Discussion – Chapitre 4 :
Nos résultats commentés et synthétisés, nous faisons maintenant un retour aux hypothèses et référents initiaux de notre étude qui supposent que, dans le cadre de leur socialisation sur le marché du travail ;

  • – Les candidats et annonceurs exploitent des outils et services du Web 2.0 pour la valeur ajoutée qu’ils lui attribuent en situation d’évaluation,
  • – Les candidats et annonceurs développent avec les ressources du Web 2.0, des stratégies de présentation de soi leur permettant d’assurer leur auto promotion,
  • – Les candidats et annonceurs, par le biais de l’utilisation de supports Web 2.0, modifient la nature de leur relation en la rééquilibrant.

Il est ici primordial de pouvoir distinguer les éléments de l’ordre du mythe et ceux de la réalité, en ce qui concerne les enjeux relatifs aux évolutions technologiques 2.0. Est-il absolument nécessaire d’utiliser les supports 2.0 lorsque l’on est recruteur / annonceur? Lorsque l’on est candidat ? Cela concerne-t-il tous les secteurs d’activité et tous les types de postes ? Comment est-on perçu par les autres utilisateurs lorsque l’on exploite pas ces nouveaux supports ?
L’importance de ce phénomène dépend encore beaucoup du secteur d’activité dans lequel on exerce, ainsi que le niveau de poste (souvent niveau « cadre »), la zone géographique (région parisienne) et la taille de la société…
De même, les « cyber- candidats » sont-ils différents de leurs prédécesseurs ou ont-ils simplement décidé d’ajouter « une corde à leur arc » dans leur recherche d’emploi ? Et enfin, où en sont les entreprises et les cabinets et quelles sont les perspectives d’avenir du e-recrutement?
Il n’est pas notre propos de revenir dans cette partie, sur les modalités techniques des supports Web 2.0, déjà largement exposées dans les premiers chapitres.
Il s’agit plutôt de revenir sur les objectifs et pratiques des différents acteurs interrogés, bien que divergents, pour expliciter la tentative de ré-appropriation collective du dispositif de recrutement en ligne, en lien avec le développement des technologies 2.0. Il est en effet très intéressant de constater la variété des représentations des uns et des autres, les jugements de valeur assez individualisés sur le sujet, même si des grandes lignes se dessinent.
▫ La valeur ajoutée du Web 2.0 pour les candidats comme les recruteurs : de nouvelles possibilités de présentation de soi Candidats comme annonceurs admettent en premier lieu, qu’ils ne peuvent ignorer les services rendus par les supports Web 2.0 dans leur activité. Tous en soulignent l’aspect incontournable dans une situation de recrutement , notamment en terme d’image à donner : candidats et recruteurs ont une possibilité inédite de personnalisation de leur présentation , et peuvent ainsi orienter leur discours en fonction de leurs objectifs respectifs.
La recherche d’informations et la notion de feedback nourrissent alors le dispositif de jugement mutuel que constitue la situation de recrutement et le sentiment d’une meilleure évaluation réciproque est dominant. Chacun des acteurs considère en effet, qu’il a davantage la possibilité de venir à la rencontre de l’autre .
Le recruteur est plus visible (présent sur les réseaux et diffusant de l’information), échange avec les candidats, tandis que le candidat est davantage acteur de sa recherche d’emploi : il se crée une vitrine personnelle (plus de liberté dans sa présentation), initie et développe son réseau et par là, peut « remonter » vers les recruteurs et professionnels cibles de son secteur d’activité. Avec les apports des technologies 2.0, le processus de recrutement est ainsi modifié d’un point de vue qualitatif (meilleur ciblage, meilleur appariement, et plus grande transparence entre les acteurs).
On peut dès lors percevoir une même logique d’adhésion chez candidats et recruteurs vis à vis des usages du Web 2.0 : ses nouvelles fonctionnalités, en permettant à chacun des acteurs d’accéder à davantage d’informations sur l’autre, renforceraient leur rapport de séduction mutuel : face aux entreprises qui s’ingénient à convaincre certains candidats de venir les rencontrer en décrivant les avantages liés à leur organisation et au poste proposé, les candidats mettent tout en œuvre pour obtenir un entretien, ou même un simple retour sur leur profil de la part d’un recruteur.
De même, pour l’ensemble des acteurs rencontrés, le pire qui puisse arriver serait qu’on ne trouve aucune trace d’eux sur le Net, ce qui serait considéré comme une non maîtrise des outils actuels de communication et synonyme d’obsolescence. L’attractivité de l’entreprise comme du candidat résulte en effet, de son image sociale, de sa notoriété et de ses performances.
▫ La mise en œuvre de stratégies auto-promotionnelles:
Les stratégies d’utilisation du Web 2.0 pour les candidats et les recruteurs sont bien distinctes: bien qu’ils soient amenés à parler un langage commun et à se partager un espace virtuel, ils n’en ont apparemment pas le même usage et exploitent des supports bien différents:
On a pu constater en effet, que du point de vue des candidats, il ressort plus d’avantages que de limites dans l’exploitation du Web 2.0. En effet, ces derniers peuvent aujourd’hui se permettre de choisir l’entreprise dans laquelle ils souhaitent travailler et de quelle façon ils veulent être recrutés. Ce sont en partie leurs attentes (repérées par les concepteurs de sites et de logiciels), de plus en plus comblées, qui font évoluer le e-recrutement.
En effet, si les candidats ont tendance à penser que le Web 2.0 permet une meilleure connaissance mutuelle et une meilleure qualification de leurs candidatures (personnalité et potentiel pris en considération et susceptibles de palier au manque d’expérience), les recruteurs semblent davantage préoccupés par l’élargissement de leur moyens de sourcing et la pérennité de leur activité (gain de temps, d’argent etc.).
On serait tenté de croire que les annonceurs ont été dans l’obligation de s’adapter aux pratiques induites par les technologies 2.0 (« no Web, no business »), alors que les candidats auraient pour leur part, souhaité l’avènement de ces nouvelles pratiques.
Pourtant, les candidats essaient de gagner en visibilité et de se faire une place sur le marché du travail, en se créant une identité numérique, et les recruteurs sont surtout préoccupés par le contrôle de leur image de marque et par le fait de gagner en crédibilité vis à vis des autres acteurs du marché (clients notamment). Ainsi, quand les premiers semblent chercher à « prouver leur employabilité » pour exister sur le marché du travail, les seconds cherchent à rester concurrentiels dans un environnement où leur savoir-faire est régulièrement remis en question.
On se demande alors si chacun des acteurs de la situation de recrutement n’est avant tout préoccupé et « gêné » par la concurrence qui sévit au sein même de sa propre « communauté » ?
Il est à ce sujet, intéressant de relever le fait qu’aucun des acteurs rencontrés n’a envisagé la disparition du e-recrutement lié aux technologies 2.0, malgré ses imperfections et le fait que rien ne prouve encore ses effets vis à vis d’une quelconque augmentation du nombre de recrutement voire même de productivité. On observe ainsi une certaine opposition, pour les candidats comme les annonceurs, entre la logique d’adhésion et la logique d’usage.
▫ Une relation inévitablement déséquilibrée :
Avec la prolifération des blogs et wikis67, la multiplication des réseaux sociaux et l’explosion du trafic sur les plate-formes d’échanges, les contenus générés par les utilisateurs ont pris une place importante dans la situation de recrutement.
Or, tous ces contenus laissent des traces sur les sites qui les hébergent et dans les index des moteurs de recherche, et sont systématiquement rattachés à un auteur : professionnelle d’un individu est composée de données formelles (coordonnées, certificats…) et informelles (commentaires, notes, billets, photos…).
Toutes ces bribes d’informations composent une identité numérique plus globale qui caractérise un individu (sa personnalité, son entourage et ses habitudes) et qui permet aux acteurs du marché de se juger mutuellement , sans s’épargner, sur les adaptations de l’autre aux nouvelles technologies et d’évaluer ainsi la crédibilité de son interlocuteur.
Nous avons vu que pour leur part, les candidats se sont peu à peu engagés dans la professionnalisation de leur recherche d’emploi. Ils sont de plus en plus nombreux à s’informer voire à se former sur les nouvelles technologies et sont de plus en plus exigeants face aux autres acteurs de la relation, avec qui ils semblent presque à égalité à présent, dans le rapport de force.
Pourtant, si l’exploitation des supports Web 2.0 exige la maîtrise de techniques et d’un « jargon » particuliers (que de nombreux chercheurs d’emploi et recruteurs semblent encore loin de maîtriser), elle nécessite surtout un apprentissage pour justement surmonter les effets qu’elle provoque, tels que la « sur-information », ou la mauvaise gestion de sa réputation en ligne, effets qui contrarient fortement les tentatives d’auto promotion des candidats.
Vinck, dans son article « Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération scientifique » explique bien qu’Internet, en tant qu’objet intermédiaire (dans la situation de recrutement), « véhicule plus que ce que les acteurs y inscrivent : ils induisent des actions qui n’étaient pas anticipées »68.
En résumé, on peut penser que les supports du Web 2.0, en permettant l’essor de la cooptation, de la recommandation, du référencement etc., favoriseraient en même temps la méfiance des recruteurs vis à vis des candidats.
En effet, même si nombre de recruteurs ont mis en place de nouvelles méthodologies (humaines et techniques) de traitement et de gestion des informations et des candidatures en provenance d’Internet, les personnes interrogées dans notre étude mettent en doute la véritable utilité de certains supports 2.0 en les considérant comme des « tentatives désespérées » d’auto promotion de la part des candidats dans leur recherche d’emploi.

