Collectivités territoriales françaises : fonctionnement et décentralisation

II. Les collectivités territoriales : Commune, Département et région
Les collectivités territoriales pèsent 70% de la dépense pour la culture en France. Nous allons donc voir comment ce système conçu autour des collectivités territoriales s’articule afin de financer l’activité culturelle en France. Nous nous intéresserons ainsi à la décentralisation qui opère avec un certain nombre de réformes dont certaines très récentes.

A. Rôle et fonctionnement

Les entités considérées comme collectivités territoriales, répondent à trois critères : tout d’abord, ce sont des personnalités morales de droit public, ensuite, leurs compétences confiées par la loi sont propres à la structure et enfin, il y a un conseil d’élus. Ce sont des structures administratives distinctes de l’administration de l’Etat. Elles doivent prendre en charge les intérêts de la population d’un territoire précis, mais en dehors, elles ne sont plus compétentes.
L’une d’entre elle, la plus petite, est la Commune. Elle est créée par la loi du 14 juillet 1789 mais c’est en 1884 qu’elle est née au sens d’aujourd’hui. Les Communes avec pour représentant de l’Etat, le maire, ont pour compétences traditionnelles d’organiser les élections. Elles gèrent aussi l’action sociale comme les garderies, les crèches et les personnes âgées mais aussi l’enseignement avec les écoles primaires. De plus, elles sont compétentes en matière de voirie, d’aménagement du territoire avec les logements sociaux, les zones d’activités, etc. Enfin, elles gèrent la protection de l’ordre public. Dans la politique de décentralisation des compétences, les communes s’occupent de l’urbanisme, l’enseignement, l’action économique, les logements, l’action sociale et la culture. En effet, l’action économique est une participation au financement des aides directes aux entreprises selon le principe de proximité. Pour le logement, il existe le PLH ou Programme Local d’Habitat qui est constitué d’observations, de définition et de programmation des investissements et des actions en matière de politique du logement à l’échelle d’un territoire. En ce qui concerne l’action sociale, elle est régie par les Centres Communaux d’Action Sociale. La culture est aussi une compétence des Communes en ce qui concerne les bibliothèques, les conservatoires municipaux, les musées, le financement de l’enseignement artistique initial et le transfert sur demande de la propriété de monuments classés ou inscrits au patrimoine historique.
Le Département est une autre collectivité, créée en 1790 et qui a bénéficié en première des lois de décentralisation des compétences de 1982. Ces compétences peuvent se résumer à quatre grands types d’actions : l’action sociale, l’aménagement de l’espace et équipement, les actions économiques et l’éducation. Tout d’abord, le département met en œuvre l’action sociale et gère les prestations d’aide sociale : aide sociale à l’enfance, aide sociale aux personnes âgées, aide sociale aux personnes handicapées, insertion sociale et professionnelle (RSA), aide au logement, etc. Il est compétent en matière d’aménagement de l’espace et équipement, ainsi, il se charge de l’entretien de la voirie départementale et d’une partie de la voirie nationale depuis 2004 et s’occupe des transports non-urbains de personnes et de scolaires. Sur le plan économique, il peut attribuer des aides directes au développement économique du Département. Enfin, son action sur l’éducation, la culture et le patrimoine concerne la gestion des collèges, des bibliothèques centrales de prêt, des archives et musées départementaux et du développement des enseignements artistiques.
La Région quant à elle, est créée en 1972 mais sa reconnaissance institutionnelle se fait seulement en 2003. Ses compétences sont principalement concentrées sur le développement économique mais elle gère aussi l’aménagement du territoire et l’éducation. Ses compétences en termes d’éducation concernent par exemple les lycées, la formation professionnelle continue, les musées et archives régionaux pour ce qui est de la culture.
Ces collectivités territoriales sont toutes primordiales au financement de la culture. Nous avons vu qu’elles ont des compétences particulières. Cependant, ces compétences ne sont pas assez claires pour toutes les collectivités. Certaines compétences s’entrecoupent, d’autres ne sont pas attribuées. Les structures culturelles se retrouvent alors face à une organisation étatique organisée mais dont les rôles ne sont pas très bien définis. En effet, même s’il y a eu la volonté de créer des « blocs de compétences », la tendance à modifier et ajouter de nouvelles collectivités territoriales sans supprimer celles existantes mène à une accumulation composée de plusieurs échelons. Afin de contrôler les dépenses, l’Etat doit décider des compétences propres à chaque institution. Des mesures sont mises en place dans le contexte de décentralisation des compétences. Le système traditionnel se voit peu à peu modifié par des réformes qui prétendent tendre vers l’optimisation du fonctionnement actuel.

