Évaluation de la pollution des cours d’eau au ranch faunique de Gbadagba

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🏫 UNIVERSITE D’ABOMEY-CALAVI (UAC) - ECOLE POLYTECHNIQUE D’ABOMEY-CALAVI (EPAC) - DEPARTEMENT DE GENIE CHIMIQUE-PROCEDES (GC-P)
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de MASTER - 2021-2022
🎓 Auteur·trice·s
Dominique KPADONOU
Dominique KPADONOU

La pollution des cours d’eau au Bénin est analysée à travers l’étude du cours d’eau du ranch faunique de Gbadagba, mettant en évidence des niveaux alarmants de pollution chimique et microbiologique, responsables de la mortalité piscicole. Les résultats soulignent l’urgence d’actions pour préserver les écosystèmes aquatiques locaux.


ETAT DE L’ART DES DIFFERENTES FORMES DE POLLUTION DES EAUX DE SURFACE DANS LE MONDE, LA SOUS-REGION ET AU BENIN

Ramade, (2007) a montré que la production d’énergie, les exploitations chimiques et métallurgiques puis les activités agricoles sont les principales sources de pollutions des cours et plans d’eau dans le monde. Zirirane et al., (2014) ont montré que les principaux vecteurs de propagation de la pollution sont l’air et les ressources en eau aussi bien de surface que souterraine qui passe petit-à-petit d’une zone à une autre, d’une région à l’autre jusqu’à devenir une pollution internationale.

De même dans le monde 67% des pollutions sont d’origine agricole dont 31% ont des impacts sur la faune aquatique. 70% des accidents industriels dans le monde ont causé la pollution des cours d’eau induisant 45% de mortalité de la faune aquatique (Ropars-Collet et al., 2018). D’après Ropars-Collet al.,(2018), dans la ville de Bretagne en France de 2005 à 2012,67% des pollutions ont été enregistrées au niveau des eaux de surface dont près de 38% ont causé la mortalité des ressources halieutiques.

Gboudjou et al., (2022) ont montré que la principale cause de la pollution de la lagune Ebrié en Côte d’Ivoire est le rejet des déchets dans celle-ci par les riverains. Au Bénin, Saïzonou et al., (2013) ont montré que parmi les polluants contenus dans les eaux usées rejetées illégalement dans les cours et plans d’eaux, on peut citer les sels nutritifs (azotés et phosphatés), les métaux toxiques, les résidus de matières plastiques, les hydrocarbures comme les détergents, les colorants, les pesticides, les Hydrocarbures

Aromatiques Polycycles (HAPs), etc… qui présentent d’effets nocifs considérables sur les écosystèmes aquatiques. Ndahama et al., (2014) ont rapporté que malgré les diverses pollutions physique, chimique ou microbiologique auxquelles sont soumis les cours et plans d’eau, certains se trouvent peu pollués à cause de l’autoépuration naturelle et/ou des mesures de surveillance mise en place par les autorités à divers niveaux de commandement. Par contre en dépit de ces mesures d’autres sont assez pollués pour diverses raisons.

Etat de la pollution physique des eaux de surface

La pollution physique des eaux est la modification anthropique des propriétés de l’eau par la présence des déchets solides ou particules en suspension, ou par l’élévation de la température ou par irradiation aux rayonnements électromagnétiques (Akotègnon, 2022). Le rejet des eaux chaudes qui ont servi aux divers processus de refroidissement industriel (électrique, nucléaire) dans les eaux de surfaces est un cas palpable de pollution qui a pour conséquence la perte de la biodiversité (Boudjelal et al., 2003).

Etat de la pollution physico-chimique des eaux de surface

La dégradation physico-chimique des ressources en eau a des origines aussi naturelle qu’anthropique. Ainsi, les fortes turbidités des eaux de surface sont rencontrées en saison pluvieuse et/ou pendant les périodes de dégèle dues aux eaux de ruissellement qui charrient beaucoup de particule sur leur chemin (Gbaguidi et al., 2018). Les brusques variations de conductivité électrique et de Solides Totaux Dissouts (TDS) des cours et plans d’eau qui jouxtent les océans par le truchement des estuaires sont dues à des intrusions salines saisonnières qui font de

ces écosystèmes aquatiques des écosystèmes particuliers. Par contre, les écarts de pH et de températures sont dus aux rejets industriels. Selon l’étude effectuée par Adjagodo et al. (2017), la basse Ouémé présente une turbidité élevée hors norme OMS mais présente un pH acceptable. Les eaux de la rivière de Daloa en Côte d’Ivoire ont une conductivité située dans la marge de 192,3 µS/cm et 316 µS/cm (Ahoussi et al., 2019).

