Le contenu du droit communautaire : le principe de souveraineté

Le contenu du droit communautaire – Partie I :
La Communauté européenne n’a pas pour ambition d’unifier les droits nationaux des Etats membres mais de les harmoniser. Les Etats membres bénéficient, en principe d’une compétence prédominante en matière sociale. A défaut d’intervention des Etats membres, le droit communautaire est compétent en matière sociale. L’harmonisation européenne doit donc être l’œuvre des politiques nationales manifestant leur volonté d’intégration et non d’une simple coopération. L’action communautaire permet la coordination entre les différentes législations des Etats.
L’étude du contenu du droit communautaire est primordiale puisqu’il permet de déterminer la nature des normes communautaires et par de là leur influence sur les normes nationales. Les normes communautaires, plus particulièrement leur nature permettent à la Communauté d’agir dans un soucis de progrès social. La Communauté doit se doter de normes dont la nature lui confère les moyens nécessaires à l’harmonisation.
Pour mesurer l’influence du droit communautaire sur le droit du travail français, il est indispensable d’étudier le partage des compétences entre la Communauté européenne et notre droit national. Dans quels domaines le droit national intervient et rempli les objectifs posés par la Communauté à savoir la progression sociale ?
Dans quels domaines les institutions communautaires interviennent-elles et peuvent intervenir ?
Le contenu du droit du travail français doit en principe respecter les normes édictées par les institutions communautaires.
En étudiant les contenus respectifs de ces droits, il se dégagera une constatation à savoir si le droit national respecte le droit communautaire ou s’il le transgresse.
CHAPITRE I – LE PARTAGE DES COMPETENCES
Au niveau de la politique sociale, il n’existe pas a priori de compétences générales de la Communauté. Si la compétence en droit du travail n’était que communautaire, tout serait si simple41. La Communauté ne semble pas consacrer le social. La politique économique est pour elle, le moyen le plus approprié pour réaliser le marché commun. En effet, à travers les différents traités institués, la Communauté européenne semble vouer un intérêt inconsidéré à la politique économique. Mais le marché commun pour être effectif n’est-il pas nécessaire qu’une politique sociale stable, productive et efficace soit mise en place ?
Ces dernières années, le social semble occuper une place de plus en plus importante au niveau communautaire.
Section I – Le principe de spécialité
Quelle est la marge de main d’œuvre laissée à la Communauté pour permettre la mise en place de l’Europe sociale ? Les Etats membres ne sont-ils pas de véritables partenaires du social permettant cette avancée sociale ?
En effet, les Etats participent directement au progrès social mais aussi de manière indirecte par l’action de la Communauté.
Quels sont les objectifs de la Communauté ? Comment va-t-elle les réaliser ? Pour répondre à ces interrogations, il est indispensable d’étudier les rapports des Etats et de la Communauté face au domaine du social.
§ 1. Les objectifs de la Communauté
La Communauté a pour objectif principal de mener à bien la réalisation du progrès social, l’exercice des compétences nécessaires étant transféré des Etats membres vers la Communauté.

41 JAVILLIER (J-C), « Le droit communautaire : un droit en construction ? » in Ecrits en l’honneur de Jean Savatier, Les orientations sociales du droit contemporain, p. 227.

