Trafic de stupéfiants et logistique classique : similarités

Les similarités dans les méthodes du trafic de stupéfiants avec les

marchés légaux

Pour répondre à la question de recherche : Quelles sont les similarités avec le monde de la logistique classiques et les logiques d’entreprises ?

Plusieurs similarités ont découlé de l’étude du trafic de stupéfiants sur la distribution et le dernier kilomètre.

Plusieurs similarités ont été trouvées entre le trafic de stupéfiants sur la distribution et le dernier kilomètre et le monde de la logistique classique.

Dans un premier temps, avant d’évoquer les similarités dans l’organisation des flux et leurs logistiques, du transport et de la vente, il faut noter que le marché des drogues présente de similarités avec les marchés légaux dans les logiques structurelles, que ce soit hiérarchique ou en rapport aux organisations des « contrats », ou encore des postes.

Les similarités hiérarchiques sont présentes bien que le réseau soit organisé en grappes (Système de flux n°9), des fonctions supérieures viennent gérer le restes des fonctions supports ou des dealers, il faut comme dans une entreprise classique, des personnes ave des fonctions de pilotage (gros, chef de réseaux), des personnes avec des fonctions managériales (chef de terrain, semi-gros, dealer) et des personnes avec des fonctions opérationnelles (dealer mobile, charbonneur, choufs, sécurité, racoleurs…).

Les fonctions ne sont cependant pas aussi fixes que dans une entreprise, les rôles s’interchangent pour les fonctions avec le moins de responsabilité, ainsi, une personne ayant des tâches de sécurité peut également être chouf et un chauffeur peut être dealer.

Les contrats dans le monde des stupéfiants sont informels, mais existants, il est compliqué de « raccrocher », il y a un réel contrat informel établi entre les acteurs, tout comme dans les entreprises, rendant sensible notamment les ruptures de ces derniers.

Le contrat en lui-même, comme pour une entreprise, peut-être à temps partiel ou temps plein, ainsi, certains acteurs ne sont pas à pleine activité dans le trafic de stupéfiants et peuvent s’en servir comme complément de revenu (Campbell et Hansen, 2012, p. 484).

Les similarités dans l’organisation des flux commencent par les aspects de conditionnement.

Ainsi, pour des produits classiques comme du shampoing, il y a plusieurs types de conditionnement en fonction des étapes et des quantités détaillée, allant des matières premières, à l’unité consommateur et passant par plusieurs conditionnements intermédiaires.

Du shampoing est dans un premier temps conçu à base de matières premières, en quantité importante, et ensuite mis en bouteille et transporté dans des cartons, sur des palettes.

Une fois le chargement arrivé à une plateforme d’éclatement, certaines palettes irons pour des magasins, d’autres pour des grossistes et d’autres acheteurs.

Les produits seront donc éclatés, vers des magasins et les cartons serviront donc à la mise en rayon de l’unité consommateur : la bouteille de shampoing, qui sera achetée et utilisée.

La même chose peut être établie pour la résine de cannabis, dans un premier temps produite en grosse quantité, puis mise en valise marocaine, acheminée jusqu’à des hubs régionaux et éclaté vers plusieurs points de ventes en plaquettes, qui serait détaillée en barrettes en tant qu’unité consommateur pour être achetée et consommée.

Les conditionnements changeant donc par étape, quantité et type de transport.

Le monde du transport et du commerce international présente également des points communs avec le trafic de stupéfiants, notamment la notion d’INCOTERMS (International Commercial Terms) utilisé dans la logistique internationale, permettant de définir à partir de quel point dans la supply chain il y a une transmission de risque, de coûts de transports et de responsabilité.

Incoterms, Madeleine Nguyen: Incoterm 2020, 2020.

Figure 7 : Incoterms, Madeleine Nguyen: Incoterm 2020, 2020.

Le transport de stupéfiants est soumis aux incoterms, indirectement lorsque les stupéfiants sont dissimulés dans des cargos de produits achetés FOB (Free on Board) Le Havre par une entreprise et directement mais inconsciemment.

