Évolution de la Procédure d’Extradition : Analyse en 5 Étapes

Paragraphe 2 : La procédure

Dans cette rubrique, nous examinerons la phase de pré-extradition, détaillant les démarches initiales qui sont entreprises avant qu’une demande d’extradition ne soit officiellement formulée (A). Par la suite, nous aborderons l’examen de la demande d’extradition proprement dite(B).

La phase de pré-extradition

Cette partie se concentrera sur l’arrestation provisoire, analysant comment cette mesure temporaire est mise en place afin de garantir la présence du fugitif pendant la procédure d’extradition(a). Nous explorerons les justifications et les pratiques entourant cette étape cruciale. En outre, nous nous étalerons sur les conditions de détention du fugitif dans le cadre de la procédure d’extradition(b).

Arrestation provisoire

Lorsqu’ une personne recherchée est localisée et qu’il y a un risque élevé de fuite, il est possible de demander en en urgence son arrestation provisoire afin de l’appréhender immédiatement, même avant d’envoyer la demande d’extradition formelle à l’Etat requis. Cette demande vise à permettre l’interpellation immédiate de la personne avant même que l’Etat requis ne reçoive la demande d’extradition formelle. L’arrestation provisoire est une mesure temporaire prise en application d’un traité d’extradition ou de la législation nationale, précédant la soumission de la demande d’extradition.

Elle et généralement utilisée en cas d’urgence pour éviter que la personne recherchée ne profite de la longueur de la procédure d’extradition pour échapper à la justice, comme le dit BRACH-THIEL « un véritable jeu de piste internationale consistant pour le fugitif à tenir successivement en échec les autorités requises des divers Etats de séjour successifs » C’est le cas de l’affaire de Roman Polanski en 2009. Le cinéaste franco polonais aux Etats Unis pour des accusations de viol sur mineure datant de 1977. Il avait fui le pays avant la conclusion de son procès et s’était réfugié en Suisse, où il possédait également la nationalité.

Lorsque les autorités américaines ont localisé Polanski en suisse, elles ont immédiatement adressé une demande d’arrestation provisoire à l’Etat suisse pour prévenir toute tentative de fuite. Cette mesure a abouti à son arrestation ensuite et a ouvert la voie à une éventuelle extradition vers les Etat unis.

Concernant la transmission de la demande d’arrestation provisoire les conventions internationales, telle que la convention d’Abuja, prévoient plusieurs moyens de communication, y compris la voie diplomatique, postale, télégraphique, ou l’utilisation d’organisme internationales telles qu’Interpol. Un exemple pertinent est l’affaire de Ratko Mladic, recherché par le tribunal pénal international pour l’ex Yougoslavie pour des crimes de guerre commis pendant les guerres des Balkans. Lorsque Mladic a été localisé en Serbie, les autorités compétentes ont adressé une demande d’arrestation provisoire à Interpol, qui a rapidement diffusé l’alerte à tous les pays membres.

Cette procédure a conduit à l’arrestation de Mladic en 2011. Quant aux pièces exigées dans la demande d’arrestation provisoire, elles doivent indiquer l’existence de l’élément requis pour la demande d’extradition formelle. Par exemple, l’affaire de Julian Assange, fondateur de Wikileaks, est un exemple significatif.

Lorsqu’Assange a été localisé au Royaume uni, les autorités suédoises ont adressé une demande d’arrestation provisoire, mentionnant l’existence d’accusations de viol en suède. Cette mesure a permis d’assurer son maintien en détention en attendant l’examen de la demande d’extradition suédoise. L’arrestation provisoire est généralement facultative, mais certains traités d’extradition, telle que la convention entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, prévoient des cas où elle devient obligatoire en cas d’urgence.

Un exemple pertinent et l’affaire de Gilbert Diendéré, impliqué dans une tentative de coup d’Etat au Burkina Faso. Lorsque Diendéré a été localisée en Côte d’Ivoire, les autorités ivoiriennes ont procédé à son arrestation provisoire en réponse à la demande d’urgence des autorités burkinabé pour éviter tout risque de fuite.

