L’entreprise conjointe comme moyen efficace de coopérer

III. L’entreprise conjointe comme moyen efficace de coopérer L’entreprise conjointe est une forme de coopération intéressante à bien des niveaux. Elle apparaît dans la littérature anglo-saxonne sous equity joint venture car sa caractéristique réside dans le capital. Le concept en lui-même est problématique car il n’existe pas de définition générique; il faut donc dépasser cette définition et voire ses formes de manifestation économique et juridique. Cette absence de définition est assez surprenante car cette forme de coopération possède des avantages certains. Qu’est ce qui pousse finalement les acteurs à envisager un partage de l’autorité dans une telle formule ? Ses avantages certes, mais dans ce cas comment peut elle être une forme d’organisation stable au moins à court et moyen terme.

*** Les formules d’association

Il va s’agir de rechercher l’adéquation entre la forme juridique et les objectifs économiques poursuivis. Pour l’écriture du contrat, la forme sociétaire de l’entreprise conjointe va permettre de répondre aux objectifs de coopération à long terme car il apporte le cadre juridique adéquat pour permettre une incitation à l’effort, l’instauration de la confiance et une gestion efficace. Le trait commun de toutes entreprises conjointes c’est le partage de capital. Toutefois les types d’entreprise conjointe sont nombreux.

** Les typologies

Les entreprises communes sont utilisées dans tous les secteurs économiques et dans toutes les phases des processus de production. Il existe 3 types d’entreprise conjointe :

  1. – l’entreprise conjointe en recherche et développement,
  2. – l’entreprise conjointe en fabrication industrielle,
  3. – l’entreprise conjointe en commercialisation.

La première est recherchée lorsqu’il s’agit de renouveler fréquemment des techniques ou des produits. La seconde et la troisième répondent à une nécessité d’économie d’investissement : économies d’échelle et effets d’apprentissage. L’entreprise conjointe peut également être horizontale, verticale et diagonale. Les entreprise conjointe horizontales sont constituées entre sociétés mères concurrentes et actives sur le même marché et entraînent probablement une réduction de la concurrence. Les entreprises conjointes verticales sont constituées entre sociétés mères concurrentes mais opérant sur des marchés en amont ou en aval. L’impact sur la concurrence est plus difficile à mesurer et l’application de l’article 85 va dépendre de l’accès des autres firmes aux marchés considérés. Il existe enfin les entreprises conjointes diagonales qui sont créées par sociétés mères concurrentes mais opérant sur un marché tiers qui leur est étranger. Ici le droit de la concurrence est peu intéressé et intervient rarement. Il faut ensuite établir une taxinomie des différents types d’entreprises conjointes que l’on peut rencontrer. J.F. Hennart [1988] distingue tout d’abord les entreprises conjointes d’échelle (scale joint venture) et les entreprises conjointes chaînon (link joint venture); il s’agit dans le premier cas de 2 ou plusieurs firmes qui entrent conjointement dans un stade de production ou de distribution ou sur un nouveau marché. Dans le second cas il s’agit de situation ou les partenaires ne sont pas forcément symétriques dans l’accord. Les entreprises conjointes d’échelle dans les consortia de forage permettent aux firmes intégrées de prendre part dans différents projets en même temps. Chaque projet a une chance limitée de succès mais cette diversification du risque est préférable à une stratégie de concentration de ce risque sur quelques projets. Les joint venture chaînon sont créés pour remédier aux problèmes de 2 marchés.

