Les étiquettes de vin ou des inscriptions à l’infini

B. Les étiquettes de vin ou des inscriptions à l’infini

75% des Français trouvent que le vin « est plus difficile à choisir que les autres produits alimentaires »79. En effet sur une dizaine de critères des étiquettes, les consommateurs n’en connaissent que la moitié. De même, 57% ont du mal à déterminer les mentions de qualité d’un vin, c’est pourquoi le choix est encore plus difficile. La qualité est le seul critère recherché dans la décision d’achat du consommateur80.

Le prix est éliminé de notre analyse. En effet, le prix est souvent un des premiers critères d’influence au niveau des choix de bouteille81. La qualité serait représentée par son prix élevé. Le prix est surtout considéré pour l’occasion de consommation et selon le niveau de revenu.

Pourtant, la majorité des Français arrive dans les rayons avec une fourchette de prix déjà fixée. L’important est donc de savoir dans une même catégorie ce qui va influencer le consommateur.

Le manque d’informations sur le point de vente laisse le consommateur seul face à plus de 1000 références. Ainsi, son choix s’effectuera par la couleur mais surtout par le packaging et son étiquette. Il faut donc travailler son étiquette et connaître les mentions importantes. C’est ce que cette étude se propose de faire. Il y a donc des critères intrinsèques (1) au produit du vin à prendre en compte mais aussi extrinsèques (2).

79 http://www.ipsos.fr/ipsos-marketing/actualites/vin-produit-quotd-hommesquot visité le 12/02/2011

80 “Quality signals in wine marketing: the role of exhibition award”, U.R Orth, P, Krska, International Food and Agribusiness Management Review, vol , p 385-397, 2002.

81 « Do consumer expectations match experience? Predicting the influence of price and country of origin on perceptions of product quality » Roberta Veal et Pascal Quester, International Business Review, volume 18, 2009.

1. Les mentions intrinsèques au vin

Les mentions intrinsèques sont les mentions qui parlent directement du vin, en lui- même de son goût etc…Il s’agit du travail du vigneron qui réalise la viticulture et la vinification. La viticulture est le moment de culture de la vigne dans le champ.

Le vigneron choisit le cépage en fonction de la terre, arrose en fonction du climat etc… La vinification est le processus de transformation du raisin en vin.

*** Le degré alcoolique

Le degré alcoolique est un élément important car obligatoire sur la bouteille. Les personnes interrogées ne se soucient guère de cet élément car il ne correspond réellement à aucune valeur de qualité. Au Moyen-âge, le vin se buvait rouge et surtout très aigres dans les 6 ou 7 degrés jusqu’au XIXème siècle82.

La plupart des vins sont devenus très alcoolisés jusqu’à 16°. En effet, les vins du Nouveau Monde augmenteraient beaucoup les proportions d’alcool.

Pourtant, par une tendance venue des Etats-Unis, les producteurs commencent à jouer sur le moindre degré de leurs vins. Ainsi, les Domaines Auriol ont depuis 2009 sorti un vin So Light à 9° d’alcool contre les 12-13 traditionnellement.

Cette tendance s’inscrit dans la lutte contre l’alcoolémie. Avec l’augmentation des campagnes gouvernementales mais aussi sanitaires, les vignerons ont pris conscience que le degré ne pouvait augmenter continuellement. Mais, cette tendance s’inscrit dans la lutte contre la malbouffe et les calories, il serait alors comme un produit dit de « régime » comme nous l’indique le So Light. En effet, tout le monde sait que l’alcool contient beaucoup de calories.

Une étude83 s’est proposé de comparer l’effet des vins peu alcoolisés sur les consommateurs. Les résultats sont très favorables, puisque les consommateurs ne sentent aucune différence entre un vin normal et à faible degré. Néanmoins, les impressions et les attentes des consommateurs sur ses vins sont très négatives. En effet, les consommateurs attendent souvent une qualité très basse de ces vins.

Bien que cette mention a seulement une faible influence sur la qualité perçue. Ainsi, le vin à faible degré d’alcool pourrait correspondre aux attentes d’un segment de population : une diminution de l’alcool pour protéger sa santé, au niveau des régimes. Mais il va falloir surtout communiquer pour supprimer les appréhensions des consommateurs.

*** La mention « contient des sulfites »

Il s’agit d’une obligation légale à partir de 10 mg/L, avec un maximum légal de 160 pour les vins rouges, 210 pour les vins blancs et 400 pour les vins moelleux. Les dites « sulfites » correspondent au soufre. Ces intrants ne sont pas les seuls.

