Usage de la clause d’earn-out dans les négociations d’acquisition

Usage de la clause d’earn-out dans les négociations d’acquisition

2. Du bon usage de la clause d’earn-out dans les négociations d’acquisition.

a) Une technique dont les risques non maîtrisés peuvent exposer l’opération à l’échec…

Parmi les risques qu’encourt le vendeur, le plus difficilement maîtrisable est le risque de retournement de l’activité économique (macro économique, sectorielle, ou propre à l’entreprise)., lequel peut avoir un impact négatif sur la valorisation de la société, et donc sur l’indexation de la partie du prix restante, notamment si aucun prix plancher n’a été négocié.

Les autres risques du vendeur relèvent plutôt de ses relations avec l’acquéreur : le risque d’un conflit ultérieur entre le vendeur et l’acquéreur qui pourrait inciter ce dernier à révoquer le vendeur du management de l’entreprise (d’où l’intérêt pour le vendeur de rester majoritaire le plus longtemps possible ou de prévoir contractuellement des indemnités compensatrices significatives en cas de révocation) ou encore, le risque de contrepartie ou le risque de liquidité de l’acquéreur qui est confronté à des difficultés financières (d’où l’intérêt pour le vendeur de se couvrir par un cautionnement bancaire).

Quant à l’acquéreur, il court le risque d’un prix d’achat final supérieur au prix estimé initialement en cas de hausse de la performance de l’entreprise acquise (d’où l’intérêt pour l’acquéreur de prévoir le plafonnement de l’indexation), bien que ce risque reste modéré, puisqu’il se réduit à simplement traduire une amélioration de la performance de l’entreprises acquise supérieure aux anticipations de l’acquéreur. Quant au risque de conflit avec le vendeur qui motiverait celui ci à rester majoritaire de l’entreprise tel qu’exposé précédemment, il a l’inconvénient de mettre l’entreprise dans l’impossibilité de bénéficier du régime d’intégration fiscale tant que l’acquéreur ne détient pas au moins 95% du capital.

A moins, bien sûr, d’associer le vendeur au montage par apport de ses participations dans le holding d’acquisition, solution qui peut s’avérer délicate dans le cas d’un actionnariat pluriel qui aurait tout intérêt à être regroupé dans une financière particulière.

A ces risques économiques s’ajoute le risque d’invalidité juridique de l’opération qui viendrait soit du caractère indéterminé du prix, soit de l’influence déterminante du vendeur sur le prix par son comportement. Toutefois, la cour de cassation61 a confirmé la validité des clauses d’earn out sous réserve que :

  • * Le critère d’indexation choisi ait un caractère objectif, indépendant des parties;
  • * La clause d’indexation soit en relation directe avec l’activité;
  • * L’objectif de la clause soit la transmission des actions.

La cour de cassation62 a, par ailleurs, confirmé que les clauses d’earn out relevaient du droit commercial et non civil, dont le fondement jusqu’alors des litiges sur l’article 1844-1 du code civil pouvait faire de la clause d’earn out exonératoire des responsabilités du cédant dès lors qu’elle stipule le paiement échelonné garanti de prix plancher. Cette position de la cour de cassation admet donc la compétence juridictionnelle des tribunaux de commerce en la matière, donnant ainsi plus de souplesse et d’efficacité juridique à l’utilisation de la clause d’earn out.

Cet avantage est d’autant plus renforcé sur le plan fiscal depuis la mesure prise par l’administration fiscale dans la loi de finances pour l’an 200063, admettant le rattachement de l’imposition des plus values à l’année de paiement du prix de l’earn out.

Cette évolution n’a pas laissé les cédants insensibles à l’appel de la sirène, qui ont dû antérieurement à ces dispositions s’acquitter d’impôts sur des sommes non perçues.

Ainsi, mal maîtrisée, la technique de l’earn out peut s’avérer être un facteur d’échec. Mais on peut également affirmer que la clause d’earn out constitue ainsi un des outils les plus puissants à la disposition des professionnels du LBO. Il est certain également que ce type de clause, dans la mesure où il y a participation effective des vendeurs au montage de reprise, est d’autant plus susceptible de constituer un élément concourrant à la réussite de l’opération.

61 Cass. Com 10 mars 1998, bull. civ N° 657 aff Lenzecc/ Mayer.

62 Cass. Com 20 mai 1986, bull. civ N° 365 aff Bowater corp ltd/ Du vivier.

63 Loi de finances n° 99-1172, du 31 décembre 1999, J.O. du 31 décembre 1999.

b) …mais dont l’utilisation à bon escient est garante du succès de l’opération

Les clauses d’earn out marquent un indiscutable progrès dans le processus de valorisation, de négociation et de règlement du prix d’achat des entreprises acquises par financement avec effet de levier.

En établissant des modalités propres à bâtir un raisonnement fondé sur les flux financiers en avenir incertain, les clauses d’earn out sont cohérentes avec les approches financières modernes et contribuent à concilier dans une démarche objective les intérêts divergents de l’acquéreur et du vendeur.

Les opérations ayant bénéficié de la mise en œuvre de la clause d’earn out pour l’ajustement du prix ont prouvé l’efficacité économique, juridique et fiscale de l’earn out. L’utilisation des clauses d’earn out implique toutefois un grand professionnalisme dans leur rédaction et leur mise en œuvre, sous peine de conflits, voire de génération de coûts spécifiques dans la gestion de la société cible elle-même.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: CNAM PARIS DESS Finance d'Entreprise - Chaire de Finance du Professeur Denis DUBOIS - Spécialisation Finance d'entreprise
Auteur·trice·s 🎓:
Virginie PHAM

Virginie PHAM
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour l'obtention du DESS Finance d'entreprise - 2001-2026
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