Les impacts et les spécificités de l’écotourisme

Première partie : TOURISME DURABLE ET ECOTOURISME

II : ECOTOURISME : présentation générale

C. Les spécificités de l’écotourisme

Il ne faut pas oublier que l’écotourisme est d’abord et avant tout une forme de tourisme et qu’en ce sens, il convient de le situer plus précisément par rapport aux autres formes de tourisme auxquels il est souvent confondu, soit principalement le tourisme axé sur la nature, le tourisme d’aventure et le tourisme culturel10.

Alors que le tourisme axé sur la nature et le tourisme d’aventure sont plutôt définis sur la base des activités récréatives des touristes, l’écotourisme est défini aussi, sinon plus, par les bénéfices qu’il est susceptible d’apporter, tant à la conservation des écosystèmes qu’aux communautés locales.

L’écotourisme est étroitement lié au milieu naturel. Il importe par contre de distinguer l’écotourisme du simple tourisme nature.

Comme le souligne HONEY, il y a fréquemment un flou concernant les frontières entre le tourisme axé sur la nature et le concept multidimensionnel d’écotourisme.

L’écotourisme adhère à des principes que la notion plus vague de tourisme axé sur la nature n’est pas tenue de partager.

Tant dans la littérature que dans la pratique, on confond souvent les deux, considérant des formes de tourisme axé sur le milieu naturel comme étant de l’écotourisme sans répondre à ses principes.

Le tourisme axé sur la nature se trouve à être une forme plus générale de tourisme d’aventure ou le tourisme axé sur la chasse ou la pêche.

L’écotourisme est ainsi vu comme une portion du tourisme axé sur la nature et la relation entre les deux peut être représentée de la façon suivante :

Tourisme axé sur la nature

Ecotourisme

Selon WEAVER, pour être considéré comme du tourisme d’aventure, une activité ou un produit se doit d’incorporer trois éléments : un élément de risque ; un haut niveau d’effort physique ; et un besoin pour le touriste de posséder des habiletés spécialisées pour participer de façon sécuritaire à l’activité.

LEQUIN affirme : « Le tourisme d’aventure correspond généralement à une activité de plein air qui se pratique dans des zones naturelles peu développées où la nature sert de support, mais ne constitue pas un objectif en soi, contrairement à l’écotourisme.

Il existe ainsi une différence d’attitude fondamentale entre l’observation de la nature comme c’est le cas de l’écotourisme, et la conquête de celle ci dans le cas du tourisme d’aventure.

En somme, ces deux formes de tourisme recherchent un environnement de qualité mais pour des motifs différents : l’une pour l’observer et l’autre pour le conquérir. »

Certaines formes d’écotourisme peuvent être considérées comme du tourisme d’aventure. Par contre, pour plusieurs raisons, en général, le tourisme d’aventure ne se qualifie pas comme écotourisme.

Premièrement, plusieurs activités de tourisme d’aventure ne sont pas axées sur la nature. Ensuite, comme c’est le cas pour le tourisme axé sur la nature, cette forme de tourisme ne nécessite pas de répondre à des critères de durabilité.

Une autre distinction concerne la nature de l’interaction entre le participant et l’attraction touristique : alors que l’écotouriste recherche une expérience éducative, le touriste d’aventure désire en premier lieu un environnement qui va faciliter le risque et l’effort physique tant recherchés.

D. Les impacts de l’écotourisme11

Le développement de l’écotourisme, comme toute autre forme de tourisme, nécessite la création d’infrastructures et l’afflux de personnes ayant des cultures, des valeurs et des besoins différents. Il est indéniable que ces changements ont des effets bénéfiques.

Cependant, si les populations d’accueil, les développeurs et les protecteurs de la ressource n’essaient pas activement d’en contrecarrer les effets pervers potentiels, l’écotourisme peut aussi avoir des conséquences négatives sur le plan environnemental aussi bien sur le plan social.

Voyons maintenant est ce que l’écotourisme peut-il aider à sauvegarder l’environnement tout en favorisant le développement économique et social des régions concernées ? Cette question, qui constitue l’une des problématiques implicites de ce travail, est à l’origine de nombreux dossiers et reportages publiés dans la grande presse 286.

1- Les impacts sur les écosystèmes

En général, le tourisme est perçu comme responsable, du moins en partie, de la dégradation de l’environnement. Bien qu’il soit reconnu que la présence de visiteurs dans des régions naturelles entraîne une certaine dégradation de l’environnement, tous les auteurs ne s’accordent pas sur le degré de responsabilité du tourisme.

A partir des enquêtes faites dans divers parcs à la fin des années 1980, JENNER et SMITH concluent qu’aucun impact majeur sur l’environnement des parcs à l’étude n’est attribuable à l’activité touristique.

En réalité affirment-ils, la moitié des menaces environnementales provient de l’extérieur des parcs, comme les produits chimiques toxique ou les pluies acides.

