Les 5 leçons de la loi marocaine sur les entreprises en difficulté durant la Covid-19

Université Hassan II-Casablanca Faculté des Sciences Juridiques,

Économiques et Sociales de Mohammedia

Mémoire de fin d’études pour l’obtention du Master Droit Des Affaires sous le thème
Les 5 leçons de la loi marocaine sur les entreprises en difficulté durant la Covid-19
Covid-19 et Traitement des difficultés des entreprises

Réalisé par :
Sara MAHIR

Encadré par :
Pr. Asmaa MAZOUZ

Année Universitaire :
2020/2021

Remerciements

Je tiens à exprimer ma profonde gratitude et mes sincères remerciements

A Madame le Professeur Asmaa MAZOUZ, Pour l’attention qu’elle a portée à mon travail ; Sa disponibilité et ses encouragements,

À Monsieur Mohamed ABOULHOUCINE et à tous les professeurs de la Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et Sociales de Mohammedia ,

Pour les précieuses connaissances qu’ils m’ont inculquées, Tout au long de ma vie estudiantine universitaire.

A tous ceux qui m’ont lu et conseillé.

A ma famille

Pour son soutien et son encouragement durant toute cette aventure passionnante et enrichissante

A tous mes amis ; Pour leur précieux soutien.

Sommaire

Partie 1 : L’application de la loi 73-17 à l’épreuve de la COVID-19

Chapitre1 :LesprocéduresPréventives commemesures palliatives à la défaillance

Chapitre 2 : Les procédures Curatives : La Sauvegarde ou le Redressement, quels critère de choix ?

Chapitre 3 : La Restructuration de l’entreprise en difficultés

Partie 2 : Les Limites à l’application de la Loi 73-17 à l’épreuve de la COVID-19

Chapitre 1: Limites liées aux procédures mises en place pour traiter l’entreprise en difficulté

Chapitre 2 : Limites liées aux organes de procédure :

Chapitre 3 : Limites liées à la gestion de l’entreprise

Liste des Abréviations

CAC : Commissaires aux comptes CDE : Chef d’entreprise

PV : Procès-verbal

PTC : Président du tribunal de commerce AG : Assemblée générale

SA : Société anonyme

SARL : Société à responsabilité limitée SCS : Société en commandite simple

SPP : Suspension Provisoire des Poursuites MP : Ministère Public

CRP :Commissairesauxrestructurationsetàlapréventiondes difficultés des entreprises

BO : Bulletin officiel

DOC : Dahir des Obligations et des Contrats C.COM : Code de Commerce

CVE : Comité de Veille Économique

LRAR : Lettre Recommandée avec Accusé de Réception CA : Conseil d’Administration

CS : Conseil de Surveillance

SCS : Société en Commandite Simple SNC : Société en Nom Collectif

AGE : Assemblée Générale Extraordinaire TPI : Tribunal de Première Instance

4 CPC : Code de Procédure Civile Al : Alinéa

Introduction

La crise sanitaire actuelle que nous vivons en raison de la pandémie Covid-19 à mis à l’arrêt des pans entiers de l’activité économique mondiale. Elle s’est répandue dans le monde entier comme une traînée de poudre touchant pays après pays de manière sidérante, de sorte qu’elle n’a cessé de perturber l’ensemble des acteurs à savoir : État, Organisation, Citoyens et entreprises qui sont désorientés face à l’ampleur et la brutalité de cet évènement inattendu.

D’une gravité exceptionnelle, la crise est révélatrice de divers dégâts sur le plan sanitaire, social, économique et financier affectant l’activité économique et sociale en général et celles des entreprises en particuliers.

En effet, la plupart des états ont adapté leur cadre juridique et règlementaire dans une optique de limiter les conséquences désastreuses de cette crise sur leurs économies.

C’est dans ce cadre, que le Maroc n’en fait pas l’exception, il entreprit depuis Mars 2020, plusieurs mesures législatives, règlementaires et sanitaires pour manier cette période de crise internationale.

Ainsi, le décret n°2.20.292 relatif à l’état d’urgence sanitaire et aux procédures de sa déclaration, a été publié, mardi 24 mars, au Bulletin Officiel. Il s’inscrit dans le cadre des mesures préventives accomplies pour lutter contre cette pandémie.

