Recherche et entreprises : Eloge de la folie

Recherche et entreprises : Eloge de la folie

Mémoire d’Ingénieurs Elèves

Corps Techniques de l’Etat

Mémoire de fin d’études
Recherche et entreprises : Eloge de la folie Recherche et entreprises : Eloge de la folie

Jean-Baptiste AVRILLIER et Hélène LE DU

Pilote : M. Michel BERRY

Année universitaire :
2002

Avant-propos

Malgré le nombre de rapports déjà parus sur le sujet, nous avons choisi de consacrer notre mémoire de fin d’études aux relations entre la recherche publique et les entreprises.

Avant de commencer ce travail, nous avions en effet souvent entendu que de larges brèches s’étaient formées depuis vingt ans dans le mur qui séparait recherche publique et entreprises, mais que de graves faiblesses subsistaient.

En particulier, nous avions appris que les relations entre recherche et industrie étaient jalonnées de « ratés », se traduisant par une présence insuffisante dans notre économie de secteurs aujourd’hui porteurs ou essentiels pour l’avenir.

Interpellés par ces défaillances, nous n’avons cependant pas cherché à réaliser une analyse critique exhaustive des modes de valorisation de la recherche en France. Cette approche nous aurait conduits à reproduire des travaux existants.

Nous avons préféré partir du constat suivant : il y a tout juste vingt ans, se tenaient les Assises de la Recherche, dont le but était de susciter une très large réflexion sur le système de recherche et d’innovation français, notamment sur le rôle socio-économique de la recherche.

Accueillies au départ avec scepticisme ou ironie, ces assises ont finalement donné lieu à des débats effrénés, à une effervescence exceptionnelle et à une folle envie de changement, qui ont débouché sur d’importantes réformes et de nets progrès.

Malheureusement, cette dynamique semble aujourd’hui émoussée, puisque les mots de « blocage », « retard », « virage manqué » sont ceux qui reviennent le plus souvent. Ce contraste nous a conduits à décider de partir en quête du brin de folie capable de faire à nouveau bouger le monde de la recherche.

Aussi avons-nous intitulé notre étude : « Recherche publique et entreprises : éloge de la folie », en hommage aux folles expériences que nous avons pu observer et que nous allons vous faire partager.

Remerciements

Nous souhaitons remercier tout particulièrement Michel Berry, notre pilote, qui a su nous éclairer de ses conseils avisés tout au long de notre travail, et redonner un sens à notre étude lorsque nous étions désorientés.

Nous remercions également toutes les personnes, chercheurs et non-chercheurs, qui nous ont reçus et ont pris le temps de discuter avec nous. Le contenu de notre étude doit beaucoup à la richesse de leurs témoignages.

Nous tenons à remercier plus particulièrement Pierre Tambourin, Hélène Pollard et Paul Soler, de Génopole, Claire Lemontey, Dominique Laborde et Dominique Job de Génoplante, Philippe Kourilsky de l’Institut Pasteur et Thierry Weil pour le soutien qu’ils ont apporté à notre étude.

Introduction

I. La recherche : Un enjeu majeur délaissé

Un sujet qui ne passionne pas les foules

L’une des grandes surprises de notre étude a été de constater à quel point la politique de recherche et d’innovation est absente du débat public en France.

Ceci a été d’autant plus flagrant à l’occasion des campagnes électorales du printemps 2002, au cours desquelles la politique de recherche et d’innovation a été quasiment absente des programmes, sans parler des débats entre candidats.

Les candidats à l’élection présidentielle n’ont fait au mieux qu’effleurer la question, alors qu’aux Etats-Unis les candidats George W Bush et Al Gore avaient débattu publiquement de ce sujet en 2000.

Mais en France, les problèmes de la recherche ne sont pas considérés comme un enjeu électoral ; ils ne semblent pas non plus considérés comme un enjeu politique : l’adoption du budget de la recherche passe quasiment inaperçue chaque année à l’Assemblée Nationale, contrairement aux Etats-Unis où elle donne, paraît-il, lieu à une semaine de débats intenses sur le choix des priorités.

Pourtant, les enjeux sont majeurs

Ce manque d’intérêt de l’opinion publique et des hommes politiques français pour la politique de recherche et d’innovation est d’autant plus regrettable que la situation n’est pas satisfaisante et que cela peut avoir des conséquences très importantes.

Une étude récente montre en effet que la recherche française va mal : une batterie d’indicateurs internationaux calculés par Commission Européenne, l’OCDE et l’Observatoire des sciences et des techniques (OST) nous apprennent que la France est, parmi les pays de l’OCDE, en quatorzième ou quinzième position pour le nombre de publications scientifiques par million d’habitants ; elle est seulement dixième pour les articles les plus cités dans chaque discipline ; dixième pour le nombre de brevets déposés en Europe ; onzième pour les brevets déposés aux Etats-Unis.

De plus la tendance générale est au déclin, et à son aggravation : dans un rapport récent, la Commission Européenne a construit un indicateur global, censé mesurer la dynamique des performances de chaque pays en matière d’innovation.

Il en résulte un tableau de synthèse des tendances par pays, qui présente la France dans la catégorie « accuse un retard supplémentaire ».

La situation est d’autant plus préoccupante que la France est l’un des pays de l’OCDE qui dépense le plus pour la recherche, y compris la recherche fondamentale.

De tous les pays recensés par la Commission, la France est même en tête pour la part du budget de l’Etat consacrée à la R&D.

