Impact et stratégies : optimiser la relation fournisseur-acheteur en période de crise

Première partie

Bibliographie académique

A travers l’introduction générale, nous avons pu voir l’évolution historique de la fonction Achat, accompagnée par une brève description des rôles et des responsabilités que l’acheteur a endossés.

Nous avons décrit le cadre de notre mémoire à travers l’identification de la crise économique comme élément déclencheur du changement dans la relation fournisseur – acheteur.

Dans cette partie, nous allons aborder ce que la littérature académique a avancé au sujet de l’impact d’une crise économique sur la relation fournisseur – acheteur.

1. Analyse du portefeuille Achat

Pour mieux cartographier le panel fournisseur et leur impact sur les résultats de l’entreprise, la matrice de Kraljic (Kraljic, 1983) propose une méthode de segmentation du portefeuille Achat afin de comprendre le poids stratégique des différentes familles d’Achats et les fournisseurs associés.

La matrice de Kraljic
Figure 1 : La matrice de Kraljic (kraljic,1983)

La matrice met en parallèle deux aspects :

L’importance stratégique de la famille Achat en ordonnée.

La complexité du marché fournisseur en abscisse.

1-1 Les stratégies achats (Kraljic)

Segmentation des types d’AchatImportance stratégiqueRecommandations des leviers Achats
Les Achats simplesCes achats ont peu d’impact sur l’activité de l’entreprise. Leur approvisionnement reste simple, comme par exemple les fournitures de bureau.Rationnaliser les produits, automatiser les processus et contrôler les volumes.
Les Achats leviersCes achats ont un impact décisif sur le business de l’entreprise mais leur approvisionnement reste également simple. Avec les achats leviers, il y a une bonne marge de gains intéressantes.Exploiter pleinement sa puissance achat en mettant par exemple en concurrence les fournisseurs, en négociant ou en trouvant des produits de substitution.
Les Achats critiquesCes achats ont un risque business faible mais souffrent d’un marché limité (faible nombre d’acteurs)Garantir les volumes, piloter la relation fournisseur, sécuriser les stocks et les approvisionnements.
Les Achats stratégiquesDe ces achats dépend l’activité même de l’entreprise, il s’agit souvent de ressources rares ou uniques, soit des achats à fort enjeu pour l’entreprise.Développer des partenariats fournisseurs, notamment via un logiciel SRM, analyser le marché, envisager l’intégration verticale.

Figure 2 : Les stratégies A chat selon la matrice Kraljic

2. La segmentation fournisseur

Une étude plus poussée de la segmentation du portefeuille Achat selon la matrice Kraljic, nous permet d’identifier deux types de positionnements fournisseur influençant ainsi la nature de la relation avec l’acheteur, à savoir :

  1. Les fournisseurs stratégiques : Les Achats critiques – Les Achats Stratégiques
  2. Les fournisseurs non stratégiques : Les Achats simples – Les Achats leviers

Fournisseurs non stratégiques Fournisseurs st ra tégiques

Achats stratégiques Achats stratégiques

Achats leviers Achats leviers

Importance de l’achat Importance de l’achat

Achats critiques Achats critiques Achats simples Achats simples

Complexité des marchés Complexité des marchés

Type s de fournisseur s selon Kraljic

Figure 3 : Type s de fournisseur s selon Kraljic

3. Les types de relations fournisseur – acheteur

En 1983 Peter Kraljic (Kraljic, 1983) a défini deux types de relations fournisseur – acheteur, en s’appuyant sur deux dimensions, l’importance stratégique du produit acheté et la complexité du marché fournisseur. Ce qui a permis de faire la différence entre :

  1. Relation s stratégiques , relations qui lient l’acheteur avec les fournisseurs stratégiques comme défini précédemment, ce type de relation impose le partenariat à l’acheteur puisque selon Kraljic, ce genre de fournisseur entre dans l’écosystème du client, ainsi la raison d’être de ce dernier dépend de ses fournisseurs stratégiques.
  2. Relations non stratégiques , relations qui lient l’acheteur avec les fournisseurs non stratégiques, comme il existe un bon nombre de fournisseurs dans le marché qui peuvent répondre aux besoins de l’acheteur, ce dernier joue le rapport de force en mettant ses fournisseurs non stratégiques en concurrence afin d’avoir le bon rapport qualité-coût-délai.

