CHAPITRE 4 : MISE EN ŒUVRE ET SUIVI DES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT DANS LES CTDS CAMEROUNAISES : CAS DE LA COMMUNE DE BANGANGTE ET DE LA CUD

Dans ce chapitre, nous allons présenter le schéma de mise en œuvre et de terminaison de la politique de développement dans la Commune de Bangangté (section 1), puis dans la Communauté Urbaine Douala (section 2).

SECTION 1 : MISE EN ŒUVRE ET SUIVI DURABLE DES ACTIONS SELECTIONEES DE LA POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DE LA COMMUNE DE BANGANGTE

La politique de développement de la Commune de Bangangté prévoit que la mise en œuvre des actions ou projets de développement sélectionnés, se concrétise par la mobilisation des financements, des partenaires et des prestataires pour la réalisation desdits projets (paragraphe 1), parallèlement à la mise en place d’un service de gestion durable des infrastructures commandées (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Mise En Œuvre Des Actions Sélectionnées Dans La Politique De Développement De La Commune De Bangangté

Dans cette phase, les projets ou actions de développement sont connus. Il est alors question de les mettre en œuvre. C’est pour cela que la Commune de Bangangté procède à la mobilisation des financements et des partenaires (A), et à la réalisation des projets(B).

A – La mobilisation des financements et des partenaires

Une fois que les projets sont sélectionnés, et approuvés par les autorités compétentes, la commune passe à l’étape suivante : la mobilisation des financements et des partenaires. Selon M. MFONSO E., SG CBGT 2013 – 2019, les financements sont mobilisés auprès de différentes entités, ou par des dispositifs locaux, nationaux et internationaux. Ainsi, des dispositifs tels que la fiscalité locale, la dotation générale de l’Etat, le BIP ; des organisations nationales telles que l’Etat, le FEICOM, le PNDP ; mais aussi des organisations internationales telles que l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF), la fondation Veolia, le GIZ, le Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne (SIAAP) et l’Agence de l’Eau Seine Normandie (AESN), ont été sollicitées par la Commune de Bangangté. Du côté des partenaires, on peut citer des bailleurs de fonds à l’instar de la Banque Africaine de Développement (BAD). Cependant les partenaires peuvent aussi intervenir sur le plan technique, et sur le plan du réseautage. ERA (Environnement Recherche Action) -Cameroun fait partie des partenaires techniques du projet MODEAB. Aussi, M. SOP Guillaume, SG 2010 – 2013, affirme que la population participe aux charges en posant sur la table, généralement l‘espace qui sera exploité, ainsi que la main d’œuvre.

Dans le cadre de la recherche des financements auprès de la plupart des organisations bailleurs de fonds, la Commune de Bangangté a adopté un mode opératoire particulier. Le SG 2013-2019, révèle que, à l’intention de chaque bailleur de fonds pressenti, la commune a soumis un dossier de demande de financement comportant un descriptif exhaustif qui montre la pertinence du projet, présente les informations relatives à sa mise en œuvre, ainsi que son coût. Le SG ajoute que, pour monter ces dossiers, la commune fait appel à un prestataire spécialisé (un individu ou un cabinet). Le principe du montage du dossier est de présenter le projet de la commune de manière à ce qu’il corresponde aux attentes du bailleur de fond convoité. L’un des éléments importants est de montrer « l’incidence réelle » du projet sur la vie des populations. Durant l’entretien réalisé avec M. Christian TCHOUNKEY, responsable communal, on apprend que l’une des raisons pour lesquelles le projet ENERBA a été soutenu, est son impact dans la réduction de la vulnérabilité des femmes et des jeunes filles à travers l’éclairage publique solaire. L’aspect lié à l’autonomisation de l’hôpital de district de Bangangté, a aussi intéressé les bailleurs.

Aussi, selon M. MFONSO E., une demande ne saurait aboutir si la commune ne s’implique pas financièrement. C’est pourquoi la Commune de Bangangté a injecté 80 900 euros (env. 53 millions FCFA) dans le projet MODEAB. Ce montant provenait de la fiscalité de la commune, mais aussi d’autres partenaires tels que le FEICOM – sous forme de prêt « remboursable » d’après ledit SG .

