5 astuces douanières pour contrer le trafic culturel

Les institutions de Répression

L’Organisation Mondiale de la douane (OMD)101

L’Organisation Mondiales des Douanes (connus jadis sous le Conseil de coopération douanière (CCD) est une organisation intergouvernementale établie par une convention entrée en vigueur en 1952. En vertu de ce texte fondateur, l’OMD a pour mission d’assurer le plus grand degré d’harmonie et d’uniformité possible entre les systèmes douaniers de ses Etat membres et plus, particulièrement, d’étudier les problèmes inhérents au développement et à l’amélioration des techniques et des législations douanières.

L’OMD regroupe actuellement les administrations douanières de 151 Etat membres. L’Organisation a collaboré avec l’UNESCO à la rédaction d’une série de conventions internationales concernant l’importation et l’exportation de matériel éducatif, scientifique ou culturel parmi lesquelles la Convention de l’Unesco de 1970.

En 1970, l’OMD a adopté la Convention de Nairobi, qui traite, dans l’une de ses annexes, de l’assistance que les pays peuvent s’apporter mutuellement dans la lutte contre la contrebande d’objets d’art, d’antiquités et autres biens culturels. Les dispositions de l’annexe XI complètent celles de la Convention de l’UNESCO de 1970 eu égard en particulier à la coopération internationale entre autorités douanières.

101 Pernille Adkerud & Etienne Clément, op.cit., p.55

L’annexe XI de la Convention de Nairobi instaure un fichier central de renseignements (en d’autre terme, une base de données internationale) ou sont réunies des informations sur les personnes qui font de la contrebande ou qui sont soupçonnées d’en faire et sur les méthodes utilisées par elles. Ce fichier est établi et géré par le Secrétaire de l’OMD sur la base de l’information reçu des parties contractantes. La base de données de l’OMD diffuse et fournit de l’information à ses membres ainsi qu’autres parties concernées, comme l’UNESCO et l’INTERPOL.

Le trafic illicite de biens culturels est un phénomène mondial, aggravé dans certaines régions en situation de fragilité, de conflit armé et de catastrophes naturelles. Depuis 2016, lorsque le Conseil de l’OMD a adopté une Résolution concernant le rôle de la douane dans la prévention du trafic illicite des biens culturels102, ses 184 Administrations Membres se sont engagées à lutter contre ce fléau.

Ce délit spécifique peut être lié à plusieurs autres délits graves, tels que le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il peut également se manifester par des attaques contre l’identité des personnes et la tentative d’effacer la mémoire de leurs culture et traditions à travers le pillage et la destruction de sites du patrimoine culturel, et peuvent ainsi être qualifiés de crime contre l’humanité.

En septembre 2022, la Conférence mondiale de l’UNESCO sur les politiques culturelles et le développement durable MONDIACULT 2022 s’est tenue à Mexico, avec la participation de 150 États. Au terme de 10 mois de négociations, une Déclaration MONDIACULT 2022103 a été adoptée. Par le biais de cette Déclaration, les gouvernements s’engagent unanimement à intensifier leur lutte contre le trafic illicite de biens culturels.

La Déclaration appelle également à une coopération internationale plus étroite avec tous les partenaires impliqués dans cette lutte, notamment l’Organisation mondiale des douanes (OMD), INTERPOL, UNIDROIT, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et le Conseil international des musées (ICOM).

Au cours des six dernières années, l’OMD a aidé ses Membres ainsi que leurs forces de police dans la détection, les saisies et les enquêtes liées au trafic illicite de biens culturels. Ce travail a été mené en permanence par le biais de la plateforme ARCHEO de l’OMD, en plus des opérations régionales et mondiales annuelles Pandora et Athena coordonnées en coopération avec INTERPOL et Europol.

102 RESOLUTION DU CONSEIL DE COOPERATION DOUANIERE CONCERNANT LE ROLE DE LA DOUANE DANS LA PREVENTION DU TRAFIC ILLICITE DES BIENS CULTURELS (Bruxelles, juillet 2016), http://www.wcoomd.org/-/media/wco/public/fr/pdf/about-us/legal-instruments/resolutions/resolution_cultural-heritage.pdf?la=fr 103MONDIACULT 2022 : Les États adoptent une Déclaration historique pour la Culture, https://www.unesco.org/fr/articles/mondiacult-2022-les-etats-adoptent-une-declaration-historique-pour-la- culture

Outre le soutien fourni aux fonctionnaires des douanes et à leurs homologues des forces de police afin de faciliter la circulation des marchandises ne représentant pas de valeur culturelle, scientifique ou religieuse, ce travail a mené à de nombreuses saisies et restitutions importantes de biens culturels dans le monde entier.