A la fin des années 1990, le processus Achat est devenu de plus en plus complexe (De Boer, 1998) ainsi la nature des produits achetés n’est plus suffisante pour segmenter les fournisseurs. Des recherches ont essayé de développer l’analyse de Kraljic en ajoutant une nouvelle dimension liée au fournisseur lui-même et à la relation qu’il entretient avec son client (Bensaou, 1999). Dyer, (Dyer, et al.,1998) ont relié la caractéristique des produits avec celle de l’interdépendance client – fournisseur.

Quasi marchés (relations transactionnelles)Quasi hiérarchies (partenariat stratégique)
CommoditésProduits personnalisés
Faible niveau d’interdépendanceNiveau élevé d’interdépendance

Figure 4 : Basée sur ( Dyer , et al.,1998)

A travers cette étude on peut distinguer l’opposition entre une relation fournisseur – acheteur transactionnelle, reposant sur l’équilibre du marché, avec des liens faibles entre l’acheteur et ses fournisseurs et une relation fournisseur – acheteur collaborative, stratégique et partenariale, basée sur une forte relation de coopération.

Cette dichotomie transaction/relation trouve ses origines d’un paradigme marketing relationnel développé depuis les années 1990. Il est représenté par une continuité relationnelle qui commence par la transaction pour aller vers la coopération (Grönroos, 1994), (Day, 2000), (Anderson, et al,. 2004).

D’une part, l’acheteur et le fournisseur se contentent de l’échange de produits à des prix compétitifs, d’autre part la relation se développe sur la base d’un relationnel coopératif. Il est important alors « D’entretenir d’étroites relations avec les fournisseurs, afin de créer mutuellement de la valeur, à coût faible, à travers l’investissement durable dans la coopération et la collaboration » (Sheth et al,. 2000).

Pour les acheteurs, convaincre leurs fournisseurs et développer avec eux des relations solides pour pouvoir par la suite partager les gains d’une collaboration efficace sont une mission difficile et très coûteuse car cela demande un grand investissement matériel et humain.

Il est donc intéressant de bien distinguer les différentes relations pour adapter une stratégie spécifique à chaque situation d’échange et de mettre en place les plans d’actions pertinents qui leur sont associés.

Afin d’établir ce type de relation fournisseur – acheteur, l’entreprise cherche à caractériser les éléments clés de cette relation. Pour cela, ils doivent tenir compte des caractéristiques du produit acheté, du processus de fabrication à mettre en œuvre, des enjeux financiers, de la complexité de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement ou les capacités de l’acheteur à influencer la façon dont le fournisseur fonctionne. Il existe plusieurs méthodes, généralement sous des formes différentes, mais qui ont la même démarche à savoir, caractériser des segments technologiques et économiques.

En 2010, Stéphane Nogatchewsky et Gwenaëlle Nogatchewsky font la distinction entre trois types de relations fournisseurs – acheteurs :

  • Les relations stratégiques, avec une complexité technologique élevée, des contraintes économiques fortes, ainsi qu’une rareté de la ressource (un nombre limité de fournisseurs, complexité de la chaine d’approvisionnement).

Dans ce cas, l’acheteur doit sécuriser au mieux les relations, avec une réduction du nombre de fournisseurs approuvés. Mais, dans son souci de performance, l’acheteur doit aussi promouvoir l’amélioration continue des leviers de différentiations générateurs de productivités, à travers des chantiers de type Kaizen, la réduction des cycles ou la réduction des coûts menés chez le fournisseur.

Dans des secteurs technologiques de pointe, le client cherche aussi à impliquer le fournisseur le plus en amont possible dans les programmes de développement. Cette stratégie consiste à obtenir un partage des risques associés (Coût de développement, industrialisation…) entre client et fournisseur. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

  • Les relations tactiques, caractérisées par un niveau de complexité technologique modéré, des enjeux économiques importants mais un potentiel de sources offrant des alternatives crédibles. A ce niveau, la stratégie de l’acheteur se traduit par la mise en concurrence régulière des fournisseurs.

