La traduction du genre de Dieu et de la Bible en lamé

La traduction du genre de Dieu et de la Bible en lamé

2.2.3. Traduction de la Bible

La Bible est un livre très ancien qui a traversé le temps grâce au travail remarquable des copistes et surtout des traducteurs qui ont rendu disponible de nombreuses versions en plusieurs langues. Sa traduction est basée sur deux grands principes (Nida, 1964)

2.2.3.1. Principe de la traduction biblique

Selon Nida (1964), il existe deux grands principes de la traduction biblique : les versions à correspondance formelle ou littérale et les versions à équivalence dynamique ou fonctionnelle.

Dans les versions à correspondance formelle ou littérale, le traducteur cherche à laisser voir la manière dont la chose est dite dans l’original. En d’autres termes, il reste le plus proche possible du texte source. Ses tenants sont entre autres : George Tiner et James Holmes.

Par contre dans les versions à équivalence dynamique ou fonctionnelle, le traducteur cherche à rendre le sens original en s’affranchissant des correspondances formelles et en essayant de produire les mêmes impressions et réactions que le texte original auprès du lecteur.

En d’autres termes, il dissocie le contenu de la forme et le transpose dans la forme de la langue cible. Ses adeptes sont entre autres Nida, Vinay, Dalbernet et Newmark.

2.2.3.2. Traduction féministe de la bible

Le mouvement féministe développé au XIXe siècle dans les pays occidentaux, a embrassé presque tous les domaines de la vie. Dans le champ religieux, des féministes engagés se sont réunis autour d’un projet commun de traduction d’une « Bible des femmes ».

En 1895, Elisabeth Stanton réunit une vingtaine de femmes américaines afin d’écrire la « Woman’s Bible » (Bible de la femme), une première rébellion féministe contre la Bible. Elles rédigèrent un commentaire de plus de 500 pages contre les rôles figés des femmes dans la Bible.

Sans aucune surprise, elles furent censurées car, accusées de propager les doutes sur l’inspiration divine de la Bible. Toutefois, ce fut un réel succès car leur travail a connu un grand succès et est réédité à plusieurs reprises.

Quatre points ont principalement guidé leurs travaux : l’étude des textes évoquant les femmes afin de contrer les arguments légitimant leur subordination, la recherche de leur potentiel libérateur, sortir de l’oubli les femmes chrétiennes du passé, valoriser les femmes des pays du Sud souvent victimes de l’entreprise missionnaire et les femmes doublement soumises.

En 2018, Élisabeth Parmentier, Pierrette Daviau et Laurianne Savov, ont réuni une vingtaine de femmes théologiennes, universitaires et formatrices à Genève afin de rédiger la « Bible des femmes » dans un esprit quelque peu différent de celle de 1895.

Selon elles, l’objectif n’est pas la critique des interprétations traditionnelles sur la femme mais des commentaires bibliques exposant des découvertes d’excellentes travaux des biblistes, femmes et hommes qui ont réalisé un grand nombre d’interventions traditionnelles.

Cette équipe œcuménique constituée des catholiques et protestants venant d’Europe, d’Afrique et du Québec ont scruté sur les errances de la tradition chrétienne, des occultations, des traductions tendancieuses, des interprétations partiales, des relais du patriarcat qui ont pu mener à de nombreuses restrictions, voire d’interdits pour les femmes.

Elles ont également pris soin de replacer les textes dans leur contexte et leur portée.

2.2.3.3. Problèmes de la traduction du genre de Dieu dans la Bible

Dans la Bible, le problème de la traduction du genre de Dieu se pose avec une acuité particulière. Dès la première page du livre, le traducteur se trouve dans un ultime dilemme, celui de comment rendre le nom de Dieu et de ses nombreux attributs.

Pour les millions des chrétiens, Dieu est de sexe masculin et par ricochet, les pronoms personnels, les pronoms possessifs, et les pronoms démonstratifs y relatifs ; de même que les adjectifs possessifs et démonstratifs par exemple (pour les langues utilisant les genres grammaticaux tel que le français il et elle), doivent s’y conformer.

Le véritable problème du traducteur est de trouver l’équivalent exact. Pour Mojola (2018) la solution est celle proposée par Eugene Nida (1964) et qui consiste en la recherche « de l’équivalent le plus proche » ou en l’équivalence dynamique et non la correspondance formelle de la traduction.