Concernant la durée de l’arrestation provisoire, les traités d’extradition fixent des délais spécifiques pour sa cessation si la demande d’extradition n’est pas déposée dans les délais requis. Un exemple est l’affaire de manuel Noriega, l’ancien dictateur panaméen, recherché pour trafic de drogue et blanchiment d’argent. Lorsque Noriega a été localisé en France, une demande d’arrestation provisoire a été adressée à l’autorité française.

Si la demande formelle d’extradition n’avait pas été reçue dans les délais impartis, l’arrestation provisoire aurait pris fin et Noriega aurait été libéré. Enfin, il est crucial de n’utiliser l’arrestation provisoire qu’en cas d’urgence réelle et de respecter le droit fondamental de la personne recherchée. Un exemple pertinent est l’affaire de Pinochet a été arrêté au royaume Uni en réponse à une demande d’extradition émie par l’Espagne pour des crimes de génocide et de torture, la cour britannique a dû déterminer si l’arrestation provisoire était justifiée malgré ses problèmes de Santé.

Cette affaire souligne l’importance de l’équilibre entre la nécessité d’arrêter la personne recherchée et le respect de son droit humain fondamental.

Les conditions de détention du fugitif dans le cadre de la procédure d’extradition

La détention provisoire dans le cadre de la procédure d’extradition, également connue sous le nom d’écrou extraditionnel, a pour conséquence l’incarcération du fugitif. Cette mesure, bien que liberticide, est encadrée par les textes nationaux et internationaux afin de protéger les droits du prévenu. Au Burkina Faso, par exemple, la constitution stipule à son article 3 que personne ne peut être privé de sa liberté sans être poursuivie pour des actes prévu et punis par la loi.

De plus, des textes burkinabè prévoient des sanctions pour le responsable de lieux de détention qui procèdent à l’arrestation ou à l’extradition d’un individu sans mandat, jugement ou ordre du gouvernement.

Sur le plan international, plusieurs textes consacrent le droit à la liberté et à la sureté de toute personne, garantissant ainsi une protection contre toute privation arbitraire de liberté. Parmi ce texte, on peut citer l’article 3 de la déclaration universelle de droit de l’homme (DUDH), l’article 6 de la charte africaine du droit de l’homme et des peuples (CADHP), l’article 9 du pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et l’article 5 de la convention européenne du droit de l’homme (CEDH). La cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a précisé la condition d’une détention qui ne peut être qualifiée d’arbitraire en vertu de l’article 5 de la CEDH.

La mesure privative de liberté doit être mise en œuvre de bonne foi et être étroitement liée au motif de détention invoqué par le gouvernement. Le lieu et les conditions de détention doivent être appropriés, et la durée de la détention ne doit pas excéder le délai raisonnable nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi. En ce qui concerne la procédure d’extradition, le prévenu a le droit d’être informé de raisons de son arrestation et peut demander sa mise en liberté devant la chambre d’accusation, que le décret d’extradition soit déjà intervenu ou non.

La procédure est généralement publique sauf si le parquet ou le comparant en décident autrement et elle est oral et contradictoire. Ces règles encadrant la détention du fugitif reflètent le souci de protéger la liberté individuelle face au risque d’arbitraire des Etats dans leur lutte contre la criminalité internationale.

L’examen de la demande d’extradition

Nous analyserons comment cette étape implique l’intervention des autorités judiciaires et comment elles évaluent la demande en fonction des critères légaux et des considérations juridiques(a). Nous examinerons également comment cette phase garantit le respect des droits fondamentaux du fugitif. Ensuite, nous nous tournerons vers la phase administrative de l’examen de la demande.

Cette étape mettra en lumière le rôle des instances administratives dans le processus d’extradition(b).

