Le marché de drogues : le darknet et les impacts du Covid-19

Le marché de drogues : darknet, Covid-19..

Les évolutions du marché de drogues

Les différentes évolutions du trafic de stupéfiants sont les réponses à des évolutions de marché :

  • L’auto-plantation croissante, en réponse aux évolutions de consommation d’herbe de cannabis et non de résine.
  • Le darknet, pour l’achat anonyme et dématérialisé au détail ou en gros de stupéfiants.
  • La pandémie de Covid-19 et ses restrictions de mobilité qui influent sur les réseaux de trafics.

Les évolutions du marché de drogues sont dans un premier temps lié aux positions des modes de transport dans l’économie mondiale, avec « le recours croissant au fret maritime qui semble aussi avoir séduit les trafiquants de cocaïne ».

Dans un second temps, les évolutions sont technologiques, avec des « énormes profits que génère le trafic de drogue, les narcotrafiquants investissent sur des technologies de pointe dans le domaine sous-marin pour améliorer encore la sûreté du transport et augmenter les flux vers le Mexique et les ÉtatsUnis. » (Eudeline, 2015, p. 2).

Les évolutions technologiques (nouvelles machines de récolte, nouveaux systèmes d’irrigations, nouveaux systèmes d’augmentation du taux de THC dans les graines de cannabis…) engendrent des améliorations des méthodes de production , permettant d’atteindre des objectifs de productivité plus importants « the cannabis industry has changed in the past years (increased importance of high-yielding varieties/strains, development of modern production techniques ) 1» (Chouvy, 2019, p. 2).

Mais également des évolutions se situant dans la demande, avec la cocaïne qui « il y a une vingtaine d’année avait le statut d’une drogue destinée à l’élite s’est considérablement « démocratisée » touchant un large éventail de la population française de l’ouvrier au cadre en passant par le toxicomane de rue. » (Gandilhon, 2016, p. 31).

Des évolutions donc dans les consommateurs de drogues et dans les produits consommés, avec une augmentation des consommateurs de cannabis sous forme d’herbe et moins sous forme de résine, « Over the two past decades or so, the European cannabis market has undergone major developments.
The primary change was the shift towards marihuana consumption rather than resin consumption, which spurred an ever-increasing local cannabis production that is subject to industrialization processes. 2» (Weinberger et al., 2019, p. 11).

L’industrie du cannabis a changé au cours des dernières années (importance accrue des variétés/sujets à haut rendement, développement de techniques de production modernes, etc.

Au cours des deux dernières décennies environ, le marché européen du cannabis a connu des évolutions majeures.

Le principal changement a été le passage à la consommation de marihuana plutôt qu’à celle de résine, ce qui a donné lieu à une production locale de cannabis toujours plus importante, soumise à des processus d’industrialisation.

Les évolutions de consommation et le recours à l’auto-plantation

Cette évolution de consommation a engendré une augmentation de l’auto-plantation, pour éviter les marchés illégaux, « alongside this dimension, many growers express a desire to avoid the ‘criminal element of the illegal drug market.
This was frequently underlined in studies conducted in Western Europe in Denmark, Germany, France, and Finland1 (EMCDDA, 2012). » (Weinberger et al., 2019, p. 9).

Phénomène également present en France avec « depuis quelques années à un bouleversement du marché qui voit de plus en plus l’herbe de cannabis, produite sur le continent, détrôner la résine de cannabis produite au Maroc. » (Gandilhon, 2016, p. 32).

Ce fait c’est constaté avec une augmentation du nombre de saisies d’herbe de cannabis sur le territoire européen.

Carte 2 – Saisies de résine ou d’herbe de cannabis, 2016 et années plus récentes, EMCDDA Rapport Drogues Europe, 2018

Saisies de résine ou d'herbe de cannabis

Une évolution récente et liée directement à l’évolution du rapport à la technologie est l’utilisation du darknet dans le trafic de stupéfiants.

