L'agriculture biologique : naissances des courants

L’agriculture biologique : naissances des courants

1-1-2 Naissances des différents courants et organisation de la profession

C’est précisément dans ce contexte de crise agroalimentaire globale que la montée du bio prend tout son sens.
Motivé par l’opposition catégorique aux excès de l’industrialisation et à l’économie productiviste, plusieurs mouvements contestataires confluents voient le jour pour avertir sur la nécessité d’agir.
Aux travaux antérieurs de Steiner énoncés précédemment (entre autres) vient s’ajouter une prise de conscience globale en faveur du respect de l’environnement et d’une meilleure qualité de vie par la société.
On peut alors y discerner très tôt d’un côté un courant avec une vision plus technique voir économique composés de distributeurs, et de l’autre côté un courant avec une démarche sociale plus globale composé principalement de médecins et consommateurs avertis qui mettent en lumière le lien entre alimentation et santé, exposant ainsi les dangers des produits de synthèse pour l’humain.
Si dans les détails les motivations divergent quelques peu, l’objectif reste cependant le même pour tous les acteurs de cette petite révolution agricole, il s’agit d’initier un mode alternatif de production qui prend en compte l’équilibre naturel des sol, tout en instaurant des principes éthiques et écologiques durables.
Dans une tentative d’unification des efforts on assiste en 1958 à la création du Groupement d’Agriculture Biologique de L’Ouest qui représente le tout premier regroupement de producteur bio en France , il deviendra en 1962 L’AFAB (l’association française d’agriculture biologique) avant d’éclater à nouveau quelques années plus tard en deux courants d’agriculture biologique distincts : Nature & progrès qui est associé au courant social plus global et Lemaire-boucher qui est une société commerciale plus axé sur la technique.10
Malgré la séparation les efforts de L’AFAB ont démontré une première volonté d’organiser la profession et c’est dans la continuité de cette dynamique de développement que l’on assiste à la création du premier cahier des charges bio et français, présenté par Nature et progrès en 1972, qui marque ainsi la toute première étape vers une organisation plus sérieuse et une volonté de reconnaissance de la part du secteur bio.
Nature & progrès encourage la même année la création de Fédération internationale des mouvements d’agriculture biologique (IFOAM), avec comme objectif la coordination de toutes les organisations déjà existantes dans le secteur bio.
Malheureusement c’est également dans les années 70 que le mouvement bio se voit divisé peu à peu en une dizaine d’organisation qui développent chacune leur cahier des charges.
Cette dispersion des efforts renforce ainsi l’opinion publique sur le bio d’un mouvement marginal et désorganisé.
Toutefois le le mouvement dans sa globalité ne perd pas en force et la volonté de reconnaissance du bio se manifeste une nouvelle fois avec la Fédération National des Agriculteurs Biologique. Créé en 1978 avec pour objectif la réorganisation de l’ensemble de la production biologique par zones géographiques, indépendamment des différentes marques.
La fédération nouvellement créé prend alors comme responsabilités “l’étude et la défense des intérêts économiques, matériels, juridiques et moraux de la profession d’agrobiologiste dont elle assure la représentation nationale et internationale”11.
Les efforts d’organisation et de reconnaissance dans le secteur bio à cette époque font de la France un des pays pionniers dans la matière, et si le mouvement a parfois tendance à donner l’impression de s’éparpiller il ne perd pas son souffle pour autant, la prise de conscience elle est toujours en marche auprès des consommateurs et la reconnaissance nationale tant attendue ne saurait tarder.
C’est également dans les années 70 que l’on observe les deux premiers chocs pétroliers de l’histoire (1973 – 1979), a priori sans rapport avec le bio, ces deux crises permettent en réalité d’en renforcer la nécessité dans l’opinion publique.
En effet la monté soudaine du prix du pétrol permet de mettre en évidence le lien entre agriculture moderne et consommation d’énergie fossiles à travers la fabrication de produits de synthèses, principalement à base de pétrole.
A partir de ce moment le Bio se voit rajouter une motivation environnementale évidente qui va au-delà de la contamination des terres françaises, l’enjeu devient alors peu à peu global et plus “sérieux”, il est à présent question de l’avenir de la planète.