67 Un wiki est un système de gestion de contenu de sites Web rendant ses pages Web librement modifiables par tous les visiteurs y étant autorisés. Les wikis sont utilisés pour faciliter l’écriture collaborative de documents avec un minimum de contraintes.
68 VINCK, D. (1999). « Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération scientifique : contribution à la prise en compte des objets dans les dynamiques sociales », Revue française de sociologie, n°2, p.385-414

De même, les candidats et recruteurs considèrent que le processus de recrutement en tant que tel est resté inchangé : il comporte les mêmes étapes, reste très encadré, formel. Il ne saurait encore être question de se séparer du CV traditionnel, sur support papier, ni de se passer de l’entretien physique, véritable pivot de la rencontre candidat / recruteur.
Le maintien de l’utilisation des supports et outils traditionnels d’évaluation des candidatures, ne serait-il pas, de la part des recruteurs, une ultime tentative pour garder le contrôle de la situation de recrutement ? Cette réalité de pratique démontre l’importance de l’appropriation des évolutions technologiques par les acteurs : chacun prend dans les apports du Web 2.0 ce qui l’intéresse et l’analyse à sa façon, ce qui signifie malgré tout que des besoins très différents trouvent une réponse sur le Net.
En conclusion, nous pouvons dire qu’une relation gagnant-gagnant entre candidats et recruteurs est de l’ordre du mythe, d’autant plus dans une situation de e-recrutement, situation dans laquelle la rencontre candidat / recruteur est en elle-même médiatisée. En effet, même si la rencontre la plus visible est bien celle des recruteurs avec les candidats, qui avant un entretien physique, échangent sur Internet et se « pre-sélectionnent » par ce biais, il est important de revenir sur le fait que les recruteurs sont souvent les prescripteurs des concepteurs de sites (agences de communication) et de logiciels de gestion RH et de jobboards (tels que Stepstone), à qui ils commandent des outils de communication ou de recrutement spécifiques.
De même, les candidats et ces annonceurs sont en relation par la réalisation d’études de marché, d’analyse de besoins des candidats, d’études…etc. Il en va aussi ainsi pour les recruteurs qui commentent les logiciels de gestion RH et autres sites emploi imaginés pour eux.
A la lumière de ces constats, il est évident que des décalages se créent et déséquilibrent la relation, soit disant plus égalitaire avec le développement des technologies 2.0, entre candidats / recruteurs.
La relation marchande vient d’emblée perturber la relation professionnelle entre candidat et recruteur médiatisée par les supports 2.0 (développés par des concepteurs de sites et logiciels). Ainsi, l’offre de services quelle quelle soit, se trouve toujours réappropriée par l’Utilisateur qui vise son propre intérêt : nous n’utilisons pas forcément un dispositif tel qu’il a été conçu, mais observons en permanence des écarts, des dysfonctionnements…
Le point de rencontre virtuel entre candidats et recruteurs est techniquement un logiciel ou une application d’Internet. Ce support de relation, immature, est encore susceptible d’évoluer tant sur un plan technique qu’au niveau des systèmes de représentations des acteurs (Web 3.0).
En effet, il faut bien comprendre qu’Internet et ses évolutions telles que le Web 2.0, sont à l’origine du dispositif de recrutement en ligne auquel chaque catégorie d’acteur doit en permanence s’adapter, s’ajuster au comportement des autres afin que la rencontre, thème central du dispositif, reste toujours possible.
On peut finalement se demander si sans objet technique intermédiaire69 (tel que l’Internet et ses évolutions), le marché de l’emploi ne serait pas plus égalitaire, car il n’implique alors qu’un seul processus d’intermédiation entre offre et demande, et donc entre recruteur et candidat?
Ainsi, on peut remettre en question le fait de chercher des solutions techniques à des problèmes non techniques. En effet, les résultats de notre étude nous amènent à repenser le fait que « les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (dont font partie l’Internet et ses nouvelles applications), peuvent renforcer cinq caractéristiques dont on aperçoit bien les effets indésirables »70, tels que :