Utilisé comme plateforme d’échange et de communication, le darknet permet de mettre en relation l’offre et la demande sur une plateforme dématérialisée, permettant de se procurer des produits stupéfiants sans le « risque de la rue », « The perceived benefits include a reduction of physical danger compared to street trades, increased product quality at cheaper prices, speedy delivery, and the convenience of varied and well-presented offerings from the same source2 » (Dittus et al., 2018, p. 279).

Les évolutions par le Darknet

Le darknet vient offrir un nouveau canal logistique pour les drogues, « Traditionally, drugs have travelled along long and complicated supply chains3 [16]. However, the emergence of new trading platforms has the potential to change these relationships. » (Dittus et al., 2018, p. 277).

L’avantage des plateformes du darknet étant l’anonymat donné lors d’un achat, « Darknet markets, also called cryptomarkets, rely on anonymising technology and electronic currencies to facilitate licit and illicit transactions among participants in relative anonymity » (Dittus et al., 2018, p. 277).

Ces plateformes présentent néanmoins comme les méthodes de distribution physique classique des risques, « Similar to offline crime, participation in darknet markets incurs various forms of risk, including detection by law enforcement, loss of shipments, vendor fraud, and others4 [24]. » (Dittus et al., 2018, p. 279).

Parallèlement à cette dimension, de nombreux cultivateurs expriment le désir d’éviter l’«élément criminel» du marché des drogues illégales.

Ce point a été fréquemment souligné dans des études menées en Europe occidentale au Danemark, en Allemagne, en France et en Finlande.

Les avantages perçus comprennent la réduction du danger physique par rapport au commerce de rue, l’augmentation de la qualité des produits à des prix plus bas, la rapidité de la livraison et la commodité d’une offre variée et bien présentée provenant de la même source.

Traditionnellement, les drogues voyagent le long de chaînes d’approvisionnement longues et compliquées.

Les marchés du Darknet, également appelés cryptomarchés, s’appuient sur des technologies d’anonymisation et des monnaies électroniques pour faciliter les transactions licites et illicites entre les participants dans un anonymat relatif.

La difference du darknet est la concentration des acteurs, le trafic physique étant répartie de manière globale, le darknet est lui présent dans un nombre réduit de pays, « It is commonly found that there is high spatial concentration: a small number of the same countries are responsible for the majority of global trades, regardless of the marketplace. Top trading countries include the US, the U.K., Australia, Germany, Holland, Canada, and China » (Dittus et al., 2018, p. 279).

Le darknet présente donc un éclatement des réseaux commerciaux traditionnels , « Le recours à Internet pour le trafic des substances psychotropes s’avère à cet égard une illustration frappante de l’éclatement des réseaux commerciaux traditionnels » (Quirion, 2016, p. 6).

Un éclatement et donc un marché où « les vendeurs font face à une plus grande opportunité commerciale puisqu’il s’agit d’un marché sans contact, mais font également face à beaucoup d’incertitudes et de problématiques, » (Bergeron et al., 2021, p. 249).

Le darknet a également été saisi comme une alternative pour l’achat de stupéfiants lors de la pandémie de Covid-19, « dans les mois qui ont suivi le début de la pandémie de COVID-19, l’European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction (EMCDDA) a observé une utilisation accrue des crypto marchés , ce qui amène les chercheurs à se demander si les crypto marchés constituent un canal plus pratique pour la distribution des drogues illicites puisqu’il évite le contact physique » (Bergeron et al., 2021, p. 245).

Les cryptomonnaies et le darknet présentent un intérêt pour la commercialisation et l’achat de stupéfiants car ils sont anonymes et totalement dématérialisés.

Le darknet pourrait alors permettre un marché qui a subi le même effet lors de la pandémie que Amazon et d’autres marchés en ligne, favorisant les achats sans contacts.

Les impacts du Covid-19

Le Covid-19 a engendré de nombreux impacts sur les marchés de vente de drogues, « Le marché de la vente de drogue est impacté par la tragédie qui l’entoure (Covid-19) avec, par exemple, la hausse du prix pour s’adapter à l’offre et à la demande. » (Bergeron et al., 2021, p. 247).

