Le divorce : les avantages matrimoniaux et les libéralités

L’application dans le temps du nouvel article 265 du code civil – Section 2 :
Ce nouvel article règle le sort, en cas de divorce, de l’ensemble des libéralités et avantages matrimoniaux que les époux ont pu se faire durant leur mariage.
Son application dans le temps est-elle régie par les dispositions transitoires de l’article 33-II de la loi, ou peut-on l’appliquer immédiatement aux divorces soumis à l’ancienne procédure ? Etudions les deux hypothèses.

§ 1 – 1ère hypothèse : l’article 265 entre dans le cadre des dispositions transitoires de l’article 33-II

On considère que la loi qui régit le prononcé du divorce règle aussi ses conséquences.
Dans ce cas, le nouvel article 265 ne s’appliquera pas lorsque le divorce continu à être soumis à la loi ancienne (A). Son application est en effet liée avec l’application de la nouvelle procédure (B).

A – Inapplication de l’article 265 aux procédures régies par la loi ancienne.

L’ancien système de la loi du 11 juillet 197591 continue à régler le sort des donations entre époux et des avantages matrimoniaux lorsque cette même loi continue à s’appliquer aux procédures en cours. Il s’agit des deux exceptions prévues à l’article 33-II a) et b) de la loi du
26 mai 2004. Lorsque la convention temporaire du divorce sur requête conjointe a été homologuée avant le 1er janvier 2005, les époux décideront eux même du sort des donations et avantages qu’ils s’étaient consentis92. Et lorsque, dans les autres cas, l’assignation a été délivrée avant le 1er janvier 2005, le sort de ces libéralités et avantages matrimoniaux dépendra encore de la répartition des torts.

B – Application du nouvel article 265 aux seules procédures régies par la loi nouvelle.

Il s’agit des procédures en divorce introduites avant le 1er janvier 2005 dont la convention temporaire n’a pas été homologuée ou l’assignation n’a pas été délivrée à cette date. La survie de la loi ancienne peut, en outre, être écartée si les époux choisissent de recourir aux passerelles des articles 247 et 247-1 du code civil, c’est-à-dire les passerelles vers les nouveaux divorces par consentement mutuel et accepté.
Elle est aussi écartée, lorsque malgré une assignation délivrée avant le 1er janvier 2005, les époux décident de modifier le fondement de leur demande au profit du nouveau divorce pour altération définitive du lien conjugal93.
Cette interprétation est celle proposée par la circulaire du garde des sceaux du 23 novembre 200494. Elle entraîne une dualité de régimes pour plusieurs années encore car il est aussi prévu que l’appel et le pourvoi en cassation sont formés, instruits, et jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance95.
Il faudra en tenir compte pour les liquidations des régimes matrimoniaux car les règles définissant le sort des avantages matrimoniaux dépendront de la loi qui a régi le prononcé du divorce. Une autre interprétation est envisageable.

§ 2 – 2e hypothèse : l’article 265 n’entre pas dans le cadre des dispositions transitoires

En interprétant strictement les exceptions de survie de la loi ancienne, on peut, peut être, dissocier la loi qui régit le prononcé du divorce de celle qui régira le règlement de ses conséquences (A). Nous avons vu dans l’introduction que la loi de 1975, n’était pas parvenue à concentrer les effets du divorce lors de son prononcé, notamment en ce qui concerne le sort des libéralités et avantages matrimoniaux.
La séparation dans le temps du prononcé du divorce du traitement de ses conséquences pourrait conduire à l’application de la loi nouvelle lorsque son entrée en vigueur s’est produite entre les deux opérations. L’action en divorce est soumise à la loi ancienne conformément aux dispositions transitoires, tandis que ses conséquences relèvent immédiatement de la loi nouvelle (B).

A – La dissociation du prononcé du divorce du règlement de ses conséquences.

Un auteur a démontré que normalement, les règles réglementant les causes, la procédure et les effets du divorce s’appliquent à toutes les instances en cours, et à tous les jugements postérieurs à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.
En effet, le jugement de divorce est constitutif de droit donc la loi qui régit les règles de cette constitution doit s’appliquer immédiatement à toutes les procédures en cours96. Mais le législateur de 2004, comme celui de 1975, malgré sa volonté d’appliquer rapidement la loi nouvelle, a préféré prévoir la survie de la loi ancienne quand la procédure était déjà bien avancée afin d’éviter d’allonger sa durée et d’aggraver les différends entre les époux.
L’article 33-II pose pourtant le principe que la loi nouvelle « s’appliquera aux procédures en divorce introduites avant son entrée en vigueur sous les exceptions qui suivent ». Ces exceptions ne devraient donc concerner que la procédure et non les conséquences du divorce.
Il a prévu dans ces hypothèses que « l’action en divorce est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne ». Il est possible d’interpréter cette exception de la manière suivante : le juge doit décider de prononcer le divorce en fonction des anciens cas et en suivant l’ancienne procédure. Puis, conformément à l’ancien article 264-1 issu de la loi du 23 décembre 1985, en prononçant le divorce, il ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux.
Or, c’est à l’occasion de ces opérations que se met en œuvre le maintien ou la révocation des avantages matrimoniaux. Si cet ordre intervient après le 1er janvier 2005, le règlement de ces intérêts patrimoniaux se fera selon les nouvelles règles de l’article 265 du code civil. Cette interprétation stricte de l’exception de la survie de la loi ancienne permet une application générale du nouvel article 26597.

