Le prix de transfert et l’administration fiscale camerounaise

Chapitre 2 : Les perspectives pour une fiscalisation plus efficiente et pratique plus régulière des prix de transfert au Cameroun

Afin de rendre plus efficiente et efficace la fiscalisation des prix de transfert ainsi que sa pratique régulière par les entreprises concernées au Cameroun, compte tenu des difficultés auxquelles elles sont confrontés lors du contrôle, affectant non seulement l’administration fiscale camerounaise.

Mais aussi les entreprises pratiquant lesdits prix de transfert, il nous a paru judicieux de proposer des perspectives pour une fiscalisation plus efficiente des prix de transfert à l’administration fiscale camerounaise ( Section 1 ) et aux entreprises les pratiquant des perspectives pour une pratique plus régulière des prix de transfert ( Section 2 ).

Section 1 : Les perspectives pour une fiscalisation plus efficiente des prix de transfert pour l’administration fiscale camerounaise

Dans le cadre de la loi de finances 2020, le gouvernement camerounais a décidé de renforcer ses dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale internationale.

A cet effet, il a renforcé spécifiquement ses dispositifs de lutte contre le transfert illicite de bénéfices ( Paragraphe 1 ) en plus de ces mesures prises par le gouvernement, nous lui proposons d’autres mesures qu’il pourrait appliquer pour lutter également contre l’érosion de la base d’imposition et transfert illicite de bénéfices ( Paragraphe 2 ).

Paragraphe 1 : Renforcement des dispositifs législatifs de lutte contre l’évasion fiscale générée par les prix de transfert par le gouvernement camerounais.

L’administration fiscale camerounaise dans le but de lutter contre cette évasion fiscale, devrait proposer la modification de certaines articles du Code Général des Impôts (CGI) et l’ajout de nouvelles dispositions renforçant les dispositifs législatifs des obligations (A) et celui des sanctions (B)

A : Le renforcement législatif des obligations

L’adhésion du Cameroun au modèle de la Convention ONU-OCDE sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale en 2017 marque en effet un nouveau départ pour l’administration fiscale camerounaise.

En effet cette adhésion vient renforcer le dispositif de lutte contre le transfert illicite de bénéfices lié à la mauvaise pratique des prix de transfert sur son territoire par les entreprises associées ou multinationales ou d’elle même.

Cette convention permet au Cameroun d’améliorer ses capacités de collecte des informations fiscales, spécialement en ce qui concerne les filiales camerounaises des multinationales dont les sociétés mères sont pour la plupart situées dans des juridictions fiscales déjà parties à la convention.

Le législateur fiscal camerounais a en effet intégré dans ses dispositifs de lutte contre l’évasion fiscale et la fraude les normes internationales proposées par l’OCDE non seulement à ces Etats membres, mais aussi à des Etats non membres.

Cette intégration vise à renforcer le régime des obligations en matière de prix de transfert .

En effet, le législateur fiscal camerounais au niveau de l’obligation déclarative, à procédé à la suppression de l’article 18-3 du CGI 2018 qui exigeait aux entreprises relevant de la DGE une documentation justifiant la politique des prix de transfert et un relevé de participation qu’elles détiennent dans d’autres sociétés sur un imprimé fourni par l’administration.

Il l’a reformulé dans l’article 18 ter du CGI 2020 ou il exige de ces entreprises qu’elles devront fournir en plus de la documentation justifiant les prix de transfert, une déclaration annuelle sur les prix de transfert au plus tard le 15 mars comme prévu dans l’article 18-1 du CGI 2020. C’est dans ce sens qu’il a reformulé l’obligation déclarative en matière de prix de transfert.

Le législateur fiscale camerounais dans ses dispositions de 2018, ne déterminait les bénéfices indirectement transférés par comparaison à ceux réalisés par les entreprises indépendantes.

Dans ces nouvelles dispositions, il les détermine par comparaison a ceux réalisés par les entreprises indépendantes comme prévu à l’article 19-1 du CGI 2020. Et par conséquent, rend plus succinct le PPC dans ses nouvelles dispositions.

De manière générale, le législateur fiscale camerounais dans ses nouvelles dispositions, s’est référé aux normes internationales OCDE pour comparer en effet toute transaction, méthodes utilisées au principe de pleine concurrence comme l’a prévu l’OCDE dans le but de lutter contre l’évasion fiscale internationale des entreprises multinationales, tirant son fondement de l’article L19 bis du CGI 2020; c’est-à-dire exigé aux entreprises lors de la vérification de leur comptabilité, de fournir une documentation justifiant la politique des prix de transfert conformément aux standards internationaux comme prévu par l’OCDE.

Il a également supprimé l’exigence de la preuve en cas de transfert de bénéfices. Il a également prorogé le délai de contrôle des prix de transfert de 6 (Article L40 du CGI 2019) à 9 mois comme prévu à l’article L40 du CGI 2020

B : Renforcement du régime des sanctions

Le législateur fiscale camerounais dans ses dispositions, afin de lutter en effet contre le transfert indirect de bénéfices engendrant de pertes fiscales sèches dans les recettes de son administration fiscale, à renforcé en effet des sanctions en cas de contrôle la comptabilité par les agents fiscaux.

Conformément aux dispositions de l’article L19 du LPF, chaque entreprise avant la vérification de sa comptabilité, est tenue de présenter une documentation justifiant sa politique de prix de transfert, au plus tard le 15 mars de l’exercice en cours.

