Les modèles de financement des hôpitaux en France

3.3 – Financement des hôpitaux et contrat optimal
3.3.1 – Présentation du modèle
Comme nous l’avons observé tout au long de ce travail, les modèles de financement de l’hôpital mettent en jeu des modalités mixtes de paiement fondées à la fois sur le niveau de l’activité et une modalité par dotation non reliée au coût réel observé. Le médecin est le plus souvent l’unique décideur dans le domaine thérapeutique, alors que le plus souvent la structure de l’hôpital est sensée impliquer à la fois le médecin et les gestionnaires. Ces trois auteurs développent ainsi un modèle selon lequel gestionnaires et médecins jouent des rôles différents mais complémentaires dans la décision thérapeutique. On peut dès lors noter que la décision thérapeutique est la décision d’engager la dépense destinée à traiter un patient. Dans ce modèle, les autorités publiques fournissent le financement, les gestionnaires répartissent et fixent le niveau des ressources à l’hôpital et enfin les médecins sont responsables directement du traitement du patient, et pour cela, il prescrira soit des thérapies à haut niveau de technologie ou non, étant donné le fait qu’il est l’acteur qui détient les informations les plus fines sur le case-mix de l’hôpital.
Les autorités publiques signent des contrats avec les gestionnaires fixant les modalités du financement ainsi que son niveau et spécifiant également un certain niveau d’équipement de haute technologie. De leur côté, les gestionnaires, qui connaissent globalement le case-mix de leur hôpital, signent des contrats avec les médecins spécifiant le niveau des ressources non- médicales allouées et leur niveau de rémunération. Enfin, les médecins qui connaissent effectivement la sévérité des cas traités, sélectionnent les patients qui vont être traités avec les équipements de haute technologie et ceux qui ne le seront pas et reçoit une rémunération de la part des autorités publiques en fonction de ces choix thérapeutiques. D’après ces auteurs, il existe un problème d’agence à deux étages dans lequel les contrats doivent être conçus afin de répartir l’information le plus efficacement possible.

84 BOADWAY Robin, MARCHAND Maurice, MOTOHIRO Sato, An optimal contract approach to hospital financing, Journal of Health Economics, Elsevier, n° 23, 2004.
85 Il s’agit de la seule étude de ce type à ma connaissance, cependant, la modélisation ne sera pas reprise ici. Pour plus de détails, se référer à BOADWAY Robin, MARCHAND Maurice, MOTOHIRO Sato, An optimal contract approach to hospital financing, Journal of Health Economics, Elsevier, n° 23, 2004.

En effet, les médecins peuvent être tentés de prescrire majoritairement des traitements de haute technologie pour accroître leur niveau de rémunération. Il n’est pas nécessaire de préciser que cette incitation va dans le sens d’une absence de maîtrise des dépenses.
Cette relation d’agence à deux étages se caractérise par des acteurs qui ne partagent pas les mêmes objectifs. Le but du gestionnaire est de maximiser le surplus financier de l’hôpital alors que le médecin est concerné davantage par la qualité des soins prodigués, son niveau d’effort et son niveau de revenu. Pour sa part, les autorités publiques auront plus vocation à assurer un niveau de qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses publiques de santé.
De plus, le problème réside dans la répartition de l’information entre ces différents acteurs. Avant de passer un contrat avec le gestionnaire, le gouvernement n’a aucune information concernant le case-mix de l’hôpital, qui est rappelons-le, la répartition des patients de l’hôpital en fonction du degré de sévérité de leur pathologie et de leur état de santé. Le gestionnaire a, quant à lui, certaines informations à ce sujet mais qui restent superficielles par rapport à celles détenues par le médecin.
Le modèle consiste donc à une séquence organisée chronologiquement entre trois niveaux de décideurs. Il existe ainsi une relation d’agence entre le gouvernement-principal et le gestionnaire-agent, et une autre relation d’agence entre le gestionnaire-principal et le médecin-agent, et à chaque niveau, le principal est moins informé que l’agent. Pour compléter le modèle, il aurait fallu parler de la relation d’agence qui existe entre le médecin et ses patients, mais BOADWAY, MARCHAND et MOTOHIRO ont décidé d’occulter ce niveau en prenant l’hypothèse que le patient reste passif dans le processus de décision thérapeutique (ce qui n’est bien évidemment pas le cas en réalité).
Le gouvernement va donc proposer un type de contrat de financement destiné à obtenir l’information dont les gestionnaires disposent tout en corrigeant les inconvénients des contrats passés entre gestionnaire et médecin.
Selon ces auteurs, il est surprenant que la littérature concernant le mode de financement des hôpitaux n’ait pas opté pour une approche de type contra optimal. En effet, ils regrettent que les auteurs se contentent de présenter des modèles de financement mélangeant paiement prospectif à la pathologie et remboursement des coûts observés. Selon eux, il est indéniable que les modes de financement basés sur des classifications en G.H.M. ont permis de réduire grandement les asymétries d’information entre le gouvernement et les hôpitaux. Mais le problème de l’hétérogénéité des patients n’est pas réglé. De ce point de vue, le gouvernement et les gestionnaires ne partagent pas la même information que le médecin concernant les risques médicaux des patients classés dans un G.H.M. donné. De plus, selon eux beaucoup d’auteurs considèrent médecin et gestionnaire en tant que décideurs séparés dans l’organisation de l’hôpital.
Pour résumer, le gouvernement ne dispose d’aucune information quant à la catégorie de l’hôpital concerné avant de passer un contrat avec le gestionnaire. Le gestionnaire connaît la catégorie de son hôpital mais c’est le médecin qui connaît la sévérité réelle des cas classés dans les G.H.M.
A chaque étage, le principal propose « un menu » de contrats et l’agent en choisit un. Chaque contrat est composé de trois caractéristiques : un financement (peu importe les modalités), un niveau d’équipement de haute technologie et enfin un niveau de rémunération à l’acte directement versée au médecin par patient traité avec les équipements de haute technologie.
Au premier niveau, le gouvernement propose plusieurs contrats et le gestionnaire en choisit un en fonction de la catégorie de son hôpital. Puis au second niveau, en fonction du contrat choisi par le gestionnaire, celui-ci propose plusieurs contrats au médecin qui en choisi un à son tour en fonction de sa propre information sur le type de son hôpital, déterminé par le degré de sévérité des pathologies et des patients.
Au troisième niveau, le médecin dispose d’un contrat lui offrant une rémunération, un paiement à l’acte (sous forme d’honoraires comme c’est le cas dans les cliniques privées à but lucratif en France) et un niveau de ressources. Il prendra ses décisions thérapeutiques en fonction de ces trois paramètres et ajustera son niveau d’effort également sur cette base.
Lire le mémoire complet ==> (Un nouveau mode de financement du service public hospitalier en France :
le passage à la tarification à l’activité dans le cadre du plan « hôpital 2007 »)
Mémoire Présenté et soutenu par Fabien LAFFITTE – Institut d’Etudes Politiques de LYON
Université LUMIERE LYON II

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