La phase judicaire de l’examen

La loi du 10 mars 1927 a remplacé l’arbitraire gouvernemental et les pratiques administratives par un contrôle et une procédure judiciaire visant à offrir de nouvelles garanties aux personnes concernées. Selon cette loi, dans les 24heures suivant l’arrestation d’une personne recherchée, le procureur du Faso ou un membre du tribunal compétent procédé à un interrogatoire d’identité de l’intéressé, dont un procès-verbal est dressé. La personne arrêtée est ensuite transférée sans délai à la maison d arrête du chef-lieu de la cour d’appel, dans le ressort de laquelle elle a été arrêtée.

Dans le 24 heures suivant la réception des pièces, le procureur général ou un membre de son parquet doit informer l’intéressé du mandat d’arrêt et procéder à son interrogation dont un procès-verbal est établi l’affaire est ensuite renvoyée à la chambre d’accusation, avec tous les documents pertinents, et la personne visée par l’extradition doit comparaitre devant la cour dans un délai maximum de 8 jours supplémentaires par le ministère public ou le comparant avant les. La chambre d’accusation compétente doit être celle du lieu de détention au moment de la transmission de la demande d’extradition au ministère de la justice, sinon, cela entrainerait des irrégularités de procédure. Lors de sa comparution, la personne recherchée a deux options : soit renoncer au bénéfice de la loi et consentir formellement à son extradition, auquel cas la cour prend acte de cette déclaration et envoie sans délai une copie de la décision au ministre de la justice, soit refuser de donner son consentement, entrainant alors l’application de la loi de 1927.

Si la personne ne consent pas à son extradition, la chambre d’accusation rend un avis définitif et motivé sur la demande d’extradition, sans possibilité d’appel ; sauf en cas d’erreurs évidentes. Si la chambre d’accusation manque de certaines informations pour prendre une décision, elle peut demander des informations complémentaires à l’Etat requérant conformément à la convention d’Abuja.bien que la décision de la chambre d’accusation ait généralement rendue sans recours, les tribunaux criminels français ont accepté, dans des cas spécifiques comme l’affaire Dore du 17 mai 1984, des recours en vue de protéger le droit de la personne recherchée.

Dans cette affaire, la cour de cassation a annulé un avis favorable car elle n’observait pas les conditions procédurales essentielles, telles que l’absence du rapport d’un conseiller ou l’absence de possibilité pour le défendeur ou son conseil de s’exprimer après les arguments du parquet. Une foi la phase judicaire terminée, commence la phase administrative de l’examen.

La phase administrative de l’examen

Une fois la procédure judicaire achevée, le dossier est transmis au ministre de la justice dans un délai de huit jours après l’expiration des délais prévus à l’article 14. La suite de la procédure dépend de l’avis rendu par la chambre d’accusation. Si l’avis est défavorable selon la loi de 1927, l’extradition ne peut être accord.

Et la personne réclamée doit être libérée sans possibilité de nouvelle demande d’extradition pour les mêmes faits.

En cas d’avis favorable, le gouvernement a le choix de décider ou non d’extrader la personne réclamée, en prenant en compte des considération politiques et diplomatiques, mais en respectant les conditions et règles de la convention d’Abuja de 2001. Toutefois, cette convention, offre à l’Etat requis certaines possibilités de refuser l’extradition, notamment en cas de nouvel élément survenu entre temps. Si l’Etat burkinabé est favorable à l’extradition, le ministre de la justice propose, si nécessaire, un décret autorisant l’extradition, qui peut également faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir selon le conseil d’Etat français.

En cas de pluralité de demandes d’extradition pour une même infraction ou des infraction différentes, la loi de 1927 et la convention d’Abuja fournissent des critères pour aider l’Etat requis à prendre des décisions, notamment en privilégiant l’Etat contre les intérêts duquel l’infraction était dirigée ou celui l’infraction était dirigée ou celui sur le territoire duquel elle a été commise.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
L’entraide judiciaire en matière d’extradition en Afrique de l’ouest
Université 🏫: Université aube nouvelle UFR/sciences juridiques et politiques - Domaine: sciences juridiques et politiques
Auteur·trice·s 🎓:

M. ABOUBACAR NOMAO Abdoul Fataou
Année de soutenance 📅: Mémoire de synthèse en vue de l’obtention de la licence - Option: droit public - Août 2023
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