Le phénomène des communautés et des sites Web contestataires

2) Le phénomène des communautés et des sites Web contestataires
a) Les communautés
Pour parler de communauté, il faut retrouver certains éléments24 :
La présence d’échanges réels
Pour créer une dimension communautaire, il doit y voir des échanges entre les membres. Ces échanges peuvent être verbaux, écrits, visuels…

21 Voir p 64
22 Communicator, DUNOD, 2000 , p 48
23 D. Heiderich, Le rôle d’Internet dans le partage des savoirs en situation de crise, www.communication-crise.com, 2003
24 La dimension et le concept communautaire, www.abc-netmarketing.com, 27 décembre 2002

La création de valeur pour les membres
La création de valeur peut se traduire par l’échange de conseils, d’informations, mais également par le simple fait de « rompre » une situation d’isolement. Internet est devenu une tribune, où chacun peut se faire entendre. C’est aujourd’hui le moyen le plus accessible pour prendre la parole, alors qu’elle nous est rarement donnée dans les médias classiques.
Le sentiment d’appartenance
C’est un des éléments permettant d’affirmer que le groupe possède une dimension communautaire. Ce sentiment d’appartenance se traduit par une reconnaissance mutuelle entres les membres de la communauté, et le sentiment de partager des valeurs communes.
L’apparition de leaders
Comme tout phénomène de groupe, le développement de communauté peut s’accompagner de leaders ou d’experts, reconnus plus ou moins tacitement comme tels par les membres.
Le leader doit avoir une audience, et doit également être crédible. C’est un visionnaire, et son message est simple et intelligible. Il est capable de mobiliser et de fédérer autour de lui.
Par rapport aux crises, on peut mettre en avant 3 types de communautés :
* celles qui sont liés à un sujet, (par ex les fournisseurs d’accès à Internet) et dans lesquelles des critiques sont émises sur un opérateur,
* celles qui sont issues d’une crise,
* celles qui sont des lieux de contestation permanente.
Il est possible de pénétrer dans ces communautés, via le marketing viral.
Le marketing viral est un mode de diffusion d’informations commerciales selon un processus proche de celui des rumeurs : il est basé sur le bouche à oreille. Mais il est un art délicat à manier. Il faut faire preuve de professionnalisme et prendre beaucoup de précautions pour s’aventurer dans cette voie.
J’ai rencontré M. Pierre-Samuel Guedj, de l’agence Burson-Marsteller, et à cette occasion, il m’a expliqué que s’introduire « masqué » dans les forums pour discuter et convaincre les membres d’une communauté n’était pas la meilleure façon de gérer une crise. Au contraire, avancer à visage découvert, et donner une version factuelle est plus honnête, et permet d’accorder une plus grande crédibilité à la démarche de l’entreprise. Ne jamais mentir est la meilleure façon d’inspirer confiance.
Les individus peuvent faire partie de plusieurs communautés :
– Celle de l’opérateur (exemple : AOL, Wanadoo…),
– Des loisirs,
– De l’éducation,
– De la bourse etc.
Souvent, les mêmes personnes se retrouvent sur les mêmes thématiques de forums. Toutefois, selon Bernard Benhamou25, « le risque est de voir se créer sur Internet des îlots fragmentés et cloisonnés, imperméables aux idées qui ne leur sont pas familières ». Il y a donc un risque plus ou moins fort de radicalisation.
Ces communautés en ligne sont donc potentiellement des sources de crises. Si un groupe décide de s’attaquer à une entreprise, les effets peuvent se faire ressentir immédiatement. Et peuvent être lourds de conséquences.
A l’inverse, il est possible d’utiliser certaines catégories d’internautes pour influencer l’opinion publique. Il s’agit des E-fluentials26. Une étude réalisée par l’agence Burson- Marsteller a permis d’identifier une catégorie d’internautes, dont le champ d’influence sur leur environnement est beaucoup plus important que la plupart des autres utilisateurs.
A titre d’exemple, un E-fluentials sur deux transmettra à son entourage une information sur un sujet d’actualité, alors que seulement un internaute « classique » sur quatre le fera. Un E- fluentials parlera d’une « expérience positive » à onze personnes, et d’une « expérience négative » à dix-sept personnes.
Il est donc important de comprendre comment fonctionnent les communautés, les leaders d’opinions pour, non seulement cibler les messages envers chacune de ces « tribus », mais également améliorer la communication et l’image des entreprises en période de crise.