L’article 5 du décret prévoit que le gouvernement peut prendre, en cas de nécessité absolue, des mesures exceptionnelles urgentes à caractère économique, financier, social ou environnemental, à même de contribuer directement à faire face aux impacts négatifs de l’état d’urgence.

Toutefois l’ensemble des mesures de préventions prise par notre pays en vue de la réussite du confinement n’étaient pas sans conséquences. Assurément l’activité économique a été drastiquement impactée, le fonctionnement du marché a été chamboulé en raison de la fermeture de toutes les frontières, fermeture de plusieurs secteurs tels que les hôtels, restaurants..

Par Conséquent, le Maroc a entrepris une panoplie de mesures à la fois financières et économiques dont les principales sont :

  • Création d’un fonds spécial pour la gestion de la pandémie du Coronavirus « La Covid-19»

Ce fonds, doté d’une enveloppe de 10 milliards de dirhams, mobilisé à partir du budget général de l’État, est affecté principalement, à :

  1. La prise en charge des dépenses de mise à niveau du dispositif médical, en termes d’infrastructures adaptées et de moyens supplémentaires à acquérir, dans l’urgence, pour traiter dans de bonnes conditions les personnes qui seraient atteintes par le virus
  2. Le soutien de l’économie nationale pour faire face aux impacts induits par cette pandémie à travers les mesures qui seront proposées par le Comité de Veille Économique (CVE), en vue d’atténuer, notamment, les impacts sur le plan social.

Le décret de création du Fonds détaille l’origine des fonds, lesquels proviendront de :

  • La contribution du budget de l’État qui n’est pas encore fixée ;
  • La contribution des régions qui a été fixée à 1,5 MMDH ;
  • La contribution des entreprises et établissements publics ;
  • La contribution du secteur privé
  • L’amende de l’ANRT contre Maroc Telecom versée dans le fonds ;
  • La contribution des organisations et instances internationales. Ainsi, il est prévu que le fonds Hassan II contribue à hauteur de 1 milliards de dirhams.

Mise en place d’un Comité Veille Économique

Un Comité de Veille Économique a été mis en place au niveau du Ministère de l’Économie, des Finances et de la Réforme de l’Administration. Ce comité est chargé, d’une part, de suivre de près l’évolution de la situation économique à travers des mécanismes rigoureux de suivi et d’évaluation et, d’autre part, d’identifier les mesures appropriées en termes d’accompagnement des secteurs impactés.

A cet égard, le Comité de Veille Économique (CVE) a tenu lors de sa première réunion une discussion portant sur les premières mesures à adopter pour préserver la situation économique au Maroc.

Deux premières mesures y ont été annoncées concernant les crédits et la CNSS.

  1. Suspension du paiement des charges sociales (cotisations CNSS) ;
  2. Moratoire pour le remboursement des crédits bancaires au profit des entreprises.

A cet effet, un comité technique a été créé afin de déterminer les modalités et conditions d’octroi de ces mesures, au cas par cas.

Il est à préciser que les mesures prises par notre pays n’ont pas été d’une forte aide pour certaines entreprises marocaines qui voient leurs activités se dégrader de jour en jour et ce en raison du confinement sévère, anticipé et particulièrement long, décidé à juste titre par les autorités marocaines. Et malgré le déconfinement décidé, le rebond et la reprise des activités demeurent très faibles, notamment pour le secteur touristique.

Cependant, il n’en demeure pas moins que de nombreuses entreprises soient en difficultés et certaines d’entre elles peuvent même se trouver en état de cessation de paiement ou même dans une situation irrémédiablement compromise.

Dans ce cadre, le droit des difficultés des entreprises peut être considéré comme une thérapie anticrise permettant d’accompagner les entreprises en difficultés. Son efficacité sera évaluée en ces temps de crise, en l’occurrence la loi 73-17 relative aux difficultés de l’entreprise.

Considérées comme cellules principales, les entreprises, particulièrement les petites et moyennes, jouent un rôle crucial dans la structure économique du royaume. L’intervention du législateur est devenue nécessaire pour faire face aux difficultés de nature à menacer la continuité de ces entreprises. Et ce à travers l’instauration d’une culture de bonne gouvernance dans la gestion de l’entreprise et de la prise de mesures et de procédés efficaces qui se manifeste principalement dans la détection précoce et la prévention des difficultés de la part du chef de l’entreprise avant le recours au règlement judiciaire afin de sauver l’entreprise et assurer sa survie.

