2.2.3-Principe du lombricompostage

Le principe du lombricompostage repose sur les qualités naturelles de ces vers de surface et sur la création d’un milieu de vie qui leur est favorable afin de permettre une dégradation et une transformation rapides des déchets organiques. Elles se réalisent en présence d’oxygène et d’humidité (Amorce, 2018).
L’action des vers de terre est complétée par le travail des bactéries et des champignons (Amorce, 2018). Ce processus permet d’obtenir un amendement organique riche en éléments minéraux, le « lombricompost », dont les caractéristiques sont proches du terreau (plus chargé en matière organique que le compost). Il peut être utilisé sur les plantes en mélange avec de la terre.
Un jus valorisable est également produit : il s’agit du « lombrithé » ou « jus de lombricompost », obtenu par la percolation de l’eau contenue dans les biodéchets à travers le tas en cours de dégradation. Une dilution au 1/10ème est indispensable pour l’utiliser en tant qu’engrais liquide (Amorce, 2018).

2.2.3.1- Lombricompost

Le lombricompost est un fertilisant 100 % naturel, issu de la digestion des déchets fermentescibles de cuisine par les vers de terre (St-Pierre, 1998). Il se présente sous la forme d’un terreau de couleur noire, d’agréable odeur et a l’aspect grumeleux (Sierra et al., 2011).
On le récupère dans le bac inférieur.
La figure 9 présente les turricules des vers de terre ou lombricompost.
Principe du lombricompostage - Turricules des vers de terre ou lombricompost
Figure 9 : Turricules des vers de terre ou lombricompost Source : Sierra et al.(2011)
Ces turricules (déjections) ont une teneur élevée en matière organique et un rapport C/N de 10,7 (St-Pierre, 1998). Le lombricompost est un engrais 100 % biologique. Il peut être utilisé sur toutes les cultures, mais aussi en agriculture biologique où son marché est bien développé à l’échelle internationale.
Le lombricompost possède une activité biologique importante.
La flore bactérienne qui s’y développe est représentative de la flore intestinale des lombriciens. Suite aux passages des résidus organiques à travers l’intestin du ver, celle-ci s’est multipliée dans le substrat en décomposition. Cette flore joue un rôle important dans le cycle de l’azote (St-Pierre, 1998).
Une fois appliqué comme amendement organique, le lombricompost a une action bénéfique au niveau des sols et des végétaux, principalement en raison de son haut contenu en matière organique.
Il agit sur les propriétés physiques, chimiques et biologiques des sols et sur leur niveau de fertilité. Il améliore la stabilité structurale du sol et augmente sa capacité de rétention en eau et sa porosité (St-Pierre, 1998).
Le lombricompost améliore également les échanges gazeux, le drainage, l’aération des sols et sa capacité d’échange cationique (Edwards et Burrows, 1988). Soulignons enfin que le lombricompost contiendrait des composés riches en hormones qui faciliteraient la croissance des plantes et la résistance aux maladies (Dominguez et al., 1997).
Le lombricompost est très important pour l’agriculture biologique et est également utilisable pour les jardins, potagers, pelouses, jardinières, pots de fleurs et les plantes d’appartement. Cependant, il est très riche et ne doit pas être utilisé seul. Mélanger un quart de lombricompost avec trois quart de terre de jardin ordinaire ou de l’ancienne terre.
En rempotage, ajouter directement au sol, deux parts de terreau naturel à une part de lombricompost.

⇒ Utilisateurs du lombricompost

Le lombricompost est un produit de haute qualité et intéresse :

• Les agriculteurs avec
  • – l’agriculture spécialisée (horticulture, pépinière, viticulture),
  • – le maraîchage (melons, fraises, tomate, petits pois, haricots verts).
• Les collectivités avec l’entretien des espaces verts et jardins publics de mairies.
• Des professionnels spécifiques avec
  • – les professionnels du gazon en plaques,
  • – les professionnels des golfs.
• Les particuliers avec
  • – leurs plantes d’appartement, fleurs,
  • – leur potager (tomates, fraisiers, pommes de terre, petits pois, haricots verts, céleri, salades, radis).