Il a créé un effet de rupture sur l’offre proposée étant donné des restrictions des différents modes de transports, les drogues étant dissimulées dans ces derniers : « les éléments recueillis pour le moment portent à croire que la pandémie de COVID-19 et les mesures destinées à la contenir influent à divers degrés sur la chaîne d’approvisionnement en drogues, que ce soit à l’étape de la production, du trafic ou de la consommation ».

Que ce soit dans l’approvisionnement en précurseurs chimiques , « certains producteurs pourraient se retrouver contraints de chercher de nouveaux procédés de fabrication, les restrictions de mouvement limitant l’accès aux précurseurs et aux produits chimiques de base » (UNODOC, 2020, p.1) avec l’approvisionnement de précurseurs asiatiques, « Reductions in trade and transport are likely to have effects on illegal drug supply as precursor chemicals and other finished synthetic products are often conveyed from Asia to other parts of the world by commercial cargo and post1 (Pardo, 2018; DEA, 2019) » (Pardo, 2021, p. 3).

Dans le cas des passages frontaliers, « empêchés de passer les frontières du fait de l’interdiction de voyager, les trafiquants devront peut-être trouver de nouvelles routes et de nouvelles méthodes. » (UNODOC, 2020, p.1) ou dans le cas de trafic international par des body-packers ou mules empruntant le transport aérien de passager, « c’est dans les pays où de grandes quantités de drogues sont passées en contrebande sur des vols commerciaux que l’on devrait observer les conséquences les plus immédiates et les plus marquées de la situation actuelle. » (UNODOC, 2020, p.1), « Compte tenu des restrictions imposées presque partout au trafic aérien de passagers, l’approvisionnement en drogues par vols commerciaux pourrait être complètement désorganisé. » (UNODOC, 2020, p.3).

1La réduction des échanges et des transports aura probablement des effets sur l’offre de drogues illicites, car les précurseurs chimiques et autres produits synthétiques finis sont souvent acheminés d’Asie vers d’autres parties du monde par fret commercial et par voie postale.

Le Covid-19 peut également avoir une influence sur les consommations qui sont propres à certains contextes (soirées, rassemblements, festivals, concerts…), « les restrictions aux déplacements et aux rassemblements, ainsi que les mesures de distanciation sociale mises en place pour stopper la propagation de la COVID-19, peuvent conduire à une diminution globale de la consommation, mais elle pourrait repartir à la hausse une fois les restrictions levées.

Cela est particulièrement vrai pour les drogues qui sont principalement consommées dans les bars et les clubs ou lors de festivals de musique.

Des pénuries de certaines drogues ont déjà été signalées dans certains pays, ce qui a entraîné une augmentation des prix. » (UNODOC, 2020, p.8).

Il est également possible que la pandémie provoque des changements dans le type de substance consommée, « les pénuries d’opioïdes causées par les restrictions dues à la COVID-19 pourraient inciter les usagers à se tourner vers des substances plus facilement disponibles telles que l’alcool, les benzodiazépines ou à mélanger les opioïdes à des drogues synthétiques. » (UNODOC, 2020, p.8).

Les conséquences économiques et sociales de la pandémie pourraient faciliter l’usage nocif de drogues ou le fait de les commercialiser, « du fait de la hausse du chômage et de l’absence d’offres d’emploi, il y a de fortes chances pour que les personnes pauvres et défavorisées se tournent vers l’usage nocif de drogues, souffrent de troubles liés à l’usage de drogues et se livrent à des activités illicites liées aux drogues » (UNODOC, 2020, p.3).

Ces aspects sociaux-économiques viennent poser la question de la place des politiques restrictives face aux drogues, de leur utilité et des solutions pérennes et alternatives qui pourraient être mises en place.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La logistique des stupéfiants : Zoom sur la distribution finale et le dernier kilomètre
Université 🏫: Sorbonne Université - Master TLTE
Auteur·trice·s 🎓:
Julien Magana

Julien Magana
Année de soutenance 📅: Travail de mémoire de Master (Transports, Logistiques, Territoires & Environnements) - Jun 2027
Student in second year of Master GAED specialized in Transport Logistics Territories and Environment . searching for an intersting PhD program that would meet my mindset and curiosity
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