B. Décentralisation

a. Réforme des collectivités territoriales

i. Les EPCI

La clause générale de compétence est un concept qui donne la capacité d’initiative à une collectivité territoriale dans un domaine de compétence au-delà de celles qui lui sont attribuées de plein droit, sur le fondement de son intérêt territorial en la matière. Cependant, la réforme du 16 décembre 2010 vient supprimer cette clause pour les départements et les régions. C’est seulement lorsqu’il y a un vide juridique alors les départements ou les régions pourront prendre des mesures sur ce sujet. Cette mesure engagée par le président Nicolas Sarkozy en 2008 vise à simplifier l’organisation territoriale du pays en deux pôles : départements-région et communes- intercommunalité. Il souhaite ainsi faciliter la fusion des collectivités territoriales avec notamment la création des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre regroupant plusieurs communes ayant décidé de développer plusieurs compétences en commun, comme les transports, l’aménagement du territoire ou la gestion de l’environnement. L’Etat élabore donc ce qui est appelé dans la loi « projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité ». (Article L5210-1, Loi 96-142 1996-02-21 jorf, 24 février 1996)
L’EPCI est une personnalité morale de droit public, avec une mission d’intérêt général. Les communes qui le composent lui transfèrent des compétences et des ressources. Il existe deux types d’EPCI : ceux sans fiscalité propre et ceux avec. Les EPCI sont administrés par les conseillers communautaires qui lui sont propres. Ils disposent de leurs propres budgets. Pour les EPCI à fiscalité propre, ils sont composés des impôts locaux, de la dotation globale de fonctionnement versée par l’Etat et des dotations d’équipement des territoires ruraux. De plus, ils disposent de leurs propres services. Ils sont soumis au principe de spécialité, leurs compétences d’attribution sont spécialisées sur des champs précisés par la loi ou dévolus de loi dans le cadre de son périmètre. Ils sont aussi soumis au principe d’exclusivité puisqu’ils sont les seuls à pouvoir agir dans le domaine de compétence qui leur a été transféré. Enfin, ils répondent à la notion d’intérêt communautaire.
Les compétences exactes seront réparties dans une loi ultérieure appliquée en 2015. Au niveau fiscal, la taxe professionnelle est supprimée et remplacée par la contribution économique territoriale que nous développerons plus tard.

ii. La loi du 16 décembre 2010

La loi du 16 décembre 2010 résulte des propositions du Comité pour la réforme des collectivités territoriales piloté par Edouard Balladur. La loi prévoit plusieurs changements.
Tout d’abord, elle prévoit le remplacement des conseillers généraux et des conseillers régionaux par un nouveau type d’élu local : le conseiller territorial. Siégeant à la fois au conseil général et au conseil régional, il sera élu pour 6 ans au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, dans le cadre de cantons redécoupés.
Dans un souci de renforcement de compétitivité des grandes agglomérations, les départements ou régions pourront fusionner. Cela ne sera cependant possible qu’avec l’accord de toutes les assemblées concernées et de la population consultée par référendum.
Une nouvelle catégorie d’établissements publics de coopération intercommunale est créée : la métropole.
Afin que l’ensemble du territoire soit couvert par des structures intercommunales avant le mois de juin 2013, la loi prévoit notamment un nouveau dispositif pour faciliter la fusion entre plusieurs communes : “les communes nouvelles”. La création d’une nouvelle commune sera autorisée à la condition que cette demande émane d’au moins les deux tiers des conseils municipaux des communes d’un même établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ces conseils municipaux doivent en outre, représenter plus des deux tiers de la population totale.
La loi maintient l’existence des départements et des régions, mais elle prévoit la spécialisation de leurs compétences. Ainsi, à partir du 1er janvier 2015, les départements et régions ne disposeront plus de la clause de compétence générale. Ils seront dotés de “compétences exclusives”, compétences qui ne pourront être exercées par un autre niveau de collectivité. A partir de cette date, aucun projet communal ou intercommunal ne pourra bénéficier du cumul des subventions départementales et régionales si les conseillers territoriaux n’ont pas adopté “un schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services”. Ce schéma est destiné à fixer, entre la région et les départements qui la composent, les délégations de compétences, ainsi que l’organisation de leurs interventions financières. L’interdiction ne s’appliquera cependant pas aux domaines du sport, du tourisme et de la culture.