Etat de la pollution chimique des eaux de surface

Si autrefois la principale pollution des ressources en eau était microbiologique, depuis l’avènement de l’industrialisation la pollution chimique des écosystèmes et en particulier celle des ressources en eau a galopé et plus compliquée à y faire face (Gboudjou et al., 2022 ; Gbaguidi, 2014). Les activités anthropiques surtout agricoles constituent la

principale source de pollution des milieux naturels après l’industrie (Adjagodo et al. 2016 ; Hounsounou et al. 2016). Ainsi, l’agriculture qui était à l’origine intrinsèquement biologique, est devenue avec la croissance démographique modernisée par la mécanisation, l’utilisation massive des intrants agrochimiques de synthèse comme les engrais synthétiques et les pesticides pour augmenter les rendements afin de faire face au déficit alimentaire toujours renouvelé.

Cette pratique qui, en partie, permet de répondre à la demande de la population n’est pas sans conséquences environnementales et sanitaires (Lawani et al., 2017). Il s’en suit que l’Homme en voulant lutter contre la faim, rend son environnement invivable au fil des âges. Selon Ramade (2007), dans les années 90, la consommation annuelle mondiale en pesticides étaient plus de 3 millions de tonnes de matières actives pures, ce qui représente une masse impressionnante de rejet polluant dans la nature.

Sur le lac Guidimouni et la mare de Tabalak au Niger certains auteurs ont constaté des niveaux élevés de dégradation des écosystèmes aquatiques et ont rapporté que les cultivateurs de la zone s’intéressent plus à l’usage des pesticides prohibés que ceux homologués par le gouvernement (68,76% pour Guidimouni et 88,62 % pour Tabalak).

Selon les mêmes auteurs, ces usages contribuent massivement au rejet dans l’environnement de l’Aldrine, Fenthion, DDT, Profenophos, Dicofol et Lindane, Dieldrine, Dimethoate (Youchaou et al., 2021). Selon Agbohessi et al., (2012), le coton est une filière phare du développement du Bénin. Mais l’usage incontrôlé des engrais et des pesticides dans cette filière, a induit des contaminations par le glyphosate, le Profénofos, l’Acétamipride, la Cyperméthrine, la Flubendiamide, le spirotétramate et autres formes de pyréthrinoïdes des eaux du Couffo dans la zone cotonnière de Djidja.

Alors les niveaux de contaminations ont atteint un seuil tel qu’un suivi régulier et continu devrait être réalisé au risque d’assister à une catastrophe sanitaire et/ou à une dégradation trop poussée des écosystèmes aquatiques (Aïkpo et al., 2015 ; Bachabi et al., 2020). Au-delà de ces constats se cachent parfois des catastrophes environnementales et sanitaires diffuses en ce sens que les produits phytosanitaires que les producteurs qualifient de moins chers, accessibles et performant de par leurs effets immédiats sont prohibés, persistants dans l’environnement, lipophiles et

très toxiques par toutes les voies de contamination (orale, inhalation et dermiques) avec des effets les plus souvent irréversibles (Akinhola et al., 2015). Ces molécules leur parviennent par des circuits informels qui échappent à tout contrôle. L’étude de Gbaguidi et al., (2011) sur la rivière Agbado dans la commune de Savalou a suspecté l’utilisation des pesticides comme technique de pêche sur les cours et plans d’eau

comme la principale cause de mort massive et cycle des poissons. Pour certains auteurs les molécules incriminées peuvent être des extraits de plante ou des molécules de synthèse chimique (Gbaguidi et al., 2011 ; 2014 ; 2018 ; Dossa, 2016). Pour Azonnakpo et al., (2020) le Delta de l’Ouémé est soumis à une pollution organique variable en fonction des saisons et de l’espace considérés.