En effet, les vignerons utilisent des pesticides du sulfate d’ammonium de la gélatine ou encore des levures. Ils permettent tout d’abord à un vin pas très bon de le relever et le rendre acceptable.

Mais aussi, cela permet au vin de supporter la vie en supermarché ainsi que leur transport. Il sera dans un camion en palettes qui attendra sur un quai de déchargement à la chaleur pendant un certain temps. Ensuite, dans les rayons des supermarchés, les bouteilles seront à la verticale dans les plus de 18°C, sous les néons allumés 24h/24. Il faut savoir que pour sa conservation le vin a besoin d’être allongé, dans le noir à 12-13°C. Ainsi, le vin a besoin de ses produits pour ne pas « tourner au vinaigre ».

Pourtant, peu de consommateurs s’intéressent à cette mention. Il s’agit pourtant d’une des seules mentions qui indiquent ce que contient le vin.

En effet, tous les autres produits de la consommation courante se doivent d’indiquer leur composition et les Français y sont très attentifs à ce que l’on dit. Et pourtant, ici, le consommateur est absent, il ne sait pas ce que cela veut dire et souvent cela est écrit en petit. De plus, le choix est tellement difficile qu’il ne va pas ajouter une mention qui n’est pas assez communicante.

*** Le millésime

« Avec le vin, tu peux avoir une mémoire historique comme une bibliothèque ou une cinémathèque »84, cette approche est surtout donnée par le millésime qui recense chaque année de production. Le vin est un des seuls produits agricoles qui se bonifie avec le temps.

Le millésime permet de le dater et de se remémorer d’une année particulière (comme au début de chaque émission d’In Vino BFM). Il a donc sa carte de visite avec le millésime : le climat a conditionné son goût et se transforme chaque année.

Le millésime correspond à l’année de vendange qui peut être indication de qualité lorsque les experts établissent qu’il s’agit d’une bonne ou d’une mauvaise année. Les années sont cotées selon les régions.

Il permet également de suivre l’évolution du vieillissement du vin. En effet, le vieillissement suit une courbe parabolique. Le vin s’améliore jusqu’à atteindre son paroxysme puis s’éteint petit à petit. De plus, il est d’autant plus qualitatif que pendant longtemps il a été interdit pour les vins de table. Aujourd’hui, cette question a été assouplie si 85% de la récolte provient de cette année.

Ce critère est peu important pour les moins de 35 ans (seulement 44%) car il est seulement connu à 45%. De plus, l’utilisation du millésime insinue une connaissance importante en matière de vin pour connaître les bonnes et les mauvaises années.

*** L’origine de production

Le vigneron a « un engagement honnête avec la terre et un désir d’exprimer le caractère d’un lieu dans l’élaboration du vin »85. C’est pourquoi la région et le lieu de production sont aussi importants pour le vigneron et qu’il les place souvent en premier sur l’étiquette.

La région de production correspond à un terroir qui serait transmis par la bouteille. Le terroir est un mot qui existe peu dans d’autres langues. René Lebeau explique qu’il s’agit d’une « étendue de terrain présentant certains caractères qui l’individualisent au point de vue agronomique dus à ses qualités physiques et aux aménagements entrepris par l’homme »86.

La région de production est l’une des principales87 variables qui influencent la décision avec le prix, elle arriverait même en deuxième après le prix88. De plus, Emily McCucheon et al (2009)89 ont remarqué qu’au niveau des consommateurs australiens, le terroir était d’une importance capitale après la qualité et le prix (deux mentions que nous retirons de l’analyse).

85 « Le goût et le pouvoir » Jonathan Nossiter, Le Libre de poche, 2009, p 41

86 Définition citée dans « Existe-t-il des terroirs viticoles en Champagne » Alain Marre, Revue géographique de l’Est, vol 44, 1-2, 2004.

87 « Follow the leader : how expert ratings mediate consumer assessments of hedonic quality » David Priilaid, J. Feinberg, O. Carter et G.Ross, South African Journal of Business Management, volume 40, juin 2009,

88  = 81

La population française reste très ancrée au niveau du terroir. 88% des Français pensent que ce critère est important voire très important pour choisir un vin90. Les jeunes adultes sont très sensibles à l’origine et à la région, c’est pourquoi il s’agit du premier critère de choix pour une bouteille (74% à 84%) bien avant le prix (48,7% à 80%)91. Selon l’étude réalisée sur 155 jeunes adultes, ce critère est important pour 67% de cette population.

