Exercice de la copie privée et Mesures techniques de protection

Menaces sur la copie privée : une atteinte directe contre les « droits » du consommateur – Section 2 :
Le code de la propriété intellectuelle pose le principe du droit exclusif des auteurs, producteurs et artistes interprètes de décider de la représentation et de la reproduction de leurs enregistrements58. En parallèle, ont été reconnues le 11 mars 1957, certaines dérogations à ce droit exclusif59.
Ainsi, les auteurs ne pouvaient s’opposer à la réalisation de « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage du copiste et non destinées à une utilisation collective ». Pendant presque trente ans, ce principe de copie privée n’était qu’une exception aux droits exclusifs des auteurs. Toutefois, la Loi de 1985, a permis à l’ensemble de ces ayants droit de bénéficier d’une rémunération dite de « copie privée », afin de compenser les pertes résultant de l’usage de produits dédiés à la copie et du bénéfice perçu par les vendeurs des supports permettant l’acte de copie.
L’époque des technologies analogiques, pendant laquelle a été crée cette rémunération, a aujourd’hui fait place à celle des technologies numériques qui permettent la réalisation de copies de parfaites qualités. La « commission de la copie privée60» a estimé bon de se réunir en 2001 afin d’étendre la rémunération à certains supports numériques amovibles, et poursuit actuellement ses travaux sur les supports non dédiés à la copie.61

58 Voir article L.122-1ss du code de la propriété intellectuelle.
59 Voir article L.122-5 du code la propriété intellectuelle.
60 Cette commission s’était initialement réunie en 1986 afin de déterminer les supports devant faire l’objet d’une redevance et fixer le taux de cette dernière.

Mais la tendance actuelle serait plutôt vers la disparition pure et simple de la copie privée. La Directive 2001/29/ CE sur le droit d’auteur du 22 Mai 2001 tend en effet à rendre facultatif le recours pour les Etats membres, lors de la transposition du texte, à la création ou la sauvegarde en droit interne de textes relatifs à la copie privée.
Outre le fait que cette exceptions de copie est directement menacée par la légitimation des mesures techniques de protection (A) et leur protection juridique que nous avons évoqué plus haut, le risque serait aussi de s’éloigner de la nature initiale de la copie privée, ainsi que de la distinction entre copie privée et copie « pirate » continue de s’estomper (B).
A) les mesures techniques de protection mettent fin à l’exercice de la copie privée.
La rémunération pour copie privée vient compenser un préjudice, mais ce ne doit pas être le préjudice subi du fait de la contrefaçon, mais plutôt celui occasionné par l’impossibilité de soumettre les copies à l’autorisation des ayant droit.
En effet, le préjudice, qui est mentionné dans le texte de 1985 ou encore celui plus récent de la directive sur la société de l’information de 2001, doit rester celui lié à l’utilisation privée d’une œuvre acquise de façon licite par un particulier. La copie privée cause un préjudice aux ayants droit puisqu’elle permet une exploitation de l’œuvre qui leur est inconnue.
A titre d’exemple, les ayants droit ne connaissent pas le nombre de copie privée que les consommateurs effectueront pour leurs besoins strictement personnels (copie pour la voiture, le bureau, la maison de campagne, la cuisine…). Même s’il s’agit d’une utilisation privée et licite, puisqu’ils ont acquis l’œuvre de façon légale, il est évident cependant qu’il y a une multiplication des enregistrements à partir de la copie originale. En l’absence de tels moyens de reproduction, l’utilisateur n’aurait pu faire ces enregistrements ou aurait peut-être racheté l’œuvre, notamment en cas de destruction de la bande originale ou de rayure sur le CD.
De plus, avec l’exception de copie privée, il est en droit d’utiliser valablement sa copie, dès l’instant où il possède toujours la copie originale ou du moins le support. On pourrait valablement imaginer qu’un consommateur qui aurait rayé un CD entier, pourrait valablement utiliser la copie qu’il en avait fait au préalable.

61 Et notamment les disques durs d’ordinateurs…

Force est cependant de constater que dans ces cas, la copie est réalisée pour l’usage strictement personnel de celui qui copie. La réalisation d’une copie pirate ne peut constituer un usage personnel, quand bien même le contrefacteur n’en ferait pas commerce. La contrefaçon trouve une définition à l’article L.335-2 du CPI : « est un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation, ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits d’auteurs tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi ». Si l’on s’en tient à cette définition, seuls les actes pénalement répréhensibles au regard du droit d’auteur sont concernés par la contrefaçon. Le consommateur qui contournerait des mesures techniques de protection afin de réaliser une copie privée ne commettrait aucun acte de contrefaçon puisque la copie en question est une exception aux droits exclusifs de l’auteur. Toutefois, à défaut d’être condamné sur le droit d’auteur, le consommateur croyant réaliser un acte autorisé par le code la propriété intellectuelle pourrait être condamné pour neutralisation de la mesure technique. La présence d’une mesure technique de protection
Alors même que cette copie serait réalisée à titre privé, par un consommateur ayant acquis l’œuvre en toute légalité, la présence d’une mesure technique de protection sur le CD l’empêche d’y avoir recours. Reconnaître l’existence de ces mesures technique revient à nier tout caractère « privé » à la copie.
Mis à part le contournement de ces mesures techniques de protection, il est évident qu’emprunter un disque ou télécharger un fichier gratuit grâce notamment aux systèmes peer to peer, puis les graver sur CD ou DVD vierge ou les stocker sur un baladeur MP3 ne peut constituer une copie privée, quand bien même l’acquéreur en ferait une utilisation privée et personnelle. Il s’agit dans ce cas de contrefaçon puisque l’atteinte en question vise directement les droits exclusifs de l’auteur. Toutefois, la rémunération pour copie privée payée par le consommateur ne peut compenser la perte subie par les ayants droit du fait des copies pirates, même si ces dernières ne font l’objet d’aucune utilisation commerciale ou collective. C’est pourtant ce que la pratique laisse apparaître.
Lire le mémoire complet ==> (Le droit d’auteur et le consommateur dans l’univers numérique)
Entre solidarisme de la consommation et individualisme de la propriété.
Mémoire de fin d’études – DEA De Droit Des Créations Immatérielles – Droit Nouvelles Technologies
Université De MONTPELLIER I – Faculté De Droit
 

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