** Le choix de l’entreprise conjointe.

Les études réalisées pour comprendre les raisons du choix de l’entreprise conjointe permettent de constater que l’on retrouve bien évidemment les raisons de la constitution d’accords de coopération simple, comme étudié au chapitre 1; elles permettent en plus de dégager des raisons complémentaires, propre à l’entreprise conjointe. Il existe ainsi les raisons de coûts avec les économies d’échelle, et le partage de risques. Toutefois il existe en plus les notions de connaissance du marché locale pour les entreprises conjointes transfrontalières. En effet lors de la constitution d’entreprise conjointe qui implique une entreprise qui veut entrer sur un marché étranger, elle voudra avoir une connaissance des habitudes locales, des réglementations, des coutumes et pratiques que la firme aura du mal à acquérir par le marché et que l’expérience pourrait lui donner mais qui peut s’avérer fort coûteux car trop long et facteur de trop d’erreurs. Il s’agit dans ce même cadre d’utiliser l’initiative de l’acteur local en lui apportant un savoir-faire. Une firme pourrait décider d’apporter son expérience à l’acteur local par l’accord d’une licence, toutefois les études ont montré que les firmes locales souhaitent une participation plus directe et plus impliquée de la firme étrangère; la société locale veut en effet que la firme étrangère supporte le même risque, à hauteur comparable. Il faut de plus noter que souvent les Etats favorisent la création de société commune plutôt que l’accord de licence. Les entreprises conjointes ont des avantages quant à l’accès au crédit, mais aussi en ce qui concerne les aides, et les régimes fiscaux. Il faut enfin souligner que parfois l’entreprise conjointe naît de relations antérieures positives que les partenaires souhaitent poursuivre à travers une structure juridique plus stable. Il ressort de cette analyse que les raisons pour lesquelles les firmes désirent s’associer sont liées aux facteurs qui les poussent à s’installer à l’étranger et aux incidences de la situation existante dans le pays d’implantation. L’entreprise conjointe fait ainsi partie de la stratégie d’internationalisation des firmes (le rapport de KPMG reflète bien cela). Ainsi Stopford et Wells [1972] ont montré que plus une firme était diversifiée plus elle avait recours à l’entreprise conjointe. Les firmes diversifiées doivent acquérir des connaissances et du savoir-faire que seul un partenaire peut apporter de manière rapide et finalement peu coûteuse. Les preuves empiriques de ce choix existent; Davies en 1977 a montré que 60% des accords de licences se limitaient à des plans et des spécifications techniques, dans le cas d’entreprise conjointe l’étendu du savoir transféré est bien plus large et inclus savoir-faire et connaissance tacite. Killing en 1980 montre que sur 30 entreprises conjointes étudiées 19 impliquaient le transfert de savoir tacite, alors que dans le cas de licence le taux est de 1 sur 74. Une façon de se prémunir contre les problèmes sur les marchés des produits intermédiaires seraient de nouer des contrats de long terme, qui fixerait ex-ante le prix du pétrole brut pour une période de temps donnée qui correspondrait à la durée de vie de la raffinerie. Cependant comment se protéger contre les aléas de l’environnement sur des périodes de 25 ou 30 ans ? Les contrats noués sont alors incomplets et exposés à des renégociations. C’est pour cela que le rôle d’une participation capitalistique peut sembler intéressant; cela va réduire les problèmes d’opportunisme en incitant chaque partie à se comporter de la manière la plus bénéfique pour l’entreprise conjointe. Chacun va recevoir une partie des profits en atténuant ainsi l’incitation naturelle à remarchander.

*** Des avantages de l’entreprise conjointe…

Les entreprises conjointes apportent une réelle valeur ajoutée aux firmes qui les mettent en place. Mais où se trouve cet avantage ?

** La nature des actifs

JF Hennart [1988] développe assez largement une analyse en terme de coût de transaction pour expliquer l’existence d’entreprise conjointe; il s’agit de voir que s’il y a utilisation de cette structure alternative c’est parce que les marchés sont incapables de réaliser une allocation efficiente des ressources. Il a été montré en chapitre 1 pourquoi une firme pouvait rechercher l’acquisition de compétence à travers des partenaires différents. Il s’agit maintenant de montrer pourquoi cela a lieu à travers une participation et non à travers une acquisition complète. Pour répondre à la question de savoir qu’elle est la supériorité de l’entreprise conjointe sur une acquisition, il faut aller chercher la réponse du coté de la nature des actifs acquis par l’entreprise conjointe. Il s’agit d’actifs spécifiques à la firme et il s’agit de biens publics. Dans le premier cas les actifs ne peuvent pas être dissocier de la firme elle-même. Dans le second cas il s’agit d’actifs dont le partage peut se faire à faible coût marginal. Il va s’agir des problèmes de duplication de l’effort; il est plus coûteux de répliquer un effort déjà entrepris que d’acquérir son produit. Il s’agit aussi de combiner des actifs complémentaires; l’entreprise conjointe sera ainsi plus efficace pour 3 raisons selon Balakrishan [1991] (Cet auteur adopte un raisonnement en terme de théorie de l’agence). Tout d’abord l’entreprise conjointe évite au contraire d’une acquisition une vente terminale et un transfert de droit de propriété définitif et permet aux partenaires de dénouer un accord à un coût relativement faible. D’autre part l’entreprise conjointe introduit pour chaque parent des droits de propriété formels et informels. Ainsi la responsabilité des parents est engagée dans la gestion du partenariat. Cette possibilité n’est pas disponible dans les contrats de pure coopération; cela permet de réduire les comportements opportunistes. Et enfin, l’entreprise conjointe est une excellente opportunité pour évaluer la valeur des actifs du partenaire. Beaucoup d’accord d’entreprise conjointe stipule une date de dissolution et beaucoup de ces accords se terminent par le rachat des parts d’un ou de tous les partenaires par un des parents. Dans ce cas audit et monitoring sont beaucoup plus faciles. L’entreprise conjointe n’est toutefois pas un mécanisme sans coût pour combiner les actifs. A cause de l’absence d’unité de commande, des disputes peuvent émerger pour la répartition des gains. Les coûts de contrôle et de gestion de ces entités sont plus élevés que dans les cas alternatifs. L’entreprise conjointe est un compromis entre le contrat et la hiérarchie qui combine de nombreux points positifs mais qui n’élimine pas tous les problèmes.

