7 secrets des politiques de développement des collectivités camerounaises 

PARTIE I : ETATS DES LIEUX DES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT DES COLLECTIVITES TERRITORIALES DECENTRALISEES AU CAMEROUN

Dans cette première partie, nous allons présenter les origines historiques, juridiques et actancielles des politiques de développement des collectivités territoriales camerounaises (Chapitre 1), et les opportunités qu’elles peuvent exploiter à travers un schéma théorique contextualisé qui sera aussi présenté (Chapitre 2).

CHAPITRE 1 : ORIGINES SOCIO-JURIDIQUES DES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT DANS LES COLLECTIVITES TERRITORIALES DECENTRALISEES CAMEROUNAISES

Les politiques de développement des CTDs camerounaises n’existent pas ex-nihilo. Elles ont une origine historique, des fondements juridiques (Section 1), et sont matérialisées par des individus et des associations locales et internationales donnés (Section 2).

SECTION 1 : ORIGINE HISTORIQUE ET FONDEMENT JURIDIQUE DES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT DES CTDS CAMEROUNAISES

Les politiques de développement des CTDs camerounaises naissent au bout d’un transfert de la culture administrative occidentale issue du Moyen-âge vers le Cameroun, par le biais de la colonisation (Paragraphe 1), avant d’être concrétisées dans l’Etat indépendant à travers des textes juridiques fondateurs (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Naissance des Politiques Locales de Développement et Avènement au Cameroun.

Les politiques locales de développement sont nées en Occident (a), avant d’être transférées, par le biais de la colonisation, aux pays africains en général, et au Cameroun en particulier (b).

A – Naissance des Politiques locales de développement en Occident

Les politiques locales de développement sont des politiques publiques destinées à améliorer les conditions de vie des populations, et mises en œuvre par des entités décentralisés. Elles sont issues d’un processus qui débute à la naissance des politiques publiques en général.

Les politiques publiques prennent leur origine au Moyen-âge en Europe. Elles se sont manifestées dans le temps des royautés, à l’époque où les rois bénéficiaient de la plupart des pouvoirs de domination sur leurs sujets. Ces rois disposaient notamment de prérogatives exclusives sur des secteurs clés tels que la guerre, la monnaie, et l’impôt. Les mesures prises dans chacun de ces domaines constituaient des politiques publiques. Pour faire accepter leurs décisions auprès des sujets, les rois moyenâgeux se sont approprié les connaissances d’administrations, aussi appelé les savoirs de gouvernement par Michel Foucault, et n’hésitaient pas à les mobiliser au besoin. C’est ainsi qu’ils arrivaient à faire respecter et appliquer leurs politiques auprès des sujets gouvernés.

Quelques temps après, cette organisation va être bouleversée par les progrès techniques et scientifiques du 19ème siècle. Ce bouleversement s’est traduit principalement par la complexification de la société, et des relations entre les Hommes. En effet, les effets de l’industrialisation, et des nombreuses crises qui se sont succédé pendant la première moitié du 20ème siècle, ont fait de la problématique sociale, la toute première priorité pour les Etats comme la France ou l’Angleterre. On parlait alors de l’Etat providence. Aussi avec l’industrialisation, de nouvelles formes de relation ont émergé, les hommes qui étaient jadis seulement rattachés à une communauté, vont se trouver lier par une multitude de relations sociales nouvelles. C’est ainsi que de nouvelles catégories sociales vont naitre, en même temps que de nouveaux secteurs d’activité.

Pour s’adapter à ces changements, et garder le contrôle sur les Hommes, l’Etat a développé des programmes d’actions pour chaque secteur, dans chaque niveau territorial, y compris dans les entités décentralisées, par l’intermédiaire des élus locaux chargés d’assurer le développement locale. C’est ainsi que les politiques locales de développement sont nées en Occident, avant de se développer sur le continent noir.

B – Le transfert colonial des politiques locales de développement vers le Cameroun

Pendant la colonisation, des types de gestion administrative ont été transférés aux pays africains aujourd’hui indépendants. Au Cameroun, l’une des premières incursions a été opérée par les Portugais au 16ème siècle, sur le large des rives du Wouri. Mais la première puissance à prendre formellement possession du territoire de l’actuel Cameroun, c’est l’Allemagne. L’acte de formalisation lié fut pris le 14 juillet 1884. L’organisation administrative de cette Allemagne était fondée sur le principe indirect. Plus tard, et suite à la défaite de l’Allemagne pendant la première guerre mondiale, le territoire de l’actuel Cameroun sera partagé entre la France et l’Angleterre.

Comme sous la domination allemande, la partie britannique du Cameroun coloniale a été administrée selon le principe de l’indirect rule. Le principe de l’indirect rule, consiste à s’appuyer sur les autochtones pour gouverner les colonies, sous la supervision et la domination de la couronne. Ainsi, le gouvernement local nommé dans le Cameroun orientale avait la charge d’implémenter des politiques pour développer le territoire sous domination britannique, selon les orientations de la métropole. C’est ainsi que les responsables politiques locaux ont progressivement adopté la notion de politique publique.