Le traitement des difficultés des entreprises est encadré par le livre V du code de commerce.

En effet , le droit des difficultés de l’entreprise peut être définit comme étant l’ensemble des règles ayant pour objet de restaurer le déséquilibre qui peut influencer négativement l’exploitation d’une entreprise, de permettre à l’entreprise de dépasser ses difficultés dans l’objectif de poursuivre ses activités, de maintenir les emplois occupés, et régler ses créanciers, d’organiser judiciairement son redressement lorsqu’elle est en situation de cessation de paiement et enfin de procéder à sa liquidation judiciaire lorsqu’il s’avère que sa situation est irrémédiablement compromise.

Cette nouvelle législation des procédures collectives – qui s’est inspirée des dispositions du droit français issues des réformes des lois du 1er mars 1984, du 25 janvier 1985 et celle du 10 juin 1994 – a marqué un grand tournant dans l’évolution de cette matière. Elle a apporté plusieurs innovations par rapport au droit traditionnel de faillite, parmi lesquelles il convient de citer : l’institution de la prévention des difficultés – l’élargissement du rôle du tribunal – l’adoucissement des sanctions – et surtout la restauration d’une procédure de redressement de l’entreprise.

L’application de cette législation a permis de relever un certain nombre de difficultés d’application inhérentes à la mise en œuvre d’une telle réforme : le nombre de règlements amiables était insignifiant, le taux d’échec des redressements judiciaires a été très important parmi les procédures ouvertes, la liquidation judiciaire était généralement la solution finale de la procédure.

En 2015, le ministère de la justice avait indiqué que neuf entreprises sur dix qui entament une procédure de redressement finissent par une liquidation judiciaire. Et depuis la réforme du droit marocain des procédures de traitement des difficultés de l’entreprise a constitué une grande priorité. Et donc l’activation rapide de la machine législative a permis à la loi 73-17, modifiant et complétant le livre V du code de commerce de voir le jour, en entrant en vigueur le 23 avril 2019.

Avant la promulgation de cette nouvelle loi, et à la lumière de la loi 15-95, l’ouverture d’une procédure de traitement des difficultés de l’entreprise était généralement la conséquence de son état de cessation de paiement ; une notion légale mais implicitement définie par la loi.

En effet, l’article 560 de l’ancien livre V du code de commerce prévoyait que : « les procédures de traitement des difficultés de l’entreprise sont applicables à tout commerçant, à tout artisan, et toute société commercial, qui n’est pas en mesure de payer à l’échéance des dettes exigibles, y compris celles qui sont nées de ses engagements conclus dans le cadre de l’accord amiable prévu à l’article 556 ci-dessus»

Cependant, la nouvelle loi n° 73-17, en introduisant un nouveau mode de règlement des difficultés de l’entreprise révolutionnant l’approche des procédures collectives, a fait diminuer le rôle de l’état de cessation de paiement. Et le tribunal n’intervient plus uniquement après la constatation de l’état de cessation de paiements pour enclencher la machine procédurale de redressement, mais il opère de manière vigoureuse, dès les premiers symptômes d’une crise sérieuse de l’entreprise dans le cadre d’un plan de sauvegarde.

Ainsi, le nouveau droit des difficultés d’entreprise qui constitue une rupture totale avec l’ancienne législation revêt une importance à la fois économique et juridique. L’évolution donc de ce droit se présente en 3 principales étapes :

La première étape concerne la phase avant le protectorat dans laquelle le droit applicable en ce domaine était le droit musulman. Et donc, toute personne dont l’actif n’arrivait pas à couvrir ses dettes était déclarée en faillite par le Cadi. De ce fait, les biens de la personne étaient séquestrés et elle était frappée d’interdictions.

La deuxième étape a été marquée par la promulgation du Dahir du 12 Août 1913 (qui entra de plain-pied avec le protectorat français), formant code de commerce qui s’est largement inspiré de la législation française de l’époque sur la faillite et la liquidation judiciaire. Ces deux procédures étaient voisines dans la mesure où une grande partie des dispositions légales étaient communes (avant de juger, il fallait chercher si la personne en difficultés était de bonne ou de mauvaise foi).

