Les différences entre la composition pénale et la peine

Les différences entre la composition pénale et la peine

Sous-section II : Différences quant aux effets du prononcé des mesures de composition

Ce qui peut apparaître comme la plus importante des différences entre la composition pénale et la peine est que l’auteur des faits est libre d’exécuter ou non la mesure de composition pénale alors qu’il ne peut refuser d’exécuter la peine.

De plus, contrairement aux peines, les sanctions prises dans le cadre de la composition pénale ne constituent pas le premier terme de la récidive légale bien que faisant l’objet d’une inscription au casier judiciaire de l’individu.

1 – Des sanctions dépourvues de caractère exécutoire

Nous le savons, la composition pénale doit être proposée à l’auteur de l’infraction qui doit l’accepter pour qu’elle puisse produire de quelconques effets.

Nous savons également que l’auteur ne peut plus revenir sur son consentement quand bien même il n’approuverait pas les sanctions prises à son encontre par le procureur de la République.

Mais si la personne ne peut qu’accepter la décision du parquet, n’ayant pas le pouvoir de discuter les sanctions, il n’est pas pour autant contraint par celle-ci car les mesures de composition pénale n’ont pas de force exécutoire.

En d’autres termes, le mis en cause ne peut pas être forcé d’exécuter les sanctions prises par le procureur de la République dans le cadre d’une composition pénale.

Seulement, les poursuites seront obligatoirement déclenchées et la personne sera jugée et condamnée non plus à une sanction, mais à une peine qui elle devra obligatoirement être exécutée.

La personne a donc tout intérêt à exécuter les mesures de composition pénale.

Les différences entre la composition pénale et la peine

Même si dans les faits il apparaît que c’est le magistrat du siège qui impose ses choix au parquet, précisant, en amont de la mise en œuvre de la composition, quelles infractions peuvent donner lieu à la proposition de la mesure et quelles sanctions peuvent être envisagées, son rôle, une fois la procédure lancée, se limite à accepter ou rejeter la composition pénale.

Les sanctions n’émanant pas directement du juge, le législateur aurait eu quelques difficultés à donner à des mesures décidées par le parquet la valeur d’une peine.

Il se serait certainement heurté à la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui exige une séparation nette entre l’autorité de jugement et l’autorité de poursuite38. En ne donnant pas la force exécutoire aux mesures de composition pénale, le législateur avoue donc implicitement qu’elles ne peuvent être considérées comme des peines.

La composition pénale est souvent comparée à l’ordonnance pénale par des juristes qui considèrent que la première est un élargissement de la seconde.

L’ordonnance pénale, décrite aux articles 524 et suivants du Code de procédure pénale, est une procédure simplifiée réservée aux contraventions, et depuis la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002, aux délits prévus par le code de la route.

Lorsque le parquet choisit la procédure simplifiée, il communique le dossier de la poursuite et ses réquisitions au juge du tribunal de police qui statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant soit relaxe, soit condamnation à une amende, ainsi que, le cas échéant, à une ou plusieurs des peines complémentaires encourues.

Ceux qui voient dans la composition pénale une « ordonnance pénale élargie » considèrent que les procédures sont tellement proches que ce qui différencie les mesures tient seulement dans leur champ d’application car la composition pénale est également applicable à tous les délits encourant à titre de peine principale une peine d’amende ou une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans, et pas seulement les délits prévus par le code de la route.

Ils voient alors dans la composition pénale une ordonnance pénale élargie aux délits.

Cependant, puisque dans l’ordonnance pénale le parquet ne fait que des réquisitions et c’est le juge qui statue, la décision du juge a les effets d’un jugement passé en force de chose jugée et est donc exécutoire, ce que, comme nous le savons désormais, la composition n’a pas.

Qualifier la composition pénale d’ « ordonnance pénale élargie » apparaît ainsi réducteur et rapide car, contrairement à la composition pénale, l’ordonnance pénale aboutit au prononcé d’une véritable peine.

Le fait que les mesures de composition pénale, bien qu’imposées au mis en cause par le parquet, soient des sanctions dont l’exécution ne peut être obtenue de force, constitue la différence la plus importante d’avec une peine, outre le fait que la peine doive être prononcée par l’autorité de jugement.