De plus, il s’agit d’un des critères qu’ils connaissent le mieux à 67%. La région signifie quelque chose car c’est un critère facile à comprendre et à visualiser. De plus, le peu de régions simplifie son déchiffrage.

Pourtant, il y a une certaine confusion entre l’origine et la marque, surtout pour les jeunes de 25-34 ans qui citent le Beaujolais comme une marque92. Ces différentes informations paraissent étranges. Les jeunes croient connaître ce qu’est l’origine de la production puisque cela semble simple : Bordeaux, Bourgogne, Alsace.

Cependant la confusion avec le Beaujolais est assez explicite pour comprendre que le vin reste obscur même avec la connaissance d’une mention.

La région est une des plus importantes informations pour prévoir la qualité du vin rien qu’avec l’étiquette. De plus, l’ajout d’information sur la région augmenterait la confiance du consommateur sur sa qualité93. La région transforme le goût d’un cépage. En effet, le climat va jouer sur son caractère, la terre va donner une saveur particulière au raisin. Il est donc important de ne pas négliger la région de production.

*** Le cépage

Le cépage est une notion peu comprise et surtout peu connue des jeunes Français, à seulement 42%. Le cépage est la variété de grappes de raisins utilisées pour le vin. Bien que la notion soit simple, la maîtrise de celui-ci demande du temps. Il faut une bonne connaissance pour distinguer les cépages entre eux et leurs caractéristiques.

Tout le monde a entendu parler de Merlot, de Chardonnay, de Syrah, de Riesling, de Pinot Noir ou de Cabernet-Sauvignon. Il existe plus de 6 000 cépages dont 50 principaux dont certaines régions en ont la spécificité94. Ce cépage va déterminer le goût du vin mais il demande une connaissance particulière.

L’utilisation de la mention est très moderne. Elle vient des Etats-Unis et surtout de Californie qui inscrivent en gros et au centre des étiquettes le cépage, souvent Chardonnay, utilisé. Depuis, il y a eu une explosion de ces mentions partout dans le monde.

Le cépage est important pour les Français à 78%95, alors que pour les jeunes c’est un critère important à 74%96.

Au niveau de l’étude réalisée au cours de ce mémoire, 57% des répondants ont considéré ce critère comme important voire primordiale. Cela incite donc à une explication plus poussée de cette notion qui est peu comprise. La forte mise en avant de cette mention implique peut être ce chiffre. En effet, les personnes sans comprendre, l’utilisent d’une façon générique pour faire leur choix.

*** Label Agriculture Biologique ou AB

Le vin bio représente 5% des vins commercialisés en France, dont la moitié est en cours de labellisation97. Il y a un cahier des charges très important : il ne doit y avoir aucun produit phytosanitaire dans l’élevage de raisin, c’est-à-dire que ce sont les raisins qui sont issus d’agriculture biologique.

Pourtant, il peut y avoir rajout de soufre. D’ailleurs, cela est même plutôt conseillé à cause de l’instabilité et l’acidité des raisins qui sont souvent moins mûrs.

Ce label est peu important pour les moins de 35 ans à 69%, seulement 1% pense qu’il est primordial98. Ce chiffre est tout de même étrange vis-à-vis de la tendance du bio. On voit fleurir beaucoup de produits qui n’utilisent pas de produits chimiques et les Français en redemandent.

Pourtant, le vin a une image de produit naturel. Sans doute, les Français ne s’imaginent pas le nombre de produits chimiques utilisés par les vignerons. Ils ne s’intéressent donc pas à ces produits qui seraient seulement pour suivre la tendance.

*** Les labels juridiques

La réforme des appellations a bouleversé totalement les productions. En effet, il y a eu une transformation de nomination mais aussi de possibilités comme nous l’avons vu, dans le point juridique.

Ici, nous allons reprendre certains éléments mais surtout s’attacher à la signification de chaque mention pour le consommateur.

La loi du 6 juillet 1966 définit l’Appellation d’Origine comme la « dénomination d’un pays, d’une région ou d’une localité servant à désigner le produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus au milieu géographique comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains ». L’AOC permet la garantie d’une culture, d’un territoire précis qui donne aux vins ses caractéristiques intrinsèques.

