Le coût de la scolarité à Lubumbashi est analysé à travers la prolifération des écoles privées, mettant en évidence son impact sur la qualité de l’éducation et les défis financiers rencontrés par les ménages à faible revenu. Cette étude révèle les implications socio-économiques de cette dynamique éducative.
Université de Lubumbashi
Faculté des sciences économique et de gestion
département de gestion
Mémoire présenté et défendu en vue de l’obtention du grade de licencié en gestion financière
Prolifération des écoles privées et coût de la scolarité maternelle, primaire et secondaire dans la ville de Lubumbashi
Par :
KINGOMBE MUSEBA Christophe
SEPTEMBRE 2023
ÉPIGRAPHE
« L’éducation est l’arme la plus puissante que l’on puisse utiliser pour changer le monde, mais quand elle est limitée par de frais de scolarité exorbitants, elle devient une arme à sens unique. »
Nelson Mandela
RÉSUMÉ DU MÉMOIRE
Ces dernières années, la ville de Lubumbashi a connu une augmentation significative du nombre des écoles privées. Cette tendance s’explique par le manque d’écoles publiques de qualité et l’augmentation de la demande en éducation de qualité. Il était question de savoir si la prolifération des écoles privées a un impact sur la qualité de l’éducation et sur le coût de scolarité.
Pour pouvoir répondre à ces préoccupations, nous nous sommes construits quatre hypothèses, que nous avons soumises à la vérification empirique. Du point de vue méthodologique nous nous sommes servis des techniques de recherche : l’observation indirecte ou technique documentaire et l’observation directe (questionnaire écrit) pour récolter les données auprès des habitants de la ville de Lubumbashi. Toutes ces informations ont été traitées par l’analyse statistique.
La présente étude nous a permis d’aboutir aux résultats suivants :
- Les écoles privées sont peu accessibles pour la population à faible revenu dans les deux communes de la ville de Lubumbashi. Les principales raisons qui empêchent la population à faible revenu d’accéder aux écoles privées sont :
- Le coût de scolarité élevé
- Le manque de places disponibles dans les écoles privées
- La qualité de l’enseignement s’est détériorée avec la prolifération des écoles privées, la principale conséquence de la prolifération des écoles privées sur le coût de la scolarité maternelle, primaire et secondaire est l’augmentation des coûts indirects liés à l’éducation. Les parents doivent souvent dépenser davantage pour les uniformes, les fournitures scolaires et les activités extrascolaires proposées par les écoles privées.
- Le coût de scolarité a un impact significatif sur le revenu et les dépenses mensuelles des parents (ménages). La majorité des parents interrogés affirment qu’ils ont des difficultés à payer les frais de scolarité de leurs enfants.
INTRODUCTION
1. Présentation du sujet
Notre sujet est intitulé « la prolifération des écoles privées et coût de la scolarité maternelle, primaire et secondaire. Cas de la ville de Lubumbashi. » La ville de Lubumbashi étant vaste nous avons mené notre étude dans deux communes de celle-ci qui sont ; la commune de la KATUBA et la commune de la KENYA.
Notre réflexion se base sur la multitude des écoles privées ces dernières années et le coût de la scolarité. On ne peut pas envisager le développement d’une nation sans investir dans le secteur éducatif. Le secteur éducatif est important dans le sens où il est appelé à former les futurs cadres de demain, comme dit-on : « un peuple qui n’éduque pas sa population est appelé à disparaitre ».
Depuis quelques années, nous avons constaté une recrudescence des écoles privées dans la ville de Lubumbashi. Cette recrudescence est due en partie à la croissance démographique qu’a enregistré notre pays ces dernières années et la défaillance de l’état congolais à assurer l’éducation de sa population. Cette défaillance à des effets néfastes sur la qualité de la formation, l’éducation et le coût de scolarité.
En effet, comme dans une structure de marché dite de concurrence parfaite c’est-à-dire il y a plusieurs acheteurs et plusieurs offreurs de l’éducation dans notre cas. Les écoles sont en concurrence et cette concurrence affecte non seulement la qualité de la formation mais aussi le coût de scolarité.
