Le cadre général de l’action de la Communauté européenne

B – Le cadre général de l’action de la Communauté
L’article 2 du Traité de Rome institue à la communauté les missions de promouvoir un niveau de vie, d’emploi et de protection sociale élevé, l’égalité entre les hommes et les femmes. Ces différentes missions s’inscrivent dans le cadre de la coopération entre les Etats membres. La Communauté a comme mission première l’établissement de l’Union économique mais ceci implique une politique sociale commune développée.
La Communauté veille au respect par les Etats Membres des obligations qui leur sont conférées en matière d’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et féminins (article 141 du traité CE) et de congés payés (article 142 du traité CE).
L’article 136 du Traité d’Amsterdam reprend la politique sociale communautaire de l’article 117 du Traité de Rome. Ainsi, les Etats membres s’érigent en promoteur de l’amélioration des conditions de vie et de travail de la main d’œuvre46. Pour y parvenir, le marché commun doit être mis en place dans le but de favoriser les systèmes sociaux47. L’objectif premier de la Communauté n’est point d’uniformiser les systèmes nationaux, mais d’assurer une équivalence des systèmes nationaux, insérée au sein du progrès social48. Cette harmonisation des systèmes, pour être effective, nécessite l’action des institutions communautaires.
L’article 136 du Traité d’Amsterdam d’application actuelle, évoque d’une part « l’égalisation dans le progrès » et d’autre part, « l’harmonisation par les Etats membres et le rapprochement des législations par l’action de la Communauté ». Cette harmonisation sociale rencontre inévitablement des difficultés du fait des inégalités existantes entre les différents pays membres. Elle peut parfois être spontanée c’est-à-dire qu’elle découle directement de la volonté des Etats, mais souvent elle apparaît plutôt se dégager de l’action de la Communauté sans réelle volonté des Etats de parvenir à cette harmonisation. Les règles dégagées doivent être proches d’un pays à l’autre mais non nécessairement identiques49. Nous pouvons donner comme illustration à notre propos la directive sur les licenciements collectifs n’empêchant point les entreprises d’aménager, conformément à leurs besoins, leur service du personnel. L’harmonisation est dite, selon la Cour partielle50.
L’objectif de la Communauté n’est en aucun cas l’uniformisation exceptée au sujet du déplacement des travailleurs51. Qu’est ce que l’uniformisation ? Selon Monsieur le Professeur Bernard Bossu, « l’uniformisation consiste en l’introduction d’une règle commune qui va obligatoirement se substituer aux règles juridiques antérieures des différents Etats membres. La règle qui sera directement applicable dans les ordres juridiques internes ne laissera aucune place aux particularismes juridiques nationaux. »52.
Le traité CE, au sein de son article 140 indique que « la Commission encourage la coopération entre les Etats membres et facilite la coordination de leur action dans tous les domaines de la politique sociale ». Il s’agit donc de coordination53 et non d’unification, ceci engendrant inévitablement des difficultés au niveau de l’action de la Communauté qui doit respecter les particularismes de chaque Etat membre tout en réalisant le progrès social. La politique sociale est également encadrée par la cohésion économique et sociale54. Cette cohésion consiste en une véritable coordination des politiques régionales de la Communauté. Cette harmonisation sociale a lieu grâce à la mise en place de directives au niveau communautaire. L’harmonisation des droits nationaux se réalise donc par l’intermédiaire du droit communautaire. Notons, que l’harmonisation se distingue de la coordination55.

49 BONNECHÈRE (M.), « De la connaissance et de l’usage du droit communautaire dans la pratique quotidienne du droit social », Dr. Ouvrier 2000, p. 85.
50CJCE, arrêt Rockfon du 7 décembre 1995
51 Est concerné l’ensemble des mesures relatives à la libre circulation des travailleurs.
52 BOSSU (B.), « Harmonisation européenne et contrat de travail » in L’harmonisation du droit des contrats en Europe sous la direction de Jamin (C.) et Mazeaud (D.), Economuica, Etudes juridiques, 2001, p.97.
53 Est l’ensemble de techniques qui permettent l’application supranationales des normes nationales : CARTOU (L.), Communautés européennes, Dalloz, 1991, 10ème édition, p.140. Ajoutons que les particularismes nationaux sont respectés.
54 VOGEL-POLSKY (E.), De la dimension sociale du marché intérieur à une véritable cohésion économique et sociale, in Quel avenir pour l’Europe social : 1992 et après ?, Edition CIACO, Bruxelles, 1992.
55 Dans le règlement n°1408/71, la Cour affirme à cet égard, que ce dernier « se limite à coordonner les législations des Etats membres et ne vise nullement à les harmoniser », CJCE, Rossi, Rec. 1979, p.831.

Quant à l’article 140 du traité CE56, il prévoit que la Communauté a pour mission de promouvoir la collaboration étroite entre les Etats membres : « la Commission agit en contact étroit avec les Etats Membres par des études, des avis et par l’organisation de consultations ».
Le progrès social consiste en la réalisation des objectifs prévus aux articles 136 et 137.
Le Traité de Maastricht introduit la « coopération relative à des questions d’intérêt commun »57.Les Etats, pour mener à bien la coopération, décident de s’informer, de se consulter mutuellement et de collaborer entre eux. La coopération entre les Etats se manifeste surtout au niveau de l’emploi58, l’immigration des pays tiers59, la politique sociale.
A propos du principe de spécialité des compétences communautaires, la CJCE l’a rappelé dans un arrêt du 12 novembre 1996 sur le repos dominical60. Le Royaume Uni reprochait à la Communauté de ne point respecter l’article 118A61 dans l’édiction de la directive du 23 novembre 1993 concernant certains aspects du temps de travail62 c’est-à-dire le principe de spécialité des compétences. La CJCE a rejeté pour l’essentiel le recours du Royaume Uni, excepté l’article 5 de la directive annulé. La Cour a procédé à une analyse détaillée de chaque disposition de la directive afin de vérifier le respect de l’article 118 A. Elle a ainsi appliqué le principe de spécialité des compétences pour déterminer que la Communauté n’avaient point outrepassé ses compétences, et respectait donc l’article 118 A. La Cour affirme implicitement que l’harmonisation de la protection de la santé et de la sécurité est une motivation qui ne suffit pas en soi pour justifier de l’adoption d’une directive sur le fondement de l’article 118 A63. La seule volonté de la Communauté d’harmoniser n’est point suffisante pour l’édiction des normes communautaires.

56 Ancien article 118.
57 Cf RODIÈRE (P.), Droit social européen.
58 Art. 126§ 2 du Traité CE
59 Art. 61 à 69 du Traité CE
60 CJCE, arrêt du 12 novembre 1996, Royaume Uni c/ Conseil ; MARTIN (P.), « L’harmonisation sociale en débat », Dr. Soc. 1997, p.303.
61Nouvel Art. 136 du traité du CE
62 Directive 93/104 du 23 novembre 1993.
63 MARTIN (P.), « L’harmonisation sociale en débat, CJCE Royaume Uni de GB c/ Conseil de l’Union européenne », Dr. Soc. 1997, p. 307.

Lire le mémoire complet ==> (L’influence du droit communautaire en droit du travail français)
Mémoire de DEA de droit social – Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales
Université LILLE 2- Droit et santé

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