Tout ceci met en danger la vie aquatique et pourrait engendrer la raréfaction ou la disparition totale des espèces aquatiques les plus sensibles comme certaines algues et poissons. Il est démontré que les algues, les mollusques et les oursins sont vulnérables aux polluants organiques (Kouamé et al., 2021). Yao et al., (2020) ont rapporté des niveaux de contamination annuelle de la lagune Ebrié en Côte d’Ivoire en métoxuron, aldicarbe, simazine, métolachlore et déséthylatrazine variant entre 0 et 159,46 µg.L-1 dans l’eau et 0 à 40,66

µg.Kg-1 dans les muscles des poissons analysés. Ces concentrations présentent un risque d’intoxication à plus ou moins long terme pour les consommateurs des ressources de la lagune. Pour Bawa et al. (2006), le manque d’application des réglementations en vigueur contribue à la dégradation de l’environnement et nulle ne saurait échapper aux déconvenues qui pourraient en découler.

En ce qui concerne les niveaux de contamination des ressources en eau de surface en métaux toxiques, plusieurs auteurs se sont penchés sur le sujet et ont rapporté des informations sur les sources et l’ampleur de la contamination des cours et plans d’eau dans la sous-région et les conséquences environnementales et sanitaires associées.

Ainsi, selon Todedji et al. (2020), les métaux toxiques retrouvés dans l’environnement proviennent de la mauvaise gestion des eaux usées industrielles, hospitalières ou des déchets solides urbains et/ou hospitaliers. Adje et al., (2021) ont rapporté que le barrage hydroélectrique de Nangbéto au Togo est un réceptacle de plusieurs déchets avec plusieurs formes de pollutions.

Les auteurs ont montré que le barrage est contaminé par le cuivre (Cu), le mercure (Hg), le cadmium (Cd), le palladium (Pb), l’arsenic (As), le nickel (Ni) et le chrome (Cr). Or la contamination croisée d’un écosystème en plusieurs polluants augmente les risques de nuisances pour les ressources halieutiques et par ricochet l’homme même si chacun des polluants est retrouvé à des concentration faibles au seuil critique (Diaby et al., 2017).

Des poissons prélevés dans le système lagunaire togolais soumis aux analyses physicochimiques ont révélé la présence en concentration hors normes de cadmium, d’arsenic et de Plomb. Ce qui est un facteur de risque d’intoxication aux métaux toxiques des consommateurs en général et en particulier les enfants et des individus aux systèmes immunitaires défaillants (Ouro-Sama et al., 2014).

Etat de la pollution microbiologique des eaux de surface

La pollution microbiologique est causée généralement par des bactéries ou des virus et protozoaires provenant en majeure partie des excréments animaux et humains dont la présence dans les eaux est une preuve de dégradation microbiologique (OMS, 2004). Pour déterminer l’état microbiologique d’une eau on se base sur le dénombrement de certains indicateurs surtout d’origine fécale comme : les coliformes totaux, les coliformes fécaux ou thermotolérants, les entérocoques ou streptocoques (Minha et al., 2006).

L’étude menée par Lalami et al. (2014) sur neuf stations collectrices des eaux usées domestiques et industrielles de la ville de Fès (Maroc) sur une durée de trois ans a révélé que ces eaux rejetées sans aucun traitement dans un milieu récepteur contiennent une quantité importante de germes pathogènes. Les études microbiologiques et parasitologiques réalisées ont montré une présence massive de souches de parasites notamment Salmonella typhi, les kystes de protozoaires (Entamoeba histolitica, Entamoebacoli et Giardia lamblia) et des œufs d’helminthes.

Le nombre de microorganismes rencontrés dépasse ceux recommandés par les directives de l’OMS et pourrait être à la base des maladies et/ou infections bénignes ou graves comme les diarrhées, les gastro-entérites, les fièvres typhoïdes, l’ascaridiose, les hépatites, la dysenterie, la leptospirose… (Lalami et al., 2014). De même les eaux de l’Oued Hassar (Maroc) contiennent une importante charge microbiologique en coliformes totaux, coliformes fécaux et streptocoques fécaux (Fouad et al., 2013).

Au Bénin, les eaux du Delta de l’Ouémé sont contaminées par des germes fécaux variés entrainant de facto la consommation de cette eau dangereuse pour l’homme en cas de traitement non adéquat avant sa prise (Azonnakpo et al., 2020). Atidegla et al., (2010) ont rapporté des contaminations microbiologiques des eaux souterraines utilisées pour l’irrigation maraîchère à Grand-Popo.

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