Les licences libres et les licences de libre diffusion : différence

Les licences libres et les licences de libre diffusion : différence
Section 2

Analyse juridique des licences libres

A. La différence entre les licences libres et les licences de libre diffusion

Les pratiques de la gratuité sont en plein essor. Face à ces pratiques, la réglementation sur la propriété intellectuelle va à l’encontre des revendications des internautes. Beaucoup conçoivent le droit d’auteur comme « un héritage du passé qui ne pourra survivre aux pratiques massives de copies des œuvres permises par le numérique 1 ». L’environnement numérique et les réseaux imposent de revoir certains aspects du droit d’auteur.

Pour les partisans du no copyright, c’est l’ensemble du droit d’auteur qui doit être revu. Cette vision radicale est à opposer à la conception du copyleft, plus modérée, qui propose d’aménager le droit d’auteur afin qu’il soit en phase avec la technologie actuelle. Il s’agit alors de considérer que l’auteur d’une œuvre a un monopole juridique, mais rien ne l’empêche de ne pas l’exercer.

En droit français, le Code de la propriété intellectuelle laisse cette liberté à l’auteur de pouvoir diffuser gratuitement son œuvre. L’article L. 122-7-1 dispose que « l’auteur est libre de mettre ses œuvres gratuitement à la disposition du public, sous réserve des droits des éventuels coauteurs et de ceux des tiers ainsi que dans le respect des conventions qu’il a conclues ».

Ainsi, certains informaticiens ont souhaité conserver la tradition de l’internet, information libre et partagée par tous, en proposant un modèle économique alternatif sur la base des logiciels libres. L’origine des logiciels libres remonterait à une colère de Richard Stallman, à la fin des années 1970, suite à un dysfonctionnement de son imprimante.

Il tenta d’accéder au logiciel qui contrôlait la machine mais celui était protégé par un brevet. En 1983, R. Stallman envoie un message dans un des newsgroup d’Usenet annonçant qu’il est en train d’écrire un logiciel complet compatible Unix, GNU. Plus tard, en 1991, un étudiant finlandais, Linus Torvalds, met au point la première version d’un système d’exploitation basé sur le projet GNU qui deviendra le logiciel GNU-Linux.

Afin de rémunérer les informaticiens qui ne sont pas financés par une université, R. Stallman crée en 1985, la Free Software Foundation qui récolte des fonds et qui concevra la General Public Licence, GPL, cadre juridique dans lequel la diffusion des logiciels libres doit s’effectuer.

La licence GPL n’est pas réservée aux logiciels et peut s’appliquer à la littérature, la vidéo ou la musique. En France, des collectifs d’artistes ont mis au point la licence Art libre sur le modèle appliqué aux logiciels, afin d’inviter les artistes à entrer dans un cadre juridique de protection alternatif. Il s’agit alors, non pas de fournir le code source d’un logiciel, mais de développer la diffusion et le partage des œuvres artistiques.

Il est important de préciser que le droit d’auteur reste la base juridique du copyleft. Il ne s’agit pas d’autoriser les utilisateurs à copier, redistribuer ou modifier l’œuvre mais d’autoriser les auteurs à leur accorder cette liberté. La licence libre peut se définir comme une licence s’appliquant à une œuvre de nature quelconque pour en faire un contenu libre offrant à l’utilisateur certains droits quant à l’utilisation, à la modification, à la rediffusion et à la réutilisation de l’œuvre dans des œuvres dérivées.

La licence libre doit être distinguée de la licence de libre diffusion. Par extension, on parle de licence de libre diffusion pour les licences permettant au minimum la copie. Les licences libres sont des licences de libre diffusion, mais la réciproque n’est pas vraie. Par exemple, la licence Art Libre et la licence Creative Commons by-sa sont des licences libres, tandis que les licences Creative Commons by-nc-sa et Creative Commons by-nd ne sont pas des licences libres mais sont des licences de libre diffusion.

1 Joëlle FARCHY « internet et le droit d’auteur, la culture Napster » CNRS éditions, 2003

Dans son rapport de juin 20071, le CSPLA, explique que le terme de « licence libre » doit être utilisé pour les licences qui offrent ces quatre libertés : libertés d’utiliser/d’usage, de copier, de modifier une œuvre et de diffuser les modifications. Les autres licences peuvent être qualifiées de « licence ouverte ».

Dans la pratique, la majeure partie des œuvres musicales est diffusée sous des licences de libre diffusion. Recenser ce type de licence est quasi impossible, notons à titre d’exemple les licences suivantes : Creative Commons, Art Libre, GNUArt, Open Music, Musique Libre.

L’objet de ces licences, contrairement aux licences libres appliquées aux logiciels, est la libre diffusion. C’est la principale caractéristique qui répond à cette propriété de l’internet, l’échange libre. Mais les possibilités offertes par ces licences sont nombreuses, et un auteur peut même autoriser la modification de son œuvre, ce qui correspondrait en France à abandonner le droit moral qui s’attache à toute œuvre de l’esprit.

Ainsi, M. Milliard, conseiller à l’Institut de Recherche sur les Musiques Actuelles, explique que « les licences libres sont une solution différente du droit d’auteur ».

C’est, en effet, une réalité de plus en plus présente sur l’internet. Certains artistes ont juste envie de se faire connaître, quitte à être mal rémunéré voire pas rémunéré du tout. Cette logique s’est développée en parallèle avec le web.

Ainsi, plusieurs sites offrent la possibilité aux artistes de faire connaître leurs œuvres. A titre d’exemple, les sites MySpace ou plus récemment Facebook, qui permettent à tous de créer une page Web et de diffuser de la musique, connaissent un succès sans précédent. Il s’agit bien là d’une nouvelle forme de distribution des œuvres, non seulement musicales d’ailleurs, qu’il convient de prendre en considération.

D’autres sites, associatifs, diffusent des œuvres musicales gratuitement, et en grande quantité. Le site Dogmazic diffuse près de 15 000 morceaux, par 1 700 groupes. Ce mode de diffusion nécessite une protection juridique, pour que les échanges et la diffusion se fassent en toute légalité, et les licences de libre diffusion permettent de répondre à ce besoin croissant. Les licences de type Creative Commons sont en phase avec la révolution numérique et l’âge des réseaux.

1 Rapport du Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique « La mise à disposition ouverte des œuvres de l’esprit ».Juin 2007 (www.culture.gouv.fr/culture/cspla/CO.pdf)

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Diffusion en ligne des œuvres musicales : protection technique ou contractuelle ?
Université 🏫: Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne
Auteur·trice·s 🎓:
Simon BRIAND

Simon BRIAND
Année de soutenance 📅: Master 2 Droit de l’internet - 2006 – 2007
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