La troisième étape fut marquée par la publication du Livre V du Code de Commerce promulgué par le Dahir du 1er août 1996, et est entré en application le 04 Septembre 1997. Il a connu une modification de forme par la loi n°81.14 portant Dahir du 22 août 2014 et complétant le titre du Livre V et de l’article 546 de la loi 15.95 portant code de commerce. Ce nouveau Dahir a donné un nouvel intitulé à ce Livre V sous la dénomination : « les procédures de prévention et de traitement des difficultés de l’entreprise ». Ensuite vint le nouveau livre V (Loi 73-17 relative aux difficultés de l’entreprise)

A ce stade, il est opportun de mentionner les apports majeurs du nouveau Livre V du Code de Commerce (loi n°73.17) :

La première innovation majeure du nouveau Livre V du Code de Commerce a porté sur les dispositions générales et les définitions, afin de pouvoir lever tout équivoque ou mauvaise interprétation des textes.

9 La deuxième nouveauté de la loi réside au niveau de la prévention interne, c’est ainsi qu’on assiste à une détermination précise des causes donnant lieu à l’application des procédures de prévention et qui se manifestent dans les difficultés de nature juridique, économique,

10 financière ou sociale. Par ailleurs il a été procédé au remplacement de l’expression « délibération de la prochaine assemblée générale » par « convocation de l’assemblée générale dans le délai de 15 jours ». Ce changement a pour objectif d’assurer plus de rapidité et d’efficacité dans le traitement des difficultés.

La troisième innovation de la loi concerne la prévention externe et ce à trois niveaux :

  1. L’expression « règlement amiable » a été remplacée par la « conciliation »
  2. La confidentialité de la procédure externe
  3. Une expansion des missions du mandataire spécial.
  4. Le quatrième changement de la nouvelle loi, concerne la mise en place de la procédure de sauvegarde qui est d’inspiration américaine et qui a également été transposée dans le droit français.

La cinquième nouveauté concerne la procédure de traitement des difficultés de l’entreprise, le législateur a tenu à apporter des formulations précises de certaines notions afin d’éviter toute confusion dans les implications jurisprudentielles. C’est ainsi qu’il a définit la notion de cessation de paiement et précisé ce que l’on entend par : « les créances » et après l’ouverture des procédures ainsi que la notion de « créancier ». Par ailleurs, il a ajouté d’autres documents que le débiteur devra fournir pour prouver son état de cessation de paiement.

L’avant dernière innovation , réside dans la reconnaissance des procédures transfrontalières afin de faciliter la coopération entre les juridictions marocaines et étrangères et de renforcer la sécurité juridique. (Procédure d’exequatur)

Nous pouvons dire que le nouveau livre V est élaboré majoritairement de procédures visant à préserver la continuité de l’activité de l’entreprise, et à organiser sa restructuration.

Toutefois, cette pandémie mondiale à la tête de la crise actuelle serait une réelle épreuve pour tester l’efficacité de l’arsenal juridique en l’occurrence via la loi 73.17, adopté par le Maroc en pour aider les entreprises en difficultés, et de le renforcer aussi surtout à la lumière du droit comparé.

Ce qui nous amène à se demander :

Problématique :

La nouvelle réforme du livre 5 du code de commerce relative au traitement des difficultés des entreprises est-elle applicable en ces temps de Crise Sanitaire ? Et Quelles sont les limites de cette dernière ?

Compte tenu de la spécificité du sujet et de son ampleur, nous allons uniquement traiter le cas des entreprises marocaines qui sont en difficultés en raison de la pandémie mondiale et l’adaptation des mesures et/ ou dispositions présentées par la loi 73-17 relative aux difficultés de l’entreprise ainsi que ces limites.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Covid-19 et Traitement des difficultés des entreprises
Université 🏫: Université Hassan II-Casablanca - Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et Sociales de Mohammedia
Auteur·trice·s 🎓:
Sara MAHIR

Sara MAHIR
Année de soutenance 📅: Mémoire de fin d’études pour l’obtention du Master Droit Des Affaires sous le thème - 2020/2021
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