7 clés de la digitalisation pour la performance financière des banques 

Section 2 : Digitalisation et performance financière un examen des canaux de transmission

Les discussions sur l’effet de la digitalisation sur la performance financière des banques dans les pays d’Afrique subsaharienne sont enrichissantes. En effet, l’examen des études à notre compréhension n’établit pas une relation directe entre la digitalisation et la performance financière des banques. Il est donc question dans un premier temps d’établir les différents canaux de transmissions par lesquels la digitalisation peut affecter la performance financière. Dans un second temps, de recenser les analyses empiriques qui ont testé cette relation. De ce fait, bon nombre d’auteurs se sont intéressés aux effets de ces multiples canaux. Dans cette section, l’analyse des différents canaux de transmission entre les la digitalisation et la performance financière des banques est démontré.

Présentation des canaux de transmission

La digitalisation peut affecter la performance financière des banques par plusieurs mécanismes. En effet, les textes regroupent plusieurs types de ce fait, l’analyse qui suit s’attarde sur l’examen du canal des technologies financières liées aux paiements, virements et prêts et l’inclusion financière. Ils peuvent être regroupés en canal direct et indirect.

Canal direct

Les canaux directs de transmission de la digitalisation sur la performance financière des banques sont :

Technologies liées aux paiements et virements : En Afrique subsaharienne, les technologies financières utilisés concernent notamment les paiements mobiles et les virements électroniques pour un taux de 21%, avec un investissement sur les logiciels relatifs aux services financiers de 21% et les paiements et règlements de 18% constituent les principaux domaines d’investissement.

Technologies liées aux prêts : Les technologies liées aux prêts, à l’analyse des données et à la chaîne de blocs comptent également parmi les domaines prioritaires pour certains groupes, quoique dans une moindre mesure. Les technologies financières en Afrique (comme ailleurs) n’en sont qu’à leurs premières phases de développement et les groupes bancaires n’investissent pas encore massivement dans des technologies financières liées à l’activité de prêt. L’accent est toujours mis sur la facilitation des virements et des activités d’arrière-guichet.

Néanmoins, il convient de noter que plus d’un groupe bancaire sur quatre indique concentrer ses investissements en matière de technologies financières sur des technologies relatives aux prêts, à l’analyse des données et à la chaîne de blocs. En d’autres termes, tandis que les technologies financières ne sont pas encore déployées massivement pour l’activité de prêt, un quart des groupes bancaires investit des fonds dans cette direction.

Canal indirect

L’expérience du Kenya nous apprend quelles sont les mesures à mettre en place pour réaliser une révolution numérique dans un pays. Le Kenya bénéficie toujours des avantages de son adoption précoce des services financiers numériques, qui a permis à l’inclusion financière de gagner du terrain. En outre, au Kenya, une part bien plus importante de la population se situe à moins de 5 km d’un « point d’accès à des services financiers » et le pays dispose de bien davantage de points d’accès par personne que les autres pays de la région ; en moins de dix ans, l’utilisation de l’argent mobile est passée de zéro à 75 % de la population adulte, et le secteur de l’assurance s’est développé, grâce à la classe moyenne émergente du pays.

Le succès rencontré par le Kenya dans le domaine des services numériques a été rendu possible par des cadres réglementaires évolutifs et souples, des réformes des infrastructures financières et une amélioration rapide des compétences et des capacités. Ce cercle vertueux compte quatre phases :

L’expansion du socle technologique que constitue la téléphonie mobile ;

L’introduction de comptes d’épargne virtuels par le biais de services financiers numériques de base complétés par des services bancaires virtuels ;

L’utilisation de données relatives aux transactions, à l’épargne et aux opérations financières collectées grâce aux services financiers numériques pour calculer des notes de crédit, évaluer le risque lié au microcrédit et lui appliquer une tarification ;

L’extension des services financiers numériques aux paiements transfrontaliers et aux transferts de fonds internationaux.

