L’impact des médias sur la présomption d’innocence
Université d’Abomey-Calavi
Faculté de droit et de science politique
Ecole doctorale des sciences juridique politique et administrative
Niveau d’étude : Master II Droit et Institutions Judiciaires
La présomption d’innocence à l’épreuve des médias
Présenté et soutenu par/
Sourou Luc Malkiel ODUNLAMI
Sous la direction du
Roch Gnahoui DAVID
Professeur Titulaire des Universités
Agrégé des Facultés de Droit
Année Académique :
2020 – 2021
DEDICACE
A mes parents.
REMERCIEMENTS
Il est évident que rien ne peut se faire en autarcie.
Mes premiers sentiments de gratitude vont au Professeur Roch Gnahoui DAVID. Ses conseils, ses critiques et sa bienveillante attention ont été pour moi une source de motivation.
C’est aussi l’occasion de remercier tous les membres du jury pour avoir accepté d’apprécier ce travail.
Mes remerciements vont également à l’endroit de tout le corps enseignant de l’école doctorale pour la qualité de la formation reçue.
Je n’oublie pas toutes celles et tous ceux qui ont contribué, d’une manière ou d’une autre, à la réalisation de ce travail. Qu’ils trouvent en ces mots, le symbole de ma gratitude.
LISTE DES PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONS
Art | : | Article |
Cf | : | Confer |
Ch. | : | Chambre |
DUDH | : | Déclaration Universelle des Droits de l’Homme |
Comm | : | Commentaire |
LGDJ | : | Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence |
Ed. | : | Edition |
§ | : | Paragraphe |
Op. cit. | : | Cité plus haut |
PP | : | Pages |
R.S.C | : | Revue de Sciences Criminelles |
CEDH | : | Cour Européenne des Droits de l’Homme |
V | : | Voir |
PUF | : | Presse Universitaire de France |
P | : | Page |
Obs. | : | Observations |
TABLE DES MATIERES
DEDICACEi
REMERCIEMENTSii
LISTE DES PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONSiii
SOMMAIRE2
INTRODUCTION3
PREMIERE PARTIE : UN PRINCIPE VIOLÉ11
Chapitre I : Les contours de la violation de la présomption d’innocence par les médias11
Section I : Les origines de la violation de la présomption d’innocence par les médias11
Paragraphe 1 : La cohabitation malaisée du droit à l’information avec la présomption d’innocence11
A-L’autonomie des deux droits subjectifs12
B-L’absence d’hiérarchie formelle entre les deux droits subjectifs14
Paragraphe 2 : La poursuite de finalités opposées entre les droits en conflit18
A- Les finalités du droit à l’information19
B- Les finalités de la présomption d’innocence20
Section II : Les manifestations de la violation de la présomption d’innocence par les médias22
Paragraphe 1 : L’exercice abusif du droit à l’information22
A-Le rôle classique des médias dans les procédures judiciaires22
B-Les procédés d’atteinte à la présomption par les médias25
Paragraphe 2 : Les restrictions nécessaire face aux abus27
A-Les restrictions liées au respect des règles déontologiques28
B- Les restrictions d’accès à l’information liées aux droits de la défense31
Chapitre II : Les implications de la violation de la présomption d’innocence par les médias…33
Section I : La médiatisation des affaires juridiques34
Paragraphe 1 : L’influence de la médiatisation abusive sur la victime34
A-L’existence de fait d’une présomption de culpabilité34
B-L’atteinte irréversible à la réputation de la personne poursuivie35
Paragraphe 2 : L’influence de la médiatisation abusive sur le procès38
A-L’influence directe des médias sur l’opinion publique38
B-La pression indirecte de l’opinion publique sur les magistrats39
Section II : Le comportement des acteurs dans la procédure pénale42
Paragraphe 1 : Le devoir d’impartialité des magistrats43
Paragraphe 2 : Le devoir de réserve des autres autorités44
SECONDE PARTIE : UN PRINCIPE PROTÉGÉ47
Chapitre I : Les sanctions existantes en matière de protection de la présomption d’innocence47
Section I : L’inefficacité d’ordre général des mesures de protection de la présomption d’innocence48
Paragraphe 1 : L’inefficacité des mesures de droit commun48
A-La dénonciation calomnieuse48
B- La violation du secret professionnel51
