PARTIE II : LA POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DE LA COMMUNAUTE URBAINE DE DOUALA (CUD) ET LA COMMUNE DE BANGANGTE (CBGT)

Dans cette seconde partie, nous allons présenter les phases d’élaboration, de mise en œuvre et de terminaison des CTDs camerounaises, à travers l’étude de deux cas. Ainsi, nous allons présenter la phase d’élaboration (Chapitre 1) et la phase de mise en œuvre et de terminaison (Chapitre 2) de la politique de développement de la Communauté Urbaine Douala et de la Commune de Bangangté, dans une perspective descriptive, mais aussi comparative afin de ressortir les particularités spécifiques, à chaque phase.

CHAPITRE 3 : ELABORATION DES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT DANS LES CTDS CAMEROUNAISES : CAS DE LA COMMUNE DE BANGANGTE ET DE LA CUD

Dans ce chapitre, il s’agit de présenter le processus d’élaboration des politiques de développement dans la Commune de Bangangté (section 1), puis dans la Communauté Urbaine Douala (section 2).

SECTION 1 : UNE CONSTRUCTION MULTI-ACTEURS DE LA POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DE LA COMMUNE DE BANGANGTE

La Commune de Bangangté a une situation géographique et administrative particulière (paragraphe1). Selon sa politique de développement, les programmes d’action de développement prennent leurs sources dans les idées et les besoins exprimés et sélectionnés par les différents acteurs de la commune (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Présentation De La Commune De Bangangté

La Commune de Bangangté est déterminée par sa situation géographique et administrative (A), et socio-économique (B).

A – Situation géographique et administrative

La Commune de Bangangté est située au Cameroun, à l’intérieur du département du Ndé, dans la région de l’ouest. Elle constitue un arrondissement, et en même temps, le chef-lieu du département du Ndé. D’une superficie de 800 km², la Commune de Bangangté s’étale sur un domaine herbacé et un sol ferralitique, traversé par le cours d’eau nommé Noun. Elle est limitrophe :

Au nord, par la commune de Bayangam, la commune de Foumbot, et la commune de Demdeng ;

A l’est, par la commune de Massangam ;

Au sud, par la commune de Bazou, la commune de Tonga, et la commune de Bassamba ;

A l’ouest, par la commune de Bana, et la commune de Bangou.

Bangangté compte en tout 41 villages répartis dans 7 groupements :

Groupement Bangangté : Madja, Banekane, Tchoudim, Batoum 1, Bantoum 2 et 3, Maham, Feutap, Babitchoua, Kafeng, Projet 2, Nenga, Babou, Bapoumpa, Nkong-Gam (Projet 1), Sanki, Bametcha ;

Groupement Bangoulap : Sagna, Nounfam, Kopda, Madoum, Bonkeu, Badjuidgong, Lafeng ;

Groupement Bangoua : Ndoukong, Bandiangseu, Fambiangseu, Famveu, Baloue ;

Groupement Baména : Louh, Bangweu, Faplouh, Poozou, Tchouplang, Langweu ;

Groupement Bahouoc : Nenta, Noumko, Noumtchouet ;

Groupement Batchingou : Batchingou chefferie, Batchingou (Tousseu) ;

Groupement Bagam-Fokam : Bagam-Fokam 1, Bagam-Fokam 2.

Cette commune a été créée avant l’indépendance, par l’arrêté N° 807 du 29 novembre 1954 avec le statut de Commune mixte rurale. Elle a été gouvernée successivement par plusieurs personnes dont les 03 dernières sont : Niat Djifenji Marcel de 2002 à 2007, Ketcha Célestine Courtes de 2007 à 2018, et Dr. Kouamouo Jonas, en exercice depuis 2018. Elle compte plusieurs récompenses et certifications décernées en appréciation de son action :

Prix Ville propre de la région de l’Ouest 2008 ;

Prix Ville propre de la région de l’Ouest 2009 ;

Prix Ville propre de la région de l’Ouest 2010 ;

Prix National FEICOM des Meilleures Pratiques de Développement Local en 2012;

Prix d’Excellence des Nations Unies pour le service public 2014 décerné par le Département des Affaires Economiques et Sociales des Nations Unies, à Séoul;

Prix de la 2ème Meilleure Ville Moyenne d’Afrique 2015 décerné en Angola par le CGLU Afrique ;

Prix Ville propre de la région de l’Ouest 2018 ;

Certification AFAQ 28 000 COLLECTIVITES en 2018 par l’AFNOR.