On retrouve la notion de transmission de risque et de responsabilité lors d’un achat de stupéfiant.

Lors d’une livraison à domicile par un dealer mobile, le client achète alors la drogue DDP, à l’inverse si un client décide d’aller chercher sa drogue sur un four ou pour aller encore plus loin directement au lieu de production, il achètera alors EXW (sortie usine).

Il en est de même pour les transferts entre hubs et points de vente, un vendeur de région parisienne peut vendre sa drogue à un grossiste de Rouen EXW ou bien DDP, c’est-à-dire qu’il gérera lui-même ou non le transport et donc prendra en charge les coûts, la responsabilité et les risques.

Pour les vendeurs à l’international, qui vendent par exemple entre La Línea de la Concepción et Rouen, ils peuvent vendre CPT, c’est-à-dire ils gèrent le transport jusqu’à la région parisienne et ensuite c’est la responsabilité de l’acheteur Rouennais d’aller chercher son produit et de faire le post-acheminement jusqu’à son terrain de vente.

Il y a de réelles logiques entrepreneuriales, suivant des codes du transport international de marchandises mais de manière indirecte et non-officielle, aucun dealer n’a jamais proposé la vente DDP à un client sur Snapchat mais indirectement, en vue des transmissions de responsabilités, il s’agit bien d’une vente DDP.

Suivant les similarités dans le transport, les similarités dans les gestions des commandes, des organisations de livraisons et de suivi des stocks et de juste à temps sont également partagée entre le monde des drogues et les entreprises classiques.

Pour les gestions de commandes, un suivi des commandes de clients est réalisé , permettant d’avoir une idée des livraisons à venir et donc de les organiser en conséquence, « tu vas faire ta petite tournée du laitier en campagne la » (Entretien Cio, février 2022) comme indiqué précédemment en suivant plusieurs techniques en fonction du profil du dealer (faible quantité et plus d’aller-retours).

Les commandes clients reçues et les tournées de livraisons organisées (en prenant compte des risques en fonction des localisations de livraisons), les stocks sont alors ré-évalués après les livraisons.

Les stocks (nourrices) étant sensibles, ils sont le plus souvent éclatés en plusieurs petites quantités dans plusieurs lieux, une gestion de ces derniers est donc nécessaire et une estimation des niveaux de stock pour faire face aux demandes clients est importante.

Ainsi, le niveau de stock est suivi en lien avec les commandes clients pour anticiper le flux de produits qui devra être acheté pour garder un stock de sécurité (un stock minimal pour éviter les ruptures et donc le mécontentement des clients et de leur permettre de trouver d’autres sources pour le même produit).

Les mêmes logiques existent dans les entreprises de la grande distribution par exemple, où un produit est commandé en fonction des niveaux de stocks et des demandes clients, on sait qu’un produit x sera plus demandé et donc que le stock similaire a un produit y moins demandé ne sera pas suffisant, on adapte donc le stock (Stage de Coordinateur Transport Europe chez Lactalis, Laval 2021).

Une autre notion pour éviter le stock (et éviter un risque important ) est le « juste à temps », technique visant le zéro stock pour son coût dans les entreprises classiques (automobile notamment) et donc pour son risque dans le trafic de stupéfiants.

Un dealer mobile va pouvoir lors de chaque livraison, aller s’approvisionner dans un four pour aller livrer ses clients finaux avec une tournée de plusieurs clients il n’a donc aucunes nourrices, une quantité de produit limitée sur lui mais réalise moins de bénéfices car il ne peut pas acheter en quantité importante et donc bénéficier de remises.

Ces similarités dans la vente font découler également des similarités dans le cadre autour de la vente de produits avec le marketing, la publicité ainsi que les crédits et avances sur factures, paiement comptant ou 60 jours factures dans les entreprises.

En effet, il y a comme décris avec les fonctions supports des acteurs dédiés aux activités de marketing, de promotion des produits (sur les réseaux sociaux avec une présentation de l’offre des produits sur Snapchat par exemple), de publicité et de favoriser l’achat du produit grâce aux racoleurs et aux dealers eux-mêmes.