Paragraphe 2 : L’inefficacité des mesures spéciales53
A-La constitution du délit de diffamation53
B- Les difficultés de répression de la diffamation55
Section II : Les avancées notables du code du numérique57
Paragraphe 1 : Les infractions de presse par le biais d’une communication électronique57
A- Les sanctions liées aux publications sans source58
B- Les sanctions tenant à la divulgation des détails d’une enquête60
Paragraphe 2 : La poursuite des infractions de presse par le biais d’une communication électronique61
A- La reconnaissance de la valeur probatoire de l’écrit sous forme électronique62
B- Le renvoi à l’application du code de procédure pénale63
Chapitre 2 : Les sanctions envisageables en matière de protection de la protection de la présomption d’innocence66
Section I : Le renforcement des mesures d’ordre juridique66
Paragraphe 1 : L’amélioration de la réponse pénale66
A- La préservation du secret de l’enquête et de l’instruction66
B- L’introduction d’une publicité strictement encadrée dans le cadre de l’information judiciaire68
Paragraphe 2 : L’amélioration de la réponse civile69
A-La nécessaire hiérachisation des droits en conflits70
B- La consécration de la responsabilité de l’Etat fondée sur les exigences du procès équitable72
Section II : L’instauration des mesures d’ordre pratique74
Paragraphe 1 : Le renforcement de la communication de la justice74
A-Le renforcement de la communication de la justice sur son fonctionnement74
B- Le renforcement de la communication de la justice sur son action76
Paragraphe 2 : Les autres mesures77
A-Le développement de la connaissance sur l’Etat de droit78
B- La question du financement des médias79
CONCLUSION83
BIBLIOGRAPHIE87
INTRODUCTION
« Un homme ne peut être considéré comme coupable avant la sentence du juge et la société ne peut lui retirer la protection publique qu’après avoir été convaincue de la violation des conditions auxquelles elle lui avait été accordée (…) car si le délit est incertain, n’est-il pas affreux de tourmenter un innocent »1 ? Cette interrogation de Cesare BECCARIA se comprend aisément dans le contexte de ce sujet, si l’on considère que « le métier de journaliste n’est pas d’être juge avant le juge, ni juge après le juge, ni juge à la place du juge »2.
Pourtant, avec la prolifération et la modernisation des moyens de communication par voie écrite ou audiovisuelle, la médiatisation est devenue plus forte, l’information tellement diffusée et rediffusée, que la personne soupçonnée ne s’en relève jamais, marquée qu’elle est à vie du sceau de l’infamie. Plus grave, après des mois de procédure, lorsqu’arrive le non-lieu, les médias qui ont seriné à quel point elle était coupable ne se pressent pas de clamer son innocence, ne serait-ce que pour rétablir son honneur. Une situation à l’évidence totalement injuste3 qui remet en cause la valeur de la présomption d’innocence.
Le thème objet de la présente étude est intitulé : La présomption d’innocence à l’épreuve des médias. Mais avant d’en venir au fond, une définition des mots clés du sujet, apparaît nécessaire.
D’après le lexique des termes juridiques4, la présomption d’innocence est « le principe selon lequel, en matière pénale, toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits qui lui sont reprochés, tant qu’elle n’a pas été déclarée coupable par un jugement irrévocable de la juridiction compétente. Inscrite dans la plupart des instruments internationaux de protection des droits de l’Homme et dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et ayant à ce titre valeur constitutionnelle, cette présomption a notamment pour effet de faire bénéficier du doute à la personne concernée ».
1 BECCARIA (C.), Des délits et des peines, Flammarion, Paris, 1991, p. 127.
2 SIMONIS (M.), « Un dosage délicat entre droit et déontologie », in Journalistes – La lettre de l’AJP n°97 – neuvième année – OCTOBRE 2008, page 2.
3 DUPOND MORETTI (E.), Dictionnaire de ma vie, éditions KERO, 2018, page 91.
4GUINCHARD (S.), Lexique des termes juridiques, 23ème édition, Dalloz, page 808.