** La forme juridique

L’entreprise conjointe est l’exemple type de l’opération stratégique à la frontière entre l’entente et la concentration. Avant la réglementation anti-concentration, la Commission considérait que les entreprises conjointes pouvaient être des opérations de concentrations, mais également une entente susceptible d’affecter les règles du marché. Ces opérations étaient contrôlées sur la base de l’art 85 du Traité de Rome. On ne considérait une entreprise conjointe comme une opération de concentration que si les partenaires consacraient à l’opération des actifs spécifiques, industriels et commerciaux nécessaires à une concurrence réelle et de manière irréversible. Aujourd’hui la réglementation répond à la carence du droit communautaire et régit les entreprises conjointes accomplissant de façon durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome. Le cas échéant les art 85 et 86 du Traité de Rome entre en action. L’action stratégique doit se baser sur une forme juridique qui n’est pas pénalisante car la souplesse demeure l’un des attraits de l’alliance. Les fondements économiques de ces restrictions partent de 3 postulats qui garantissent le jeu normal de la concurrence.

  • – les entreprises prennent individuellement leurs décisions relatives à la quantité et au prix des produits qu’elles vont commercialiser,
  • – chaque entreprise est dans l’incertitude quant aux décisions des autres offreurs,
  • – il n’existe pas de barrières à l’entrée ou à la sortie du marché.

De plus l’entreprise conjointe a l’avantage de bénéficier de la garantie juridique de plusieurs maisons mères qui va rendre plus économique le financement des lourds investissements en obtenant des fonds des marchés financiers à un taux plus avantageux. Pour étudier les différentes formes juridiques, une comparaison des régimes des différents pays peut fournir de précieuses informations. Il faut pour cela se reporter aux lois nationales (loi de 1966 en France). J. JEHL [1988] propose à cet égard un excellent travail. L’entreprise conjointe comme moyen efficace de coopérer La tâche est très difficile car la diversité des régimes est très importante mais parfois aussi l’absence de textes spécifiques laisse beaucoup de liberté aux agents. 2 aspects doivent être notés :

  1. – l’intervention des Etats dans la création d’entreprises conjointes,
  2. – la grande autonomie accordée aux agents.

Les formes juridiques de la coopération de dimension communautaire

Forme du Contrat CaractéristiquesFormes ContractuellesFormes Sociales
Entreprise conjointeGEIE (consortium)
Formes juridiquesAccords de coopération, ou groupement non statutaireSociété commerciale (SAS…)Structure propre
Origines des entreprisesToutes originesEntreprises UE
Nature de l’entité crééeContrat indissociable des partiesPersonnalité morale
Durée du contratSelon volonté des parties99 ansDéterminée ou indéterminée
Objet du contratLarge ou spécifiqueSpécifique
Droit du contratDroit de L’Etat du contratDroit de l’établissement de l’entreprise conjointeDroit communautaire
ActivitéToutesRattachée à celle des membres
MissionCelle qui lui assigne les partiesPropre à l’entreprise conjointe, dissociable de celle des partenairesBase égalitaire
Zone d’exerciceSelon les clauses du contratLieu du siège socialDans tout pays de l’UE
Lieu du pouvoir de directionTout endroit au niveau mondialDans l’UE
Base du contratSelon les termes du contratParitaire ou hiérarchiséeBase égalitaire
Objectif des partenairesPartage des fruits de la coopérationRecherche de profitService commun
Contrôle communautaireArt 85 et 86 du traité de l’U.E. sur les ententes et abus de position dominanteRéglementation anti-concentrationArt 85 et 86 du traité de l’U.E. sur les ententes et abus de position dominante