Pour les paiements, plusieurs modes sont possibles, premièrement le paiement comptant, réalisé en une seule fois, le plus commun et le plus arrangeant pour les vendeurs, ensuite, le paiement en plusieurs fois, envisageable pour les dealer mobiles et fixes (observation participante Rouen, Alençon, Vesoul, 2015-2020), où pour les clients réguliers, de confiance, qui peut cependant engendrer des problèmes en cas de non-paiement.

Un autre mode de paiement est le « chrome », similaire au crédit, c’est une demande de décalage du paiement par le client au vendeur, il est possible tout comme pour le paiement en plusieurs fois sous les mêmes conditions de confiance et peut mener aux mêmes problèmes.

La digitalisation permet également des modes de paiements dématérialisés, les paiements dans la distribution finale de drogues se faisant de main à main et donc en espèce.

Un type d’offre permet un paiement différent de l’espèce, c’est le cas de l’offre de stupéfiant sur le darknet et donc le recours à l’e-commerce de stupéfiants.

Tout comme dans le monde légal d’échanges de marchandises, le trafic de stupéfiants à une dimension digitalisée, avec des achats possibles en ligne par cryptomonnaies sur des plateformes du darknet précédemment citées, les drogues peuvent donc être achetées par paiement en ligne et sans espèces .

Tous ces éléments sont donc des points communs entre le trafic de stupéfiants et les organisations classiques d’entreprises et permettent de répondre à la question de recherche sur les similarités avec le monde de la logistique classique et des logiques d’entreprises.

Les éléments précédemment évoqués sur les méthodes et techniques de conditionnement, les fonctions supports, l’organisation technique et l’organisation physique du trafic, les différents types de canaux de ventes permettent de répondre aux questions d’organisation de la distribution et du dernier kilomètre pour les stupéfiants ainsi que son fonctionnement, ses canaux et méthodes empruntées.

Il y a donc des similarités dans les structures d’entreprises, avec des hiérarchies respectées dans le monde des stupéfiants. Des similarités dans les contrats et leur importance qui lie les acteurs.

Les conditionnements qui s’adaptent à chaque étape sont également des points communs entre le trafic de drogues et le transport de marchandises conventionnel.

Les termes de ventes (INCOTERMS) sont également (même si inexistant pour le trafic) une similarité inconsciente pour le transfert de risque sur la chaîne logistique. L’organisation logistique pour les stupéfiants présente des similarités avec les entreprises de grande distribution par exemple sur les logiques de commandes, de gestion de la demande, de juste à temps et de prévision.

Enfin, le dernier aspect de similarité est la digitalisation des opérations de ventes, avec des interfaces en ligne, connectées avec des modes de paiements dématérialisés par le biais du Darknet.

La distribution et le dernier kilomètre s’organisent face aux différentes répressions par des méthodes de transport incluant la dissimulation à plusieurs échelles, des véhicules au corp humain et le soudoiement d’acteurs clés, la multiplicité des acteurs et des fonctions support venant apporter une réduction des risques face aux méthodes restrictives.

Les canaux empruntés pour la distribution peuvent être physiques ou non, par le biais de fours, dealer mobiles ou fixes, en événements particuliers, en soirée et en ligne via l’utilisation du darknet.

Une dernière question cependant n’a pas encore été répondue et c’est celle des solutions alternatives qui sont ou qui pourraient être proposées sur le trafic de stupéfiants.

Pour illustrer ces méthodes, les concrétisés et les schématisées une étude de cas territorialisée a été réalisée sur la livraison et le dernier kilomètre des stupéfiants au travers de l’agglomération de Rouen.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La logistique des stupéfiants : Zoom sur la distribution finale et le dernier kilomètre
Université 🏫: Sorbonne Université - Master TLTE
Auteur·trice·s 🎓:
Julien Magana

Julien Magana
Année de soutenance 📅: Travail de mémoire de Master (Transports, Logistiques, Territoires & Environnements) - Jun 2034
Student in second year of Master GAED specialized in Transport Logistics Territories and Environment . searching for an intersting PhD program that would meet my mindset and curiosity
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