L’économie gabonaise : analyse de la structure actuelle

Analyse de la structure actuelle de l’économie gabonaise

I. Diagnostic socioéconomique et Analyse des stratégies de développement

Dans cette partie, il sera question d’effectuer une analyse des agrégat macroéconomiques du pays afin d’avoir une idée sur situation économique du pays.

A. Analyse de la structure actuelle de l’économie gabonaise

1. Agrégats macroéconomiques et évolutions

Le Gabon est considéré comme un « désert vert » à cause de la superficie qu’occupe la forêt dans le pays. La richesse créée par le pays provient principalement de des activités extractives.

Avec une croissance du PIB de 0.5% en 2017, son évolution reste fortement corrélée à l’évolution du cours du pétrole.

La chute du prix du baril de pétrole en 2015 a fortement affecté l’activité économique du pays. Ainsi, en 2015 on constate une diminution de la croissance économique du pays.

Figure 1 : Evolution du Cours du pétrole et Croissance

Evolution du Cours du pétrole et Croissance

Sources : ( U.S. Energy Information Administration, 2019); Auteur.

En outre, l’endettement de l’Etat dont le détail sera effectué dans les paragraphes suivants a fortement évolué passant de 64.2% du PIB en 2016 à 62.7% du PIB en 2017 (Expert-comptable-international.info, 2019). Cette légère baisse pourrait fortement être liée à la baisse de l’activité économique.

L’inflation quant à elle se situe à 2.7 en 2017 alors que le solde de la balance commerciale a fortement baissé passant de -9.9% du PIB en 2016 à -4.9% du PIB en 2017.

La contribution des secteurs dans le PIB (Figure 2) n’a pas fortement changé au cours du temps. Les activités extractives contribuent fortement au PIB, soit plus de 50% du PIB en 2011. Bien qu’étant en baisse en 2017 (32.9% du PIB), l’activité extractive demeure la première source de création de richesse du pays.

Le second secteur qui contribue à la création de richesse du pays est l’intermédiation financière.

En hausse de 3.4% du PIB entre 2011 et 2017, ce secteur permet d’apprécier le rôle et l’efficacité du secteur bancaire et financier dans la création de richesse du pays. Enfin, l’administration publique a connu une forte augmentation dans la création de richesse du pays. Sa contribution passe de 8.5% du PIB à 14.2 % du PIB soit une hausse de plus de 5.7% du PIB en six ans.

Cette augmentation serait attribuée à la politique de diversification des ressources fiscales afin de soutenir l’économie.

Figure 2. PIB par secteur en pourcentage du PIB entre 2011 et 2017.

PIB par secteur en pourcentage du PIB entre 2011 et 2017

Source : (DGEPF, 2017)

2. Politique budgétaire et Endettement

a) Politique budgétaire et la taxe force

Figure 3 : Evolution des recettes, dépenses publiques et du solde budgétaire en % du PIB

Evolution des recettes, dépenses publiques et du solde budgétaire en % du PIB

Source : CEA, 2017

Le Gabon, tout comme la plupart des pays en développement de la sous-région, tire ses recettes budgétaires à partir de l’exportation des matières premières.

Pour le cas du Gabon, l’exportation du pétrole (80 % des exportation en 2017) représente la part la plus importante de ces ressources budgétaires. La fluctuation du prix du baril de pétrole est donc un paramètre important à prendre en considération dans l’élaboration des lois de finance. Entre 2012 et 2013, la situation des finances publiques reste stable, avec un solde budgétaire positif (1.8% du PIB).

L’année 2015 commence a montré l’effet de la diminution du prix du baril de pétrole sur les recettes publiques. Pour l’année 2016, le déficit se creuse pour atteindre -5 % du Pib.

Bien que le déficit ait diminué pour se situer autour de -1.1 % du Pib en 2017, ce graphique rappel la vulnérabilité de la structure des finances publiques.

En regardant en détail (CEA, 2017), nous voyons que le solde budgétaire est fortement corrélé aux recettes budgétaires. En effet, la diminution des recettes budgétaires entre 2014 et 2016 entraine le déficit budgétaire alors que les recettes non pétrolières restent presque constantes dans le temps avec une moyenne située à 13% du PIB.

La dégradation des finances publiques liée à la chute du prix du baril de pétrole a eu un impact négatif sur le plan économique et social.