A – Le principe de souveraineté
1/ Une problématique spécifique à la Communauté
La définition classique du principe de souveraineté, « dans un sens initial, désigne le caractère suprême du pouvoir étatique ». Le sens dérivé de la souveraineté de l’Etat se caractérise par « le pouvoir étatique lui-même, pouvoir de droit (en raison de son institutionnalisation) originaire (c’est-à-dire ne dérivant d’aucun autre pouvoir) et suprême (en ce sens qu’il n’a pas d’égal dans l’ordre interne ni de supérieur dans l’ordre international, où il n’est limité que par ses propres engagements et par le Droit international) »42.
En droit international, la souveraineté se manifeste par le fait que des Etats souverains disposent de la plénitude des compétences, cependant ils peuvent par voie conventionnelle en limiter l’exercice, dans le respect des exigences constitutionnelles d’égalité, de réciprocité43…
Cette théorie peut être transposée en droit communautaire. En effet, ce ne sont pas les compétences, elles mêmes, qui sont transférées mais leur exercice. Les Etats membres, grâce au vote à l’unanimité, peuvent prendre des décisions ou celles qui seraient inopportunes.
Les Etats membres confèrent une partie de l’exercice de leurs compétences aux instances communautaires dans le but de l’harmonisation sociale et de la réalisation des objectifs sociaux communs. Conférer l’exercice de compétences à la Communauté ne signifie pas que ces dernières échappent à la compétence nationale. Il n’est pas interdit à l’Etat membre de conserver ses normes sociales particulièrement protectrice de l’intérêt des travailleurs ou de participer au progrès social en prolongeant l’action de la Communauté par l’édiction de normes plus protectrices des salariés. Ceci est vrai en matière de sécurité et de santé des travailleurs. Le Traité de Maastricht a conféré l’exercice de compétences dans ce domaine à la Communauté, il s’agit, depuis de compétences concurrentes, la Communauté agissant de manière subsidiaire par rapport à l’action des Etats membres.
Pour réaliser le progrès social, il est indispensable d’inscrire les actions étatiques et communautaires au sein d’un processus d’intégration et non d’une simple coopération. La participation de l’Etat à l’intégration nécessitera la perte partielle de sa souveraineté.

42 Définition de la souveraineté de l’Etat dans Lexique des termes juridiques, 11ème édition, Dalloz, 1998, p.501.
43 STEPHANOU (A.), « L’union européenne et la souveraineté des Etats membres » in Mélanges Droit et justice, p.357

Il existe cependant, un noyau dur composé des droits souverains dont le partage de compétences entre les Etats membres et la Communauté est impossible : le droit de grève, le lock out, la rémunération, le droit d’association44.
2/ L’influence du principe de souveraineté sur la Communauté
Il s’agit, en l’espèce de s’interroger à partir de quel moment, la participation d’un Etat membre à un processus d’intégration lui faire perdre sa souveraineté.
a) La compétence de principe ou présumée
La Communauté européenne, à la différence des Etats membres ne bénéficie pas d’une compétence de principe ou présumée. En effet, les compétences de la Communauté sont régies par le principe de l’attribution 45(empowerment). Ceci s’illustre par l’article 3 du traité CE : « la Communauté agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées et des objectifs qui lui sont assignés par le présent traité ».
Cependant l’article 235 du traité CE apporte un correctif à la règle de la compétence d’attribution au terme duquel « si une action apparaît nécessaire pour réaliser, dans le fonctionnement du marché commun, l’un des objets de la Communauté, sans que le présent traité ait prévu les pouvoirs d’action requis à cet effet ».
Même si, la Communauté n’a pas reçu les compétences spécifiques pour agir, elle ne doit point se trouver limiter dans son action visant à instaurer le marché commun.
b) Le partage des compétences
Le terme « répartition » ne convient pas. Parler de répartition des compétences pourrait laisser croire que la Communauté procède, par elle-même, à une répartition des compétences et qu’elle disposerait d’une compétence de principe.
Quant au terme « transfert » des compétences, il implique une impossibilité pour l’Etat membre de révoquer les compétences transférées à la Communauté, ce qui n’est bien sûr pas le cas. Elle impliquerait également l’impossibilité d’action de l’Etat au niveau des compétences transférées. On ne peut ainsi parler de transfert de compétences.
Le terme « partage » apparaît en l’espèce mieux approprié pour désigner les compétences conférées à la Communauté. Le partage des compétences s’effectue entre la
Communauté et les Etats membres par le principe de subsidiarité, véritable critère d’exercice des compétences concurrentes.
L’intégration européenne met à l’épreuve la souveraineté des Etats dont va dépendre le partage des compétences entre la Communauté et les Etats membres.
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Mémoire de DEA de droit social – Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales
Université LILLE 2- Droit et santé

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