L’article 43 de la constitution stipule que toute personne a droit à l’éducation scolaire. Il y est pourvu par l’enseignement national. Ce dernier comprend les établissements publics et les établissements privés agréés.
La loi fixe les conditions de création et de fonctionnement de ces établissements. Les parents ont le droit de choisir le mode d’éducation à donner à leurs enfants. L’enseignement primaire est obligatoire est gratuit dans les établissements publics.
Malheureusement, les différents secteurs de la vie nationale enregistrent depuis plus d’une décennie un important disfonctionnement de sorte qu’il n’est pas facile d’appliquer la gratuité de l’enseignement dans les écoles publiques.
Le secteur éducatif illustre bien la profondeur de la crise que traverse notre pays la république démocratique du Congo et notre ville en particulier. Le pourcentage de la population sans instruction est inquiétant car on ne peut pas envisager le développement dans un pays qui tourne le dos à l’éducation de sa population.
Enfin, la prolifération des écoles privées et le coût de scolarité apparaissent comme un facteur de compétitivité économique. Donc l’état congolais doit revoir sa politique en ce qui concerne la gestion des écoles privées et essayer de l’adapter aux enjeux actuels. D’où la raison d’être de cette étude.
2. Phénomène observé
À travers le monde une rentrée scolaire est souvent source d’angoisse pour les parents d’élève, les enseignants et l’Etat eu égard aux nombreuses agitations observées pendant cette période.
Les parents font face à d’énormes dépenses pour la scolarisation de leurs enfants, occasionnées par l’achat des matériels scolaires, les différents frais scolaires à payer, sans oublier la prise en charge des enseignants dans les écoles privées à travers le minerval ou autres frais de scolarité.
Les ménages contribuent à près de 77 % des dépenses totales courantes d’éducation tant au primaire qu’au secondaire, à travers plusieurs types de dépenses dont les plus importants sont les frais de scolarité (46 % au primaire et 55 % au secondaire) et ce, malgré l’instauration de la gratuité. Les dépenses des ménages par enfant scolarisé étaient estimées à 62 800 FC (16 % du PIB/hab.) dans l’enseignement primaire et 125 900 FC (32 % du PIB/hab.) dans l’enseignement secondaire en 2012 ; des niveaux trois fois plus élevés que les coûts unitaires publics par élève.
Ceci classe la RDC parmi les pays où l’apport des ménages est des plus substantiels. Il indique également un financement de l’éducation peu équitable, et non pro-pauvres, étant attendu que la contribution des ménages au niveau de l’éducation de base soit marginale[1].
En 2020, L’agence américaine pour le développement internationale (USAID) et l’aide au développement britannique (UKAID) ont mené une enquête sur la prolifération des écoles privées à bas coût en République démocratique du Congo. Cette enquête a montré que face à l’explosion démographique, les États les plus fragiles et les gouvernements des pays d’Afrique subsaharienne ne parviennent pas à répondre à la demande exacerbante en éducation.
Les écoles privées prennent alors souvent le relais. Les écoles non placées sous l’autorité de l’État accueillent déjà près de 14 % des élèves des pays à faibles revenus en âge d’aller à l’école primaire et 24 % des élèves de primaire dans les pays à revenus intermédiaires de la tranche inférieure[2].
Toujours selon cette enquête, l ’accès à l’éducation et la qualité de l’éducation en RDC restent problématiques pour le gouvernement et les bailleurs de fonds, car cela les empêche d’atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies. Les écoles privées à bas coût peuvent faire partie de la solution en aidant à combler les lacunes d’un accès équitable à une éducation de qualité et à améliorer les compétences des élèves en lecture, mathématiques et autres compétences fondamentales.
Toutefois, elles doivent pouvoir compter sur le support et les mécanismes de gestion et de surveillance qui permettraient de garantir la bonne santé financière du secteur de l’éducation dans son ensemble.
Ces dernières années, la ville de Lubumbashi a connu une augmentation significative de la prolifération des écoles privées. Cette tendance s’explique par le manque d’écoles publiques de qualité et l’augmentation de la demande en éducation de qualité.