C’est dans ce contexte que les Etats de la CEMAC ont sollicité l’appui du FMI en adoptant en 2015 le PREF (Programme de renforcement économique et financier). L’appui du FMI vient principalement pour aider les Etats à faire face au problème de déficit budgétaire et aider ces derniers à mettre en place des plans de relance de l’économie.

Cet appui s’inscrit dans le cadre mécanisme élargie de crédit( MEDC).

Figure 4: Evolution des recettes fiscales et pétrolières

Evolution des recettes fiscales et pétrolières

Source : (CEA, 2017)

Pour mener à bien la relance de l’économie, le Gabon a adopté le PRE (Plan de Relance de l’Economie) dont les principales lignes sont :

1) l’optimisation de la collecte des recettes;

2) la maitrise de la dette publique; 3) la restructuration du système financier public;

4) la maitrise des dépenses courantes et de la masse salariale;

5) le transfert aux services publics personnalisés, et des investissements.

Ce programme entend mettre en place différentes mesures qui permettrons à long terme une viabilité des finances publiques, mais aussi renforcer la résilience face aux chocs macroéconomiques.

A ce stade, il apparait nécessaire que le pays, au travers de ce PRE, mette en place de véritables politiques de diversification de ressources publiques à travers la mise en place de mesures visant à :

1) taxer le secteur informel qui occupe une grande part dans l’activité économique du pays;

2) la réduction des avantages fiscaux et dépenses fiscales par la mise en place d’autres moyens incitatifs;

3) une véritable maitrise de la masse salariale à en diminuant les sureffectifs au sein de l’administration publique, le gel des recrutements au sein de certains ministères dont l’urgence est moins présente;

et enfin 5) régler la question de la dette dont l’analyse se fera dans la section ci-après.

b) Endettement

La question de la dette dans les pays en développement a fait l’objet de plusieurs études conduisant ainsi à la prise de conscience sur la nécessité de la mise en place d’un cadre d’analyse de la viabilité de la dette.

Les politiques keynésiennes traditionnelles montrent que la croissance peut provenir du déficit budgétaire d’un Etat grâce au multiplicateur keynésien. Cette croissance est possible que si les différents agents économiques sont non-ricardiens ( (Barro, Robert, 1981) .

Cela laisse donc penser que la prise de conscience de la possibilité d’augmentation des impôts futurs suite à une forte accumulation de la dette entrainerait une récession.

Une étude plus poussée de (TRAN, 2018) portant sur le seuil de la dette pour l’assainissement des finances publiques teste la corrélation non linéaire entre la prime de risque souverain et la dette.

Il montre que la prime de risque augmente avec le niveau de la dette, mais à partir d’un certain seuil (35% du PIB pour les pays d’Amérique Latine et 40-55% du PIB pour le reste des pays de l’échantillon), la prime de risque croit de manière exponentielle.

Un pays dont la dette est déjà risquée sur les marchés internationaux et qui y recourt pour desserrer sa contrainte budgétaire verra la charge de sa dette augmenter significativement. Connaitre le seuil de la dette servira donc de signale aux dirigeants pour mettre en place des mesures visant à changer la trajectoire de la dette pour qu’elle soit soutenable.

C’est dans ce contexte qu’intervient le FMI dans son approche d’analyse de la viabilité de la dette.

Figure 5 : Situation de la dette

Situation de la dette

Source : (BM, BAD, CEA, 2017)

Depuis l’année 2011, le stock de la dette du gouvernement gabonais a fortement augmenté passant de 16.5 % du PIB en 2011 à 59% du PIB en 2018. Elle a donc été multipliée par quatre. Plusieurs facteurs clairement connus peuvent expliquer ce fait.

Tout d’abord l’organisation des différents évènements sportifs (Coupe d’Afrique des nation 2012 et 2017) dont les budgets restent importants; la mise en place des différents projets issus du PSGE (Plan Stratégique Gabon Emergent), et enfin le besoin de ressources pour couvrir les pertes liées à la chute du prix du baril de pétrole.

Avec un stock de la dette qui croit et un taux de croissance qui diminue (2.1 en 2016 contre 3.9 en 2015), il est donc logique que les intérêts liés au payement de la dette augmentent passant de 1.6 % du PIB en 2014 à 2.3% du PIB en 2016 (PUTHOD, et al., 2018).

Le graphique ci-après permet d’illustrer le poids de la dette dans le budget de l’Etat.