Pour ce faire l’acheteur met en place des analyses comparatives et cherche des opportunités potentielles sur le marché.

L’acheteur peut alors intégrer ses fournisseurs dans des processus d’amélioration de la performance globale et leur adresser des missions liées au levier de la concurrence, sans pour autant consacrer le même niveau d’implication que dans le cadre de relations stratégiques. Son but est d’avoir différentes sources qualifiées et ainsi de diviser pour mieux régner. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

  • Les relations « open market » caractérisées par des contraintes financières plus ou moins élevés, mais qui ne présentent pas de contrainte technologique et où la concurrence existe.

Dans ce cas, l’acheteur est en position de force pour tirer le maximum de profit à travers l’effet volume par une mise en concurrence systématique et à limiter les coûts du processus sourcing (à travers les enchères inversées, la délégation, etc.).

Ce sont des contrats de routine à court terme à moindre coût. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

4. L’organisation du management des relations

L’organisation du management des relations n’est pas une problématique nouvelle. Des recherches historiques au sein l’industrie automobile en font preuve (Fabre et al., 2010) avancent que la démarche de l’externalisation s’est accompagnée par une réflexion sur les structures organisationnelles (où positionner les Achats ? quelle importance donner à la direction des Achats ? Comment créer une interaction efficace avec les autres fonctions de l’entreprise ?).

Des réflexions approfondies dans le milieu de l’industrie aéronautique et automobile sur le sujet dans le sens où les achats deviennent de plus en plus complexes et coûteux. Leur style de management est structuré pour être en parfaite adéquation avec les relations stratégiques. La mise en œuvre de l’organisation s’est ensuite orientée vers les relations tactiques et ensuite open market.

On fait la différence généralement entre trois niveaux hiérarchiques qui sont directement impliqués dans le management des relations client-fournisseur : les front line agents, le middle management et le top management. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

  • Les « front line agents » de l’acheteur et du fournisseur cherchent à améliorer les résultats opérationnels. Ils veulent un impact immédiat sur la performance à travers des initiatives opérationnelles et l’amélioration de la flexibilité. Ils collaborent sur la résolution de problèmes qualité, logistiques et l’optimisation des produits et processus de fabrication. Acteurs de terrain, ils tirent leur efficacité d’une expérience partagée. (Nogatchewsky, et al,. 2010).
  • Les « middle managers » de l’acheteur et du fournisseur concentrent leurs efforts sur l’optimisation et l’efficacité des moyens à mettre en œuvre. Par conséquent, Ils cherchent à obtenir de bon résultats grâce à l’intégration horizontale des stratégies et de moyens.

Il s’agit pour l’acheteur et le fournisseur de connecter les procédures et les structures des deux entreprises afin d’avoir un bon impact sur la coordination des actions envisagées. En particulier, c’est à ce niveau que se pense l’intégration la plus poussée des processus du client et du fournisseur. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

  • Enfin, les « top managers » de l’acheteur et du fournisseur créent et formalisent ensemble la vision et les objectifs. En remettant en question le statu quo, ils se basent sur la motivation des hommes et mettent en place les orientations à donner pour assurer la réconciliation de leurs cultures et structures respectives. A travers cette démarche, une collaboration dynamique peut se développer dans la coopération client-fournisseur. (Nogatchewsky, et al,. 2010).

C’est l’articulation entre les trois niveaux hiérarchiques et les autres parties prenantes des entreprises cliente et fournisseur qui permet d’initier et de développer la relation. Chacune des deux parties joue un rôle important dans la collaboration et dans le management de la relation.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
L’impact d’une crise économique sur la relation fournisseur – acheteur
Université 🏫: KEDGE Business School - Ecole de commerce et de management
Auteur·trice·s 🎓:
SMIMID Ilyass

SMIMID Ilyass
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour obtenir le titre master specialisé - Spécialité : management des achats internationaux et innovation
Acheteur - Logisticien .
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