Le PMSI : " Petit  Machin Sans Importance"

1.3 – Le P.M.S.I. : « Petit Machin Sans Importance »17?
Après 7 ans de fonctionnement de ce système, force est de constater que les révisions budgétaires opérées sur la base du P.M.S.I. n’ont concerné que 1 % des dotations globales. L’objectif de la mise en place d’un tel système destiné à asseoir davantage le financement des établissements de santé sur leur performance était de devenir un outil d’incitation à l’amélioration des pratiques, mais les médecins hospitaliers qui l’ont très vite surnommé le « Petit Machin sans importance » n’y ont vu qu’une tentative d’intrusion du secteur administratif dans leur travail et surtout le P.M.S.I. a été très vite perçu comme un outil supplémentaire de réduction budgétaire18.
La première limite tient dans le fait que « le P.M.SI. peut être détourné de ses objectifs » dans le fait que le séjour d’un patient peut être classé dans un G.H.M. plus valorisant en points I.S.A.19. En effet, quand un parient se présente avec une certaine pathologie dont le diagnostic est peu précis, c’est-à-dire que le diagnostic conclut à une certaine catégorie de pathologies comme les cancers par exemple. La tentation peut être grande de classer le séjour du patient dans le Groupe homogène de Malades le plus rémunérateur en points I.S.A. Par exemple, en 2001, le G.H.M. 681 « Chimiothérapie pour tumeur » est valorisé par 203 points I.S.A. soit une rémunération théorique de 395 euros par jour d’hospitalisation en ambulatoire pour l’hôpital. Si l’hospitalisation est complète, le séjour sera alors classé dans le G.H.M. 585 « Chimiothérapie pour leucémie aiguë » qui génère 2517 points I.S.A., soit 4896,2 euros20. Cette différence de valorisation induit donc certaines pratiques médicales qui viseront à préférer l’hospitalisation complète par rapport à l’hospitalisation en ambulatoire qui peut représenter un confort certain pour le patient du fait qu’il est traité dans son environnement familial. La classification dans un G.H.M. ne tient donc pas véritablement compte de l’intensité des soins prodigués en fonction de la pathologie mais plutôt du type de séjour21. Il y a aussi un risque de sélection des patients. On pourra être incité à choisir les patients avec les pathologies les moins sévères, et donc les moins coûteuses, afin de diminuer les coûts et donc diminuer la valeur de l’I.S.A.
Mais la principale limite du mode financement basé sur la D.G.F. corrigée par le P.MS.I. réside dans le financement de l’innovation.

17 REVERCHON A., « À l’hôpital, les instruments de gestion peinent à rendre compte de la complexité des tâches », in Le Monde du 29 juin 1999.
18 REVERCHON A., « L’hôpital s’aventure dans la culture de gestion », in Le Monde du 20 janvier 2004.
19 Dr Jean-Marie RENARD, Le système d’information hospitalier, Cours de PCEM 2, CERIM, Université LILLE II, octobre 2003.
20 Valeur du point I.S.A. région Rhône-Alpes de 1999 : 1,95 euros.
21 Exemple tiré de PERRIER L., 2001.

Dans sa thèse, Lionel PERRIER illustre ce problème par un exemple précis, le financement des molécules onéreuses de chimiothérapie au sein du Centre régional de Lutte contre le Cancer Léon BÉRARd à Lyon. Selon lui, les hôpitaux soumis au P.M.S.I. doivent faire face à deux contraintes difficilement conciliables : il doivent assurer un haut niveau de performance au niveau médical et maintenir un point I.S.A. proche de la moyenne régionale sous peine de se voir sanctionnés pour sur-dotation. Cependant, un hôpital désireux de favoriser l’innovation en utilisant les dernières molécules de chimiothérapie ou les protocoles les plus modernes peuvent rapidement se retrouver en situation de sur-dotation et ainsi être indirectement sanctionnés pour avoir choisi l’innovation. Le « système P.M.S.I. pénalise donc l’innovation technique et limite l’utilisation des molécules onéreuses dès lors que leur coût excède la rémunération du G.H.M. » [PERRIER L., 2001]22.
Dans le cas du mabthéra (anticorps utilisé pour lutter contre les lymphomes malins), le prix moyen journalier du traitement s’élevait à 1779,7 euros en 2001 alors que le G.H.M. consacré aux soins chimiothérapie en ambulatoire est valorisé à hauteur de 394,9 euros. Pour financer cet écart, le système P.M.S.I. va attribuer des points I.S.A. complémentaires. Mais ce financement des molécules onéreuses par des points I.S.A. soulève trois types de questions :
− A partir de quel prix une molécule devient-elle onéreuse ?
− Comment passer du prix libellé en euros à un nombre de points I.S.A. ?
− Comment identifier les molécules onéreuses servant à traiter des cancers des autres pathologies comme par exemple l’interféron ?
Enfin, la dernière limite est plus technique que pratique. En effet, les divers aménagements du système P.M.S.I. au cours du temps comme des changements dans la classification en G.H.M., les revalorisations successives de certains G.H.M. en points I.S.A. rendent les comparaisons inter-annuelles très délicates.
Cette première étape dans la réforme du mode de financement du secteur public hospitalier était nécessaire mais était limitée intrinsèquement du fait que celle-ci s’articulait sur la base de la D.G.F. En effet, le P.M.S.I. n’a été conçu que qu’un outil de péréquation destiné à corriger les inégalités inter-régionales et inter-établissements et comme nous l’avons vu précédemment, il n’a pas permis de relier efficacement le financement au niveau d’activité des établissements de santé.
Le « retard français » en termes d’innovation et notamment dans le domaine de l’imagerie médicale n’a de cesse d’inquiéter et les professionnels de santé s’alarment devant la « fragilisation financière des hôpitaux »23. Cette situation n’est pas nouvelle et le ministère de la Santé réfléchit à une refonte de l’hôpital depuis 1998. Le P.M.S.I. a subi des modifications constantes afin de l’adapter aux besoins mais cela n’était pas suffisant et il aura fallu attendre 2002 pour parvenir à un plan d’action concret, le plan « Hôpital 2007 » qui prévoit notamment un mode de financement directement relié au niveau d’activité des hôpitaux sur la base des données du système P.M.S.I. qui devient vraiment un outil de facturation.

23 « La fragilisation financière des hôpitaux alarme les milieux professionnels » in Le Monde du 22 octobre 2004.

Lire le mémoire complet ==> (Un nouveau mode de financement du service public hospitalier en France :
le passage à la tarification à l’activité dans le cadre du plan « hôpital 2007 »)
Mémoire Présenté et soutenu par Fabien LAFFITTE – Institut d’Etudes Politiques de LYON
Université LUMIERE LYON II
 

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