Identité personnelle et générationnelle de l’adolescent

Identité personnelle et générationnelle de l’adolescent

3. Signe de distinction : une identité personnelle

La recherche de la provocation ou l’évitement des extrêmes (ni trop conforme, ni trop original), la recherche du regard, de l’attention d’autrui, garçon ou fille, semblent des axes de construction. L’adolescent est tiraillé entre la tendance à fusionner avec son groupe social, ses pairs et la tendance à s’en dissocier individuellement (G. Simmel, 1988, p89).

Chaque adolescente, et peut-être plus encore chaque lycéenne cherche en accord avec sa personnalité la différence qui la fera être elle-même (par son style, mais aussi par la « customisation » des vêtements ou des accessoires). G. Lipovetski souligne qu’avec la mode, commence le pouvoir social des signes infimes, « les petits riens qui font toute la différence », l’étonnant dispositif de la distinction sociale conférée au port des nouveautés tenues, c’est la différenciation marginale.

C’est d’autant plus vrai que l’adolescent est à la fois en quête de sa personnalité et qu’il la construit. La personnalisation, quête d’identité, de statut et de standing, se fonde sur des signes muets, non pas sur des objets ou des biens, mais sur des différences.

J.C. Kaufmann souligne que lorsque rien n’est imposé, il devient encore plus important d’avoir l’idée de ce qui est peut être considéré comme normal. Il s’agit de toujours se positionner devant les normes et de se construire dans la référence permanente aux autres. Vincent, même s’il se distingue de tous les autres collégiens par son look détonant de rappeur, ne recherche pas l’excentricité.

« Personne n’en porte comme ça, mais c’est pas excentrique. » (Vincent, 3ème, 15 ans, Neuilly)

4. Signe d’imitation : une identité générationnelle

Pour François de Singly (notamment dans les Adonaissants), la mise à distance des parents permet l’individualisation des jeunes. Cette prise d’autonomie s’accompagne de la création d’un « nous » générationnel.

Les façons dont les adolescents s’expriment à titre personnel empruntent fortement aux produits ayant l’étiquette jeune sur le marché. Pour dire « je », ils agissent en ayant recours à de telles pratiques de telle sorte qu’ils sont jeunes, même si cette qualification signifie tout autant l’action d’un travail de construction identitaire que la revendication à une classe d’âge. La culture jeune vestimentaire joue un rôle de différenciation générationnelle qui exclut les parents.

Michel Fize, sociologue et auteur de «Les Interdits, fondements de la liberté» (Presse de la Renaissance) affirme : «le vêtement représente un signe identitaire fort pour les adolescents.

On a souvent tendance à penser, à cet âge, que l’on est ce qu’on paraît être, ce qui n’est pas étonnant dans une société où l’apparence, le montré, peuvent facilement prendre des proportions exagérées. Le vêtement, et plus largement la parure, fait partie des codes de reconnaissance et d’appartenance à l’adolescence». C’est pour eux une manière de vivre le dédoublement identitaire : à la fois fils/fille de et jeune.

Comme l’ont indiqué Caron et Ward, l’adolescent a tendance à fuir le modèle parental pour s’identifier le plus possible aux modèles imposés par les pairs. Le développement de cette culture jeune depuis les années 60, traduit l’importance d’un monde de l’enfant reconnu par les adultes et où ils ont peu de légitimité à intervenir (F.de Singly). L’enquête qualitative de Dominique Pasquier (2005) montre que la culture des pairs prend une importance grandissante, contribuant à resserrer le sentiment d’identité collective sur les cercles les plus proches.

En affichant des goûts et préférences en vigueur dans le groupe des jeunes, les adolescents mettent en branle la dynamique de l’autonomisation, le processus de la séparation subjective avec les parents, la conquête de critères à soi, fussent-ils ceux du groupe de pairs.

Pour cette identité générationnelle, le passage au lycée semble décisif et en témoignent les marqueurs de passage, comme par exemple le port de talons pour les lycéennes et à l’inverse, les objets et vêtement abandonnés à cette étape comme le jogging, non pas uniquement pour des raisons de changement de mode. A contrario, certains interviews ont montré que les frontières entre adultes et adolescents n’étaient pas étanches puisqu’il pouvait y avoir prêt de vêtements de part et d’autre.

G. Lipovetski, L’empire de l’éphémère, Gallimard, 1987

Kaufmann J.C., « le corps dans tous ses états » in Un corps pour soi, PUF, 2002

Face à des parents permissifs qui laissent aux adolescents une grande autonomie dans le champ vestimentaire, quelle est la marge de manœuvre de l’adolescent ? Jusqu’où est-il autonome dans ses choix face à une institution scolaire (collège ou lycée) qui a fortement élargi le cadre autorisé en supprimant l’uniforme et en restreignant les contraintes essentiellement aux couvre-chefs?

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Modes vestimentaires chez les adolescents
Université 🏫: Université Paris-Descartes – Paris V - Faculté des sciences humaines et sociales
Auteur·trice·s 🎓:

Année de soutenance 📅: Mémoire de recherche Master 2 - JUIN 2008
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