2.2.3.2- Lombrithé

C’est le liquide qui s’écoule à la base du lombricomposteur; il se forme lors de la décomposition des déchets biodégradables humides en cours de dégradation. On le récupère au fur et à mesure de sa production dans le bac récolteur de jus, grâce au petit robinet du bac inférieur.
La figure 10 présente le dispositif de récupération du lombrithé.

Dispositif de récupération du lombrithé

Figure 10 : Dispositif de récupération du lombrithé
Source : www.tco.re/wp-content/uploads/2015/12/Guide-Lombricompostage.pdf
C’est un excellent fertilisant qui peut être utilisé comme engrais liquide, à condition de le diluer avec de l’eau car il est très concentré. Cette dilution est à raison de 10 %, c’est-à-dire que 1ℓ de lombrithé correspond à 10 ℓ de mélange pour la pulvérisation ou l’arrosage. Avant l’utilisation, on doit laisser le mélange se reposer pendant 72 h.
Un écoulement trop important est révélateur d’une trop grande humidité dans le lombricomposteur.
Il faudra veiller à apporter plus de matières sèches. Plus le lombrithé est frais, plus il contient des micro-organismes qui améliorent la qualité du sol et la santé de la plante. En application, il protège les plantes (intérieur ou extérieur, potager, espaces verts) contre les maladies et animaux ravageurs.

2.2.4- Paramètres du lombricompostage

Le lombricompostage se pratique dans un contenant fermé, gardé en intérieur afin de maîtriser les six paramètres essentiels suivants:

⇒ Température :

Pour le lombricompostage, la température idéale se situe entre 15 et 25 °C. En dessous de 15 °C, l’activité biologique des vers diminue et la transformation des déchets ralentit. Une température atteignant les 30 °C est fatale pour les lombrics.
Les domaines de température présentés à la figure 11 doivent donc être impérativement respectés.

Domaines de température du vers de terre

Figure 11 : Domaines de température du vers de terre
Source : www.terredecamargue.fr/wp-content/uploads/2012/02/guide-lombricompostage.pdf

⇒ Humidité :

Les vers ne doivent pas se trouver dans un milieu trop humide. La plage d’humidité idéale pour le lombricompostage est de 70-90 %; ils préfèrent une salinité inférieure à 0,5 %.
Le lombricomposteur doit donc être mis à l’abri de la pluie, et les déchets mis au compostage ne doivent pas être majoritairement aqueux (ou doivent à minima, être accompagnés de papier, cartons ou autres fibres permettant d’absorber l’excédent.

⇒ pH :

Il doit être compris entre 6,5 et 8.

⇒ Aération et drainage:

Cette étape est très importante pour les vers de terre, car ça aide à éliminer les gaz pouvant les asphyxier. Pour assurer une aération et un drainage appropriés, les parois, le fond et les côtés du lombricomposteur doivent être perforés afin de permettre une bonne aération du système, et être plus généralement situé dans un espace aéré.

⇒ Présence de l’obscurité :

Les vers de terre ont sur la peau, des cellules photosensibles qui provoquent de la douleur lorsqu’elles sont exposées à la lumière. C’est pourquoi, ils demeurent sous la surface du sol pendant la journée.
Les lombrics aiment l’obscurité.