Pour obtenir ces résultats remarquables, les banques ont travaillé en étroite collaboration avec les entreprises de télécommunications, leur permettant même de détenir une part de marché plus importante que sur d’autres marchés émergents.

L’inclusion financière est un premier pas vers des évolutions prometteuses : des formes novatrices de soutien aux régimes de retraite et une protection sociale ciblée par les pouvoirs publics, l’expansion des systèmes de paiement régionaux au sein des blocs régionaux, l’application de mesures visant à mettre un terme au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme, et un environnement plus favorable qui permettrait à une politique monétaire prospective de succéder à des années de répression financière et de politiques réactives.

Analyse empirique de la relation entre la digitalisation et la performance financière des banques

Plusieurs recherches se sont intéressés à la relation digitalisation et performance financière. De même cet effet peut mener à plusieurs résultats. D’un autre côté on observe les résultats négatifs et d’autre part des effets positifs. Sur ce constat, cette partie recense les effets positifs et négatifs de la digitalisation sur la performance financière dans un premier temps, et dans un second temps les effets contraires.

Effet positif de la digitalisation sur la performance financière des banques

En terme de positionnement technologique : Les groupes bancaires s’intéressent toujours plus aux technologies de l’information et celles liées aux services bancaires mobiles, tout en déclarant que les principaux besoins en matière d’assistance technique (AT) concernent les technologies liées à la gestion des risques de crédit et aux prêts. En 2018, seuls 5 % des groupes bancaires jugeaient l’informatique prioritaire pour ce qui est de l’AT, contre 16 % dans la présente édition. Les technologies liées aux prêts ont accédé à un niveau de priorité plus élevé dans cette édition (16 %) par apport à l’édition 2018 de l’enquête (5 %). Ces données cadrent avec les marchés prioritaires à long terme désignés comme des domaines de croissance (financement des PME et clients particuliers), que nous avons mentionnés plus haut.

Une proportion considérable des groupes (44 %) déclare avoir terminé le déploiement des technologies de banque mobile, ce qui illustre la vitesse à laquelle cette technologie est mise en place en Afrique. En revanche, très peu de groupes bancaires en Afrique (14 %) estiment avoir achevé le déploiement des technologies financières, à savoir les technologies servant à automatiser et à améliorer les services financiers. Une bonne part des groupes s’attache toutefois, soit à mettre en place des technologies financières (42 %), soit à planifier une telle mise en place (37 %).

En suite la banque mobile : À long terme, les groupes bancaires déclarent se concentrer sur les produits et services relatifs à la banque à distance et les services bancaires mobiles. Là encore, ces résultats sont conformes à l’attention croissante accordée aux clients particuliers et aux PME, tout comme en 2018. Les services de banque à distance et les services bancaires mobiles réduisent le coût de l’intermédiation avec les petits clients et permettent de collecter les dépôts à moindre coût, tout en libérant les réseaux d’agences d’une certaine pression, ce qui leur permet de répondre aux besoins des professionnels et des travailleurs indépendants.

Certains groupes citent deux nouveaux types de produits comme des priorités stratégiques : le crédit-bail (5 %) et le crédit hypothécaire (3 %). Au vu de ces chiffres, il est raisonnable de penser que l’offre de produits des groupes bancaires africains est en train de s’élargir et d’être adaptée pour répondre à un éventail de besoins qui croît à mesure que la classe moyenne gagne en taille sur certains marchés.

En décembre 2016, Equity Bank avait transféré les deux tiers (66%) de ses transactions sur le canal mobile, contre seulement 46% un an plus tôt – une augmentation de 141%, étant donné que le total des transactions a augmenté de manière significative de 207 millions à 344 millions au cours de la même période. Pour le produit Equiloan, Equity a transféré 85% des décaissements de prêts vers les canaux digitaux, contre 75% l’année précédente.

