Droits politiques de la femme: les lois nationales et les institutions

Les droits politiques de la femme : les lois nationales et les institutions

Section 2

La traduction des droits politiques de la femme à travers les lois nationales et les institutions

Conformément au principe de parité inscrit dans la Constitution de 2011 visant à améliorer la représentativité des femmes dans la vie politique, une dynamique nationale a été lancée et s’est concrétisée par l’adoption de plusieurs lois organiques et la mise en place de nouveaux mécanismes institutionnels visant à favoriser une plus grande participation des femmes dans l’espace politique.

A ce niveau de la réflexion, nous allons nous contenter de mettre en lumière les textes majeurs relatifs aux droits politiques des femmes (§1) et les institutions chargés de les promouvoir (§2).

§1 : Textes majeurs et lois nationales relatifs aux droits politiques des femmes

* Loi n° 9-97 formant code électoral

Cette loi énonce des dispositions générales applicables indistinctement du sexe. Elle organise les modalités de préparation, de déroulement et de détermination des résultats des élections.31

Elle précise que les marocains des deux sexes âgés de 20 années grégoriennes révolues et jouissant de leur droits Civils et politiques et n’étant dans aucun des cas d’incapacité sont électeurs.32

31 Préambule de la loi n°9-97 formant code électoral.

32 Article 3 de la loi n°9-97 formant code électoral.

Toutefois, la loi n°64-02 vient pour modifier et compléter la loi précitée et cela se traduit comme suit : « sont électeurs tous le marocain de deux sexes âgés de dix-huit années grégoriennes révolues au moins ». Donc l’âge de vote a été abaissé de 20 ans à 18 ans.

On aperçoit également, outre les circonscriptions prévues la création de «Circonscriptions électorales complémentaires» dans le ressort territorial de chaque commune ou arrondissement.33

33 Articles 204-1 et 204-2 de la loi n°36-08 modifiant et complétant la loi n°9-97 formant code électoral.

Puis la création d’un «fonds d’appui pour la promotion de la représentativité des femmes» qui est un soutien destiné au renforcement des capacités de représentativités des femmes à l’occasion des élections générales communales et législatives.34

34 Article 288 bis de la loi n°36-08 modifiant et complétant la loi n°9-97 formant code électoral.

* Loi n°78-00 portant charte communale

Cette loi apporte la création auprès du conseil communal d’une commission consultative nommée «Commission de l’égalité et égalité des chances».

La commission donne son avis, les questions concernant la parité et l’égalité des chances et l’approche du genre social.35 Et la mise en place d’un plan stratégique de développement communal selon une démarche participative sensible au genre.36

35 Article 14 de la loi n°78-00 portant charte communale, modifié par l’article 1er de la loi n° 17-08 promulguée par le dahir n° 1-08-153 du 18 février 2009.

36 Article 36 de la loi n°78-00 portant charte communale.

* Loi 27-11 sur la Chambre des représentants

Cette loi a alloué 60 sièges aux femmes sur 395, c’est à dire 15%. La liste de candidatures doit inclure les noms de soixante (60) candidates avec indication de leur classement et de 30 hommes âgés de moins de 40 ans.37

37 Article 23 de la loi n°27-11 sur la chambre des représentants.

* Loi organique 29-11 relative aux partis politiques

Celle-ci prévoit que chaque parti politique travaille à la réalisation d’un tiers de la participation des femmes à ses organes de direction aux niveaux national et régional, dans le but de réaliser la parité entre les hommes et les femmes.

De ce fait les partis politique œuvre à élargir, généraliser et encourager la participation des femmes dans le développement politique du pays.38

38 Article 26 de la loi n°29-11 relative aux partis politiques.

* Loi organique 59-11 relative à l’élection des membres des conseils des collectivités territoriales

Elle dispose de mécanismes visant à la promotion de la représentation des femmes à ce titre il est créé, au niveau de chaque préfecture, province ou préfecture d’arrondissements deux circonscriptions électorales dont l’une est réservée aux femmes, sans pour autant qu’elles soient privées de leur droit de candidature dans l’autre circonscription électorale.39

39 Article 76 de la loi organique 59-11 relative à l’élection des membres des conseils des collectivités territoriales.

* Loi organique n° 02-12 relative à la nomination aux fonctions supérieures

Cette loi édicte les principes de nomination aux fonctions supérieures, à cet effet elle introduit le respect de la parité entre hommes et femmes, la consécration des principes de mérite, d’égalité des chances et de transparence. Elle annonce également le principe de non-discrimination, sous toutes ses formes, dans le choix des candidates et candidats aux fonctions supérieures, y compris en raison de sexe.40