Source : dans Alliouat, 1996, p104. Aucun système juridique n’est complètement différent d’un pays à un autre et par conséquent. D’une manière générale l’entreprise conjointe est une personne morale qui adopte le statut de société. Il s’agit de SNC, SARL, SA, SAS ou de GIE. La SNC est intéressante dans la mesure ou elle offre une grande marge de manœuvre; elle implique toutefois une responsabilité solidaire et illimitée des associés et est donc peut compatible avec le besoin d’autonomie des entreprises conjointes. La SARL n’est pas meilleure dans la mesure ou lorsqu’il s’agit de financer de larges investissements, la faculté de ce régime à émettre des valeurs mobilières est fermée. C’est la SA ou la SAS qui vont le mieux permettre de concilier ce besoin d’autonomie avec cet accès aux marchés financiers. Il existe également le GIE ou le GEIE qui offre une assez grande liberté contractuelle, mais réduit son utilisation à des projets bien précis.

** …Au partage du capital

Jusqu’à présent il a été développé les conditions nécessaires à l’existence d’entreprise conjointe. Il s’agit de l’imperfection des marchés intermédiaires qui font que la firme a recourt à des modes de coordination de ces activités alternatives au marché, à la licence ou tout autre contrat de long terme. Toutefois pour l’instant la supériorité de l’entreprise conjointe sur une internalisation totale n’a pas été montrée. Hennart résume assez bien son approche à travers un tableau :

CapitalConnaissance du paysTechnologie taciteDistributionNationalitéBiens intermédiaires
CapitalEntreprise conjointe d’échellePetites entreprises recherchant financement chez les plus grosses
Connaissance du paysEntrer sur le marchéQuasi-intégration verticale
Technologie tacitePetites entreprises recherchant financement chez les plus grossesEntrer sur le marchéEntreprise conjointe d’échelle Joint venture chaînon pour l’apport de complémentaritésApport de la nationalité
DistributionLicenceEntreprise conjointe d’échelleQuasi-intégration verticale
NationalitéApport de la nationalité
Biens intermédiairesQuasi-intégration verticaleQuasi-intégration verticaleEntreprise conjointe d’échelle