Le Vocabulaire Juridique5 va plus loin en présentant la présomption d’innocence comme « un préjugé en faveur de la non-culpabilité ; règle fondamentale gouvernant la charge de la preuve, en vertu de laquelle toute personne est, a priori, supposée ne pas l’avoir commise, et ce, aussi longtemps que sa culpabilité n’est pas reconnue par un jugement irrévocable, principe qui implique qu’elle doit être acquittée au bénéfice du doute par la juridiction de jugement si sa culpabilité n’est pas démontrée, et que, pendant l’instruction même, elle doit être tenue pour non coupable et respectée comme telle, les « indices laissant présumer qu’elle a participé, comme auteur ou complice aux faits » dont le juge d’instruction est saisi justifiant seulement sa mise en examen, et la recherche, par la justice qui en a la charge, des preuves contraires à la présomption légale d’innocence ».
Les médias (presse, radio, télévision, cinéma, disque, affiche, supports multimédias, communication au public en ligne) sont les « moyens de communication de masse » par lesquels sont diffusés, au public, les messages et les contenus, de toutes natures, indispensables à la vie sociale6.
Il n’est pas question, à l’évidence, d’instruire ici contre quiconque un quelconque procès en sorcellerie, mais de tenter de conjurer le risque grave que court tout individu suspecté seulement d’avoir commis tel ou tel acte répréhensible : celui, avant toute preuve de culpabilité d’apparaître à l’opinion publique comme un déjà-coupable, puisque son nom est donné par les médias et les griefs articulés contre lui largement diffusés, voire commentés.
5 CORNU (G.), Vocabulaire Juridique, Association Henri Capitant, 12ème édition, page 551.
6 DERIEUX (E.), Le droit des médias, Editions Dalloz, page 4.
Etudier ce thème, revient à apprécier l’impact des médias sur les affaires judiciaires et particulièrement sur l’un des principes fondamentaux du procès pénal qu’est la présomption d’innocence.
Historiquement, la presse moderne ne remonte pas au désir d’informer, d’éduquer et de distraire le public7. S’il est vrai aujourd’hui que le droit des médias peut s’entendre, en partie, de l’ensemble des droits et devoirs du journaliste, la presse est conçue comme à la fois le support et le contenu de l’information relatée par le journaliste. La presse et son droit trouve leur origine dans la naissance et le développement du procédé d’imprimerie.
La communication ou échange d’informations, notamment par le biais des médias, a pris une ampleur considérable avec la mondialisation et surtout la technologie numérique8. Le développement de vastes conglomérats de médias professionnels qui s’est accéléré tout au long du XXe siècle n’a cessé de susciter des inquiétudes et d’encourager l’avènement d’une production alternative d’information, qui se voulait en opposition, ou en marge, de ce qui était diffusé par les médias dominants. L’histoire des médias modernes comme la presse écrite, le cinéma, la radio et la télévision, est donc inséparable de celle des critiques qui l’ont accompagné en cherchant à produire d’autres manières de raconter le monde9.
Au Bénin, pendant des décennies, les systèmes politiques ont souvent été caractérisés par la toute-puissance de l’Etat sur les rares médias qui existaient10. Il aura fallu l’historique Conférence des forces vives de la Nation, tenue en février 1990 pour ouvrir la voie à une démocratie pluraliste et libérale concédant aux citoyens le droit à l’information et surtout la liberté de presse.
7 Albert (P), Dictionnaire de la culture juridique, ALLAND (D). et RIALS (S)., Paris, PUF, 2003, p.1190, V° Presse.
8 HUET (J.) & DREYER (E.), Droit de la communication numérique, Lextenso éditions, LGDJ, 2011.
9 CARDON (D.) & GRANJON (F.), Médiactivistes, Collection Contester, 2ème édition, 2013, p.1.
10 QUENUM (F.), Le régime Juridique des médias audiovisuels privés au Bénin à l’ère du renouveau démocratique, Mémoire de maîtrise es Sciences Juridiques, 2005, page 2.
Tel que prévu au cours de la Conférence nationale, l’Etat reconnaît aux particuliers le droit de créer des organes de presse et d’exercer au même titre que les organes publics. La conséquence immédiate de cet acte aura été la création de multiples journaux et chaînes de télévision privés.