Outre le soutien opérationnel, l’OMD, en coopération avec ses partenaires, continue de renforcer les capacités techniques des administrations des douanes en déployant son programme phare de formation PITCH (Preventing Illicit Trafficking of Cultural Heritage / prévention du trafic illicite de patrimoine culturel) auprès des fonctionnaires des douanes de première ligne.

À ce jour, plus de 300 fonctionnaires de plus de 40 pays sur différents continents ont reçu cette formation pratique en face à face. L’OMD poursuit également ses efforts de sensibilisation au rôle de la douane dans la lutte contre le trafic illicite de biens culturels au niveau politique par le biais de son engagement lors de la réunion des ministres de la culture du G20104 à Rome en juillet 2021 et lors de la conférence ministérielle Euromed105 en juin 2022 à Naples.

L’INTERPOL106

L’Organisation Internationale de Police Criminelle (OIPC)- mieux connue sous le nom d’Interpol est une organisation intergouvernementale dont le but principal est de faciliter la coopération entre les forces de police de par le monde. A cette fin, chacun de ses 178 pays membres s’est doté d’un bureau, le BCN d’Interpol (Bureau central national d’Interpol), dont les agents sont formés par l’Interpol.

L’Interpol se consacre à la lutte contre la criminalité internationale. Face à la multiplication des délits relevant du trafic illicite de biens culturels, l’Interpol a adopté un programme spécialement consacré à ce problème.

104Participation du Secrétaire général à la réunion des ministres de la Culture du G20 à Rome,

105Le rôle de la douane mis en avant à la première Conférence des Ministres de la Culture de la région UE- Méditerranée,

106 Pernille Adkerud & Etienne Clément, op.cit., p.54

Parmi les grands moyens utilisés par l’Interpol pour lutter contre le trafic illicite de biens culturels volés, figurent les notices internationales de recherche d’objets volés que le secrétariat général produit et diffuse régulièrement.

Quand un vol est découvert, le Bureau compétent d’Interpol adresse au siège de l’Interpol les renseignements concernant la date et le lieu du vol, la description des objets volés et des photographies des objets disparus, ainsi qu’une demande de publication de notice. Il utilise pour cela un formulaire type (CRIGEN/ART) spécialement conçu par l’Interpol à cette fin.

L’information ainsi fournie est ensuite introduite dans la base de données de l’Interpol et sert à établir une notice, rédigée en anglais et en français. Les notices sont adressées à tous les Etats membres de l’Interpol afin qu’ils les distribuent aux services de police et de douane, aux musées, aux salles des ventes, aux antiquaires et aux prêteurs sur gages.

Plus la diffusion est large, plus efficace est la recherche, L’effet potentiel de ces notices est considérable dans la mesure où leur publication peut rendre impossible la vente de certains objets. Malheureusement, les vols commis sont loin d’être déclarés en assez grand nombre à l’Interpol.

Interpol a mis en place une base de données sur les œuvres d’art volées. Si la grande majorité des informations concerne les biens culturels volés, certaines données portent sur des objets qui ont été saisis par les forces de police en vue d’identifier leurs propriétaires légitimes.

Selon les règles en matière de traitement des données, les informations sont fournies par les Bureaux centraux nationaux d’Interpol dans les pays membres de l’Organisation et, sur la base d’accords spéciaux de coopération, par l’UNESCO et l’ICOM. Les informations couvrent tous les types d’œuvres d’art, de biens culturels et d’antiquités liés à un délit et identifiables de parleur caractère unique.

C’est la raison pour laquelle, à quelques exceptions près, les objets enregistrés dans la base de données sont tous accompagnés de photographies. Tous les pays membres d’Interpol disposent d’un accès direct à distance à cette base de données et tous les Bureaux centraux nationaux d’Interpol sont invités à en autoriser l’accès au plus grand nombre possible d’organismes chargés de faire respecter la loi dans leur pays.