25 D. Heiderich, Internet et la communication de crise, une première approche, www.communication-crise.com, 2003
26 www.efluentials.com, enquête réalisée par l’agence Burson-Marsteller

Les mouvements sociaux de toute nature, en particulier la défense de l’environnement, d’une part, et d’autre part les idéologies d’extrême droite, (comme le nazisme, le racisme) ont profité de la flexibilité du réseau pour diffuser leurs idées et tisser des liens à l’échelle nationale et planétaire. L’univers social d’Internet est aussi divers et contradictoire que la société.
Internet est donc une nouvelle forme de liberté d’expression, et, comme le précise Manuel Castells, Internet « permet une mise en réseau de chacun par décision autonome pour s’organiser, agir ensemble et produire du sens ».27
b) Les mouvements contestataires
Les mouvements sociaux du XXIème siècle qui visent à transformer les valeurs et les institutions de la société se manifestent sur Internet. Le mouvement ouvrier se connecte, s’organise et se mobilise sur Internet. Et beaucoup d’autres en font autant : le mouvement des femmes, les mouvements identitaires, religieux, les causes politiques, les défenseurs de projets culturels etc.
Le cyberespace est devenu une « agora électronique planétaire », où toute l’insatisfaction humaine explose en une véritable cacophonie.
Les sites «ANTI-quelquechose » poussent comme des champignons et existent dans pratiquement tous les domaines :
Anti OGM (www.infogm.org)
Anti diesel (www.webzinemaker.com/antidiesel)
Anti Nike (www.caa.org.au/campaigns/nike/, www.saigon.com/nike)
Anti Mc Donald (www.mcspotlight.org)
Anti publicités (www.antipub.net)
Anti Total (www.members.lycos.fr/antitotal)
Anti-total en Birmanie (www.birmanie.net)
Anti EDF (http://electricitedeforce.com)
Anti tout (www.antiyahoo.fr.fm)
Il ne faut pas oublier les anti nucléaires, les anti RATP, les sites d’appels au boycott, les sites de détournements de logos…
Internet possède l’immense capacité de fédérer des centaines voire des milliers de personnes jusqu’à l’international, autour d’un thème. Sur le site de l’ONG d’ATTAC, quelques lignes apparaissent dès les premières pages, afin d’expliquer leur mode de fonctionnement : « il se constitue en réseau, sans structure » hiérarchique» ni «centre» géographique. Pluraliste, il s’enrichit de la diversité de ses composantes et favorise l’action commune, sans limiter d’aucune façon la liberté d’intervention de chacun. Il vise à renforcer, à relier et à coordonner sur le plan international l’intervention de tous les partenaires qui se reconnaissent dans sa plate-forme ».28
Les initiatives citoyennes peuvent faire beaucoup de dégâts aux entreprises incriminées : un site « radiophare.net » a été mis en ligne par l’association Radiophare deux jours après la catastrophe de l’Erika en 1999. Ce site incitait la population à se mobiliser. Quelques jours ont suffi pour que Total, perde le contrôle, et la « bataille du Web », face à ces cyberactivistes.
Didier Heiderich donne dans une de ses publications, des informations supplémentaires sur ce phénomène29 : « Subitement, les entreprises avaient découvert qu’une manifestation spontanée et citoyenne pouvait rapidement dépasser ses frontières géographiques et utiliser Internet lors d’une crise majeure. Internet est de ce point de vue radicalement différent des autres médias : son interactivité incite à l’action plutôt qu’à la passivité. Contrairement au téléspectateur, l’internaute ne se contente pas de recevoir, il participe pleinement ».
Cette nouvelle forme de contestation s’est retrouvée ultérieurement avec les affaires Danone et Esso. Les marques tentèrent de sauvegarder juridiquement le droit à l’image et d’empêcher les détournements, mais vainement à ce jour.
Ces initiatives citoyennes se retrouvent également en politique : le 21 avril 2002, lors des élections présidentielles, le Front National (FN) s’est retrouvé au second tour. La France a connu une de ses plus grandes crises politiques majeures. Des milliers d’emails furent échangés spontanément avec des appels à manifester, des sites anti-FN aussitôt mis en ligne, des caricatures des dirigeants du FN etc. : la pression contre le Front National, s’est donc faite en partie grâce à Internet, et à des initiatives spontanées.
Lire le mémoire complet ==> (Internet et la communication de crise: Internet est-il un accélérateur de crise ?)
Mémoire de fin d’études
Groupe ESA-Paris – Master Communication et Marketing

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