  • – L’individualisation (à défaut d’auto promotion ?)
  • – L’inflation des techniques,
  • – L’intellectualisation et la fragmentation des activités (qui accentuent les inégalités entre individus « qui maîtrisent » et ceux « qui ne savent pas », dans une situation d’emblée déséquilibrée ?)
  • – La médiatisation et les écrans (qui estompent un peu plus les contours de la réalité d’un marché ?)
  • – La simulation.

« Ainsi, à l’utopie d’un progrès scientifique développant de façon linéaire un avenir soit disant meilleur pour tous, se substitue une réalité pluridimensionnelle : les stratégies antagonistes d’une multiplicité d’acteurs ».

69 La notion d’objet technique intermédiaire, définissant l’Internet est développée par AKRICH, M. (1987) dans Comment décrire les objets techniques ? Technique et culture, n°9, p.49-64.
70 SCARDIGLI, V. (1992). Cinq transformations culturelles. In Les sens de la technique. Paris : PUF, p.265.

Conclusion

Lors de mon stage de fin d’études dans un cabinet de recrutement, j’ai été amenée à explorer toutes les nouvelles potentialités de l’Internet pour élargir les sources de candidatures et renouveler les manières d’approcher les Internautes. Interpellée par les retours et la pertinence des candidatures consultées par l’intermédiaire de blogs emploi, d’e-portfolios, de CV vidéos ou interactifs, etc. j’ai souhaité mieux connaître les chercheurs d’emploi qui utilisent ces supports du Web 2.0 : quelles sont leurs stratégies et leurs attentes ?
Dans un second temps, j’ai voulu confronter leurs propos à ceux de consultants en cabinet de recrutement et en agence de communication RH, très sensibles à la notion de « marque personnelle ».
Il s’agissait d’une part, de mettre à jour les enjeux issus de l’appropriation du Web 2.0 par les candidats et les recruteurs et d’autre part, de les expliciter. En effet, outre le fait que les applications 2.0 soient très récentes et difficiles à appréhender (du fait de leur technicité), j’ai souhaité faire émerger les représentations de chacun des acteurs de la situation de e-recrutement, pour comprendre ce qui était réellement en jeu dans leurs pratiques.
Peut-on réellement considérer, comme certains professionnels l’affirment, que le Web 2.0 est le support d’une nouvelle révolution (comme l’Internet à ses débuts) dans le domaine du recrutement ? Ou bien doit-on considérer les applications 2.0 comme de simples supports de communication?
En un mot, je me suis demandé dans quelle mesure les supports du Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ? Et quelles stratégies les candidats et les recruteurs peuvent-ils adopter pour construire une relation gagnant-gagnant ?
A la lumière de notre enquête, il semble que nous devons considérer le Web 2.0 comme une possibilité inédite de présentation de soi, comme un nouveau support de communication aux multiples potentialités : candidats et recruteurs exploitent ces outils et services dans le but d’assurer leur auto promotion (par la mise en valeur de leur image personnelle).
Indépendamment du dispositif de jugement mutuel induit par la situation de recrutement, nous avons compris que chaque acteur du Web 2.0 donne son propre sens aux nouvelles technologies et les exploite selon des objectifs particuliers.
Enfin, avant d’entamer cette étude, j’avais présupposé que les supports du Web 2.0 permettaient aux candidats de rééquilibrer leur relation avec les recruteurs en leur offrant la possibilité de se démarquer, de se présenter de manière plus personnalisée et de partager leur « terrain de chasse ».
J’avais sous estimé l’impact du contexte (inversion du marché du travail), l’immaturité des acteurs vis à vis de l’appropriation des technologies et la méfiance des recruteurs, qui semblent chercher à garder le contrôle de la situation de recrutement en conservant la maîtrise du processus, à défaut de pouvoir conserver la totale maîtrise de la relation (en terme d’approche, de prise de contact, de langage…).
Ainsi, on pourrait penser que depuis le Web 2.0, chacun des acteurs croit qu’il domine l’autre dans la situation de recrutement : le candidat vis à vis de la relation avec le recruteur, et le recruteur vis à vis de la gestion du processus.
Au cours de cette recherche, certains biais sont apparus, ce qui nous amène maintenant à nuancer nos propos. Notre étude étant de type exploratoire, nous ne prétendons à aucune vérité mais avons seulement voulu comprendre puis expliciter une réalité de pratiques à travers les interprétations qu’en font les acteurs. Pourtant ;