Si cette entreprise ne s’exécute ou ne le fait correctement à la date du début de la vérification de la comptabilité, elle écopera d’une mise en demeure de 15 jours francs.

Cette mise en demeure prévient l’entreprise qu’elle doit présenter cette documentation et si après le délai prévu, il y’a toujours absence de documentation, alors l’entreprise écopera d’une amende de 5% du montant de la transaction, et le montant de l’amende ne peut être inférieur à 50.000.000 FCFA.

Le législateur camerounais à constaté en effet lors de l’accord des prêts par les entreprises mères situées à l’étranger aux entreprises sous contrôle ou ayant un lien de dépendance situées au Cameroun, que les entreprises situées au Cameroun sous contrôle consentent avec les entreprises mères situées à l’étranger à fixer des intérêts pour ces prêts anormaux, pouvant être soit très élevés soit moins élevés dans le but d’obtenir soit un retour sur investissement soit un accroissement de ses capitaux.

Ces intérêts anormaux augmentent en effet les déductions forfaitaires des charges financières soumises aux prix de transfert dans l’administration.

Et dans le but de limiter cela, le législateur fiscal camerounais dans ses nouvelles dispositions notamment l’article 7 A 1 d du CGI 2020, a annulé les déductions forfaitaires des charges soumises aux prix de transfert tout en baissant le taux de déductibilité des frais généraux de 5% à 2,5% du bénéfice imposable.

Le législateur fiscal camerounais à également étend la limitation des frais d’assistance technique de 1% à 2,5%, et ceux d’études relative au montage d’usine de 5% à 7%.

La direction générale des impôts s’est également engagée à collaborer avec les organisations et institutions de toute nature dans le cadre de la mobilisation optimale de recettes fiscales et son dispositif de recherche et d’informations.

Ces institutions internes sont entre autre la direction générale des douanes avec qui elle collabore dans le cadre des performances de mobilisation des ressources internes à travers la lutte contre toute forme de fraude douanière et fiscale; avec également la direction générale du budget et du trésor avec qui elles viseront à optimiser la collecte des impôts et taxes sur l’exécution du budget de l’Etat et promouvoir l’échange d’informations entre lesdites administrations.

Paragraphe 2 : Autres mesures de lutte contre l’évasion fiscale internationale

Les agents de l’administration fiscale camerounaise lors du contrôle de l’anormalité des prix de transfert, font quelques fois à des difficultés émanant non seulement de l’administration, mais aussi des entreprises, leur empêchant de réaliser un excellent contrôle.

Pour combler ces failles, nous leur proposons en effet de concevoir des règles efficaces concernant les entreprises étrangères contrôlées et autres mesures (A), également de mettre sur pieds une taxation unitaire des entreprises multinationales (B).

A : Conception des règles efficaces concernant les entreprises étrangères contrôlées et autres

Comme mesures de lutte contre l’évasion fiscale internationale, nous proposons en effet plusieurs mesures au gouvernement camerounais, entre autres :

  • La conception des règles efficaces concernant les sociétés étrangères contrôlées. Les règles de ce type visent en effet à atténuer le risque de transfert de bénéfices vers les filiales étrangères dans des scénarios précis en imposant ces bénéfices au niveau de la société mère, tout en ayant sa quote-part de ces bénéfices.

En principe, ces règles s’appliquent dans les cas où la filiale étrangère n’est pas soumise à un régime d’imposition identique à celui qui s’applique dans la juridiction de la société mère.

Les règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées constituent en effet une réponse au risque d’érosion de la base d’imposition des juridictions de résidence de la société mère.

  • Nous proposons comme autre mesure au gouvernement camerounais l’établissement de sa propre liste noire mondiale des paradis fiscaux, fondées sur les critères objectifs et exhaustifs, et prendre des mesures y compris des sanctions pour éviter le recours aux paradis fiscaux.

B : Mise sur pieds de la taxation unitaire des entreprises multinationales

Les entreprises multinationales de par l’influence qu’elles exercent sur les Etats en développement, abusent quelques fois de leur droit déjà avantageux, pour en effet effectuer des pratiques illicites dans le but de transférer les bénéfices générés par ces pratiques vers des paradis fiscaux ou vers leurs propres Etats, impactant négativement sur l’économie de ces Etats en développement qui sont presque précaires.

Afin de limiter cela, nous proposons à l’administration fiscale camerounaise d’effectuer en effet une taxation unitaire sur ces entreprises multinationales76.

76 A propos de taxation unitaire des entreprises multinationales, voir OCDE (2015), Opinion des universitaires sur « l’imposition unitaire » et les formules de répartition, Autres méthodes de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices et des flux financiers illicites qui en résultent- Rapport final 2015, Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris. dx.doi.org/10.1787/9789264248489-fr

Cette mesure vise en effet à taxer les entreprises multinationales dans les pays où elles réalisent leurs activités génératrices de bénéfices et taxer leur bénéfice global.

Pour y arriver l’administration fiscale camerounaise devrait en outre :

  • Considérer chaque entreprise multinationale non pas comme une somme d’entités juridiques séparées et n’ayant aucun lien avec leurs filiales mais comme une entité unique
  • Mettre fin au secret fiscale des entreprises multinationales sur leurs activités
  • Repartir le bénéfice réalisé dans les pays ou ces entreprises multinationales exercent leurs activités afin de déterminer le montant d’impôt sur les sociétés à payer dans chaque pays.

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