Mis à part le PNDP, la BAD et le GIZ, toutes les autres organisations citées ci-dessus ont participé aux financements du projet MODEAB. Ce projet a coûté 1,3 million d’euros (env. 884 millions FCFA) dont le financement est structuré ainsi qu’il suit :

AIMF : 480.000 euros (env. 315 millions FCFA) ;

Commune de Bangangté : 80.900 euros (avec le soutien du FEICOM) ;

Fondation Veolia : 350.000 euros (env. 229 millions FCFA) ;

Agence de l’Eau Seine Normandie : 250.000 euros (env. 164 millions FCFA) ;

SIAAP : 188.000 euros (env. 123 millions FCFA).

On peut aussi citer le projet ENERBA qui a été financé à hauteur de 415.690 euros (env.273 millions FCFA), avec le concours de l’AIMF, de la fondation Veolia, de l’Agence De l’Environnement et la Maîtrise de l’Energie (ADEME), et accompagné par le Réseau des Femmes Elues Locales d’Afrique – Section Cameroun (REFELA-CAM). Là aussi, la Commune de Bangangté a participé financièrement avec l’appui du FEICOM.

B – Sélection d’un prestataire et mise en œuvre effective

Une fois que les financements sont disponibles, la Mairie prépare et lance un Appel d’Offres. L’Appel d’offres est une procédure qui permet à la Mairie de sélectionner, parmi des candidats ayant au préalable soumis leur offre sur la base d’un cahier de charges produit par ses soins, l’opérateur qui convient à ses attentes, en vue de la réalisation d’une prestation dont les spécificités sont comprises dans un document (cahier de charges) élaboré par les services techniques de la commune en collaboration avec les services déconcentrés indiqués de l’Etat. Selon les échanges avec M. TCHOUNKEY C., pour le projet MODEAB, la délégation départementale du Ministère de l’Energie et de l’Eau (MINEE) et la délégation départementale du Ministère de l’Environnement (MINEPDED) ont été impliquées.Ensuite, et conformément à la procédure en vigueur, les dossiers des candidats sont étudiés par une commission de passation de marché liée au Ministère des Finances (MINFI). Puis, la prestation est confiée à un des prestataires, qui s’occupe de réaliser les travaux commandés. Dans le cadre du projet ENERBA, l’installation des panneaux solaires a été réalisée par l’entreprise SOPROCIT Sarl. Dans le cadre du projet MODEAB, la fondation Veolia et la SIAAP ont apporté un appui technique, à l’entreprise adjudicataire ETS ATELEWA.

Une fois la prestation réalisée, le Maire procède à la réception de l’ouvrage. C’est ainsi que, dans le cadre du projet ENERBA, la centrale solaire de l’hôpital de district de Bangangté a été inaugurée le 12 décembre 2018, en présence du directeur de l’hôpital Dr. Bouba.

La réalisation des prestations commandées par la commune est contrôlée par un comité de suivi. Ce comité est chargé de suivre l’évolution des projets initiés par la commune. Le SG 2013 – 2019 précise que ce comité est composé par les représentants des services déconcentrés, le Maire, et le secrétaire général de la commune. M. TCHOUNKEY affirme que ce comité se réunit au moins 1 fois par trimestre. On note aussi le contrôle opéré par une commission du conseil municipal.

Paragraphe 2 : Mise En Place D’une Structure De Gestion Durable Des Acquis

Après la réalisation d’un projet de développement, la Commune de Bangangté met en place une structure de gestion durable des infrastructures dont elle a bénéficié au bout des prestations. On note un comité de gestion centrale communale (A), et un comité de gestion locale dans les villages (B).

Le comité de gestion durable centrale de la commune

Selon le SG 2010 – 2013, si une structure de gestion durable a été adoptée par la Commune de Bangangté, c’est parce que, par le passé, les infrastructures étaient totalement abandonnées après leur mise en place. C’est ainsi que dans le cadre de projets tels que MODEAB, il a été mis en place des comités de gestion. Le projet MODEAB a abouti à la réalisation de diverses installations liées à l’eau, d’une part, et à l’assainissement, d’autre part. Concernant l’eau, on compte 11 forages/captages, 10 stations de traitement : filtration et chloration sans électricité, 7 réseaux de distribution d‘eau réhabilités, 40 bornes fontaines et 30 branchements particuliers. Conformément à la carte de l’annexe 3, les installations ont été réalisées à : Bandenkop, Batchningou, Bamena, Bangoua, Bandiengseu, Bahouoc, Bangoulap.