B – L’application générale du nouvel article 265

Dans l’hypothèse envisagée, l’ancien système de prise en compte des torts dans la détermination du sort des donations et avantages matrimoniaux n’est donc plus applicable et se trouve remplacé par le nouvel article 265 du code civil, dès le 1er janvier 2005.
Par conséquent, dans les divorces sur requête conjointe dont la convention temporaire a été homologuée avant le 1er janvier 2005, la convention définitive qui interviendra après cette date pourra tenir compte des nouvelles règles. Pour ces divorces le changement n’est pas important, car nous verrons que le nouveau système laisse aussi une place importante pour le règlement conventionnel de ces questions.
Dans les autres cas, lorsque l’assignation a été délivrée avant le 1er janvier 2005, et le jugement prononcé après cette date, la répartition des torts n’aura plus d’incidence sur le sort des donations et avantages matrimoniaux.
Les liquidations de régimes matrimoniaux qui interviennent après un jugement postérieur au 1er janvier 2005, quelle que soit la loi qui a régi la procédure, se feront en considération du nouvel article 265, en maintenant les avantages qui ont pris effet au cours du mariage et en révoquant ceux qui prennent effet à la dissolution du régime ou au décès de l’un des époux. Cette interprétation serait conforme à la volonté du législateur d’appliquer rapidement les nouvelles dispositions98.
Nous pensons donc qu’il est possible d’appliquer dès le 1er janvier 2005 la nouvelle irrévocabilité des donations de biens présents et la nouvelle validité des donations déguisées pour celles conclues avant cette date.
Ce nouveau régime des libéralités est à combiner avec le nouvel article 265 qui organise leur sort en cas de divorce, ainsi que celui des avantages matrimoniaux. Nous pensons que ce dernier pourra également s’appliquer de façon générale dès le 1er janvier 2005.
Nous pouvons maintenant commencer l’étude des nouvelles conséquences légales du divorce sur les donations et avantages matrimoniaux.
Lire le mémoire complet ==> (Les conséquences du divorce sur les libéralités entre époux et les avantages matrimoniaux)
Mémoire présenté en vue de l’obtention du Master Droit Recherche, mention droit des personnes et de la famille
Lille 2, université du droit et de la santé – Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales
________________________________________
91 Anciens articles 265 à 269 du code civil.
92 En sachant que l’on considère les donations de bien présents désormais irrévocables.
93 Ces exceptions à l’exception de la survie de la loi ancienne sont prévues à l’article 33-II b) in fine. Pour une étude d’ensemble des dispositions transitoires de la loi du 26 mai 2004, V. F. SAUVAGE, « L’application dans le temps de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce », JCP éd. N 2004, n° 1505, p. 1588 ; Lacoste (G.) et LARRIBAU-TERNEYRE (V.), « Les dispositions transitoires de la loi du 26 mai 2004 sur le divorce », Dr. Fam. Janvier 2005, p. 8 ; A. BÉNABENT, La réforme du divorce article par article, Defrénois, 2004, p.13 et s. ; « Dispositions transitoires » in Les nouveaux divorces : AJ famille 2004, p. 232
94 Circ. n° 0420849 C, du 23 nov. 2004 spéc. n°115.
95 Article 33-IV de la loi du 26 mai 2004.
96 F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, op. cit. p. 133.
97 Pour une interprétation contraire, V. A. BÉNABENT « Dispositions transitoires » in Les nouveaux divorces : AJ famille 2004, p. 232.
98 A priori, rien n’empêche d’étendre cette interprétation aux articles 265-1 et 265-2 du code civil.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Les conséquences du divorce sur les libéralités entre époux et les avantages matrimoniaux
Université 🏫: Lille 2, université du droit et de la santé - Ecole doctorale n° 74 - Mémoire du Master Droit Recherche
Auteur·trice·s 🎓:

Vincent DELVART
Année de soutenance 📅:
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