Construction périodique et directionnelle du verbe en Shupamem

Construction périodique et directionnelle du verbe en Shupamem

1.12 Construction périodique et directionnelle du verbe en Shupamem

Une construction périodique directionnelle du verbe (CPDV) est une suite de verbes exprimant une même action et ayant un même sujet. Comme le dit Nchare (2005) , les verbes de la construction périodique directionnelle du verbe (CPDV) ont les caractéristiques suivantes :

  • Ils expriment des actions simultanées ou directement consécutives ;
  • Ils ont un seul sujet grammatical ;
  • Ils n’ont aucun connecteur (conjonction de coordination ou de subordination) ;
  • Ils sont indiqués ou interprétés comme ayant les mêmes catégories grammaticales telles que l’aspect, la modalité temporelle ou modale, la négation, etc.

(51) a. í kàpí -pié ŋgbǒm fá.
3sg P3 prendre maïs donner
« Il avait pris le maïs et avait donné. »
b. í pí-twò mbíʃə̀ mɔ̀n.
3sg P2 -venir demander enfant
« Il était venu et avait demandé l’enfant. »

Nous constatons que les phrases (51a et b) comportent deux verbes qui ont tous le même sujet. En outre, ces deux verbes sont conjugués au même temps.

1.13 Aspects du verbe

Comrie (1976) cité par Nchare (2005 :86) définit l’aspect comme la manière selon laquelle une action est vécue par un locuteur (par exemple, terminée ou continue) .

Il s’agit en fait du point de vue sur la durée interne du procès, particulièrement de son déroulement et de ses limites. Selon Lagane et René (1997 :94) , quand on parle de l’aspect, l’action peut être présentée de deux façons :

a.Comme étant en train de se faire ; c’est l’aspect non-accompli

(52) Ali tiá – fáʔ ŋgbǒm.
Ali N AC -travailler maïs
« Ali est en train de travailler le maïs »

b.Comme étant déjà faite au moment où l’on s’exprime ; c’est l’aspect accompli

(53) Ali tə́ – fáʔ ŋgbǒm .
Ali AC- travailler maïs
« Ali a travaillé le maïs »

Nchare (2005) a parlé de trois aspects : le perfectif, l’imperfectif et l’habituel. Dans le cadre de ce travail, nous allons parler des aspects suivants : l’aspect inhérent, l’aspect perfectif, l’aspect imperfectif, l’aspect habituel et de l’aspect inchoatif.

1.13.1Aspect inhérent

L’aspect inhérent renvoie au verbe encore considéré à l’infinitif, comme le dit Nséme6.

Il s’agit généralement de l’aspect duratif :

(54) a. jín- fáʔ ŋgbǒm.
INH -travailler maïs
« Travailler le maïs. »
b. jín- twɔ́t lɛ̀.
INH-écrire lettre
« Écrire. »

Comme nous le montrent les exemples (54a et b) , l’aspect inhérent existe en Shupamem. Cet aspect est marqué par le morphème « jín » préposé au verbe. Il convient de noter que le marqueur de l’aspect inhérent est le même marqueur que celui de l’infinitif.

1.13.2Aspect perfectif

D’une manière générale, nous parlons d’aspect perfectif lorsque le procès est considéré dans sa totalité. Ici, nous n’attachons pas d’importance ni au début, ni au milieu, ni à la fin du procès.

(55) a. Njikam pê -tè – ndáp mbàllò.
Njikam P2-PERF-jouer ballon
« Njikam avait joué au ballon. »
b. Ndam pí- tè- ʒúə̀n.
Ndam P3- PERF-voir
« Ndam avait vu. »

6 Communication personnelle, (21 février 2012) .

En Shupamem, l’aspect perfectif est indiqué par le morphème « tè » comme indiquent les phrases (55a et b) ci-dessus.

Construction périodique et directionnelle du verbe en Shupamem

1.13.3Aspect imperfectif

L’aspect imperfectif s’oppose à l’aspect perfectif. Selon Nchare (2005 :87) , l’aspect imperfectif considère l’action du procès du point de vue de sa structure comme ayant un début, un milieu et une fin.

L’aspect imperfectif nous permet de présenter les actions qui sont en cour au moment de l’énonciation. En Shupamem, l’aspect imperfectif est marqué par le morphème « tiá».

(56) a. Njikam tiá – ndáp mbàllò.
Njikam IMPF -jouer ballon
« Njikam joue au ballon. »
b. Njikam tiá – ntáp –ndàp ì mbàllò.
Njikam IMPF -Neg -jouer 3sg ballon
« Njikam joue au ballon. » (Nchare (2005 :86) , ex (10a & b) )

L’aspect imperfectif est indiqué par le morphème « tiá » préposé au verbe comme nous indiquent les phrases (56a et b) ci-dessus.

1.13.4Aspect habituel

L’aspect habituel nous permet de présenter les actions qui ont l’habitude de se produire.