– J’ai débuté ce travail en ayant une vision trop restreinte des Web services 2.0, ce qui m’a fait manquer d’objectivité. Ma posture enthousiaste vis à vis des technologies 2.0 et de leur appropriation par les candidats a perturbé mon travail « d’enquêteur », lors du recueil de données auprès des annonceurs.
Je me rends compte avec le recul, que je me suis lancée dans ce travail en considérant d’emblée que le Web 2.0 était un atout indispensable pour les candidats, et en sous estimant les bouleversements qu’il pouvait induire dans les pratiques des recruteurs. J’ai ainsi été mise en difficulté par le fait de ne pouvoir aborder les mêmes thèmes d’entretiens auprès des candidats et des recruteurs, ce qui a rendu plus difficile la comparaison de leurs représentations.
– Vis à vis de ma population d’enquête, j’ai été confrontée à deux limites majeures : D’une part, je n’ai rencontré que deux recruteurs et deux « annonceurs », ce qui nuance indéniablement la représentativité de nos résultats.
D’ailleurs, recruteurs et annonceurs ont des visions différentes de la situation de e-recrutement et ont une relation marchande les uns vis à vis des autres. D’autre part, je n’ai interviewé qu’un seul concepteur de site en tant que tel, ce qui limite la portée de ma recherche : ainsi que je l’ai évoqué dans la discussion, la situation de e-recrutement comporte finalement trois acteurs majeurs qui sont ; le recruteur, le candidat et le Webmaster (concepteur de site).
Il s’agit en effet d’une relation triangulaire, Internet étant l’objet technique de l’intermédiation entre candidat et recruteur. Enfin, je n’ai recueilli les propos que d’un seul consultant en agence de communication RH et de deux recruteurs ayant eux-mêmes des pratiques professionnelles différentes, l’un étant issu d’un cabinet généraliste et l’autre étant chasseur de tête spécialisé dans un secteur d’activité.
Ainsi, la représentativité de mes interlocuteurs est compromise, même si notre recherche présente l’intérêt indéniable de couvrir un large panel de points de vue et de survoler l’ensemble des problématiques induites par la situation.
Pour conclure, on peut d’ores et déjà s’interroger sur la capacité des acteurs à s’approprier le potentiel troisième « choc » du Web 3.0, alors même que l’assimilation de l’Internet 2.0 n’est pas encore acquise par l’ensemble des acteurs du recrutement et toutes les « catégories » de candidats.
Ce constat pose clairement la question de l’existence d’une « fracture numérique » qui annoncerait une fracture des pratiques du recrutement et de recherche d’emploi ? A ce sujet, il serait utile de commencer à réfléchir sur la manière de renforcer la collaboration entre professionnels de l’accompagnement et professionnels du recrutement, (acteurs du privé et du public) afin de construire du sens autour des technologies et réseaux numériques et de créer des ponts entre ces différents acteurs.
Une recherche plus large, confrontant les pratiques, postures et représentations des intermédiaires institutionnels du marché du travail à celles de nos populations d’enquête, pourrait à ce titre, se révéler fort enrichissante.
Dominique Wolton71 explique en effet dans l’un de ces articles sur la fracture numérique, que la formule « Internet pour tous » relève davantage d’un projet industriel que d’un projet politique. Il faut ainsi veiller à ce qu’un diktat technologique ne s’impose pas. Les personnes ne pouvant ou ne souhaitant tout simplement pas s’approprier les technologies numériques doivent pouvoir accéder aux mêmes services que les populations connectées.
A titre personnel, ce mémoire présente un double intérêt : il m’a offert la possibilité de me questionner sur ma pratique professionnelle et de me positionner vis à vis d’Internet et de ses nouvelles applications en tant que futur recruteur (je souhaite poursuivre mon expérience professionnelle dans ce domaine).
D’autre part, il me permet dès aujourd’hui, et dans le prolongement de l’enseignement reçu en Master 2, de réfléchir à ma future stratégie de recherche d’emploi et à la manière de candidater auprès d’entreprises cibles.
En effet, confrontée dans quelques mois à la réalité du marché du travail, je me sens plus sereine pour aborder cette grande étape et gérer ma « marque personnelle » sur Internet.