Du côté Français, il a fallu attendre jusqu’en 1941, avant de voir les prémisses du gouvernement local. C’est au cours de cette année-là que les premiers magistrats communaux sont nommés dans cette partie du pays par le gouverneur français. L’autonomisation politique des entités locales va se faire progressivement, passant de la nomination à l’élection en bonne et due forme des magistrats municipaux. Une fois la fusion du territoire britannique et français opérée en mai 1972, la constitution de 1996 consacre les CTDs et leur offre des dirigeants élus dans le cadre d’un Etat unitaire décentralisé. Les élus des CTDs ont alors la charge de déployer des politiques pour assurer le développement de leur circonscription, sur des bases juridiques qui seront consolidées par la suite.

Paragraphe 2 : Les Bases Juridiques des CTDs et de leurs Activités de Développement

Les bases juridiques des politiques locales de développement au Cameroun sont constituées des textes qui consacrent les CTDs (A), et des textes qui leurs octroient des prérogatives les autorisant d’initier des activités de développement (B).

A – Les fondations juridiques des CTDs au Cameroun

La source juridique des collectivités territoriales décentralisées camerounaises se situe peu avant les indépendances. En effet, dans la partie du Cameroun dominée par la Grande Bretagne entre 1920 et 1930, l’ensemble des agents administratifs locaux sont nommés par la couronne, sur la base de la Constitutionnal Law, et sous la supervision du haut-commissaire, avec le consentement du Colonial Office. Dans la partie française, on note, dès 1941, une série d’arrêtés portant sur la création de CTDs. Ces arrêtés ont créé notamment des communes de différents types à Douala, à Kribi, à Yaoundé, à Ngaoundéré, à Garoua, et à Bangangté entre autres. Certains de ces arrêtés seront abrogés ou modifiés par la suite, avant la consécration constitutionnelle.

La valeur juridique des CTDs camerounaises sera inaugurée et renforcée par la constitution camerounaise de 1996. Les premières lignes juridiques de cette consécration se situent dans le Premier article de ce texte fondamental. Dans l’alinéa 2 de l’article premier il est écrit que « la République du Cameroun est un Etat unitaire décentralisé ». Ceci pose les bases de l’existence d’entités décentralisées. Par la suite, dans l’article 55 suivant, il est dit que les CTDs reconnues au Cameroun sont la Commune, et la Région. Le même article leur charge, via son deuxième alinéa, de promouvoir le développement en leur sein.

B- Les bases juridiques des activités de développement des CTDs

Après la constitutionnalisation des CTDs en 1996, leur champ d’action en matière de développement a été juridiquement élargi. D’emblée en 1996, les CTDs reçoivent la mission de veiller au développement économique, sanitaire, éducatif, culturel, sportif en leur sein. Quelques années plus tard, les lois de 2004 vont élargir et préciser le champ d’action de ces collectivités. La loi de 2004 – 17 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation, pose dans le chapitre 1 de son Titre III, la possibilité pour la CTD :

De faire des requêtes auprès de l’Etat à son profit, en son article 31 ;

De créer des entreprises, en son article 34 ;

D’acquérir des actions, en son article 35 ;

D’acquérir des titres de l’Etat, en son article 40 ;

De gérer des services en régie, affermage, et en concession, en son article 33.

Dans la même logique émancipatrice, il y a les décrets du Premier Ministre, portant sur les transferts de compétences aux CTDs. De 2010 à 2013, la primature a produit plus de 20 textes liés aux compétences des CTDs. Ainsi, les CTDs ont eu les bases juridiques nécessaires pour agir de plein droit dans plusieurs domaines supplémentaires. On peut citer entre autres :

Le décret n°2010/0239/PM du 26 février 2010 sur la distribution de l’eau potable ;

Le décret n°2010/0240/PM du 26 février 2010 sur les routes rurales et les bacs de franchissement ;

Le décret n°2010/0242/PM du 26 février 2010 sur la promotion agricole et le développement rural ;

Le décret n°2010/0244/PM du 26 février 2010 sur les activités piscicoles et pastoral ;

Le décret n°2010/0247/PM du 26 février 2010 sur l’éducation de base ;

Le décret n°2011/0002/PM du 13 janvier 2011 sur la formation professionnelle.

En 2019, la plupart des articles et lois de 2004 sera reprie, modifiée, et renforcée par le Code Général des Collectivités Territoriales décentralisées. Ainsi, les dispositions citées ci-dessus ont été reprises et reconduises la possibilité pour la commune :

De faire des requêtes auprès de l’Etat pour son bénéfice : art. 37 ;

De créer des entreprises : art.38 ;

D’acquérir des actions d’entreprise : art.52 ;

D’acquérir des titres de l’Etat : art.61,

De gérer des services en régie, affermage, et en concession : art.46.

Précisons que, dans le cas des communautés urbaines, les prérogatives sont réparties entre la communauté urbaine et ses communes d’arrondissements. A partir de tous ces textes juridiques, les CTDs peuvent se déployer, sous l’impulsion des acteurs locaux chargés de les exploiter.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université de Yaoundé II - Faculté des Sciences Juridiques et Politiques - Département de science Politique
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l’obtention du Master II en Science Politique - 2018 - 2019
Doctorant-Chercheur . Spécialités : décentralisation, développement local, et politiques publiques
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