La présomption d’innocence, en ce qui la concerne, était ignorée de l’ancien droit qui, entre l’acquittement et la condamnation, connaissait des solutions intermédiaires : l’absolution, la mise hors de cause, le plus amplement informé, qui n’avaient pas la valeur morale d’un acquittement, ni ses conséquences juridiques11. Mais, préparée par le mouvement d’idées des philosophes au XVIIIe siècle, la présomption d’innocence a été exprimée avec force dans l’article 9 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen du 27 août 1789 en une formule célèbre qui lie étroitement l’innocence présumée et la protection de la liberté individuelle au cours du procès pénal12. L’article 11 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, adoptée par les Nations Unies en 1948, l’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’Homme (1950) et l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de New York (1966) réaffirment la même règle in dubio pro reo.
Selon BOLLE, l’histoire de la présomption d’innocence remonterait à l’apparition de la notion de procès pénal.13 Pour lui, « le droit romain l’avait déjà consacré, sous les termes bien ambigus d’in dubio pro reo. » Cette origine latine a conduit tout naturellement le Siècle des lumières, à coucher le principe dans la Déclaration des droits de l’homme et du Citoyen puis, au XX ème siècle, dans la Déclaration Universelle des droits de l’Homme (art. 11) et à l’article 6§ 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme.
11 La portée de l’adage in dubio pro reo ne doit pas être exagérée : le juge ne peut retenir la présomption d’innocence que s’il n’est pas convaincu de la valeur des preuves rapportées contre la personne poursuivie. Mais quand il hésite sur l’application d’un texte pénal à l’espèce dont il est saisi, il ne peut acquitter sous le prétexte de l’obscurité ou du silence de la loi : il lui appartient de rechercher lui-même, par les méthodes d’interprétation propres au droit criminel, le sens de la loi qu’il doit appliquer (LEGAL , obs. R.S.C., 1961.337 et 1970.380).
12 « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable ; s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la loi.
13 BOLLE (P.H), Origines et Destin d’une institution menacée, La présomption d’innocence in Le droit pénal à l’aube du troisième millénaire, Mélanges offerts à Jean PRADEL, éd CUJAS, Paris 2006, p.47.
Tel ne semble cependant pas être l’avis de Christine LAZERGES. Après avoir logé le principe dans l’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, celle-ci déclare que « cet article est directement issu du traité des délits et des peines de Cesare BECCARIA »14 qui l’avait affirmé dès 1764.
Quelle que soit son origine, on retiendra que le principe a acquis une noblesse universelle et devient une garantie fondamentale de protection des droits humains, même si, progressivement, et de manière plus accentuée, son domaine se réduit sous le prétexte de la lutte contre l’insécurité15.
En doctrine, la question du respect du principe de la présomption d’innocence par les médias a fait l’objet de nombreux débats. Si Jacques ENGLEBERT estime que la présomption d’innocence n’est pas applicable aux médias qui poursuivent un but diamétralement opposé16, cette opinion n’est pas partagée par Serge GUINCHARD17 et Emmanuel DERIEUX18 qui estiment que le respect de la présomption d’innocence s’impose aux médias.
Pour Serge GUINCHARD en effet, le droit d’informer ne justifie par tout et n’importe quoi. De ce fait, la présomption d’innocence en ce qu’elle constitue un droit fondamental, le présumé innocent va pouvoir l’opposer à tout le monde. D’abord, à tous les pouvoirs étatiques, notamment à son interlocuteur naturel, le juge, lorsqu’il manifeste à son égard un préjugé. Ensuite, à toutes les personnes ou institutions, privées ou non, enfin à un interlocuteur désormais incontournable dont les images ou les mots sont parfois meurtriers : les médias.
14 LAZEGES (C.), La présomption d’innocence, in Libertés et droits fondamentaux ; R. CABRILLAC, M.-A. FRISON-ROCHE, T. REVET (Sous la direction de), Dalloz, Paris, 2006, p.509.
15 DJOGBENOU (J.), Les privations de liberté individuelle de mouvement non consécutives à une décision pénale de condamnation, Thèse de Doctorat unique en droit, Université d’Abomey- Calavi (Bénin), 2007, p 316.
