La gestion d’un terroir touristique – Chianti Classico

La gestion d’un terroir touristique – Chianti Classico

3.2 La gestion d’un terroir touristique : logiques d’acteurs, intérêts et tensions

Acteurs publics et privés sont favorables à la mise en valeur touristique du patrimoine viticole appréhendé comme une ressource en vue du développement futur de leurs territoires (AZZARI, CASSI, MEINI, 2007). Ils coopèrent d’ailleurs parfois ensemble pour l’organisation d’événements. Toutefois, ils ne conçoivent pas nécessairement cette valorisation de la même façon.

Tandis que les communes s’efforcent de proposer une stratégie de développement économique intégrant tous les secteurs d’activité, et en particulier l’industrie, les producteurs, à travers le Consorzio Chianti Classico, sont davantage convaincus qu’il faut spécialiser le terroir dans la production viticole et oléicole et le tourisme rural. Cette divergence de point de vue est entre autres visible à travers les actions de promotion et de mise en valeur déployés par chacun de ces acteurs.

D’au côté, les communes s’efforcent de promouvoir un tourisme diversifié, alliant patrimoine historique, avec la mise en valeur de leurs bourgs, patrimoine naturel, à travers des musées comme le Musée du paysage à Castelnuovo Berardenga, patrimoine religieux, avec les musées d’art religieux comme ceux de Tavarnelle Val di Pesa, San Casciano in Val di Pesa, Greve in Chianti, ou Radda in Chianti, activités de randonnées ou sportives et enfin divertissements culturels (festival de jazz Chianti festival). Le syndicat de producteurs limite quant à lui ses actions à la mise en valeur du patrimoine agricole, historique et religieux du terroir. En effet, il semble que le Consortium n‟attache de l’importance qu’aux éléments ayant participé à la construction de l’identité du Chianti Classico, à savoir le vin, l’huile, les paysages de vigne, le passé, l’architecture locale et l’art. C’est du moins ce que laisse supposer les choix qu’il a faits en matière de développement touristique.

3.2.1 Des intentions différentes concernant l’avenir des aree Chiantigiane : l’exemple du projet d’inscription du Chianti Classico au Patrimoine Mondial de l’Unesco

Un évènement passé illustre ces oppositions sous-jacentes. En 1997, la Fondation pour la préservation du Chianti Classico avait monté un dossier de candidature pour l’inscription du terroir Chianti Classico au patrimoine mondial de l’UNESCO. Toutefois, les collectivités locales n‟ont pas été consultées.

L’Etat, a donc souligné l’absence de collaboration dans l’élaboration du plan de gestion et a refusé de retenir la candidature d’un projet non concerté. Le dossier est en conséquence actuellement bloqué (PERRIN, 2009).

C’est le Consortium qui a fait la demande pour être candidat au patrimoine mondial de l’UNESCO, et non les communes. Cela fait des années maintenant. Nous n’avions pas été consultés et nous avons eu une réponse négative (S. DIRINDELLI, Maire de Tavarnelle val di Pesa, Annexe E, entretien n°3)29

De fait, les communes, sans être défavorables à l’inscription de leur territoire au patrimoine mondial de l’UNESCO, ne la considèrent pas comme une priorité. Selon les maires de Tavarnelle Val di Pesa et San Casciano in Val di Pesa, le territoire du Chianti ne se réduit pas aux secteurs du vin et du tourisme. En atteste le témoignage de M. DIRINDELLI, maire de Tavarnelle Val di Pesa :

Ce serait très bien pour notre territoire car cela nous donnerait de la visibilité. Cependant, les communes ne veulent pas être réduites à des territoires agricoles producteurs de Chianti Classique. Nous souhaitons que l’industrie manufacturière fournisse des emplois.

Nous sommes convaincus que nous ne pouvons pas vivre du tourisme et du vin exclusivement. Nous avons besoin de structures matérielles et immatérielles qui permettent à nos entreprises d’être compétitives.” (S. DIRINDELLI, Maire de Tavarnelle val di Pesa, Annexe E, entretien n°3)30

Selon les élus, pour un développement à long terme, il convient de conserver des industries et des manufactures, qui non seulement représentent 50% des revenus locaux mais permettent aussi de maintenir une économie diversifiée. Certes, la proximité de Florence facilite l’attraction de flux touristiques, mais elle contribue aussi à l’implantation d’entreprises non touristiques. Le fait d’être en situation périurbaine et bien desservie est un avantage comparatif pour leur commune qu’il ne faut pas sous-estimer.

Or l’inscription au Patrimoine mondial de l’Unesco ferait entrer le territoire dans une logique de conservation et de préservation qui pourrait entraver le développement du secteur secondaire et l’accueil de sociétés dynamiques, ce que redoutent les élus. “Le Chianti est un ensemble qui a ses particularités et ses diversités”31 (M.PESCINI, Maire de San Casciano, Annexe E, entretien n°2). C’est donc cette dimension qu’il s’agit de mettre en valeur. Réduire le Chianti au vin et au tourisme est perçu comme une démarche d’appauvrissement de ses richesses.

D’autre part, la priorité des élus locaux est davantage de satisfaire les revendications de l’ensemble de la population de leur territoire. Assurer la création d’emplois ainsi que l’accès au logement et à la culture pour tous est en conséquence privilégié.

28 Statuts de l’association Proloco de Greve in Chianti. http://www.comune.greve-in-chianti.fi.it/attach/Statuto.pdf

29 “È il consorzio che ha fatto la domanda per la candidatura al Patrimonio mondiale dell’ umanità (Unesco) e non i comuni del Chianti. Parecchi anni fa di ciò… Non ci hanno consultati e non abbiamo avuto risposta positiva”.Traduction V. ANGER

30 « Sarebbe molto bene per il nostro territorio, ciò ci darebbe della visibilità. Tuttavia, i comuni non vogliono essere ridotte ai territori agricoli di produzione del Chianti Classico. Auguriamo che l’industria manifatturiera fornisca degli impieghi. Siamo convinti che non possiamo vivere esclusivamente del turismo e del vino. Abbiamo bisogni di strutture materiali ed immateriali che permettono alle nostre imprese di essere competitive.” Traduction V. ANGER

Ils ont également élaboré des programmes de développement local visant à limiter l’augmentation des prix de l’immobilier, due à la fois à leur situation de périphérie urbaine et à la croissance du tourisme. Enfin, le modèle de développement agro-touristique défendu par le Consortium leur paraît peu porteur à long terme pour les collectivités dans la mesure où le secteur viticole connaît des crises successives (PERRIN, 2009). La spécialisation dans le tourisme et l’agriculture n‟est donc pas considéré comme un modèle de développement démocratique et stratégique par les élus.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Mise en tourisme du patrimoine viticole : l’exemple du Chianti
Université 🏫: Université de Paris 1 – Panthéon Sorbonne - Institut de Recherche et d’Etudes Supérieures Du Tourisme IREST
Auteur·trice·s 🎓:
Melle Virginie Anger

Melle Virginie Anger
Année de soutenance 📅: Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne - 2010-2011
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