Cela représente une augmentation annuelle de 207% des prêts décaissés dans le canal digital. Au niveau des transactions et les prêts décaissés, le canal mobile éclipse de loin les agences et les autres canaux d’Equity Bank. Les banques à travers l’Afrique peuvent considérer Equity Bank comme un exemple de la rapidité de réalisation de ces changements. D’après notre expérience, trois principaux facteurs de réussite sont à l’origine de la digitalisation de bout en bout. Le premier facteur est fondamental, mais souvent négligé : une stratégie digitale robuste et qui est une priorité du leadership de la banque. Le leadership doit être étroitement impliqué dans l’élaboration de la stratégie, puis servir de modèles et d’ambassadeurs pour la transformation.

La transformation digitale de bout en bout

La transformation digitale de bout en bout a deux objectifs principaux : une amélioration significative de l’expérience client et une réduction radicale des coûts. Pour y parvenir, les banques doivent se lancer dans une digitalisation de grande envergure des parcours clients et d’autres processus bancaires. Dans le cadre de sa transformation digitale de bout en bout, Lloyds Bank, au Royaume-Uni, s’est concentrée sur dix parcours clients, en offrant des prestations agiles, en déployant des parcours clients inter fonctionnels et en valorisant la responsabilité des product owners en matière de pertes et profits.

Lloyds a également modernisé son architecture IT pour étendre l’utilisation de micro-services et le recours au cloud. Les résultats ont été spectaculaires. Entre 2014 et 2016, le nombre de clients utilisant les applications mobiles de Lloyds est passé de cinq à huit millions.

Mutation des banques de détail

Les banques de détail africaines ont des raisons incontestables de se transformer sur le plan digital :

Premièrement, les clients bancaires africains sont parmi les utilisateurs les plus fervents des canaux mobiles et numériques au sein des régions en développement ;

Deuxièmement, un certain nombre de concurrents innovants, dont de nombreux acteurs des paiements mobiles ainsi que des banques investies de manière agressives dans le digital tels que Tyme Bank en Afrique du Sud ou Alat au Nigéria, font leur apparition et menacent de s’approprier des parts de marché ;

Troisièmement, les progrès technologiques placent la barre plus haut et présentent l’opportunité d’innover ; Ceux-ci comprennent une puissance de calcul accrue pour le traitement de données volumineuses à un prix abordable, l’émergence de l’intelligence artificielle et du machine Learning, la réduction des coûts d’automatisation à travers la robotique et la Blockchain ;

Enfin, les écosystèmes intégrés, qui ont vu le jour en Chine, sont plus à mêmes de s’intégrer dans le paysage concurrentiel africain, les banques devront développer une maturité digitale pour jouer un rôle au sein de ces écosystèmes.

Lorsque l’on analyse le rôle de la digitalisation dans le secteur bancaire, il est primordial de prendre en compte « la voix du client ».

Evolution de la rentabilité bancaire en Afrique

Au niveau mondial, le secteur bancaire est confronté à des taux de rentabilités décevants et à une croissance faible. Pendant sept années consécutives, le ROE bancaire est limité à une fourchette étroite, oscillant entre 8% et 10%, un niveau que la plupart des experts considèrent comme le coût des capitaux propres de l’industrie bancaire. Le rendement des capitaux propres (ROE) a reculé d’un point de pourcentage par rapport à 2015 en s’établissant à 8,6% en 2016. De plus, le taux de croissance du chiffre d’affaire mondial du secteur bancaire s’est établi à 3% en 2016, en régressant par rapport à la moyenne annuelle de 6% au cours des cinq années précédentes.

Le secteur bancaire africain contraste avec cette performance mondiale d’une manière saisissante. Les marchés africains présentent une forte croissance et une profitabilité presque deux fois supérieure à la moyenne mondiale. Bien que la concurrence s’intensifie et que la réglementation se durcit, la région conserve un potentiel de croissance important : la pénétration

de la banque de détail en Afrique ne représente que 38 % du PIB, soit la moitié de la moyenne mondiale des pays émergents.