40 Article 4 de la loi organique n° 02-12 relative à la nomination aux fonctions supérieures.

* Loi n°79.14 relative à l’Autorité de Parité et de Lutte contre toutes les formes de Discrimination

C’est l’article 19 de la Constitution de 2011 qui prévoit la création de l’APALD. Adoptée par le parlement en 2017, elle a pour attributions de veiller au respect des droits et des libertés prévues à son article créateur. L’APALD, telle que définie à l’article 164 de la constitution constitue une parmi les quatre Institutions nationales de « Protection et de Promotion des droits de l’Homme ».41

41 Les trois autres institutions sont : le conseil national des droits de l’Homme, le médiateur et le conseil de la communauté marocaine à l’étranger ; titre XII de la constitution de 2011

L’APALD veille à l’instauration de la culture de l’égalité, de la parité et de la non- discrimination, elle est également chargée du contrôle et du suivi de toutes formes de discriminations dont les femmes sont victimes puis elle est chargée d’élaborer des recommandations pour lutter contre les pratiques à caractère discriminatoire ou portant atteinte au principe de l’égalité entre les femmes et les hommes.

En somme, la nouvelle Constitution, les lois et les mesures adoptées ces dernières années ont contribué à la croissance du rythme de la participation politique des femmes.

§2 : Institutions chargées de promouvoir les droits politiques de la femme au Maroc

Le Maroc sous l’égide de ses monarques s’est engagé dans un grand chantier de réforme économique, sociale et politique, et il s’est doté de plusieurs institutions chargées de préserver et promouvoir les droits de la femme.

* Sur le plan gouvernemental

Le renforcement de la protection des droits des femmes s’est traduit sur le plan institutionnel par la création d’un ministère des droits de l’homme le 11 novembre 1993.

Ce ministère est chargé d’élaborer et de mettre en œuvre, en coordination avec les ministères concernés, la politique gouvernementale concernant la défense, le respect et la promotion des droits de l’homme.42

Et aujourd’hui l’instance gouvernementale qu’est aussi chargé de la promotion des droits politiques de la femme au Maroc est le ministère nommé, ministère de la Famille, de la Solidarité, de l’Egalité et du Développement Social.

42 Article premier du décret n° 2-94-33 de 1994 relatif aux attributions et à l’organisation du ministère délégué auprès du Premier ministre chargé des droits de l’homme.

Il lui est confié d’accompagner et suivre la mise en œuvre des programmes de promotion des droits des femmes et contribuer au renforcement de sa situation juridique et sa participation au développement social, en coordination avec les parties concernées et même réaliser des études et rapports concernant la situation des femmes.43

43 Décret n°2.13.22 du 29 avril 2013 déterminant les compétences et l’organisation du Ministère de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social.

En raison de la lenteur avec laquelle le nombre de femmes augmente en politique, les femmes réclament des méthodes efficaces pour améliorer leur représentation.

De ce fait, le gouvernement marocain a pris une mesure transitoire pour promouvoir la participation et la représentativité politique des femmes, lors de la révision de la loi organique de la Chambre des représentants en 2002, par l’adoption du Quota.

Les quotas en faveur des femmes n’ont pas pour but de discriminer les hommes mais de compenser les barrières actuelles qui existent au sein des sociétés et qui empêchent les femmes d’accéder aux fonctions politiques. Ils peuvent être considérés comme des mesures exceptionnelles, temporaires et spéciales.44

44 Boutheina Gribaa, Projet « renforcement du leadership et de la participation des femmes à la vie politique et au processus de prise de décision en Algérie, au Maroc et en Tunisie » ; Le quota, mesure temporaire spéciale de lutte contre la discrimination ; p : 58

Le principe du quota de femmes repose sur l’idée que les femmes doivent être présentes, selon un certain pourcentage, dans les divers organes de l’État.

La plupart des quotas visent à augmenter la présence des femmes, parce que le problème habituellement posé est précisément leur sous-représentation. Le quota peut exiger, par exemple que 40% des membres d’une institution soient des femmes.45

45 IDEA institut international de la démocratie et l’assistance internationale « les femmes au Parlement : au-delà du nombre » ; 2002 ; chapitre 4 : le recours aux quotas pour augmenter le nombre de femmes dans les institutions ; Drude Dahlerup ; P : 107.

Un certain nombre d’arguments sont avancés pour ou contre les quotas comme moyens d’améliorer la présence des femmes : Ceux qui sont d’accord considère que les quotas de femmes ne sont pas discriminatoires, ils servent à compenser les handicaps qui ôtent aux femmes la part des sièges qui leur revient; les femmes ont droit, en tant que citoyennes, à une représentation équitable et même que l’expérience des femmes est nécessaire dans la vie politique.