Ceci voudrait dire que même-ci les métaphores féminines ou les caractères féminins sont utilisés pour désigner Dieu dans une langue, les métaphores masculines doivent être privilégiées. Ce qui pose un véritable problème de traduction quand on sait bien que comme l’affirme Mojola (2018 :5).

God is clearly not a woman or female, yet an impression is given by translators and exegetes that God is masculine or in the image of the male human being.

This in effect is a kind of idolatry because God is not a human being; God is spirit. Our language for talking about God is simply metaphorical, figurative, and symbolic and even anthropomorphic

Dieu n’est évidemment pas une femme ou du genre féminin, pourtant une impression est donnée par les traducteurs et les exégètes comme si Dieu est du sexe masculin ou à l’image d’un être humain mâle. C’est en effet, une sorte d’idolâtrie parce que Dieu n’est pas un être humain ; Dieu est esprit.

Cette représentation de Dieu dans nos langues n’est juste que métaphorique, figurative, symbolique et même anthropomorphique. (Notre traduction)]

Dieu est un être asexué c’est-à-dire qu’il n’est ni une femme, ni un homme. C’est une conception et une perception de la réalité par une société donnée. C’est son idéologie qui, dans son acception la plus large désigne un ensemble de normes, de valeurs, d’idées, et de croyances qui régissent une communauté.

La langue en tant qu’outil de communication commun aux membres d’une même communauté, est inéluctablement liée à cette dernière.

Elle reflète les différentes manières de percevoir la réalité comme l’affirme Nissen (2002 :1), « different languages reflect different ways of perceiving reality ». [Chaque langue reflète différentes manières de percevoir la réalité (notre traduction)].

À cet effet, deux langues ne conçoivent jamais leur monde de la même manière. Car une langue remplit des tas des perceptions et des interprétations potentielles.

Elle articule une construction de valeurs, de sens, de suggestions qu’aucune autre langue n’égale exactement. Chacune engendre et exprime une version du monde pour laquelle il n’est pareil dans aucune autre.

Par conséquent, la langue française par exemple reflète la perception du monde de l’homme Français et concomitamment la langue lamé exprime la perception du monde de l’homme Lamé.

À cet effet, les connotations du genre et les structures linguistiques relatives au genre diffèrent d’une langue à une autre et ceci a une influence considérable sur le processus de traduction.

D’où les périls linguistiques et culturels que doivent affronter tout traducteur face à un texte donné, sachant qu’un transfert absolu n’est jamais envisageable.

La traduction du genre de Dieu et de la Bible en lamé

Pour Lefevere (1992), cette différence idéologique est à l’origine de la manipulation des textes par le traducteur. Car selon lui, le traducteur transpose l´idéologie dite dominante dans une pratique de l´annexion.

De telle pratique de manipulation des textes, Mojola (2018) dans son article Bible translation and gender, challenges and opportunities – with specific reference to sub-Saharan Africa, a dressé une longue liste d’annexion culturelle faite lors de la traduction biblique vers certaines langues africaines notamment l’iraqw (Tanzanie), l’ateso (Ouganda, Kenya) où Dieu, qui dans la conception de ces peuples est du genre féminin, mais l’équipe de traduction a été amené à changer le sexe de Dieu pour se conformer au cadre patriarcale caractérisant le christianisme au détriment de l’idéologie de la communauté linguistique cible.

Ou encore, le cas de certaines langues africaines à classe nominale notamment le kihehe (Tanzanie) où Dieu étant de la classe des êtres inanimés mais les traducteurs ont été contraints à changer de manière unilatérale le nom de Dieu pour le placer dans la classe des êtres animés.

Ainsi, les principaux problèmes de traduction du genre de Dieu dans la Bible sont :

  1. Les problèmes de traduction du genre liés au nom et attributs de Dieu. Ils sont manifestes à travers les métaphores et les personnifications de Dieu.
  2. Les problèmes de traduction du genre liés aux pronoms. Ce sont principalement les pronoms personnels, les pronoms possessifs et les pronoms démonstratifs désignant Dieu.
  3. Les problèmes de traduction du genre liés aux adjectifs : ce sont les adjectifs possessifs et les adjectifs démonstratifs.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Genre et concept de dieu dans la traduction du nouveau testament et des psaumes en lamé
Université 🏫: University of BUEA - Advanced school of division I
Auteur·trice·s 🎓:
Mountchi Gilbert

Mountchi Gilbert
Année de soutenance 📅: A Thesis Submitted to Division I of the Advanced School of Translators and Interpreters (ASTI) - October 2020
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