Si la base de données n’est accessible qu’aux forces de police, le Secrétariat général d’Interpol propose le même type de données à d’autres institutions, à des organismes culturels, aux professionnels du marché de l’art et au grand public grâce à un CD-ROM, mis à jour tous les deux mois et disponible sur abonnement, permettant ainsi d’effectuer des vérifications avant toute acquisition.

Outre la coopération internationale entre services de police, l’Interpol estime qu’il est très important d’encourager des contacts plus larges entre services de douane, professionnels des musées et organisations internationales. C’est pourquoi elle joue maintenant un rôle actif dans les conférences et les ateliers de formation organisés par l’UNESCO et l’ICOM.

Les institutions d’informations

Pour la mise en œuvre des dispositions des différents instruments normatifs, il a fallu mettre en place une série d’informations à l’intention des acteurs de lutte contre le trafic illicite des biens culturels afin qu’ils mènent à bien leurs missions. Ces outils d’information fournissent des renseignements plus ou moins précis sur les objets volés ou en danger ; il convient de citer entre autres les plus marquants :

La liste de l’Interpol : Une liste illustrée des œuvres d’art volées diffusé sur Internet et sur un CD-ROM. Elle est actualisée systématiquement.

L’IFAR (The International Foundation for Art Research): L’IFAR est une organisation à but non lucratif de recherche et à vocation éducative qui se consacre à l’intégrité dans les arts visuels. L’IFAR fournit une information impartiale et qui fait autorité dans les domaines de l’authenticité, de la propriété, du vol des objets d’art, ainsi que sur d’autres questions artistiques, légales et éthiques concernant les œuvres d’art ;

The Art Loss Register : C’est une base de donnée privée sur les objets d’art et antiquités volés. Elle inclut des œuvres d’art pillées pendant la Seconde Guerre Mondiale qui sont identifiées séparément. Elle est diffusée en anglais, en allemand, en français, et en italien.

La Liste Rouge : c’est une liste établie par le Conseil international des musées (ICOM) où figurent des listes d’objets en péril. Jusqu’à présent l’ICOM a publié :

  • La liste rouge des objets archéologiques africains en péril ;
  • Liste rouge des biens culturels d’Amérique latine en péril ;
  • Catégories d’objet en péril et susceptibles d’être volés en Irak.

Toutes les catégories d’objet citées dans la liste rouge sont protégées par la loi. Leur exportation est interdite. Elles ne peuvent sous aucune circonstance être importées ou mises en vente.

La liste rouge est un outil conçu pour inciter les musées, les salles de ventes, les marchands d’art et les collectionneurs à ne plus acheter ces objets. Cette liste non exhaustive est aussi conçue pour aider les services de police et de douane, ainsi que les marchands d’art, à identifier ces objets.

Les possibilités techniques offertes par les banques de données en ligne ont créé une situation nouvelle. Aujourd’hui, toutes les parties concernées peuvent consulter de telles banques de données sans que cela occasionne une perte de temps et des coûts insupportables.

Les collectionneurs privés peuvent prendre les mêmes précautions que les musées en se souciant de la provenance de l’objet et de l’authenticité des titres de propriété au moment de l’acquisition107.

L’UNESCO assure la publication et la diffusion sur différents supports d’information des textes sur le trafic illicite des biens culturels, à l’image de la Convention de 1970, celle d’Unidroit, un Guide pratique pour la mise en œuvre de la Convention de l’UNESCO de 1970 (1997), un Manuel sur les mesures juridiques et pratiques (2006), une Note d’information sur la coopération dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels, une Base de données des législations nationales sur le patrimoine culturel, ainsi que les Rapports périodiques du Conseil intergouvernemental pour la promotion du retour de biens culturels à leur pays d’origine ou de leur restitution en cas d’appropriation illégale.

A présent, nous allons aborder les institutions nationales de lutte contre le trafic.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
L’encadrement juridique du trafic illicite des biens culturels en droit international
Université 🏫: Université du Sahel - Membre du Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur (CAMES)
Année de soutenance 📅: Mémoire de Master en Droit Public - Mention : Relations Internationales - 2023
Juriste internationaliste .
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