⇒ Absence de bruit :

Le bruit et les vibrations font fuir les vers de terre, le lombricomposteur doit donc être installé à l’abri de ces nuisances.
Le lombricompostage est particulièrement adapté aux déchets de cuisine. Le lombricomposteur prend en règle générale la forme d’une boîte unique ou d’un empilement de plusieurs plateaux perforés.
Une évacuation, sous forme de robinet par exemple, doit être prévue afin de permettre d’extraire le liquide produit par les vers au cours de la décomposition des déchets.
Cependant, le lombricompostage présente plusieurs atouts (espace réduit, entretien et manutention limités, obtention de deux types d’amendements organiques) par rapport à la pratique du compostage. Mais, il présente également certaines limites (consignes de tri plus restreintes, emplacement du lombricomposteur à l’intérieur de l’appartement ou sous un abri, sensibilité des vers).
Les principaux atouts et limites du lombricompostage sont listés dans le tableau 3.
Tableau 3 : Atouts et limites du lombricompostage

AtoutsLimites
Matériel-nécessite un emplacement restreint,
-possibilité de déplacer le lombricomposteur (dans le cas des bacs à roulettes).
-nécessite du matériel adapté comprenant notamment un système de récupération du lombrithé,
-coût d’investissement pouvant être supérieur par rapport au compostage en bacs (pour un dimensionnement équivalent).
Fonctionnement-processus rapide et facile,
-absence d’odeur,
-possibilité d’interrompre les apports en biodéchets quelques semaines (au maximum quatre semaines),
-aspect pédagogique/ sensibilisation très intéressant pour les écoles.
-forte sensibilité des vers aux conditions extérieures et aux températures extrêmes : le lombricomposteur doit être placé dans un endroit où la température est stable et à l’abri du vent et de la pluie,
-nécessite un suivi et une technique poussée.
ValorisationRécolte régulière de deux types d’engrais: lombricompost et lombrithé.-demande une certaine habileté pour la récupération du lombricompost : nécessité de retirer les vers présents,
-nécessité de récupérer régulièrement le lombrithé pour contrôler l’humidité et éviter que les vers tombent à l’intérieur de celui-ci.

Source : Amorce (2018)
Grâce à sa taille globalement réduite, il est très adapté à une utilisation en appartement et fournit ainsi une possibilité aux personnes n’ayant pas accès à un espace vert privatif de composter leurs biodéchets.
La fabrication d’un lombricomposteur est très simple; il suffit de récupérer trois ou quatre bacs encastrables ou superposables les uns sur les autres. Différents matériaux peuvent être utilisés : plastique (bacs de rangement), bois non traité (caissettes) et polystyrène (bacs à poisson).
La figure 12 présente quelques modèles de lombricomposteurs disponibles sur le marché européen.

  • a) Plastique (bacs de rangement)
  • b) Bois non traité (caissettes)
  • c) Polystyrène (bacs à poisson)


Principe du lombricompostage - Plastique (bacs de rangement)

Principe du lombricompostage - Bois non traité (caissettes
Principe du lombricompostage - Polystyrène (bacs à poisson

Figure 12 : Quelques modèles de lombricomposteurs Source : Google (2018)
Les vers de terre et la litière sont introduits à l’intérieur d’un bac en plastique, d’un bac fait en bois ou en polystyrène muni d’un couvercle. La litière est le milieu de vie des vers et remplie plusieurs fonctions : retenir l’humidité, permettre une bonne aération jusqu’au fond du lombricomposteur, constituer l’apport carboné et la matière structurante.
L’aération et le drainage sont les éléments clés du lombricompostage. C’est pourquoi, le lombricomposteur possède des trous au fond pour le drainage et des évents sur le dessus pour l’aération. Cela est illustré dans la figure 13 où est présentée la vue intérieure d’un lombricomposteur avec ses différentes parties.

Vue intérieure d’un lombricomposteur avec ses différentes

Figure 13 : Vue intérieure d’un lombricomposteur avec ses différentes parties Source : www.pinterest.com/lafaussette/lombricomposteur
Au niveau des accessoires, une petite fourche peut être utile pour mélanger les apports, tout comme une pelle pour récupérer le lombricompost et un tamis pour séparer les vers présents dans le lombricompost lors de la récolte (Amorce, 2018).
Des bioseaux peuvent également être utilisés pour faciliter le stockage et le transport des biodéchets du domicile au lombricomposteur.
Enfin, un petit bac posé au sol ou accroché au lombricomposteur peut être prévu pour stocker la matière carbonée (Amorce, 2018).
Ce type de procédé est utilisé plus particulièrement pour le lombricompostage résidentiel et pour la réalisation de projets à petite échelle (St-Pierre, 1998). Utilisé à grande échelle, il cause des problèmes de manipulations, lors de l’ajustement du niveau d’humidité et lors de l’ajout de matériel frais (St-Pierre, 1998).