Mais le choix du prononcé d’une mesure de composition pénale plutôt que d’une peine produit un autre effet non négligeable qui apporte une preuve supplémentaire de l’impossibilité de considérer la composition pénale comme une peine à part entière.

2 – Des sanctions ne constituant pas le premier terme d’une récidive

Depuis la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002, les compositions pénales exécutées sont inscrites au casier judiciaire de l’individu.

Le passé pénal de chaque personne est donc désormais également alimenté par les compositions pénales. Nous aurions pu croire que le législateur entendait permettre aux juges répressifs de punir le mis en cause selon les règles de la récidive s’il venait à commettre une nouvelle infraction, mais ce n’est pas le cas.

L’inscription au casier judiciaire signifie uniquement que les autorités judiciaires pourront savoir qu’une personne a fait l’objet d’une composition pénale, et peut-être prononcer une peine plus sévère que celle qu’elles auraient envisagée avant de se renseigner sur le passé pénal de l’individu, mais en aucun cas elles ne pourront y voir le premier terme d’une récidive légale, celui-ci s’appréciant à partir d’une condamnation pénale définitive, ce que n’est pas une mesure de composition pénale puisque pas prononcée par l’autorité de jugement.

Les articles 132-8 et suivants du code pénal ne sont effectivement pas applicables à l’auteur d’une nouvelle infraction dont la première avait été traitée par le biais de la composition pénale.

Les mesures de composition pénale, si elles sont inscrites au casier judiciaire, ne constituent ni le premier terme d’une récidive spéciale (lorsque la nouvelle infraction est de même nature que la précédente) ni celui d’une récidive générale (lorsque les deux infractions sont de nature différente).

Alors que le fait d’être à nouveau jugé pour la commission d’une nouvelle infraction, pour un individu qui a déjà été condamné à une peine par une juridiction française pour la commission d’une infraction, est une rechute à laquelle la loi prévoit une aggravation de la peine, qui est souvent doublée, le législateur n’attache aucune aggravation de la peine lorsque la première infraction a fait l’objet d’une composition pénale.

Nous avons vu que l’absence d’inscription au casier judiciaire, information bien mise en évidence lors de la phase initiale de la procédure, était un attrait majeur de la composition pénale aux yeux du mis en cause et contribuait fortement à leur faire accepter la mesure.

Les auteurs y voyant là le moyen d’être sanctionnés sans pour autant être stigmatisés. C’est pourquoi, aujourd’hui, l’information de l’inscription des mesures exécutées au casier judiciaire faite à l’auteur des faits est accompagnée, le plus souvent, d’une explication sur les conséquences de cette inscription.

Le procureur de la République ou ses délégués insistent sur le fait que l’inscription ne signifie pas que les autorités judiciaires pourront s’en servir pour appliquer les règles de la récidive afin de ne pas rebuter les personnes à accepter la composition pénale.

Ainsi, être traité par une composition pénale apparaît toujours plus attrayant que d’être poursuivi et de voir une peine prononcée à son encontre.

Alors que les caractéristiques qui éloignaient la composition pénale des mesures alternatives aux poursuites étaient justement celles qui rapprochaient la mesure des peines que peut prononcer le juge répressif, nous venons de constater que, pour autant, nous ne pouvons valablement assimiler les sanctions prises dans le cadre de la composition pénale aux peines.

Mais le caractère punitif de la composition pénale a conduit à proposer un nouvel ordonnancement pénal et une gradation du traitement pénal. N’étant ni tout à fait une mesure de la « troisième voie » ni tout à fait une peine, il nous faut admettre qu’elle constitue à elle seule un nouveau mode de traitement des infractions.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Le Caractère Hybride De La Composition Pénale
Université 🏫: Lille 2, Université droit et santé - Faculté des sciences juridiques politiques et sociales
Auteur·trice·s 🎓:
Emilie Deschot

Emilie Deschot
Année de soutenance 📅: Ecole doctorale des sciences juridiques, politique et sociale (n°74) - 2005/2006
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