Source : Hennart, 1988, p.370. L’entreprise conjointe peut en faite être utilisée pour acquérir 2 types d’actif. Les caractéristiques de ces actifs sont d’être spécifiques à la firme et d’être des biens publics. Dans le premier cas ces actifs ne peuvent pas être dissocier de la firme et donc pour les contrôler c’est la firme entière qu’il faut contrôler. Dans le second cas il s’agit d’actifs qui peuvent être partagés avec un faible coût marginal. Si un actif peut être partagé à un faible coût marginal, l’acquisition de cet actif est moins coûteuse en l’achetant qu’en la produisant soit même. Le propriétaire de cet actif souhaitera vendre son actif car cette vente n’augmentera pas ses coûts de manière significative et lui permettra d’obtenir un revenu additionnel. Ainsi une entreprise conjointe ou une acquisition sera préférable à un investissement greenfield. Le choix de la firme se réduit maintenant à une acquisition ou à une entreprise conjointe. Pour ce choix il s’agit des arguments en faveur de la coopération; l’entreprise conjointe permet d’entrer sur un marché sans avoir à s’occuper de tous les problèmes qu’un engagement complet implique. De plus, une acquisition oblige la firme à entrer sur des marchés pas forcément d’un intérêt capital pour elle : ce qui l’intéresse c’est une part seule de l’acquisition mais comme cette partie est indissociable du tout elle doit s’en contenter. Il faut enfin considérer le stade de la distribution. Le système de distribution peut être considéré comme un bien public; lorsqu’un réseau est mis en place les coûts additionnels d’une utilisation croissante sont très bas. Si l’intégration verticale entre la production et la distribution est efficace, alors les actifs de la distribution de la firme à être acquise seront liés à l’unité de production, et les 2 devront être achetés en même temps. Acheter ces actifs propulserait l’acheteur vers des marchés inconnus, en augmentant ainsi les coûts de gestion. Revendre l’unité de production non nécessaire, augmenterait les coûts de fonctionnement du système de distribution en la privant d’économies de gammes potentielles étant donné le besoin d’intégration verticale vers la distribution, le nouvel acheteur de l’unité de production échangerait le réseau de distribution pour son propre réseau. Une entreprise conjointe dans ce cas offre des avantages distinctifs, à partir du moment où elle permet l’intégration verticale vers la distribution sans avoir besoin d’acquérir les actifs productifs liés. Certains types de savoir ont ces caractéristiques comme la production ou le marketing du savoir-faire. En dépit de certains aspects négatifs, l’entreprise conjointe est une forme de coopération de plus en plus en plus privilégié. Elle offre des garanties introuvables à 2 niveaux. Tout d’abord, vis à vis du marché et de l’organisation. Mais aussi vis à vis d’autres formes de coopération. La licence pose beaucoup de problèmes dans le cas de transfert de connaissances. Le consortium est certes très avantageux pour des projets dont la fin est programmée d’avance, comme l’exploration/production où les gisements ont une vie limitée. Les considérations fiscales ont prôné sur l’entreprise conjointe; mais finalement ces consortia ont toutes les caractéristiques de l’entreprise conjointe et si l’on va plus loin on se rend compte que ces consortia sont détenus par des entreprises conjointes comme l’ADNOC, mais aussi bon nombre de sociétés en Mer du Nord, qui sont détenues par une des Majors. J.F. Hennart [1988, p.372] propose un excellent cadre d’analyse mais comme il le reconnaît lui-même, son approche est trop statique alors qu’une entreprise conjointe vit, bouge mais aussi meurt car une entreprise conjointe a une durée de vie limitée. Ainsi sa durée de vie ne dépasse pas 5 à 20 ans. Si elle meurt c’est pour mieux renaître sous une fonction différente, et coller au mieux aux projets qu’elle est censée servir; en effet, l’environnement est incertain et au bout de 20 ans que peut-il rester du projet initial ? Ce qui peut être retenu c’est sa force dans le court et moyen terme. Ainsi l’entreprise conjointe répond le mieux aux objectifs économiques mais aussi techniques de l’industrie pétrolière. Ses contraintes sont multiples, et l’entreprise conjointe sait éclaircir les difficultés et arrive souvent à résoudre les problèmes pour réduire les coûts, améliorer les techniques et apporter de la flexibilité. Ainsi tout comme l’existence de la firme a pu être expliqué par la recherche de pouvoir de marché, d’efficience économique et de réduction d’externalité; la coopération peut être expliquée par ces même arguments. On peut alors se demander où se trouve la différence entre coopération et internalisation. La réponse à cette question est à rechercher à la fois dans le coût d’utilisation de la firme qui n’est pas nulle. Elle est également à rechercher dans la spécificité de la coopération qui au contraire de la firme permet d’utiliser un effet de taille sans coûter trop cher; la licence est un des moyens, mais il existe aussi l’entreprise conjointe.