Concernant l’assainissement, on compte 15 blocs de latrines écologiques installés dans des écoles et des marchés à Bangoulap, Bahouoc, Banoumga, Bandiangseu, Bangoua, Bamena, Batchingou, Fambweu, Bantoum II, Bantoum III, Projet II, Nkong-Ngam, et au centre-ville Bangangté. Tous ces ouvrages ont été mis sous la gestion d’une unité : le Service Public de l’Eau (Abrégé SPE ) et de l’Assainissement de la Commune de Bangangté. Il est supervisé par la Mairie de Bangangté, chargée de la maîtrise d’ouvrage des infrastructures, et le Comité Communal de l’Eau et de l’Assainissement (CCEA), qui donne les grandes orientations une (1) fois par an.

Des agents communaux ont été formés spécialement dans le cadre du projet MODEAB pour assurer la gestion durable de ces infrastructures. Le Service Public de l’Eau (SPE) est géré par la Régie Communale de l’Eau (RCE), dont le responsable est M. WANANG Pierre Marie, ingénieur des travaux de génie-civil. Cette structure s’occupe de l’appui et du contrôle des exploitants, des Comités d’Usagers, mais aussi, d’après M. TCHOUNKEY, du suivi du fonctionnement, de l’extension et de l’« optimisation » du SPE dans chaque village ou groupement. Le Service d‘Hygiène et d’Assainissement (SHA) est géré par M. TCHAEWO Honoré, ingénieur des travaux du génie sanitaire, rencontré surplace. Cette structure s’occupe de l’appui et du contrôle, d’une part, des latrines écologiques installées dans des écoles et des marchés dans la commune et les groupements alentours, et d’autre part, du centre de traitement des boues de vidange de Noumgha.

Les comités de gestion durable locale dans les villages

Dans chacun des villages dans lesquels une infrastructure a été installée, il y a un comité de gestion locale. Dans le cadre du projet MODEAB, ce comité est chargé des Services publics de l’Eau et de l’Assainissement. Parmi les acteurs locaux du Service Public de l’Eau, on distingue : les Comités des Usagers de l’Eau (CUE), les Exploitants qui sont des petits opérateurs privés, les Maintenanciers, et les Clients du Service Public de l’Eau. Le CUE est chargé de contrôler le SPE local et de mobiliser la population autour de l’eau potable. Les exploitants sont chargés d’assurer la production et la distribution de l’eau, de payer les charges d’exploitation et les redevances contractuelles, mais aussi, de percevoir les recettes. Les Maintenanciers interviennent à la demande. Quant aux clients, ils participent aux assemblées générales annuelles du Comité des Usagers de l’Eau, et paient leur consommation au volume. A Baména, par exemple, 1m3 d’eau était commercialisée à 350 FCFA par le service public local de l’eau potable en décembre 2013. L’exploitant faisait 200.000 FCFA de bénéfices avec 360 abonnés, et le fond destiné à la maintenance comportait un montant de 1.900.000 FCFA.

L’autre service public crée est le Service d’Hygiène et d’Assainissement dirigé par M. TCHAEWO Honoré. Ce service comprend principalement les 15 latrines écologiques installées dans la commune, dans des écoles et des marchés choisis sur la bases de critères tels que l’intensité du besoin d’assainissement, l’intérêt et le dynamisme des acteurs environnants, entre autres critères. Dans les marchés, la gestion des latrines a été expressément confiée à des commerçants. Ceux-ci s’occupent de l’entretien des latrines, et de leur approvisionnement en consommables (savon et eau), avec les recettes issues des paiements des usagers. Au niveau des écoles, un comité d’Education à l’Environnement composé des élèves du CM1 et du CM2, encadrés par des instituteurs, est créé chaque année. Les plus grands forment les plus jeunes à l’entretien des latrines écologiques. Les consommables sont achetés par les APEE. Les déchets de ces latrines sont ensuite réutilisés comme fertilisants, distribués aux agriculteurs, et utilisés pour les champs d’application des écoles. C’est cette structuration durable et innovante qui a valu à la Commune de Bangangté, le Prix d’Excellence des Nations Unies pour le Service Public 2014 dans la catégorie : Amélioration de la Prestation de service en Afrique.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université de Yaoundé II - Faculté des Sciences Juridiques et Politiques - Département de science Politique
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l’obtention du Master II en Science Politique - 2018 - 2019
Doctorant-Chercheur . Spécialités : décentralisation, développement local, et politiques publiques
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