(57) a. í ná mbə̀- twó ŋáì.
3sg Accs HAB-venir ici
« Il vient souvent ici. »
b. ali ná mbə̀- mbíʃə̀ ú.
Ali Accs HAB-demander toi
«Ali te demande souvent. »

Les phrases (57a et b) expriment des actions qui ont l’habitude de se dérouler. Comme nous pouvons le constater, l’aspect habituel est matérialisé par le morphème « mbə̀» placé avant le verbe.

1.13.5Aspect inchoatif

L’aspect inchoatif est utilisé lorsque nous voulons exprimer une action dans son commencement ou en cours de son développement.
image5

« Ils ont commencé à venir. »

Les phrases (58a et b) nous permettent de constater que nous pouvons exprimer l’aspect inchoatif en Shupamem. Par ailleurs, l’aspect inchoatif est marqué en Shupamem par « lúʔ».

1.14La quantification des procès

Quand nous parlons de la quantification des procès, nous faisons allusion à la manière dont un procès se présente. Mais, nous nous intéressons plus particulièrement au nombre de fois qu’une action se produit. C’est ainsi que nous distinguons généralement deux (02) types de procès : le procès répétitif et le procès itératif.

1.14.1Le procès répétitif

Le procès répétitif est un procès qui se répète de façon aléatoire.

(59) a. mə̌ pí-juə́n í kéjí tén.
1sg P3 voir lui fois dix
« Je l’avait vu dix fois. »
b. í pê- twó kéjí pâ.
3sg p2 – venir fois deux
« Il était venu deux fois. »

Les actions exprimées dans (59a et b) se sont répétée plusieurs fois et cela de façon fortuite.

1.14.2Le procès itératif

Les procès itératifs sont des procès qui se produisent de façon régulière. Notons qu’ici, le temps est perçu comme un cycle.

(60) a. Matateyu nábə̀ ø – ʒuə́n matio gú gáfùt.
Matateyou IT PRS- voir Mathieu tout lundi
« Matateyou voit Mathieu tous les lundis. »
b.í nábə̀-mbíʃə̀ ú.
3sg IT-demander toi
« Il te demande régulièrement. »
c.í nábə̀ -twò
3sg IT- venir
« Il vient régulièrement. »

Les phrases (60a, b et c) expriment l’aspect itératif. L’aspect itératif est marqué par le morphème « nábə̀ ».

1.15La modalité temporelle

La notion de mode occupe une place centrale en conjugaison. En effet, le mode est une catégorie de la conjugaison qui définit la manière dont celui qui parle perçoit l’état ou l’action exprimée par le verbe. Traditionnellement, il existe sept (07) modes, chacun d’entre eux

pouvant si le sens le permet exister à la voix active, passive, pronominale et à différents temps. Généralement, nous classons les modes en trois catégories : Le mode réel, le mode irréel et la nécessité.

1.15.1Le mode réel

Le mode réel nous permet d’exprimer des états ou des actions présentées comme réels. Les phrases suivantes illustrent le mode réel.

(61) a. Ali pê- léd ndàp né mà.
Ali P2- montrer maison à moi
« Ali m’avait montré la maison. »
b. fɔ́n nà twó -jún matwa.
Roi Accs F1 acheter voiture
« Le roi achètera la voiture. »

Les phrases (61a et b) expriment des événements réels.

1.15.2Le mode irréel

Le mode irréel est utilisé pour parler des actions non certaines dont la réalisation est hypothétique. C’est ce qu’indiquent les exemples (62a et b) .

(62) a. apéjuə̀ mə̌ ø – fí gbì bú mə̌ twó-fá bum n(e) ù.
Si 1sg PRS-vendre bois ce que 1sg F1 -donner argent à toi
« Si je vends le bois, je te donnerai de l’argent. »
b. apéjuə̀ pájù ø – mìe bú mə̌ twó-jun mɔ́ʔ
Si nourriture PRS- finir ce que 1sg F1 –acheter autre
« Si la nourriture finit, j’achèterai l’autre. »

Les phrases (62a et b) parlent des évènements incertains qui ne peuvent se produire que si certaines conditions sont remplies.

1.15.3La nécessité

La nécessité est généralement utilisée quand on a à faire aux verbes modaux tels que vouloir, pouvoir et devoir) . C’est ce que nous indiquent les exemples suivants.

(63) a. polo nà ø – táʔ jín- juə̀n ù.
Paul Accs PRS –vouloir INF -voir 2sg
« Paul veut te voir. »
b. mə̌ ø – jetnə́ jín – dié.
1sg PRS-dormir INF – dormir
« Je peux passer la nuit ici. »

Les phrases (63a et b) , expriment la nécessité. Cela se traduit par l’utilisation de ø–táʔ

« vouloir» en (63a) et de l’utilisation de ø–jetnə́ « pouvoir » en (63b) .

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La structure de la phrase interrogative en Shupamem
Université 🏫: Université de Yaoundé I - Faculté des arts, lettres et sciences humaines
Auteur·trice·s 🎓:
Ernest NJIFON NGOUPAYOU

Ernest NJIFON NGOUPAYOU
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté en vue de l’obtention du diplôme de Master en Linguistique Générale - Juillet 2017
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