Cependant, cette prolifération des écoles privées a entraîné une augmentation du coût de la scolarité maternelle, primaire et secondaire. Les parents doivent désormais payer des frais de scolarité exorbitants pour inscrire leurs enfants dans ces établissements privés.
Malheureusement, cette situation a aggravé le problème de l’inégalité sociale, car seuls avec un revenu constant les parents de la classe moyenne peuvent se permettre de payer ces frais de scolarité. Les parents à faible revenu sont confrontés à de grandes difficultés financières pour scolariser leurs enfants.
De plus, l’absence d’un système réglementaire efficace pour les écoles privées a permis à certaines d’entre elles de fonctionner sans respecter les normes de qualité de l’éducation. Les enseignants ne sont pas formés et les conditions de travail sont précaires, ce qui a un impact négatif sur la qualité de l’enseignement.
Bien que la prolifération des écoles privées puisse offrir des possibilités d’éducation de qualité, elle a également entraîné une augmentation du coût de la scolarité maternelle, primaire et secondaire, aggravant ainsi les problèmes d’inégalité sociale et d’accès à l’éducation. Un système réglementaire efficace doit être mis en place pour assurer que toutes les écoles privées respectent les normes de qualité de l’éducation.
Question de départ
Dans l’optique de notre travail, notre question de départ est la suivante ;
La prolifération des écoles privée a-t-elle un impact sur la qualité de l’enseignement ?
Revue de la littérature
Ici il est question pour nous de faire une référence aux auteurs ayant abordé le problème dans le même sens. N’ayant pas été en mesure de passer en revue tous les travaux qui traitent sur la prolifération des écoles privée et le coût de scolarité, nous nous sommes limité à quelques-uns ci-après :
- Amadou BOUBACAR Cissé. Dans son livre « Le coût de l’éducation en Afrique » propose que la gratuité de l’éducation devrait être mise en œuvre progressivement en Afrique pour réduire les coûts de l’éducation et faciliter l’accès à l’éducation pour tous les enfants. Pour Cissé, la gratuité de l’enseignement nécessiterait des investissements importants dans les infrastructures scolaires, les enseignants et d’autres ressources pour garantir une éducation de qualité. Cissé note également que les gouvernements africains devraient élaborer des politiques pour encourager la participation de la société civile dans le secteur de l’éducation, y compris le partenariat public-privé. Enfin, il souligne que la réduction des coûts de l’éducation en Afrique est cruciale pour la réalisation des objectifs de développement durable des Nations unies, notamment la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales[3].
- Dans son livre « Les écoles privées en Afrique noire », Mamadou Mbaye Moustapha Gaye s’intéresse à la montée en puissance des écoles privées dans le système éducatif africain depuis les années 1980. Il explore les différentes raisons qui ont conduit à cette augmentation et analyse les conséquences sur le système éducatif et sur la société africaine en général.
Le livre de Mamadou Mbaye Moustapha Gaye est divisé en quatre parties. Dans la première partie, il décrit l’évolution du système éducatif en Afrique noire et la montée des écoles privées. Dans la deuxième partie, il examine les raisons pour lesquelles les parents préfèrent les écoles privées. Il évoque notamment l’insatisfaction envers le système éducatif public, la volonté d’offrir une éducation de qualité à leurs enfants ainsi que la possibilité d’offrir une éducation islamique ou chrétienne.
Dans la troisième partie, l’auteur analyse les différentes formes et modèles des écoles privées. Il décrit les différences entre les écoles à but lucratif et celles à but non lucratif, les écoles confessionnelles et les écoles séculières. Enfin, dans la quatrième partie, il examine les conséquences de la montée des écoles privées sur le système éducatif public.