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Figure 1: Situation géographique de Bangangté au Cameroun

(Source : Plan Communal de Développement de Bangangté – 2015)

B – Situation socio-économique : commerce, agriculture et élevage

La situation socio-économique de Bangangté est celle d’une ville périphérique émergente. En 2013, on estimait sa population à 200 000 habitants. Dans cette population, on compte principalement un peu plus de femmes (50,5%) que d’hommes (49,5%), et une majorité de jeune. Le commerce et le transport occupent la majorité des travailleurs. Le commerce est centré sur des produits manufacturés, des produits de l’artisanat local, de la friperie, des produits agricoles et des produits d’élevage, entre autres. Cette activité se concentre surtout dans les marchés de la ville. En ce qui concerne le transport, on compte : le transport intra-urbain par moto taxi, le transport par taxi brousse, et par bus de ligne. Ces différents secteurs occupent des jeunes pour la plupart. Les motos taxi bénéficient de 4 espaces de stationnement dédiés à travers la ville.

Par ailleurs, l’agriculture est l’activité économique la plus importante. Les femmes agriculteurs pratiquent principalement les cultures vivrières, tandis que les hommes pratiquent davantage les cultures de rente. Parmi ces cultures, on peut compter : la culture du maïs ; du haricot ; des cultures maraîchères telles que les légumes verts, les tomates, les laitues, le piment et les carottes ; des cultures de tubercules telles que les ignames, les maniocs, le macabo, la banane-plantain, la patate ; le cacao et le café. Ces deux dernières denrées constituent les principales cultures de rente. Le café est produit à plus de 1 300 kilogramme par hectare, et le cacao est produit à environ 800 kilogramme par hectare. Ces denrées sont cultivées dans des exploitations agricoles de petites tailles, et de moyennes tailles. Ces exploitations privilégient les engrais naturels composés à partir d’excréments d’animaux (poules, porc, chèvre, etc…), au détriment des engrais chimiques.

Certaines denrées cultivées sont transformées localement. C’est ainsi que les beignets, les bâtons de manioc, les mets de pistache, le beurre de karité, l’huile de palme, et les mets d’arachide sont produits, et vendus dans les marchés locaux. Il existe aussi d’autres unités modestes de transformation : des menuiseries, des vanneries, des ateliers de couture, des ateliers de soudure, des fabriques de matériaux de construction, des boulangeries. On retrouve aussi des latrines écologiques, des dispositifs à énergie solaire, une station de traitement de boues.

L’élevage fait aussi partie des principales activités économiques de Bangangté. Cette activité est généralement menée par les agriculteurs. Les principales denrées pastorales, ce sont les chèvres et les porcs, mais aussi la volaille. La production de ces deux dernières denrées augmente graduellement avec la multiplication et la modernisation dont les jeunes et les cadres d’élevage sont auteurs. La commune compte des porcheries et des fermes traditionnelles et modernes.

Ces unités d’élevage ne satisfont pas encore à la demande locale et à la demande des métropoles adjacentes à savoir Douala, Bafoussam, Yaoundé. Mais la tendance tend vers cela. En effet, l’élevage des poulets connait une industrialisation dans la zone de Baména, et Projet I. Notons aussi que l’élevage des bœufs est encore faible. Seuls existent des élevages tenus par des groupes de population Bororos. Il faut dire que Bangangté bénéficie aussi de zones herbeuses. Ces zones font partie des ressources naturelles de la ville.

Par ailleurs, la commune compte aussi des agences bancaires, des établissements de transfert d’argent, des sociétés commerciales, des quincailleries, des hôtels, des restaurants, des boutiques de consommables informatiques et électroniques, des points de commerce de produit pétrolier, et des points de vente de poisson. Il y a aussi des lycées, des collèges privés, et des instituts d’enseignement supérieur tels que l’Université des Montagnes (UDM), l’Institut Supérieur de Technologie et d’Etudes Commerciales (ISTEC). On peut dire que la Commune de Bangangté possède un tissu économique varié, en voie de modernisation.

Paragraphe 2 : Collecte et Sélection Des Idées Suggérées de Projets de Développement

Entre 2010 et 2019, la politique de développement de la Commune de Bangangté consiste à s’appuyer sur les besoins populaires pour implémenter des projets dans une perspective durable. Ainsi, l’élaboration de cette politique passe par la réception des besoins et des idées de projets qui en découlent (A), suivi par la sélection-validation indispensable faite par conseil municipal et le représentant de l’Etat (B).