b. Le financement

i. Fonctionnement

Les collectivités territoriales perçoivent des impôts qui viennent se rattacher aux crédits à allouer aux actions comme le financement de la culture. Les impôts et taxes sont la catégorie de ressources la plus importante des collectivités. Pour 2008, ils représentent 98,13 milliards d’euros, soit 47,6 % des recettes totales. Pour 2009, leur part est estimée à 48 %. (www.vie-publique.fr/ – Direction de l’information légale et administrative)
Il faut distinguer la fiscalité directe de la fiscalité indirecte. La fiscalité directe est constituée de quatre taxes : la taxe d’habitation payée par les particuliers et les entreprises, la taxe sur la propriété foncière bâtie et non bâtie et sur les activités économiques, sous forme d’une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, puis la taxe professionnelle payée par les entreprises. La fiscalité indirecte concerne des impôts sensibles à la conjoncture économique comme la taxe locale d’équipement destinée aux transports en commun, les taxes de séjour, les taxes sur la publicité, les jeux dans les casinos, les remontées mécaniques, etc.
Il y a ensuite la catégorie des dotations qui proviennent de l’Etat. Celles-ci dépendent de critères précis comme la taille démographique, la superficie, etc. Le principe étant d’éviter les écarts de richesse trop importants. Ils constituent la seconde catégorie de ressources des collectivités locales et représentent 46 % des recettes totales en 2010. Les dotations de l’Etat correspondent d’abord aux dotations et subventions de fonctionnement des communes et groupement de communes à fiscalité propre, des départements et des régions. Puis, ils correspondent aux dotations et subventions d’équipement comme la dotation globale d’équipement ou encore les fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée. Enfin, il y a les financements des nouveaux transferts de compétences comme la datation générale de décentralisation de formation professionnelle, ou encore les compensations d’exonérations et de dégrèvements d’impôts comme la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Ces dotations sont automatiquement obtenues par les collectivités et peuvent les redistribuer à souhait puisqu’elles ne sont pas affectées à un financement particulier.
La troisième catégorie correspond à l’emprunt, pour lequel les collectivités sont autonomes mais doivent l’affecter aux nouveaux investissements. Elle est cependant en baisse constante depuis 1997 mais représente tout de même 8,4 % des recettes de collectivités en 2009. En effet, la crise économique des années 90 a restreint les collectivités à réduire les investissements et ainsi, l’emprunt. Depuis 1997, les efforts d’équipement sont repris mais en faisant appel aux fonds propres.
Les autres ressources représentaient en 2010, 11 % des recettes des collectivités. On peut en citer deux types ; d’une part les recettes tarifaires qui proviennent de la vente de biens ou de services aux usagers et d’autre part, les fonds structurels européens correspondent eux, au soutien de l’Europe.
Ainsi, les collectivités territoriales sont quasi autonomes. Cependant, toutes ces finances sont contrôlées par le préfet. En effet, les lois de décentralisation ont institué un contrôle à posteriori sur la légalité plutôt que sur le contenu mais le budget doit tout de même être contrôlé et approuvé par l’Etat.

ii. Contribution économique territoriale (CET)

La taxe professionnelle est un impôt qui représentait une part importante des recettes perçues par les collectivités au profit des communes, départements, régions, communautés de communes ou d’agglomération et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Cette taxe était due par toute personne qui exerçait à titre habituel une activité professionnelle salariée au 1er janvier de l’année d’imposition. Certaines activités sans but lucratif étaient exonérées de taxe professionnelle.
La loi de finances de 2010, annonce la suppression de cette taxe et prévoit son remplacement par la contribution économique territoriale (CET). La loi s’applique en 2010 pour les entreprises mais entrera en vigueur en 2011 pour les collectivités. L’Etat s’est engagé à maintenir leurs recettes en 2010 à l’euro près, avec l’attribution d’une compensation relai.
La CET est composée de la cotisation foncière des entreprises (CFE) assise sur la valeur de l’immobilier, et de la cotisation sur la VA des entreprises (CVAE) assise sur la valeur ajoutée. La CET a un impact variable selon la taille de l’entreprise et le secteur d’activité. Tous les secteurs d’activité étaient supposés sortir gagnants, à l’exception de l’énergie et des activités financières. De manière générale, les collectivités territoriales perdent une part des ressources fiscales puisque la taxe professionnelle représentait une importante source de revenus.
Le financement des structures culturelles en France
Mémoire de fin d’études – Option : Développer et Entreprendre
Université catholique De Lyon ESDES Business School

Sommaire :

Introduction
Partie 1: Politiques culturelles et désengagement
I. Histoire des politiques culturelles et de l’intervention de l’Etat
II. Les collectivités territoriales: Communes, Départements et Régions
III. Problématiques
Partie 2: Le mécénat – La réaction des structures culturelles
I. L’histoire du mécénat
II. Le mécénat
III. Problématique du mécénat culturel actuel
Partie 3: Quelles solutions au financement de la culture ?
I. Le cas de Sèvres – Cité de la céramique
II. Le marketing culturel
III. Un exemple d’ouverture à d’autres financements : Louvre Abu Dhabi
IV. Les solutions au financement de la culture & limites
Conclusion

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Le financement des structures culturelles en France
Université 🏫: Université catholique De Lyon ESDES - Mémoire de fin d’études
Auteur·trice·s 🎓:

Axel Psaltopoulos
Année de soutenance 📅:
Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top