1-1-3 Vers la reconnaissance du secteur

Dès lors c’est à partir des années 80 que le mouvement s’accélère réellement, la Loi d’Orientation Agricole de 1980 reconnaît les pratiques d’agriculture biologique sans les mentionner toutefois :
“les cahiers des charges définissant les conditions de production de l’agriculture n’utilisant pas de produits chimiques de synthèse peuvent être homologués par arrêté du Ministère de l’Agriculture”12.
Galvanisées par cette véritable preuve de reconnaissance les fédérations françaises d’agriculteurs biologiques gagnent en importance dans l’opinion publique, parallèlement la demande de produits biologique augmente auprès des consommateurs et permet de confirmer l’évolution du mouvement.
Dans la même lancée en 1983 le terme “agriculture biologique” est finalement légalement reconnu, il est alors définis comme “agriculture n’utilisant pas de produits chimiques de synthèse”.
Bien loin de capturer tout l’enjeu et l’ambition du mouvement bio cette définition représente malgré tout un pas important dans le développement du secteur bio qui ne se voit plus considéré comme une activité marginale et prend peu à peu une véritable place de secteur d’activité professionnel.
Plus concrètement cette agriculture nouvellement baptisée permet l’homologation à une échelle maintenant nationale des cahiers des charges qui entrent en vigueurs pour la production de produits bio 13.
Cette avancée permet en 1985 la création du logo AB (agriculture biologique) qui s’inscrit dans une toute première démarche de visibilité auprès des consommateurs.
agriculture biologique
Si la France est alors pionnière en la matière elle est tout de même suivi de près, de nombreux pays Européen vont à leur tour institutionnaliser leurs filières d’agriculture biologique et proposer leur propre cahiers des charges à échelle nationale.
Cependant les autorités l’union européenne n’est pas particulièrement en accord avec une telle dispersion de l’autorité en matière de cahier des charges.
Ces cahiers des charges nationaux représentent un certains obstacle au commerce et à la transmission de savoir-faire en terme d’agriculture biologique au sein de l’union Européenne.
C’est ce qui poussera L’UE à imposer en 1991 le premier règlement Européen sur les végétaux issus de l’agriculture biologique, ce règlement est particulièrement intéressant pour le développement du secteur bio dans toute l’Europe puisqu’il permet pour la première fois dans l’histoire de garantir un seuil d’exigence commun à tous les pays membres, tout en laissant à ces derniers le droit de le compléter (pour le durcir uniquement) sur leur propre territoire.
Dès lors les fondations du bio sont posées de façons officielle aussi bien dans l’esprit des consommateurs français que pour les autorités nationales et européennes, le secteur est enfin reconnu et pourra ainsi se développer pleinement dans les 20 années à venir.
Le mouvement bio face à l’industrialisation  : Comment l’identité du bio est-elle en train de s’effacer au profit de son industrialisation ?
Mémoire professionnel – Master 2 LCAI – Université de La Rochelle
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10 L’HISTOIRE DE LA BIO, site de la FNAB https://www.produire-bio.fr/cest-quoi-la-bio/histoire-de-la-bio/
11 Histoire de l’agriculture biologique et création de la FNAB www.fnab.org
12 L’Agriculture biologique par la FNAB http://www.agrobioperigord.fr/upload/La%20bio%20par%20la%20FNAB.pdf
13 Une brève histoire de l’agriculture biologique, L’Agence Bio https://www.agencebio.org/decouvrir-le-bio/quest-ce-que-lagriculture-biologique/

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Université de La Rochelle - Master 2 LCAI - Mémoire professionnel
Auteur·trice·s 🎓:

Zacharie Arpaillanges
Année de soutenance 📅:
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