Mamadou Mbaye Moustapha Gaye conclut que les écoles privées ont un impact important sur le système éducatif en Afrique noire, à la fois positif et négatif. D’une part, elles offrent des possibilités d’éducation pour ceux qui n’en auraient pas autrement, et peuvent amener un haut niveau de qualité en matière d’éducation. D’autre part, elles peuvent conduire à un désengagement de l’État vis-à-vis de sa responsabilité envers l’éducation, ainsi qu’à l’exclusion des classes les plus pauvres de la société et à une augmentation des inégalités.[4]
- Dans son livre « Privatisation et décentralisation de l’éducation : expérience et perspectives en Afrique noire », Addou Fall explore les expériences de privatisation et de décentralisation de l’éducation en Afrique noire et en analyse les avantages et les inconvénients. L’auteur examine les différentes approches de la privatisation et de la décentralisation de l’éducation, en se concentrant sur les efforts en cours en Afrique noire. Il examine les raisons pour lesquelles les gouvernements ont opté pour ces approches, dont la nécessité de réduire les coûts, la nécessité de fournir une éducation de qualité et la nécessité de réduire la bureaucratie
Addou Fall analyse également les conséquences de ces politiques en termes d’équité et d’accès à l’éducation. Il constate que la privatisation peut conduire à une inégalité accrue et à une exclusion de certains groupes sociaux, tandis que la décentralisation peut améliorer l’accès à l’éducation pour les groupes marginalisés. L’auteur examine également les effets de ces politiques sur la qualité de l’éducation. Il constate que la privatisation peut conduire à des améliorations de la qualité de l’éducation, mais que cela peut être limité par des coûts élevés pour les enfants et leurs familles. En revanche, la décentralisation peut améliorer la qualité de l’éducation en permettant une meilleure adaptabilité aux besoins locaux[5].
- SHAMAVU BYANJIRA John Kissa dans son mémoire montre une complexité des conditions de travail des enseignants entre les écoles du secteur public et du secteur privé dans la ville de Goma. Les enseignants qui donnent cours dans les écoles privées de la ville de Goma sont moins rémunérés que ceux du public et leurs revenus annuels restent inférieurs à ceux observés chez leurs collègues du public. Les enseignants du public disposent des manuels et programmes scolaires et mais bénéficient moins de formations sur leur utilisation que ceux du secteur privé.
Les conditions sanitaires sont meilleures dans les écoles privées que dans les écoles publiques. Les enseignants du privé représentent une proportion supérieure que ceux du public d’enseignants qui reconnaissent travailler dans les meilleures conditions sanitaires et d’environnement sûr et l’existence d’installations hydro-sanitaires adéquates[6].
- MORISHO GULAMU Richard dans son étude, a analysé le système éducatif congolais et mesuré le rendement interne. Il a montré que le système éducatif congolais n’est pas efficace sur le plan interne ; les taux de redoublement et d’abandon élevés, le taux d’achèvement scolaire faible, la faible participation des filles, la faible participation des femmes à la fonction enseignante, la forte déperdition scolaire due à la pauvreté des parents.
La faible productivité interne du système éducatif a des répercussions sur sa rentabilité externe : diplômés sans emploi ou employés dans les secteurs et postes qui ne cadrent pas avec leur formation ; insuffisance de la contribution de l’éducation au développement économique etc.
De ce qui précède, l’état actuel de fonctionnement du système éducatif congolais n’offre guère des perspectives de sa contribution au développement économique. Selon MORICHO GULAMU, la restructuration profonde de ce système peut renverser la tendance7
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1. RESEN (Rapport d’état du système éducatif national). (2014). Rapport d’état du système éducatif, Résumé exécutif. Pour une éducation au service de la croissance et de la paix. ↑
3. Amadou BOUBACAR Cissé, (2007) Le coût de l’éducation en Afrique, Ed. L’Harmattan, Paris ↑
4. Mamadou Mbaye Moustapha Gaye, (2005), Les écoles privées en Afrique noire : Essais sur l’épistémologie Africaine, Ed. Eburnie, Abidjan. ↑
5. Addou fall, (2000) Privatisation et décentralisation de l’éducation : expérience et perspectives en Afrique noire, édition l’harmattan ↑
6. SHAMAVU BYANIRA John Kissa. (2021). Comparaison des conditions de travail des enseignants et des contextes d’enseignement entre les écoles primaire et secondaire du secteur public et privée de la ville de Goma dans la province du Nord Kivu, République démocratique du Congo. Université de Bourogne. 7 MORISHO GULAMU richard. (2012). Rendement interne et disparités dans l’accès à l’enseignement primaire et secondaire en RDC, UNIKIN, FASEG ↑