Il existe un bon nombre d’impacts peu visibles mais cumulatifs qui peuvent représenter une menace pour l’environnement comme les ordures domestiques et autres, la pollution de l’eau, l’érosion des sentiers et le braconnage.

D’autres impacts seraient encore plus subtils, comme le changement dans le comportement des animaux ou dans la variété des espèces.

Le plus inquiétant, c’est qu’aucune méthodologie scientifique vraiment efficace n’existe pour évaluer ces changements résultant de l’activité touristique.

Il serait beaucoup trop fastidieux de nommer et décrire tous les effets négatifs pouvant être causés par l’écotourisme.

HVENEGAARD décrit par exemple une série d’impacts environnementaux négatifs causés par le tourisme lors de sa visite dans les aires protégées : Développement abusif, activités récréatives non contrôlées, perturbation de la faune, pollution, érosion.

Cependant, ce qui est intéressant à noter, c’est que ces effets sont plus sérieux pour l’écotourisme que d’autres formes de tourisme, car celui-ci est très dépendant de la qualité de l’environnement.

Face à cet argument de menace environnementale, celui de préservation et d’éducation a été mis de l’avant par certains chercheurs, dont BOO et BUTLER.

Selon ces derniers, en suscitant l’intérêt d’un grand nombre de visiteurs, des sites uniques peuvent réussir à accroître la sensibilisation de ces touristes aux beautés du paysage, les rendre ainsi plus conscients de la nécessité de protéger ces lieux et même parfois les inciter à œuvrer dans ce sens.

Cette forme de sensibilisation doublée d’un aspect éducatif permet aux visiteurs de vivre une expérience personnelle des plus enrichissantes et de devenir des ambassadeurs de la cause environnementale.

Selon l’O.M.T. et PNUE, l’écotourisme représente une des rares formes de développement touristique qui, sous certaines conditions, peut favoriser la protection des zones naturelles grâce aux programmes de conservation qu’il suscite et qu’il peut financer.

Pour cela, les outils de mesures des coûts et avantages écologiques sont largement des indicateurs composites qui permettent de déterminer la pression et l’intensité d’utilisation des sites d’écotourisme. L’O.M.T. a défini trois indicateurs composites qui sont particulièrement bien adaptés à la mesure des coûts et avantages écologiques de l’écotourisme.

Il s’agit des instruments suivants : Indicateur de capacité de charge, Indicateur de perturbation de site et Indicateur d’intérêt écologique.

L’intérêt de ces différents indicateurs est qu’ils permettent d’assurer une véritable surveillance écologique des produits d’écotourisme et permettent également d’avoir une vision globale des différents produits crées sur un même espace géographique par plusieurs opérateurs.

Les impacts et les spécificités de l’écotourisme

Ainsi, les objectifs écologiques de l’écotourisme visent la conservation de la ressource à long terme, c’est-à-dire qu’un projet d’aménagement ou une activité devrait en principe contribuer à restaurer, à conserver ou à améliorer le milieu naturel en vue d’une utilisation durable.

L’écotourisme est un concept réaliste à la condition de bien connaître et de respecter la capacité de support des sites écotouristiques, et de pouvoir mettre en place des systèmes efficaces de planification et de contrôle.

Ces activités de soutien et de régulation constituent la pierre angulaire des stratégies de gestion pour un écotourisme viable dans une perspective écologique.

2- Les impacts sur l’économie locale

De par son emphase sur les voyages individuels ou en petits groupes, il serait utopique de croire que l’écotourisme puisse insuffler une vigueur nouvelle à l’économie d’un pays en difficulté.

Cependant, nous pouvons reconnaître le fort potentiel de cette activité à améliorer l’économie locale.

Parmi les bénéfices de l’industrie écotouristique, la création d’emplois pour les personnes vivant à proximité des parcs de conservation.

L’écotourisme peut représenter une occasion pour les régions de diversifier leurs activités économiques tout en protégeant leurs ressources naturelles.

A titre d’exemple, au Kenya l’écotourisme a des répercussions positives sur le développement économique local et national.

Le tourisme représente quelque 30% des échanges extérieurs de ce pays, c’est plus que le café ou le thé, et génère des revenus directs et indirects de presque 500 millions de dollars américains.

Dans tout projet écotouristique, les retombées économiques peuvent avoir une importance toute particulière pour les populations locales.

Toutefois, les exemples montrent que ces avantages ne prennent de la consistance qu’après de nombreuses années.

Des études de cas démontrent par ailleurs qu’à court terme les recettes de l’écotourisme sont modestes et ne suffisent pas à financer la protection de l’environnement voulue pour conférer une haute qualité aux produits écotouristiques.

Elles révèlent en outre qu’il est très difficile d’assurer la répartition des avantages financiers entre les intervenants du secteur privé et du secteur public.

Un des principaux problèmes reliés à l’économie touristique est la demande touristique. Il s’agit d’une demande touristique instable qui peut avoir des conséquences économiques néfastes dans des régions éloignées des grands centres, où les activités économiques sont peu diversifiées et les emplois, limités et souvent précaires.