2.2.5- Méthode d’alimentation des lombrics

Selon Martin et al., (2011) cité par Azizi (2017), le régime alimentaire des vers de terres est variable. Au cours du compostage, les lombrics doivent être régulièrement alimentés avec de la matière organique fraîche, afin de maintenir une croissance, une densité et une reproduction optimales (St-Pierre, 1998).
Reinecke et Viljoen (1990), montrent qu’une population de dix lombrics alimentée de 20 grammes de substrat frais chaque 20 jours démontrait une augmentation constante de leur biomasse dans le temps. L’ajout successif de petite quantité de substrat empêche également une élévation brusque des températures et maintient le milieu en conditions aérobies.
L’épaisseur totale du substrat composté et cumulé doit être d’environ 30 à 40 centimètres (Edwards, 1995).
Au fur et à mesure qu’il est nourri, le lombric se déplace vers la matière organique fraîche, laissant au niveau de couches inférieures un lombricompost en maturation (Neuhauser, 1988).

2.2.6- Différence entre le lombricompost et le compost

Le lombricompost :

– présente des niveaux de contamination en microorganismes pathogènes bien plus faibles que le compost conventionnel (Ndegwa et Thompson, 2001) : parce que les vers épigés consomment les champignons, et que les bactéries pathogènes ne peuvent pas survivre dans le milieu peu oxygéné que constitue leur intestin (Chaoui, 2010),
– est de meilleure qualité que le compost conventionnel : ces études se basent sur l’analyse des teneurs en matière organique, en azote total et en nutriments que sont l’azote, le phosphore et le potassium (Tognetti et al., 2007; Sierra et al., 2011),
– protège les végétaux des maladies, accroit leur rendement et augmente leur teneur en protéines comparativement aux engrais commerciaux,
– améliore la composition du sol, ce qui permet ainsi de supprimer les besoins en engrais chimique,
– augmente ses capacités à retenir l’eau, diminuant ainsi les phénomènes de sécheresse,
– favorise l’enracinement.

2.2.7- Intérêt du lombricompostage

Le lombricompostage permet de :
→ réduire les déchets domestiques biodégradables, tout en fabriquant un engrais naturel qui servira à enrichir la terre,
→ réduire de 30 % la quantité de déchets à collecter, à transporter et à enfouir par la collectivité,
→ valoriser les déchets organiques gratuitement et en autonomie,
→ produire sur place du lombricompost et du lombrithé qui sont des engrais biologiques 100 % naturels et gratuits,
→ produire également des vers de terre pouvant servir d’appâts pour la pêche et pour la pisciculture,
→ reproduire le cycle naturel de la matière organique, puisque les déchets permettront de nourrir d’autres végétaux,
→ limiter les coûts de collecte, ainsi que les dépenses énergétiques et les émissions de co2,
→ réduire le volume de lixiviat produit dans les décharges. le lixiviat est un liquide pollué qui s’écoule d’une décharge. il peut contaminer l’écosystème aquatique,
→ réduire les quantités de dioxyde de carbone et de méthane produites dans les décharges. Ces gaz sont émis lorsqu’une décharge contient beaucoup de matière organique. le méthane est un gaz à effet de serre très puissant,
→ créer moins de pathogènes et moins d’odeurs que le processus de décomposition anaérobique qui a lieu dans les décharges.
Le chapitre 3 présente l’état des lieux de la gestion des déchets solides dans les ménages.

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