A – Réception des idées de projets et des besoins de la population et des élites

La politique de développement naît à partir un faisceau de projets soumis à la Mairie. Ces projets peuvent provenir de divers acteurs :

La population : Selon l’entretien réalisé le 1er juin 2020 avec Monsieur MFONSO Ernest Rodolphe, secrétaire générale de la Commune de Bangangté entre 2013 et 2019, les habitants de la commune peuvent suggérer des idées de projets à la commune par deux moyens : d’une part, « la proposition à l’exécutif » communal ; et d’autre part, à travers une enquête des besoins de la population. M. SOP Guillaume, secrétaire général de la Commune de Bangangté entre 2010 et 2013, parle de la construction du « profil historique et psychologique » des populations. Le responsable nous apprend que, s’agissant de la consultation populaire, la CBGT divise l’espace social en « 25 Unités de Planification Participative (UPP) » segmentées en catégories sociales avec l’aide d’une Organisation d’Appuie Locale, afin de recueillir les besoins. Le projet MODEAB (Maîtrise d’Ouvrage Durable dans les secteurs de l’Eau et de l’Assainissement dans la Commune de Bangangté) s’est aussi inspiré des résultats d’une enquête faite en 2006 par le PNDP pour analyser les besoins prioritaires des populations de la Commune de Bangangté. La rédaction du PCD de 2015 procède aussi par ce biais ;

Une élite : Selon le même responsable, une élite peut proposer un projet à l’exécutif municipal. Par élite, on comprend les chefs traditionnels, les députés, les sénateurs, et les diverses personnalités de la ville ;

Le conseil municipal : lors des séances de travail publiques. M. SOP Guillaume, Secrétaire Général 2010 – 2013, nous apprend qu’avant l’arrivée du PDC, ce sont les conseillers municipaux qui recueillaient les besoins ;

Le Maire lui-même : L’initiative du projet ENERBA (Energie Renouvelable dans la Commune de Bangangté), par exemple, est attribuée à Madame Célestine KETCHA Courtès, Maire de la Commune à cette époque.

Une fois les besoins rassemblés, ceux-ci sont rangés par priorités afin d’identifier les problèmes les plus importants de la commune d’après le SG 2010 – 2013 ; puis, des projets en réponses sont proposés. Le projet MODEAB par exemple, est issu des demandes des populations selon le même SG. En effet, avant sa mise en œuvre, une phase de consultation populaire a été conduite sur 700 ménages répartis dans 10 villages de la commune, précisément sur les domaines de l’eau et de l’assainissement. La collecte d’informations a aussi nécessité la consultation des autorités nationales, de la diaspora, des chefs traditionnels et des acteurs de la coopération. Cette démarche a été privilégiée car, pour les initiateurs du projet, « le déploiement adéquat d’un service public dépend largement de la pertinence du diagnostic établi ». C’est ainsi que les problèmes d’accès à l’eau potable et d’assainissement ont été identifiés dans la plupart des villages, et que le projet MODEAB a été proposé en réponse. Une fois qu’un projet de développement a été proposé, celui-ci est débattu au sein du conseil municipal.

B – Sélection et approbation des idées de projets par le conseil municipal et la tutelle

Après avoir été enregistrés à la Mairie, les projets reçus sont soumis au conseil municipal. Ce dernier se charge d’en sélectionner quelques-uns, et par la même occasion, de les valider, selon les précisions récoltées auprès du secrétaire générale 2013 – 2019 interrogé. La sélection des projets au niveau du conseil municipal dépend de deux principaux critères : le coût, et le niveau d’urgence du projet. Ainsi, le conseil municipal tient compte du financement disponible, et de l’importance du besoin que le projet va satisfaire. Le choix est opéré par le conseil municipal au terme d’une délibération de ses membres, et l’autorisation est donnée au Maire, de mener les démarches nécessaires à la réalisation des projets sélectionnés. Cette autorisation entrait en vigueur de plein droit après approbation du représentant de l’Etat. Selon le SG 2013 – 2019 interrogé, cette étape d’approbation permet à la tutelle de s’assurer que ces projets et décisions ne nuisent pas à l’intégrité de l’Etat. Il précise aussi que le projet MODEAB a été sélectionné car les textes permettaient sa mise en œuvre (voir annexe 6). Ce n’est qu’après cette sélection-validation que la politique de développement voit le jour. Le PCD rassemble tous les projets sélectionnés.

Deux précisions méritent d’être faite pour le cas du PCD et du BIP (Budget d’Investissement Public). Dans le cas particulier des PDC, la validation est faite de manière consensuelle entre l’exécutif communal, le conseil municipal, les représentants de l’Etat et des services déconcentrés, et les représentants des différentes composantes de la population. Mais il reste qu’en principe, les décisions sont prises par le CM. En ce qui concerne le BIP, les projets sont validés par le CM avant leur passage vers l’administration centrale qui valide en affectant une ligne budgétaire.

Signalons que ces projets devaient avoir l’approbation du préfet ou du sous-préfet en tant que représentant de l’Etat, jusqu’en novembre 2019, avant la promulgation du CGCTD. Dans la perspective décentralisatrice, le conseil municipal a donc un rôle déterminant sur l’orientation de la politique de développement de la Commune de Bangangté.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université de Yaoundé II - Faculté des Sciences Juridiques et Politiques - Département de science Politique
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l’obtention du Master II en Science Politique - 2018 - 2019
Doctorant-Chercheur . Spécialités : décentralisation, développement local, et politiques publiques
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