La distinction AOC ou maintenant AOP est un objet de garantie de qualité. En effet, le cahier des charges de production très strict établi par l’INAO permet de donner l’image qualitative et traditionnelle. Il faut une aire de production délimitée, une méthode de culture spécifique, un rendement maximal, et un degré minimal.

Pourtant, en novembre 2005, Philippe Mauguin, directeur général de l’INAO de l’époque déclarait : « [l’appellation] est une garantie d’origine et de tradition. Elle ne donne pas d’assurance gustative. Un vin AOC n’a pas forcément meilleur goût qu’un autre. »99. Cette réflexion montre bien le matraquage communicatif autour de cette notion qui donne au consommateur l’impression de qualité.

De plus, « La baisse qualitative des AOC a miné la confiance des consommateurs », explique Alain Bazot, président de l’association des consommateurs100. Maintenant, la qualité des vins AOC a une perception des variables et représente surtout une vision traditionnelle avec le goût juste après101.

En effet, en 2005, 99% des vins qui ont demandé l’agrément de l’appellation ont pu le recevoir. Cette légèreté pour une appellation de qualité fait craindre une perte de mérite pour la filière.

Cet agrément permettait de donner la possibilité à une région de devenir une appellation. Pourtant cet agrément était donné par des professionnels, ce qui permettait une certaine largesse. Cependant, la réforme en 2008 et 2009 a permis une meilleure indépendance du comité et surtout une revisite complète des AOC pour les homogénéiser. La loi est donc revenue sur les critiques qui entachaient la réputation des appellations.

Les appellations sont très contrôlées en Europe. Cette différenciation restreint énormément les producteurs qui se plaignent souvent de la concurrence du Nouveau Monde. De même, au niveau financier, leurs bouteilles peuvent se permettre d’être moins chères.

Pourtant, les Etats-Unis, principaux cibles des vignerons européens, ont commencé à construire des appellations dans les années 1980, avec des AVA (American Viticultural Area). Elles ne représentent que des zones viticoles aux particularités géographiques spécifiques contrôlées par l’Alcohol and Tobacco Tax and Trade Bureau (TTB).

Après les AOP, il existe, depuis 1949, le vin de pays (déjà explicité en I.A.2). On y retrouve des appellations régionales, comme le Val de Loire, départementales comme le Pays de l’Hérault ou locales, comme des Coteaux de l’Ardèche. Il existe également les vins de table, il n’y a pas de cépages désignés, ni de millésime.

C’est la catégorie la plus libre mais l’étiquette doit porter mention de : « vin de table de France » ou « mélange de vins de différents pays de la CEE ».

101 « Perception de qualité et signes officiels de qualité dans le secteur alimentaire », G.Tavoularis, F.Recours, P.Hebel, Etudes CREDOC, n°236, novembre 2007

Néanmoins, les français sont très attachés aux AOC puisque pour 81% des Français102 les jugent très importantes alors que seulement 78% des moins de 35 ans jugent ce critère important103. Ainsi, ce problème de non appellation au Nouveau Monde est un moindre problème en France. Mais il faut rappeler que « 70 % des consommateurs ne savent pas faire la différence entre un vin de pays et une appellation, ni ce qui distingu e le négoce de la propriété. » explique Vincent Girault, directeur de Biovidis104.

Il devient donc un objet de différenciation au niveau des linéaires mais également au niveau des produits d’une même marque. Pourtant, l’augmentation du nombre d’AOC peut faire fléchir cette analyse. Il y aurait donc moins de distinction entre la plupart des AOC.

De même, cette multiplication ajoute des noms d’appellations, les consommateurs qui ne savent pas réellement ce que c’est peuvent donc être encore plus dans la confusion.

Ces mentions qui désignent la matière du vin représentent en général pour les jeunes consommateurs des mentions de qualité qui permet de le rassurer dans son choix. Pourtant, certaines mentions qui pourraient les alerter passent totalement inaperçues. Le manque de communication à ce sujet laisse le client dans l’ignorance de ces mentions.

Mais, sur l’étiquette, il existe également des mentions externes qui ne désignent pas exactement la boisson en elle-même.

On pourrait penser qu’elles n’intéressent pas le consommateur. Et pourtant, certaines d’entre elles deviennent indispensables dans leur choix.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
L’étiquette de vin et le comportement du consommateur
Université 🏫: Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne - Master 2 Logistique
Auteur·trice·s 🎓:
Pauline Couston

Pauline Couston
Année de soutenance 📅: Mémoire de fin d’études - Année 2011
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