8 clés pour maîtriser la gestion des risques fournisseurs

8. Les outils de gestion des risques fournisseurs

La gestion des risques fournisseurs est devenue une des tâches principales de l’acheteur, elle représente 60% de ses priorités aujourd’hui. En effet, une mauvaise gestion des Achats, en particulier des risques fournisseurs, peut sérieusement affecter la continuité de leur production, la

qualité des produits et le développement de la productivité. Il est donc important d’identifier les risques, d’évaluer leur impact sur les objectifs stratégiques de l’entreprise et de les maîtriser.

L’analyse des risques fournisseurs repose sur quatre étapes : il s’agit d’un processus de gestion continu, comprenant l’identification, la priorisation, la prévention et le suivi des risques fournisseurs. L’analyse des risques fournisseurs peut aider les entreprises à déterminer les principaux risques

auxquels elles sont confrontées. Par conséquent, elle peut les éliminer ou réduire leur impact en développant un plan d’action préventif.

C’est un outil très efficace de gestion et de communication qui permet d’avoir une vision plus claire sur le processus d’Achat ainsi que les menaces qui peuvent surgir durant celui-ci.

Les étapes de gestion des risques fournisseurs selon Rémi Bachelet

Figure 5 : Les étapes de gestion des risques fournisseurs selon Rémi Bachelet

8-1 Identification et classification des risques Achat

Avant de conclure un contrat avec un fournisseur, l’acheteur doit avant tout prendre en considération tous les risques susceptibles d’être associés à cette étape importante, car cela implique son entreprise dans une relation commerciale avec le fournisseur pour une durée déterminée.

Cela peut avoir un risque sur l’image de son entreprise, son éthique, sa position stratégique, financière, concurrentielle, un impact environnemental et sa responsabilité sociétale. Afin d’éviter ces risques l’acheteur est amené à cartographier toutes les conséquences négatives liées à un engagement avec son fournisseur.

Il s’agit d’identifier et de cartographier les risques liés aux Achats en fonction de leur criticité. Par conséquent, la collecte des bases de données, la connaissance approfondie du marché fournisseur, accompagnées par un suivi permanent sont donc indispensables afin de disposer de la bonne

information lors du processus d’Achat. Lors de la cartographie des risques fournisseurs, l’acheteur peut répartir les risques identifiés comme suit :

Cartographie des risques selon ( Salviac et al,. 2010)

Figure 6 : Cartographie des risques selon ( Salviac et al,. 2010)

8-1-1 Les risques économiques

A. Les risques macro-économiques

Les facteurs de risques liés au marché :

L’analyse consiste ici à détecter les facteurs de risques générateurs de déséquilibre du marché duquel dépend l’entreprise. Pour mener une analyse approfondie, on recommande d’utiliser l’outil d’analyse stratégique des cinq forces de Porter, adaptée aux Achats en considérant le volet clients comme étant l’entreprise acheteuse. (Porter, 1986).

D’après Michael PORTER, L’avantage concurrentiel, Inter Éditions, Paris, 1986

Figure 7 : D’après Michael PORTER, L’avantage concurrentiel, Inter Éditions, Paris, 1986

D’une manière générale, Les facteurs de risques marché sont liés potentiellement aux déséquilibres du marché causé par un rapport de force défavorable avec les fournisseurs.

Les facteurs de risques liés au prix :

Globalement le prix d’achat est fixé avec le fournisseur au moment de la négociation, dans ce cas l’acheteur est couvert puisque le prix restera stable, mais il existe d’autres cas ou le prix est variable comme dans le marché à terme.

Le prix d’une matière première par exemple varie d’une période à l’autre. Les marchés de matières premières sont cotés, ils sont soit structurés et liquides, soit reposent sur des transactions de gré à gré dont les prix sont rendus publics.

Les facteurs de risques liés au change :

Le risque de change provient de la variation de cours, à une période donnée, entre une opération de vente et des coûts facturés dans des devises différentes.

La conversion en une devise crée cet écart au fil du temps. Par exemple, un euro fort face à un dollar faible peut affaiblir l’entreprise qui vend en dollars et achète en euros.

Les facteurs de risques climatiques :

Il s’agit des éventuels risques causés par les changements climatiques, en France par exemple Metnext (une entreprise chargée d’évaluer les risques météorologiques) procure aux entreprises des prévisions surmesure pour évaluer et gérer leur sensibilité météorologique car il existe des secteurs d’activité qui sont beaucoup impactés par ce risque, dans le secteur de l’habillement par exemple, une étude prouve que 83 % des ventes sont directement provoquées par l’unique facteur des températures. Metnext propose même une couverture des pertes liées au risque météorologique, il est désormais possible au acheteurs de se couvrir de ce risque.

B. Les risques Pays

Les facteurs de risques politiques :

Ce sont les risques liés à la stabilité des régimes et du pacte politique, économique et monétaire, par exemple les contrainte liées aux réglementations sur les investissements, les devises, les taux d’intérêts etc. L’acheteur doit apprécier les facteurs de continuité et de stabilité qui peuvent avoir un impact sur sa politique Achat.