Alors que ceux qui sont contre citent comme arguments à savoir que les quotas sont contraires au principe d’égalité des chances pour tous, puisque les femmes sont avantagées; les quotas ne sont pas démocratiques, car les électeurs doivent être ceux qui décident des élections et les quotas impliquent que le genre intervient plutôt que les qualifications dans la dévolution du pouvoir politique et qu’ainsi certains des candidats les plus compétents sont écartés.46

46 Benyahya M, « Recueil des documents et textes juridiques relatifs à la condition de la femme au Maroc » Remald n°48 Rabat 2001 ; Question du quota réservé aux femmes. P : 153 et 154.

* Cadre associatif

Dans ce cadre le champ des droits politiques de la femme est dominé par plusieurs associations on cite à titre d’exemple l’association marocaine pour les droits des femmes, l’union nationale des femmes marocaines, la ligue des droits de la femme, l’association démocratique des femmes du Maroc etc. On se contente d’évoquer les suivantes :

– Le printemps féministe pour la démocratie et l’égalité

Créé en 2011, cette coordination nationale composée d’associations féministes a vu le jour au lendemain du discours royal annonçant la mise en place d’une nouvelle constitution.

Son objectif était au départ de constituer une force revendicative auprès de la commission royale chargée de l’élaboration du projet de la Nouvelle Constitution. Aujourd’hui elle œuvre pour la constitutionnalisation de l’égalité effective entre les sexes.47

47 Site officiel du printemps féministe pour la démocratie et l’égalité : « qui sommes-nous ? » ; https://pfdemaroc.wordpress.com/

– Jossour forum des femmes marocaines

Une organisation non gouvernementale, créée en Juillet 1995 par un ensemble de femmes désireuses d’une société plus égalitariste. Créée par et pour des femmes, l’association réunit les potentialités et compétences primordiales à la promotion de leurs droits.

Son objectif s’inscrit dans le renforcement de la présence féminine sur la scène nationale et ce à tous les niveaux économique, social, culturel, juridique et politique.48

48 Site officiel de Jossour forum des femmes marocaines : « présentation » ; http://www.jossourffm-maroc.com/

* Champ parlementaire

Démocratiquement élu par les citoyens, le parlement est considéré comme le premier protecteur de droits des femmes.

Parmi les instruments dont il dispose pour remplir cette fonction figurent les commissions parlementaires, dont le nombre la composition et les attributions sont déterminées par le règlement intérieur de la chambre des représentants.

En 2012 le Maroc a signé la convention de financement du programme d’appui à la mise en œuvre du plan gouvernemental pour l’égalité qui a pour objectifs de promouvoir une meilleure protection juridique des femmes, une plus grande représentation des femmes aux postes de décision, le développement d’une culture de l’égalité et le développement de politique et de programmes sectoriels, fondés sur l’égalité hommes/femmes.

Les ministères signataires et présents ont bien spécifié leur engagement pour plus d’égalité et leur volonté à s’inscrire dans les orientations du programme. A titre d’exemples : le plan ICRAM du ministère de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social.49

49 Décret n°2.13.495 portant création la commission ministérielle du plan gouvernemental pour l’égalité « ICRAM » 2012- 2016

On trouve aussi le Conseil national pour les droits de l’homme et Diwan al madhalim qui cherchent à promouvoir une plus grande cohérence et une meilleure efficacité dans la protection et la promotion des droits de l’Homme et portent soutient juridique aux femmes pour qu’elles défendent leurs droits au tant que citoyennes.50

50 M’fadel Smires et Ihzrir Abdelmalek : « Libertés Publique et droits de l’homme » ; Conseil national pour les droits de l’homme et Diwan al madhalim P : 193

* Cadre médiatique

Les medias multiplient l’accès au public très large à travers des canaux et des programmes variables, de ce fait elles augmentent les opportunités d’accès des femmes à la scène politique.

Les medias sont tenus à aider à promouvoir la place des femmes politiques dans la société, et ce à travers la sensibilisation des gens de la place prépondérante des femmes dans la société et de leurs rôles et leurs pouvoirs d’occuper les différents postes de décision et de responsabilité politique.

Mais malgré l’adoption de la Charte nationale sur l’amélioration de l’image de la femme dans les médias, la représentation des femmes reste insuffisante et fortement stéréotypée.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Les droits politiques des femmes au Maroc
Université 🏫: Université Moulay Ismail - Faculté des sciences juridiques économiques et sociales
Auteur·trice·s 🎓:
Btissam SADDOUGUI

Btissam SADDOUGUI
Année de soutenance 📅: Mémoire de Fin d’Etude - 2017 / 2018
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