En 2017, le budget de l’Etat est estimé à 2626 Milliards de Franc CFA. Les recettes non pétrolières représentent plus de la moitié soit 55%; suivi des recettes pétrolières 22.9%. Et enfin les emprunts (22.2%) qui viennent s’ajouter pour renforcer les ressources de l’Etat.

Le principale poste qui absorbe plus de la moitié des ressources de l’Etat reste les dépenses de fonctionnement (53.4%), suivi du service de la dette (24.9%) et enfin les dépenses d’investissement (21.4%).

Figure 6 : Répartition du budget de l’Etat en 2017

Répartition du budget de l'Etat en 2017

Source : (CEA, 2017)

La part des dépenses consacrée au payement des intérêts de la dette dépasse les dépenses d’investissement (24.9>21.4). Ces mêmes dépenses (intérêts de la dette) pourraient absorber tous les emprunts dont l’Etat a bénéficié durant cette période (24.9>22.2).

De plus, toutes les recettes pétrolières à elles seules ne peuvent pas couvrir le poids des intérêts de la dette (22.9<24.9). La dette du gouvernement gabonais est composée à plus de 75% de la dette extérieur (CEA, 2017) dont plus de 40% proviennent des marchés financés internationaux.

L’augmentation de la prime de risque concernant la dette du gouvernement gabonais aura pour conséquence une augmentation directe du service de la dette en cas d’emprunt. Quant à la dette intérieure, elle est constituée des créanciers privés et des crédits de TVA.

Le poids de la dette a donc un effet négatif sur les entreprises locales car la charge causée par le non-remboursement de la TVA met une pression sur leurs équilibres comptables et financiers.

La création du « Club de Libreville » en 2018 pour évoquer la question de l’apurement de la dette intérieure et extérieure permettra à court terme de renforcer la crédibilité de l’Etat auprès de ses différents partenaires.

La trajectoire actuelle de la dette pourrait conduire le pays dans une situation d’insoutenabilité de la dette.

Compte tenu du poids de la prime de risque liée à la dette du pays, des emprunts continuels pour renforcer les ressources budgétaires contribueraient à conduire le pays dans une situation de récession.

3. Echanges commerciaux et intégration régionale

Comme la plupart des pays en développement, le Gabon reste fortement dépendant de l’exportation des matières premières dont le pétrole reste la principale.

En 2016 par exemple, le pétrole représentait presque 90% du total des exportation. Malgré la baisse du cours du baril de pétrole, la part du pétrole dans les exportations du pays reste fortement importante.

En associant le secteur des mines au pétrole (Figure 7), nous concluons que l’activité extractive représente plus de 85% du total des exportations du pays. Une situation qui créée une forte vulnérabilité de l’économie du pays face à la conjoncture économique internationale. La part du bois dans le totale des exportations représente la seconde part la plus importante.

Figure 7: Répartition des exportations par produit

Répartition des exportations par produit

Source : (DGEPF, 2017)

Cela s’explique par la décision du gouvernement d’interdire l’exportation des grumes au profit du bois transformé. Cette activité pourrait donc être un véritable moyen de diversification de l’économie.

A l’inverse, le pays importe de fortes quantités de bien tels que les biens d’équipement (38% des exportations); les biens intermédiaires (27.5 % des exportations); les biens de consommation (19% des exportations).

Le pays diminuerait le cout de ses importations en produisant certains biens d’équipement sur place.

Une véritable politique de développement du secteur de transformation du bois contribuerait non seulement à créer de l’emploi mais surtout à diminuer le cout d’importation de certains biens d’équipement.

Figure 8: Répartition des importations par produit en % du total des importations

Répartition des importations par produit en % du total des importations

Source : (DGEPF, 2017)

Au sein de la zone CEMAC, la mise en place des critères de convergence permet d’assurer la cohérence des politiques nationales avec le fonctionnement de l’union économique et monétaire (FMI, 2017).

Ainsi, le respect des critères de convergence permet la mise en place de la politique monétaire sans risque de retombé négatif pour un des pays membre. En 2015, le Gabon et le Cameroun sont les deux pays à respecter trois des quatre critères de convergence à savoir : un solde budgétaire qui doit être supérieur à -1.5% du PIB; une inflation des prix à la consommation qui doit être inférieur à 3%; et un niveau de la dette publique qui doit être inférieur à 70% du PIB.