Dans certaines petites localités, la population double avec l’arrivée des touristes, ce qui entraîne, durant leur séjour, une augmentation de la demande pour les produits locaux et favorise l’inflation du même coup.

D’autre part, le caractère saisonnier des activités peut engendrer une économie de dépendance étatique si l’écotourisme n’est pas utilisé comme tremplin pour générer d’autres activités économiques.

Au contraire, cette industrie en expansion constitue une ouverture économique souhaitable pour les régions périphériques et moins industrialisées : l’écotourisme leur permet en effet de diversifier leur activité économique, sans tomber pour autant dans un tourisme de masse qui serait à l’opposé de l’écotourisme.

Ainsi, les objectifs économiques de l’écotourisme sont la productivité et la diversification des activités.

L’activité économique découlant de cette industrie est ici considérée comme une composante essentielle de la durabilité d’une communauté. Si le tourisme n’a pas d’effets durables sur la communauté, l’industrie non plus ne sera pas viable.

Selon cette perspective, il faut reconnaître que l’écotourisme est une activité économique devant être reconnue comme un agent de développement et de changement ; et que le degré de consommation qu’on en fait est déterminé par le style de développement proposé par les acteurs.

3- Les impacts sur les populations locales

L’accroissement rapide du nombre de visiteurs dans un endroit précis a des répercussions sur les écosystèmes et l’économie, mais également des effets à caractère social et culturel sur les communautés locales, en les mettant en contact avec de nouvelles cultures et en devenant une source importante d’argent.

Or, les impacts socioculturels sont souvent plus difficiles à identifiés et à quantifier que ceux des deux autres domaines.

A partir de quel moment, par exemple, une communauté est-elle en train de voir ses traditions s’effriter en raison du tourisme ? Comment déceler une modification de la structure sociale qui serait amorcée par les voyageurs ? Pour aborder cette question complexe, il est approprié de la définir d’abord.

Il est vrai que lorsque deux cultures se croisent, elles empruntent chacune des traits l’une de l’autre, ce qui n’est pas nécessairement négatif, sauf lorsque c’est la communauté d’accueil qui en adopte le plus sans discernement.

Selon NELSON et HARRIS, cela peut même avoir un effet de déculturation sur la communauté d’accueil, quand le tourisme devient un tourisme de masse.

Le problème surgit généralement lorsque les communautés d’accueil qui vivent près des parcs se trouvent projetées dans un circuit touristique sans y avoir été préparées et sans retirer de bénéfice de cette activité.

Il arrive aussi que la création d’un parc vienne bousculer la pratique de leurs activités traditionnelles, comme la chasse et la pêche qui sont souvent interdites sur ces sites de conservation.

En outre, les gouvernements ont longtemps évincé les populations locales de certains territoires sous prétexte de les rendre plus accessibles aux touristes.

L’achat de terrains par des développeurs étrangers, souvent facilité par des politiques gouvernementales locales ou autres, peut également devenir source de conflits et de désagréments.

Un des impacts les plus néfastes que la présence des touristes peut avoir sur les communautés locales, à titre d’exemple, la commercialisation des rites culturels traditionnels, comme l’observation des cérémonies religieuses.

C’est ce qu’on appelle « l’effet de Zoo », parce qu’il n’y a aucune interaction entre les visiteurs et les visités.

A l’opposé, il arrive que dans certaines régions, le grand Nord canadien par exemple, le tourisme constitue un instrument de revivification ou de revalorisation de pratiques culturelles parfois oubliées des autochtones, et contribue ainsi à redonner une fierté et à reconstruire une identité collective.

Cependant, il faut reconnaître que les impacts sociaux sont difficilement mesurables quantitativement. Avec le temps, on arrive cependant à les apprécier de façon plus qualitative.

Les principaux objectifs sociaux liés à l’écotourisme sont de permettre à la communauté d’accueil d’améliorer sa qualité de vie, de satisfaire ses besoins d’information sur la ressource écotouristique et de participer à son propre développement.

Ces buts seront atteints dans la mesure où les communautés locales auront le pouvoir de décider et de participer à la réalisation de projets écotouristiques dans leur région, et de contribuer ainsi à leur propre développement, c’est-à-dire avoir recours à une gouvernance participative.

Bref, pour éviter que le tourisme ait des impacts négatifs sur les communautés d’accueil, il faut consulter les populations locales et tenir compte de leurs intérêts, et cela dés la phase de conception d’un projet en écotourisme.

_____________________________________

  • 10 Seloua GOURIGA, Tourisme et développement durable : quelles conjugaisons ? Cas du Maroc
  • 11 Source : OMT, Développement durable du tourisme : guide à l’intention des autorités locales, 2002.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: Mémoire de fin d’études - Administration et Gestion des Entreprises Touristiques et Hôtelières
Auteur·trice·s 🎓:

MAA OMGBA Véronique
Année de soutenance 📅: Institut Supérieur International De Tourisme De Tanger 2007-2008
Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top