Analyse de l’effet des caractéristiques de l’exploitation agricole

IV.2- L’analyse de l’effet des caractéristiques de l’exploitation

L’augmentation de la taille de l’exploitation agricole est corrélée à une plus grande probabilité d’être dans des régimes avec du travail salarié permanent (régimes 110 et 010) et dans des régimes avec les deux types de travail salarié (régimes 111 et 011).

Elle diminue à l’inverse la probabilité d’être dans les régimes non salariaux (régimes 100 et 000) et dans les régimes avec du travail salarié uniquement saisonnier (régimes 101 et 001).

La main-d’œuvre familiale étant par nature un réservoir de main-d’œuvre limité, l’accroissement de la taille de l’exploitation est associé à une plus grande probabilité de recours à la main-d’œuvre salarié, notamment permanente.

Ce résultat est cohérent avec la littérature [Findeis et Lass, 1994 ; Benjamin et al., 1996 ; Benjamin et Kimhi, 2006 ; Blanc et al., 2008].

L’augmentation du nombre de tracteurs est corrélée à une plus faible probabilité d’être dans des régimes non salariés (régimes 100 et 000) et à une plus grande probabilité d’être dans des régimes salariés (régimes 110, 111 et 011).

La mécanisation étant limitée dans le secteur des fruits et légumes, la substitution capital-travail y est faible. L’investissement dans les structures plus productives (comme par exemple dans la mise en place de production hors sol dans les serres) conduit souvent à une intensification en travail.

L’augmentation de la demande de travail est satisfaite par la main-d’œuvre salariée, la main-d’œuvre familiale étant par nature limitée. Ainsi, capital et travail seraient complémentaires plus que substituables dans ce secteur agricole particulier.

L’existence d’une structure de commercialisation et la présence de signes de qualité augmentent la propension à être dans des régimes avec salariés (régimes 111 et 011) et diminue la propension à être dans des régimes sans salariés (régimes 100 et 000).

L’activité de conditionnement et les signes de qualité conduisent à une augmentation de la demande de travail. Celle-ci est essentiellement satisfaite par la main-d’œuvre salariée saisonnière lorsqu’il existe des signes de qualité (la variable qual a un effet positif sur les régimes 101 et 001).

Au contraire, le surplus de demande de travail est satisfait par la main-d’œuvre salariée permanente lorsqu’il existe une structure de commercialisation (la variable comm a un effet négatif sur les régimes 101 et 001 et un effet positif sur le régime 101).

Ces résultats suggèrent donc que l’accroissement de la demande de travail est saisonnier lorsque des signes de qualité sont mis en place et qu’il est permanent à l’échelle de l’exploitation agricole lorsque celle-ci élargit son activité de production vers des activités de commercialisation.

Ainsi, l’augmentation de la taille des exploitations, l’élargissement des contours de l’activité agricole vers des activités autres (conditionnement et commercialisation) et les signes de qualité accroissent la probabilité de recours au travail salarié.

La nature du salariat, permanent ou saisonnier, varie cependant : la taille et le développement d’activités de commercialisation favorisent le recours au travail salarié permanent. Le développement de signes de qualité favorise le recours au travail salarié saisonnier.

L’existence d’une assurance contre la grêle est corrélée à une moindre propension à être dans le régime non salarié (régime 100) et à une plus grande propension à être dans les régimes salariés (régimes 111 et 011).

Les exploitants qui emploient de la main-d’œuvre salariée, notamment permanente, doivent être capables de payer un salaire de manière régulière. Ils sont donc plus enclins à contracter une police d’assurance afin d’être en mesure de payer les salaires même si la récolte est mise à mal par la grêle.

Comme nous l’avons expliqué dans la Partie 1 (Chapitre 1 II) et comme le montrent les modèles de ménage agricole (voir supra Partie 2 Chapitre 3), le prix du travail sur une exploitation familiale peut être endogène et dépendre des préférences du ménage.

En cas de récolte difficile, la famille peut accepter une rémunération marginale de son travail inférieure au niveau moyen des salaires.  Le prix de la main-d’œuvre familiale peut donc être variable.

Dans le cas d’une exploitation avec des salariés, le prix du travail devient exogène. Il est donc fixe et l’exploitant doit se prémunir contre un risque de mauvaise récolte.

L’analyse de l’effet des différentes OTEX révèle que les régimes avec saisonniers (régimes 101 et 001) sont moins probables dans les OTEX légumières que dans l’OTEX fruit. À l’inverse, les régimes avec permanents sont plus probables dans les OTEX légumières.

Comme attendu, le travail salarié permanent est plus probable lorsque l’artificialisation du milieu et les rotations culturales permettent l’allongement des périodes d’activité, comme c’est le cas dans les OTEX légumières.

Comme attendu, la saisonnalité de l’activité (concentration de la production : H) est positivement corrélée avec la probabilité du régime avec des travailleurs salariés saisonniers (régime 001) et négativement corrélée avec la probabilité du régime avec des travailleurs permanents (régime 110).

Analyse de l’effet des caractéristiques de l’exploitation agricole

On note aussi que, plus la saisonnalité de l’activité est grande, moins la probabilité du régime familial (régime 100) est élevée et plus la probabilité du régime salarial (régime 011 )est grande.

Ainsi, une approche plus fine de la saisonnalité de l’activité nous permet de confirmer les intuitions des travaux précédents [Huffman et Lange, 1989 ; Lass et Gempesaw, 1992 ; Kimhi, 1994] qui suggéraient que la saisonnalité (culture céréalière versus culture laitière) diminue la productivité marginale sur l’exploitation et donc la probabilité de travail sur l’exploitation pour la famille.

Le poids des produits très périssables sur l’exploitation diminue la propension à être dans des régimes avec les deux types de main-d’œuvre salariée, permanente et saisonnière (régimes 111 et 011).

Ainsi, les exploitants faisant face à une contrainte de commercialisation importante sont moins enclins à utiliser les deux types de main-d’œuvre salariée.

Le poids des produits très périssables sur l’exploitation diminue aussi la propension à être dans les régimes sans aucune main-d’œuvre salariée (régimes 100 et 000).

Ce résultat peut être lié au fait que les cultures très périssables sont souvent très saisonnières et requièrent un surplus de travail ponctuel (comme les asperges par exemple).

Dès lors, la variable P capterait une forme de saisonnalité spécifiquement liée à l’espèce produite (et non aux combinaisons de différents calendriers culturaux comme la variable H). Elle serait donc liée à une plus grande propension à utiliser du travail salarié saisonnier.

Dès lors, la corrélation négative entre le poids de produits très périssables sur l’exploitation et la probabilité à être dans des régimes avec les deux types de main-d’œuvre salariée, permanente et saisonnière (régimes 111 et 011) suggère que les exploitants faisant face à une contrainte de commercialisation importante sont moins enclins à utiliser la main-d’œuvre salariée permanente, plus chère en moyenne, que la main-d’œuvre saisonnière. Ils chercheraient ainsi à réduire leurs coûts et plus particulièrement leurs coûts de main-d’œuvre.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Institut national d'enseignement supérieur pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement - Centre International d’Études Supérieures en Sciences Agronomiques (Montpellier SupAgro)
Auteur·trice·s 🎓:
Aurélie DARPEIX

Aurélie DARPEIX
Année de soutenance 📅: École Doctorale d’Économie et Gestion de Montpellier - Thèse présentée et soutenue publiquement pour obtenir le titre de Docteur en Sciences Économiques - le 27 mai 2010
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