Les facteurs de risque s économiques :

La croissance du PIB, le taux de chômage, l’inflation et généralement le contexte économique doivent être pris en compte par l’acheteur dans une optique long terme, car la célérité de développement a une influence sur l’orientation des entreprises.

Les facteurs de risques légaux :

Il s’agit d’apprécier globalement le risque liés aux lois applicables sur la propriété industrielle, la contrefaçon et les contrats, le respect des réglementations environnementales.

Les facteurs de risques sociaux :

Cela regroupe les lois sociales sur le travail, les violations des droits de l’homme, le niveau d’éducation et la stabilité sociale. Un fournisseur qui fait travailler les mineurs impactera l’image de ses clients.

Les facteurs de risques liés aux infrastructures :

Cette catégorie de risques réfère à la capacité logistique (réseau et organisation des transports, l’énergie, la sécurité, procédures douanières).

8-1-2 Les risques financiers

Le risque sur l’exploitation :

Le risque sur l’exploitation peut être défini comme tout facteur capable de dégrader la production du fournisseur et à impacter l’exploitation à titre provisoire voire même définitif de l’entreprise acheteuse.

Sur le plan économique, le risque d’exploitation a trait à l’incertitude entourant la rentabilité d’exploitation, c’est-à-dire la marge que l’entreprise retire de ses ventes. (Salviac et al,. 2010).

Le risque financier fournisseurs :

Le risque financier du fournisseur est le risque relatif à la gestion de son bilan et de son compte de résultat, le plus récurrent est celui de la cessation des paiements (incapacité de faire face à ses engagements), pouvant faire l’objet d’une liquidation judiciaire. L’acheteur doit anticiper les difficultés financières de ses fournisseurs.

Il est obligé donc de mener une analyse financière poussée qui permet d’évaluer la santé du fournisseur à l’instant t, et de prévoir le risque de défaillance financière.

L’analyse financière repose sur des compétences en générale peu présentes au niveau de la fonction Achats. A ce moment la direction financière peut venir en aide, ou même parfois des entreprises externes susceptibles d’apporter leur expertise.

Le risque sur la trésorerie :

Le risque sur la trésorerie concerne la prise en compte les risques qui peuvent avoir un impact négatif sur la trésorerie de l’entreprise ou celle de ses fournisseurs.

En générale, l’occurrence d’un risque sur la trésorerie signifie la rupture évidente de la relation entre l’acheteur et son fournisseur.

8-1-3 Les risques industriels et qualités

Le risque qualité et l’Assurance Qualité Fournisseurs :

Par définition, la qualité est la satisfaction des produits ou services achetés aux critères de conformité attendue comme définie dans le cahier des charges envoyé au fournisseur.

La qualité peut constituer un risque à l’acheteur si la qualification du fournisseur est incomplète, si le cahier des charges n’est pas bien défini, ou en cas d’absence de politique qualité du côté de l’acheteur comme du côté fournisseur.

Le risque vis-à-vis de la technologie :

Dans le contexte des Achats, le risque de l’entreprise vis-à-vis de la technologie proposée par les fournisseurs consiste principalement à mesurer le risque de la dépendance technologique vis-à-vis du fournisseur par rapport à une technologie que l’on ne maîtrise pas. Dans le même sens, une entreprise qui se laisse dépassée par le développement technologique se trouvera non compétitive.

Le risque industriel :

Du point de vue des Achats, il s’agit ici d’apprécier les facteurs de risques liés à l’activité industrielle du fournisseur, et particulièrement à sa capacité à faire face à ses engagements de production.

Le risque industriel est lié à la probabilité d’apparition d’un événement redouté sur un site et pouvant entraîner des conséquences immédiates graves pour le personnel, les populations avoisinantes, les biens ou l’environnement, de nature à altérer le schéma industriel du fournisseur, et à mettre en cause sa production, donc ses livraisons à l’entreprise.

Le risque sur la supply chain :

Le risque sur la supply chain peut être défini comme la somme des facteurs de risque à l’origine de la désynchronisation des flux physiques entre le besoin exprimé par l’entreprise cliente d’une part, et la livraison réelle par le fournisseur ou son prestataire transport logistique du besoin appelé, d’autre part.

Cette désynchronisation peut, dans certains cas extrêmes, conduire à la rupture du cycle de production de l’entreprise ou bien encore à des phénomènes de sur stockage.

8-1-4 Les risques liés au domaine légal

Le risque contractuel :

Le risque initial, même s’il paraît évident, c’est simplement l’inexistence de contrat entre l’entreprise et ses fournisseurs. Par nature, le contrat est un instrument de prévision, de sécurité juridique et de sécurité économique, basé sur la volonté des parties et le libre consentement.

Il matérialise et définit la transaction commerciale et son contenu. Il constitue donc un point de référence pour l’acheteur. Il convient non seulement de contracter, mais également de gérer la base de contrats, et de s’assurer de leur mise à jour au fil du temps. (Salviac et al,. 2010).