Conclusion de la première partie

Cette première partie recherchait à travers à expliquer pourquoi une firme pouvait être amenée à rechercher un accord de coopération. La réponse à cette question est un peu la même que celle que se posent les économistes quant à l’existence des firmes. Les firmes existe parce que le marché est imparfait : In conditions of prefect knowledge, the theory of the firm is very simple : there are no firms. Brian J. Loasby Pour la coopération il en est de même. Il y a création d’un marché concerté avec une meilleure circulation de l’information que sur un marché classique. Ainsi c’est parce que les imperfections demeurent suffisamment importante que l’on est obligé d’introduire de la coordination artificielle en permettant aux firmes de coopérer. La coopération interfirme a le droit d’être étudiée comme une forme d’organisation à part entière malgré la diversité des formes rencontrées et malgré la nature hybride. La coopération est une nécessité pour être efficace. Pour le cas extrême de l’exploration production, ce n’est même plus une option parmi d’autres, c’est devenue la seule option. Toutefois toutes les formes de coopération ne se valent pas. Il faut être prudent et ne pas généraliser une théorie de la coopération interfirme à tous les types d’accords; alors que c’est possible quant on étudie la firme ou le marché ce n’est plus le cas quand on s’intéresse à cette 3ième forme. En effet, selon Arrow l’autorité est nécessaire pour organiser. Il s’agit de faciliter la circulation de l’information en baissant son volume et en préservant sa valeur par une baisse du nombre de canaux de diffusion. Pour être respectée l’autorité doit susciter le respect collectif et il doit exister des sanctions car il faut que cela soit le nœud d’espoir convergent. C’est pour cela que l’autorité est surtout importante au sein d’une firme. En dehors de la firme l’autorité est inefficace, mais dans quelle mesure n’est-on pas contraint par l’autorité d’acheter ou de vendre. Lors d’un accord de coopération l’autorité ne semble pas importante car tout est basé sur la volonté de chacun à coopérer. Toutefois, Blois [1972] a montré qu’il pouvait exister une dépendance d’une firme par rapport à une autre en particulier dans le cas de la sous-traitance. En effet, si une relation implique une forte concentration de leurs flux d’échange, une subordination professionnelle (née de la spécificité des actifs) et une taille déséquilibrée des contractants (grande/petite), il est fort possible que la relation soit déséquilibrée au point que certaines firmes soient contraintes d’accepter tous les « ordres » du partenaire. La licence ou le consortium peuvent être un extraordinaire moyen de développement de la firme; mais de lourdes difficultés apparaissent aussi. Il va s’agir d’un problème à la fois informationnel et à la fois lié à la qualité du bien. En effet un important problème d’asymétrie d’information existe à 2 niveaux. C’est le hasard moral et la sélection adverse. Aussi bien celui qui acquiert la licence que celui qui la cède se pose des questions quant à l’issu de la transaction : pour l’acquéreur c’est la qualité de la licence qui est important, pour celui qui la cède c’est l’usage qui sera fait de la licence qui pose problème. Les promesses des avantages de la licence sont elles réelles ? l’acquéreur de la licence ne va-t-il pas chercher à dénaturer la qualité de ce qui avait été décidé… ? Le second problème vient de la nature même d’une licence. C’est quelque chose d’assez immatérielle, dont l’exclusion est difficile. Il existe des protections légales mais elles ne suffisent pas toujours. La nature de ce type de bien amène ainsi des problèmes dans son transfert. La transmission peut tout d’abord être difficile car transférer de la connaissance prend du temps et n’est pas toujours possible. Un concept de produit peut marcher si c’est l’entreprise A qui la produit mais si c’est l’entreprise B cela peut ne pas marcher pour des raisons d’image par exemple du coté consommateur mais aussi pour des raisons interne à la firme car la culture de l’entreprise A permet de produire de façon rentable le bien en question mais ce peut ne pas être le cas si c’est l’entreprise B qui s’en occupe. Le transfert par la licence peut aussi être dangereux car la duplication peut en être très facile et finalement peu coûteuse, mais cela peut aussi être un échec. Dans ce cas pourquoi coopérer ? la réponse va venir du fait qu’il existe d’autres moyens de mener un accord de coopération. Il va être important pour la firme de choisir le mode de coopération le plus adapté à ce qu’elle recherche. L’entreprise conjointe est ainsi une des formes les plus utilisées et les plus intéressantes à étudier. D’autre part, comme le fait remarquer Alliouat [1996] la situation peut paraître paradoxale : Cette exigence [d’alliance] oblige l’acteur à coopérer tout en demeurant dans une logique de marché concurrentiel. L’opposition Marché/Firme rend ainsi incompatible les notions de concurrences et les notions d’entente. Dans ce contexte soient les firmes s’entendent pour devenir une soient les firmes se battent, en se faisant concurrence. La logique de la coopération est différente car il est préférable pour la société toute entière de coordonner et mettre en commun des efforts. C’est le cas dans la recherche et développement en général et dans la recherche de brut en particulier. C’est le but de la coopération. La production de pétrole se fait exclusivement par des consortia industriels. Il semble intéressant d’approfondir ce point unique en économie pour comprendre ce qui pousse à cela (chapitre 3), avant d’établir une analyse finale de ce secteur pour comprendre vers quelle organisation cette industrie peut évoluer (chapitre 4). Industrie du pétrole : Alliances dans l’Industrie Pétrolière Mémoire réalisé dans le cadre du DEA D’Economie Industrielle Université de Rennes 1 _____________________________________ Kogut et Singh [1985] ont montré que 42% des entreprises conjointes créées sur l’initiative de firmes étrangères aux Etats-Unis concernaient le marketing et la distribution. 17.08.98 création d’une filiale commune entre Fuchs et DEA en Allemagne, suite à une collaboration de longue date dans le secteur des lubrifiants. Règlement n 4064/89 du 21.12.89, JOCE n 1395/1 du 31.12.89.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Les alliances dans l'industrie pétrolière
Université 🏫: Université de Rennes 1 - Mémoire de DEA
Auteur·trice·s 🎓:
Tapio POTEAU

Tapio POTEAU
Année de soutenance 📅: Mémoire réalisé dans le cadre du DEA D’Economie Industrielle - 1997-2007
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