Université de Bristol, Implication dans des activités festives

Université de Bristol, Implication dans des activités festives

* Université de Bristol : une implication dans des activités festives

Lorsqu’un étudiant de l’université de Bristol reçoit sa carte d’étudiant, il se voit automatiquement affilié à l’UBU (University of Bristol Union.) Une part des frais d’inscription qu’il aura payés sera donc affectée à cette organisation qui prend en charge toutes les activités festives et sociales de l’université, mais qui gère aussi un commerce mutuel entre les membres, ainsi que la représentation étudiante dans les comités.

En d’autres termes, le syndicat régente et place les diverses associations étudiantes sportives, politiques, religieuses, culturelles… sous des réglementations communes. Il tient des magasins, des bars, mais aussi organise les campagnes électorales pour les représentants étudiants chaque année.

L’UBU est elle-même affiliée au NUS (National Union of Students) qui donne les grandes orientations nationales. Ce syndicat que nous qualifierons d’unique, se veut indépendant de tout parti politique ou organisation religieuse (comme, d’ailleurs, notre actuelle UNEF).

Mais loin d’être géré uniquement par des étudiants, l’UBU est constitué d’un personnel permanent, dont font partie le directeur général (The General Manager) et les conseillers (Union Advisers) qui s’occupent entre autres de la supervision et du contrôle de la gestion des fonds et de la politique mise en place par les Major officers, (Le président, le vice-président, le trésorier, le responsable de la communication et des campagnes, etc.) L’UBU a une structure complexe, elle est constituée de divers corps et comités.

En ce qui concerne les activités festives, d’animation ou autres des clubs (associations) au cœur de l’université de Bristol, nous avons fait un recensement taxinomique, puis observé l’importance que leur accordent les étudiants et leur degré de participation (en comparaison avec des pratiques extra universitaires.)

Ainsi, Sur les 119 clubs and societies présentés en 2001-02, 64 concernaient des activités sportives, musicales ou de découverte (Expedition society, Bridge club, Massage Society…) 22 étaient des associations de filières et d’affaires (Entrepreneurial Society, Biochemistry Society…) et seulement 9 concernaient des projets politiques, humanitaires ou environnementaux, alors que 7 associations étaient entièrement vouées à des activités et pratiques religieuses.

Nous avons découvert que très peu d’étudiants n’étaient membres d’aucun club, beaucoup y consacraient plusieurs heures dans la semaine, voire le week-end. L’analyse de contenu des entretiens et des questions ouvertes du questionnaire, révèle que la préférence va aux activités sportives et de découverte, suivies des loisirs autour de la musique, puis des groupements religieux et charitables. Aucun étudiant Erasmus interrogé par questionnaire n’a revendiqué, l’appartenance à une association politique, bien qu’il existe différents clubs, comme The Bristol University Conservative Association ou le Labour club. Parmi les sédentaires on trouve quatre personnes.

De manière générale, les associations et le syndicat étudiant de l’université de Bristol sont, dans les discours, davantage liés aux activités festives et d’animation qu’aux revendications politiques. Il est très rare que les étudiants britanniques discourent sur le rôle des représentants étudiants dans les Conseils ou sur la politique de l’université. Ils voient souvent le syndicat comme un promoteur des intérêts des étudiants au niveau commercial et récréatif, car ils parlent souvent des bars, du prix bas des consommations, des soirées organisées. De nombreux étudiants, incontestablement, ne connaissent pas le ou les rôles de leurs représentants dans la structure institutionnelle qu’est l’université.

Dans un entretien accordé au Daily Telegraph107, l’ancien président du NUS Owain James, pour l’année 2001/2002, définit lui-même les rôles de l’organisation qu’il présidait en accordant une grande place aux services qu’elle offre aux étudiants comme the card discounts, qui permet de vendre « à bon prix la bière dans les bars des syndicats, parce qu’il est négocié de façon centrale ». La participation aux associations est traditionnellement considérée comme un signe « d’intégration » au tissu social.

Pouvons-nous dès lors affirmer que le monde étudiant français est anomique parce qu’il adhère peu à la vie associative ? Que la vie associative étudiante italienne, lorsqu’elle existe, est confessionnelle ? Et que le monde universitaire anglais est intégré ?