16 ENGLEBERT (J.), « Imposer à la presse le respect de la présomption d’innocence est incompatible avec la liberté d’expression », Doctrine des médias, Introduction.
17 Serge (G.), Les Procès hors les murs, aux Mélanges CORNU, PUF 1994, p. 201.
18 Emmanuel (D.), Justice Pénale et droit des médias : Justices 1998 (n°consacré à la justice pénale), p.133.
Telle est la position partagée par le législateur béninois qui impose le respect de la présomption d’innocence aux médias. Dans sa volonté affichée de promouvoir et de garantir les droits fondamentaux de la personne et des libertés individuelles, la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, modifiée par la loi n° 2019-40 du 07 Novembre 2019, a admis la règle en son article 17. Cette garantie constitutionnelle de la présomption d’innocence n’est pas toujours préservée par le journaliste qui relate les faits sans prendre toutes les précautions nécessaires. A titre de précaution, on peut évoquer le recours à la nuance et à la subtilité et surtout l’emploi du mode conditionnel au lieu de l’infinitif. Ne pas le faire risque d’accabler l’information judiciaire et de constituer une pression sur le bon déroulement de la justice.
Par exemple, si un magistrat ne saurait s’adresser à l’accusé en matière pénale en laissant déjà entendre qu’il est coupable, que dire des mots des journalistes encore plus redoutables en raison de la large diffusion qu’ils connaissent, des mots dont sont victimes certains présumés innocents, condamnés avant même d’être jugés, dans de véritables prétoires parallèles ? La réponse n’est pas aisée, car on se trouve là au cœur de l’affrontement de deux droits également fondamentaux traduisant des aspirations quasi antinomiques : d’un côté, la présomption d’innocence qui postule le droit à la discrétion de son titulaire ; de l’autre, la liberté d’expression et d’information du journaliste qui satisfait le droit de savoir du public.
Si l’on à présent à l’esprit que le procès pénal, dès ses premiers instants, est tout entier gouverné par le droit de la preuve, on comprend l’enjeu du respect la présomption d’innocence.
Dès lors se pose la question de savoir : quel est le sort réservé à la présomption d’innocence par les médias dans le traitement des informations ?
L’objectif de ce sujet est d’analyser l’influence des médias sur la présomption d’innocence, en proposant des mesures visant à sanctionner la violation de ce principe par les médias.
Le sujet revêt un intérêt, théorique et pratique. Au plan théorique, les relations entre la justice et la presse ne vont pas sans susciter des difficultés dans la mesure où elles mettent souvent en conflit deux valeurs fondamentales que sont la liberté d’expression qui a pour corollaire le droit à l’information des médias et la présomption d’innocence. Il est question de rechercher le point d’équilibre, au regard des circonstances concrètes d’une affaire pénale, entre l’intérêt légitime du public à être informé et l’intérêt de la personne soupçonnée d’une infraction à la préservation de sa présomption d’innocence.
Au plan pratique, la présomption d’innocence est souvent malmenée par les médias. Ce travail pourrait permettre aux médias d’intégrer davantage la présomption d’innocence dans le traitement des informations judiciaires et au législateur de prendre des dispositions visant à renforcer la protection de la présomption d’innocence.
Les relations parfois conflictuelles, entre les médias et la justice, proviennent de ce qu’ils mettent en œuvre des logiques qui s’opposent. Les médias ont pour objectif d’informer le public, ce qui les amène à anticiper sur le déroulement des procès ; tandis que la présomption d’innocence s’inscrit dans une logique de protection de l’honneur et de la dignité de la personne poursuivie. L’actualité fait souvent état des relations complexes entre ces deux impératifs : d’une part, la liberté d’informer et d’autre part la présomption d’innocence. La violation récurrente de la présomption d’innocence par les médias fait dire à certains auteurs, que la présomption d’innocence dans la pratique n’existe pas19. Aussi, préconisent-ils de sanctionner toute violation de ce principe cher à tout individu.
C’est pourquoi dans le cadre de cette étude, il sera abordé d’une part, la présomption d’innocence comme un principe violé par les médias (I) et d’autre part de la présomption d’innocence, un principe protégé (II).
19 Temime(H.),« Professiondefoi »,inhttps:// /editos/profession-de-foi-par-herve–temime.