La République du Congo quant à elle a un niveau de la dette qui est proche de 100% du PIB, alors que la Guinée équatoriale a un solde budgétaire négatif important (-12.6% du PIB).

Tableau 1: Conformité aux critères de convergence en 2015

Conformité aux critères de convergence en 2015
Pays1234
Cameroun0.32.730.93.3
RCA-3.54.564-3.3
Tchad-4.26.843.32.3
République du Congo-24.83.297.12
Guinée équatoriale-12.61.728.89.9
Gabon1-0.144.7
Nombre de pays en infraction4315
1 : Solde budgétaire doit être supérieur à -1.5% du PIB
2 : Inflation des prix à la consommation doit être inférieur à 3%
3 : Niveaux de la dette publique doit être inférieur à 70% du PIB
4 : Non-accumulation d’arriérés publics doit être inferieur ou égale à 0

Conformité aux critères de convergence en 2015

Sources : (FMI, 2017)

Le respect des critères de convergence de la Zone CEMAC a permis au Gabon de bénéficier d’une amélioration de son indice d’intégration régional.

L’indice d’intégration régionale (Figure 9) est un indicateur qui vise à déterminer si un pays respecte ses engagements pris dans le cadre de mécanismes d’intégration panafricaine.

Cet indicateur couvre cinq dimensions que sont : l’intégration financière et convergence de la politique macroéconomique; l’infrastructure; l’intégration productive; l’intégration commerciale; la libre circulation des personnes.

Pour la première dimension, le Gabon obtient la meilleure note (1), comme nous l’avons vue plus haut, le pays met en place des politiques qui permettent le respect des critères de convergence dans la zone. Concernant l’intégration commerciale, le pays se classe 3èm avec une note de 0.78.

Cependant, des efforts restent à faire en matière de libre circulation des personnes et l’intégration productive.

Figure 9 : Indice d’intégration régional du Gabon

Indice d'intégration régional du Gabon

Source : (CEA, 2017)

4. Aspect sociale

Estimé à 1 979 786 en 2016 (Banque mondiale, 2017b), la population gabonaise est constituée en grande partie par des jeunes, soit 43% ont moins de 18 (UNICEF, 2017).

Avec un fort taux d’urbanisation soit 87,1 % (Population data, 2017), le profil de la pauvreté s’est amélioré dans le temps. Selon la dernière enquête de Mckinsey, entre 2005 et 2013 le taux de pauvreté serait passé de 32.7% à 30%, soit une baisse de 2.7% (Mckinsey, 2013).

Ce qui montre que malgré un contexte économique difficile, le gouvernement gabonais s’efforce de mettre en place des politiques sociales participant à l’amélioration des conditions de vie de ses opulations.

Figure 10 : Croissance du PIB/h et taux de pauvreté

Croissance du PIB/h et taux de pauvreté

Source : (CEA, 2017)

La crise économique liée à la chute du prix du baril de pétrole a affecté considérable la situation de l’emploi aussi bien au secteur privé qu’au secteur public.

Considéré comme le premier pourvoyeur d’emploi au Gabon, le secteur public a gelé les recrutements afin de maitriser la masse salariale.

En 2017, le taux de chômage au Gabon se situe à 18.5%. Concernant la santé et l’éducation, l’espérance de vie est estimée par la Banque mondiale à 65.7 ans en 2015, alors que le taux de scolarisation est estimé à plus de 90%.

Malgré une situation économique et sociale assez difficile, le Gabon est un des pays de l’Afrique centrale ayant un indice de développement humain supérieur à la moyenne soit 7 en 2017. Source : (Population data, 2017)

Carte 1: IDH à travers le monde

IDH à travers le monde

De manière générale, le Gabon traverse une situation économique assez difficile.

Cette situation s’explique principalement par le poids de sa dette et l’assèchemen t de ses ressources budgétaires causé par la chute du cours de pétrole. Pour sortir de cette situation, le pays devra mettre en place des politiques économiques suggérées par le FMI.

Ces différentes politiques consignées dans le plan de relance de l’économie seront présentées dans la section suivante : (suivant article)

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: École d’Économie – Université Clermont Auvergne - Le Centre d’études et de recherches sur le développement international
Auteur·trice·s 🎓:
BROLIN MBADINGA

BROLIN MBADINGA
Année de soutenance 📅: 2018-2019 - Master 2ème Année : « Analyse de Projet de Développement »
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