Comme l’a montré Héran (F), dans une étude sur le monde associatif108 : plus il y aurait participation à la vie associative, plus se développerait l’entre soi (hommes, diplômés, catégories moyennes et supérieures…) et moins il y aurait intégration au reste de la société. Cette tendance à la clôture est moins prononcée dans les modes de vie et de sociabilité des étudiants Erasmus français (par rapport aux cercles d’étudiants Erasmus italo-espagnols ou britanniques) nous l’avons souligné.

Parallèlement, les croyances et les pratiques religieuses sont beaucoup plus diffuses chez les étudiants italiens et britanniques que chez les étudiants français des universités. Ceci pourrait en partie expliquer la création de réseaux de sociabilité plus ou moins hétérogènes109. Ainsi la variabilité et la mixité des cercles Erasmus où les français sont présents se distingue des regroupements d’individus de pays à dominance catholique ou protestante chez les italiens et les anglais.

D’ailleurs, la notion de laïcité, n’a pas d’équivalent en langue anglaise ou italienne. La tradition laïque française permet de comprendre l’absence d’associations étudiantes religieuses et de partis politiques dans les locaux des universités publiques, et par là même, la variabilité des modes de sociabilité étudiants qui se construisent en dehors de toute institutionnalisation.

En effet, il existe depuis 1905, en France une loi sur la séparation des Eglises et de l’Etat qui accomplit le souhait de Jules Ferry, écrivant en 1883 aux instituteurs : « L’instruction religieuse appartient aux familles et à l’église. L’instruction morale à l’école. (La loi a) pour premier objet de séparer l’école de l’Eglise, d’assurer la liberté de conscience et des maîtres et des élèves, de distinguer entre deux domaines trop longtemps confondus : Celui des croyances, qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances, qui sont communes et indispensables à tous. »

107 cf. annexe n°3 Article intitulé : « Owain explains »

108 HERAN (F), « Un monde sélectif : Les associations », in Economie et statistiques n°208, Mars 1988.

109 Un autre facteur important joue sur l’établissement de groupes mixtes de nationalités diversifiés, c’est le passé migratoire des étudiants. Les enfants des différentes vagues d’immigration européennes, sont beaucoup plus nombreux parmi les Erasmus en France qu’en Italie (pays anciennement d’émigration) et qu’en Angleterre (où le système élitiste d’enseignement universitaire les a éloignés de l’université).

Ainsi, de la politique pratiquée par l’université de Provence pour l’attribution des locaux notamment, ressort cet aspect laïc proprement français, qui refuse de confondre, au nom de la liberté de conscience, croyance et connaissance (l’université étant emblématiquement un lieu de connaissance et les groupements religieux et politiques du domaine de la croyance.)

Penser l’université française revient donc, selon les termes de George Felouzis110, à s’intéresser à son fonctionnement dans ses principes d’unités (ouverture à tous les bacheliers, diplômes nationaux, etc.), mais aussi et surtout à ses éléments de dispersion (diversité de son public et de ses croyances, spécificités disciplinaires et locales, etc.).

Ce qui rend l’université française officiellement unifiée, mais pratiquement divisée, n’est-ce pas la diversité de son public « usager », (comme celui de ses « Collèges » enseignants et personnels), incarnée dans de multiples croyances et pratiques étudiantes hétérogènes ? plus nombreux parmi les Erasmus en France qu’en Italie (pays anciennement d’émigration) et qu’en Angleterre (où le système élitiste d’enseignement universitaire les a éloignés de l’université).

110 FELOUZIS (G), « Repenser les inégalités à l’université », In Sociétés contemporaines, n°38, 2000, pp67-97

Quelles sont donc ces pratiques étudiantes hétérogènes à l’intérieur et en dehors du cadre universitaire ? La création de cercles d’étudiants Erasmus conduirait-elle à leur homogénéisation? « La vie étudiante a longtemps été synonyme de bohème » nous dit Valérie Erlich111.

Il n’est pas question dans notre thèse de rechercher la part d’idéologie, de nostalgie ou de réalité d’une telle assertion, mais nous pouvons nous demander dans quelle mesure la mobilité étudiante institutionnalisée permet la pratique de nombreux loisirs et favorise les activités festives. Face aux pratiques extra-universitaires et aux loisirs, les étudiants ERASMUS seraient-ils tous égaux ? La sélectivité sociale ne s’immiscerait-elle pas, là encore, dans un domaine où on l’attend le moins ?

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