Le risque juridique :

Au-delà des difficultés liées aux contrats, les problèmes juridiques peuvent concerner des champs finalement assez vastes. En voici quelques exemples non limitatifs :

Risques liés à la propriété intellectuelle, risques règlementaires au niveau sanitaire, risques liés au droit de la concurrence etc.

Le risque de fraude :

Par nature, la fraude est un acte de mauvaise foi, en général pour un profit personnel, commis au détriment de l’entreprise. Néanmoins, aucune règle exacte ne peut prétendre définir la fraude.

L’imagination dans ce domaine n’a pas de limites, et l’homme est capable d’inventer des moyens de tricheries, tous plus ingénieux les uns que les autres. Au niveau Achat, la fraude peut toucher la transparence lors des négociations, le niveau de contrôle des prix et des commandes, ces exemples ne sont pas limitatifs.

8-2 L’évaluation et la priorisation des risques fournisseurs

Cette étape consiste à évaluer sur une échelle de 1 à 4 la probabilité qu’un risque se produise (P)

et son impact (I) sur la stabilité de l’entreprise. Le calcul de la criticité (C) de chaque risque se fait ensuite en multipliant sa probabilité (P) par son impact (I).

Méthode de calcul de la criticité d’un risque

Figure 8 : Méthode de calcul de la criticité d’un risque

Une fois la criticité calculée, l’acheteur doit ensuite prioriser les risques en identifiant ceux qui sont majeurs en fonction de leur coefficient de criticité. Les risques ayant la criticité la plus forte doivent impérativement être traités en premier.

8-3 La mise en place du plan d’action

L’acheteur établit pour chaque risque critique, un plan d’action permettant d’une part de le prévenir et de diminuer son impact, et d’autre part de sécuriser les achats en mettant en place des plans d’urgence en cas de crise.

Exemple d’un plan d’action de gestion des risques fournisseurs

La mise en place du plan d’action

Figure 9 : Exemple d’un plan d’action de gestion des risques fournisseurs

8-4 Le suivi et le contrôle de la maitrise des risques fournisseurs

L’acheteur doit ensuite suivre et contrôler en continue le pilotage des risques en mettant en place des tableaux de bord. Il instaure des indicateurs de surveillance pour faciliter le suivi et la maîtrise des risques.

Exemple d’un tableau de bord de suivi des risques fournisseurs

Figure 10 : Exemple d’un tableau de bord de suivi des risques fournisseurs

9. Conclusion de la première partie

A travers cette première partie, on a vu les quatre familles d’Achats qui constituent le portefeuille d’un acheteur. Ensuite sur la base de la segmentation Kraljic et Dyer on a défini les deux types de relation fournisseur – acheteur (relation stratégique et non stratégique).

On a approfondi l’analyse de ces deux types de relation pour prouver la faiblesse par nature des relations fournisseur – acheteur non stratégiques, puisqu’elles se limitent à des simples transactions commerciales de courte durée contrairement aux relations stratégiques, qui au-delà des rapports commerciaux, la rareté des fournisseurs sur le marché et la complexité des produits obligent l’acheteur à développer une bonne relation collaborative et partenariale à long terme.

Pour la suite de ce mémoire on a décidé de se focaliser sur les relations stratégiques pour voir comment elles sont impactées par une crise économique.

La littérature académique nous a proposé les différents modes de management de la relation fournisseur acheteur. Cependant elle a été limitée au sujet de l’impact de la crise économique sur la relation fournisseur – acheteur. A ce stade, on a essayé de voir le sujet dans l’ensemble pour finir par l’enregistrer dans le cadre d’une gestion de risques, puisque à ce propos, la bibliographie académique considère que la crise économique entre dans les facteurs de risques fournisseurs. En étudiant la cartographie des risques fournisseur, on a compris la complexité du pilotage des risques par la fonction Achat, chose qui la rend encore plus stratégique.

La réponse à notre problématique n’est pas traitée en détail, ce qui nous amène à lancer une étude empirique qui fera l’objet de la deuxième partie de ce mémoire. A travers une étude qualitative on va adresser un questionnaire aux professionnels des Achats ainsi que leurs fournisseurs pour voir la réalité du terrain.

La crise économique actuelle dû à la Covid19 et son impact sur la relation fournisseur – acheteur sera l’objet de nos entretiens, afin de comprendre ce que la crise a changé dans cette relation, quels étaient les moyens mis en œuvre pour la traverser ? Pourquoi certaines relations fournisseur – acheteur ont pu résister voir même devenir plus forte qu’avant alors que d’autres ont échoué ?

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
L’impact d’une crise économique sur la relation fournisseur – acheteur
Université 🏫: KEDGE Business School - Ecole de commerce et de management
Auteur·trice·s 🎓:
SMIMID Ilyass

SMIMID Ilyass
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour obtenir le titre master specialisé - Spécialité : management des achats internationaux et innovation
Acheteur - Logisticien .
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