Les banques africaines sont confrontées à de nombreux défis, notamment le faible niveau des revenus dans de nombreux pays, l’utilisation généralisée des liquidités dans la plupart des pays et la faible couverture des bureaux de crédit. Mais certaines banques exploitent déjà les opportunités inhérentes à ces défis, en tirant parti notamment de la couverture étendue de la téléphonie mobile en Afrique pour concevoir des offres à bas prix et adopter des modèles de distribution innovants. Grâce à ces innovations, la croissance du chiffre d’affaires de la banque de détail en Afrique pourrait s’accélérer sensiblement au cours des cinq prochaines années.

Effet négatif de la digitalisation sur la performance financière des banques

À ce jour, aucun secteur n’est à l’abri des effets de la digitalisation (Arena 2018), où le plus souvent, elle entraine de conséquences, l’intensification de la concurrence obligeant les organisations à s’arrimer, afin de pérenniser leurs activités. Alors, on peut considérer le recours à la technologie digitale comme principal facteur clé de succès des organisations relevant de facto d’une décision stratégique.

La remarquable expansion régionale des groupes bancaires d’Afrique subsaharienne s’est accompagnée d’innovations financières telles que les services bancaires mobiles, qui se sont répandus rapidement, notamment en Afrique de l’Est avec M-Pesa. Elle s’est aussi accompagnée d’une évolution de la réglementation : les autorités de réglementation de nombreux pays ont ainsi imposé aux banques un relèvement régulier des exigences minimales de fonds propres. Le meilleur exemple qu’on puisse citer à cet égard est celui du Nigeria, où les réformes du secteur bancaire ont favorisé l’expansion régionale de banques locales. Ces réformes, mises en place en 2005, prévoyaient d’augmenter plus de dix fois le minimum de capital requis pour les banques, le faisant passer de 2 milliards de NGN à 25 milliards de NGN (soit environ 190 millions d’USD).

Le respect de cette nouvelle règle a été rendu possible principalement par la réalisation de fusions-acquisitions. Les banques ainsi consolidées se sont avérées beaucoup plus efficientes et un peu plus rentables, et leur niveau de prêts non productifs a été réduit (Cook, 2011). Ces banques, devenues plus grosses et plus efficientes à la suite de la vague de consolidations qui s’est produite dans leur pays d’origine, ont ensuite développé leurs activités dans toute l’Afrique de l’Ouest.

Conclusion

L’objectif de ce chapitre était d’évaluer de manière théorique la relation entre la digitalisation et la performance financière des banques. Conformément à cet objectif, la littérature renseigne sur le fait que la digitalisation est un adjuvant de la performance financière des banques. Egalement, on recense plusieurs déterminants qui expliquent la performance financière des banques comme le retour sur investissement (ROE), la rentabilité des actifs (ROA) et le coefficient d’exploitation (CN_E).

La digitalisation n’affecte pas de manière directe la performance financière des banques. Ainsi les travaux nous montrent qu’il existe plusieurs canaux par lesquels cette relation peut s’effectuer. On peut citer le canal de la technologie financière et la technologie liée aux opérations bancaires. La littérature empirique nous montre que la digitalisation est un plus à la performance financière des banques. De ce fait, une analyse spécifique aux banques dans les pays d’Afrique subsaharienne semble alors pertinente.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Digitalisation et performance des banques dans les pays d’Afrique subsaharienne
Université 🏫: Université de Yaoundé II - Faculté des sciences économiques et de gestion - Département de mathématiques appliquées aux sciences sociales
Auteur·trice·s 🎓:
BOURDANNE SOBDIBE CHERIF

BOURDANNE SOBDIBE CHERIF
Année de soutenance 📅: Mémoire rédigé et présenté en vue de l’obtention d’un Master II Professionnel en Gouvernance Financière, Option : Métiers de la Banque - 2021-2022
Master 2 en GOUVRNANCE FINANCIERE .
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