71 WOLTON, D. (2002). Fracture numérique ou fracture numérique ?, In Francis Jauréguiberry et Serge Proulx (sld), Internet, nouvel espace citoyen ?. Paris ; L’Harmattan. (p. 34)

Lire le mémoire complet ==> (Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?)
Master 2 – Mémoire de recherche – Spécialité : Psychologie Sociale
Université Catholique de l’Ouest – Institut de Psychologie et de Sociologie Appliquées

Table des matières :
  • Introduction
  • Chapitre 1 : Du recrutement au e-recrutement avec le Web 2.0
  • I – Le recrutement « traditionnel »
  • II- Internet et le modèle classique d’intermédiation du marché du travail
  • 1- Le e-recrutement par les intermédiaires marchands du marché du travail
  • A) Les pratiques des cabinets de recrutement
  • B) Les pratiques des agences de communication RH
  • 2- Le profil des employeurs-utilisateurs d’Internet
  • A) Les principales utilisations d’Internet dans le recrutement
  • B) Les différents sites Internet utilisés par les annonceurs pour recruter
  • 3- Le profil des candidats – utilisateurs d’Internet
  • A) Les utilisateurs d’Internet au quotidien
  • B) Les chercheurs d’emploi sur Internet
  • C) Le rôle des concepteurs de sites emploi dans la situation de e-recrutement
  • 4 – Schéma récapitulatif de la situation de e-recrutement
  • III- Impacts des technologies 2.0 sur la relation candidat / recruteur
  • 1- Les mutations technologiques du Web 2.0
  • A) Le développement des contenus générés par l’utilisateur
  • B) L’apparition des réseaux sociaux et des outils collaboratifs
  • C) L’avènement des blogs et des médias personnels
  • D) L’évolution de la relation Homme / Ordinateur
  • 2- Du recrutement 1.0 au recrutement 2.0 ?
  • Chapitre 2 : Méthodologie
  • I- Fondements de l’étude
  • A) Rappel de la problématique
  • B) Concepts clés et cadre de référence
  • II- Choix méthodologiques et recueil des données
  • A) Positionnement méthodologique : une approche qualitative
  • B) Choix de la population interrogée
  • C) Méthode de recueil des données : les entretiens semi-directifs
  • D) Méthodologie d’analyse des données
  • E) Les différents thèmes d’analyse

F) Présentation des entretiens
Chapitre 3 : Analyse des données et interprétation des résultats
I- Point de vue des candidats / chercheurs d’emploi
A) Thème 1 : Le Web 2.0 et le marché du travail
B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0
C) Thème 3: Représentations vis à vis du recrutement
II- Point de vue des recruteurs / annonceurs
A) Thème 1 : Web 2.0 et recrutement
B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0
C) Thème 3 : Représentations vis à vis des candidats et du Web 2.0
III- Synthèse de l’analyse des données
Chapitre 4 : Discussion
I – Raisons et modalités d’appropriation des supports Web 2.0 par les intermédiaires non institutionnels du marché de l’emploi
II Evolution des pratiques du recrutement pour les candidats, les recruteurs et les concepteurs de site
Conclusion

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