Mais la dépense globale, publique et privée, en R&D n’a cessé de décroître en France de 2,4% du PIB en 1994 à 2,17% en 1999, alors qu’elle était la même année de 2,44% en Allemagne, 2,64% aux Etats-Unis, 3,01% au Japon et 3,80% en Suède.

DIRD/PIB (%)

DIRD/PIB (%)

Les enjeux économiques de la recherche et de l’innovation sont pourtant majeurs. Le rôle de l’innovation sur la croissance et l’emploi n’est plus à démontrer.

L’enjeu est également de permettre ou non la présence de la France dans les domaines de haute technologie comme les biotechnologies et l’informatique, où l’on observe une inquiétante déspécialisation des pays de l’Union Européenne.

Dépôts de brevets à l’OEB (1995-1997)

Dépôts de brevets à l'OEB (1995-1997)

Ceci est d’autant plus pressant que la compétition entre pays s’accélère, et que la R&D est aujourd’hui une activité de plus en plus mondialisée et concurrentielle.

Les entreprises implantent désormais leurs centres de recherche là où le tissu académique et les infrastructures sont les plus performants et les chercheurs publics ou privés suivent le mouvement.

C’est ainsi que Novartis a annoncé en avril 2002 la création d’un centre de recherche dans le Massachusetts qui regroupera l’ensemble de ses activités de R&D au niveau mondial.

Cela crée une situation paradoxale, où une bonne partie des centres de décision européens en matière de recherche pharmaceutique sont désormais implantés outre-Atlantique, et y emploient un grand nombre de chercheurs européens.

Ce mouvement global lié à la mondialisation oblige donc la recherche française à bouger plus vite si elle veut être compétitive.

Les enjeux démographiques de la politique de recherche et d’innovation sont également très importants. On annonce en effet des départs à la retraite massifs de chercheurs d’ici 2010 : il faudra remplacer 40% des personnels de recherche des EPST, et même jusqu’à 50% dans certaines disciplines.

Ceci va provoquer un véritable séisme dans le monde de la recherche publique, ce qui offrira d’ailleurs une « fenêtre de tir » unique pour mettre en place une série de réformes.

Mais si rien n’est fait, on peut légitimement se poser la question suivante : comment renouvellera-t-on les chercheurs si – comme nous l’avons vu – la recherche n’intéresse personne ? Il a récemment été annoncé que les inscriptions d’étudiants en filières scientifiques étaient en baisse de 5%, et même de 10% à l’université.

Quels chercheurs recrutera-t-on si ce désintérêt des jeunes pour les études scientifiques perdure ? Se dirige-t-on vers un schéma de type américain, où la recherche française sera essentiellement effectuée par des chercheurs d’origine étrangère ?

Mais dans ce cas, saurons nous attirer, comme les Etats-Unis, les plus brillants cerveaux des pays étrangers ? Toutes ces questions cruciales mériteraient que l’opinion publique y soit davantage sensibilisée.

Glossaire

ADN : Acide DésoxyriboNucléique
AFM : Association Française contre les Myopathies
AGENAE : Analyse du GENome des Animaux d’Elevage
ANRT : Association Nationale de la Recherche Technique
ANVAR : Agence Nationale de Valoriation de la Recherche
CEA : Commissariat à l’Energie Atomique
CIFRE : Convention Industrielle de Formation par la Recherche
CIRAD : Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement
CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique
EPIC : Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial
EPST : Etablissement Public à caractère Scientifique et Technologique
FIST : France Innovation Scientifique et Transfert
FNS : Fonds National pour la Science
FRT : Fonds de la Recherche et de la Technologie
GABI : Genomanalyse im Biologischen System Pflanze
GIP : Groupement d’Intérêt Public
GIS : Groupement d’Intérêt Scientifique
IGAENR : Inspection Générale de l’Administration de l’Education Nationale et de la Recherche
INRA : Institut National de la Recherche Agronomique
INRIA : Institut National de Recherche en Informatique et Automatique
INSERM : Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale
IRD : Institut de Recherche pour le Développement
MENRT : Ministère de l’Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique
OEB : Office Européen des Brevets
OGM : Organisme Génétiquement Modifié
PCRD : Programme Cadre de Recherche et Développement technologique
RRIT : Réseau de Recherche et d’Innovation Technologique
SAS : Société par Actions Simplifiée
SEM : Société d’Economie Mixte

Sommaire

Introduction
I. La recherche : un enjeu majeur délaissé
II. De la révolution à l’enlisement
III. Quand l’espoir renaît
Génoplante®
IV. Révolution en banlieue parisienne
V. Une source d’inspiration pour la recherche du XXIe siècle
VI. Quelques limites
VII. Comment Génopole a-t-il pu voir le jour ?
VIII. Quelques mots sur Minatec
Génoplante: aux grands maux, les grands remèdes
I. Génoplante : une Rolls-Royce pour la génomique végétale
II. Un partenariat public-privé qui fonctionne
III. Les forces de la pesanteur
IV. Les pouvoirs de la peur et du rêve
V. Synthèse
L’institut pasteur
I. Comment faire en 2 ans ce que d’autres promettent depuis 20 ans ?
II. Une évolution positive
III. Quelques limites
La création d’entreprises innovantes par les chercheurs
IV. Comment de tels changements ont-ils été possibles ?
I. Un thème très mobilisateur
II. Les bénéfices escomptés
III. Un peu de calme et de sang-froid
IV. Quand la raison s’incline
Conclusion

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Recherche et entreprises : Eloge de la folie
Université 🏫: Ecole des Mines de Paris – Corps Techniques de l’Etat
Année de soutenance 📅: Mémoire d’Ingénieurs Elèves - 2002
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