La promotion des énergies renouvelables est analysée à travers le prisme du green marketing, en se concentrant sur l’énergie solaire photovoltaïque en Afrique subsaharienne. L’étude de cas de CANOPY CAMEROUN SARL met en lumière les défis liés à l’intégration du développement durable dans les stratégies marketing.
Délimitation du sujet
La délimitation du sujet consiste à délimiter de façon précise et explicite les frontières du sujet, c’est-à-dire décider de ce qui fait partie ou non du sujet, dans toutes les dimensions du sujet, en justifiant clairement les choix effectués1. Ces choix effectués influencent sur le traitement du sujet. A ce propos et relativement à notre spécialité « Marketing International », cette étude s’intéresse essentiellement à la promotion des énergies renouvelables (l’espace matériel [A]) en Afrique Subsaharienne avec un focus sur le Cameroun (le champ spatial [B]), sur une période annuelle allant de 2015 à 2017 (l’espace temporel [C]).
Espace matériel
L’espace matériel se consacre à la promotion des énergies renouvelables grâce à un instrument appelé « le green marketing ». Ce choix se justifie avant tout par le fait que, nous vivons à une époque où les hommes sont de plus en plus soucieux de l’impact de leurs activités sur l’environnement. Cette prise de conscience collective s’explique sans doute par les récentes manifestations de tempêtes, d’inondations, et de sécheresses, etc., qui ont frappé certaines régions du monde. Malheureusement, la quête de la performance économique amène encore certaines entreprises à minimiser les conséquences externes induites par leurs activités.
En outre, les combustibles fossiles (charbon, gaz, pétrole) ou d’uranium sont épuisables, alors que l’énergie fournie par le soleil, les chutes d’eau, la croissance des végétaux, les marées, et la chaleur de la terre, est naturelle et renouvelable.
Dimension spatiale
« L’Afrique Subsaharienne » parce que, bien que bénéficiant d’un potentiel énergétique remarquable, cette partie du continent souffre encore de « famine énergétique » ; laissant ainsi en 2017 un demi-milliard de personnes sans accès à l’électricité, selon un Rapport de la Banque mondiale de février 20172. Cette situation handicape l’essor économique et social de cette partie du continent, comme l’indiquent les chiffres ci-après : un Produit Intérieur Brute (PIB) par habitant très faible d’environ 1000 dollars PPA/an ; un Indice de Développement Humain (IDH) de 0,465 avec une moyenne mondiale de 0,729 ; et le nombre de mal nourris (206 millions de personnes) augmentant de 37 millions sur les dix dernières années3.
Triste est également de constater que certains pays africains sont en retrait pour leurs politiques environnementales favorisant l’accès à l’énergie, alors que dans le monde, presque tous les pays ont mis en place un cadre réglementaire et légal destiné à favoriser ce type d’énergie. Ainsi selon la Banque mondiale, « jusqu’à 40% d’entre eux sont dans la zone rouge, ce qui veut dire qu’ils ont à peine commencé à prendre des mesures pour accélérer l’accès à l’énergie »4. Toutefois en 2017, quelques pays africains (comme le Kenya, la Tanzanie, l’Ouganda, l’Afrique du Sud, le Maroc et la Tunisie) ont été en meilleure situation énergétique.
Espace temporel
Enfin, le choix de la période annuelle de 2015 à 2017 se justifie par l’actualité internationale sur la série des assises historiques, portant d’une part sur la protection de l’environnement et de la couche d’ozone (le Sommet des Nations Unies sur le Développement Durable, la COP21, COP22, COP23, le One Planet Summit, en sont quelques exemples) ; et d’autre part sur l’évolution des ratifications de ces Accords au niveau national par les pays signataires « encore nombreux à réaffirmer et à conserver leur détermination et leur engagement », comme l’a si bien rappelé le Président de la République Française en réponse au désengagement des Etats-Unis d’Amérique.
Définitions des concepts clés
Les concepts clés sont les mots ou expressions dont la compréhension est capitale pour un sujet. En ce qui concerne le thème de notre étude, les expressions clés sont : le green marketing (A), les énergies renouvelables (B), l’Afrique Subsaharienne (C), et l’Energie solaire photovoltaïque (D). Ainsi, pour bien appréhender ces différents concepts, l’on va se référer sur les lexiques de notre discipline le Marketing International, et sur nos diverses lectures sur le sujet.
Le green marketing
Pour bien comprendre le « green marketing », il nous semble important avant toute chose de définir la notion de marketing. A ce sujet, il existe plusieurs définitions. Commençons par dire que le mot « marketing » est bâtit à partir de l’anglicisme « to market » qui signifie mettre sur le marché, commercialiser.
Cela implique donc l’idée de consulter le consommateur avant de prendre toute décision, et d’entreprendre toute action commerciale. De plus, selon l’American Marketing Association (AMA), le marketing est un état d’esprit, une attitude qui consiste, « à planifier et à mettre en œuvre l’élaboration, la tarification, la promotion et la distribution d’une idée, d’un bien ou d’un service en vue d’un échange mutuellement satisfaisant pour les organisations comme pour les individus ».
Jacques LENDREVIE et Julien LEVY semblent partager cet avis, lorsqu’ils affirment : « le marketing est l’effort d’adaptation des organisations à des marchés concurrentiels pour influencer en leur faveur le comportement des publics dont elles dépendent par une offre dont la valeur perçue est durablement supérieure à celle des concurrents. Son rôle est de créer de la valeur économique pour l’entreprise en créant de la valeur perçue par les clients »5. Toute réflexion faite, le marketing est un moyen à la disposition des organisations au-delà des seules entreprises (services publics, associations, partis politiques, institutions religieuses, etc.), dont le rôle est de créer une valeur perçue supérieure à celle des concurrents par la mise en œuvre d’une stratégie d’influence et d’une action qui s’inscrit dans la durée, dans un effort constant d’adaptation. Ceci dit, nous pouvons à présent nous intéresser au concept de « green marketing », aussi appelé en anglais ecological marketing, ou sustainable marketing.
En français, les termes les plus appropriés à la notion de « green marketing » sont : marketing écologique, marketing durable, et marketing environnemental. En effet, le marketing vert a fait son apparition à la fin des années 80 début 1990. Et c’est en 1975 que s’est tenue la première Conférence sur le marketing écologique à l’AMA, ce qui a entraîné la parution de l’un des premiers livres sur le marketing vert intitulé « Marketing écologique »6. Il faut dire que cette notion est issue des concepts du développement durable qui se définit comme : « le développement qui répond aux besoins des citoyens actuels sans nuire à la possibilité des générations futures de satisfaire leurs propres besoins »7.
Selon l’encyclopédie Wikipédia, le marketing écologique est l’ensemble des actions qui visent à : « utiliser le positionnement écologique d’une marque ou d’un produit comme argument de vente, ou la communication sur des actions environnementales de l’entreprise pour valoriser son image de marque »8. Ainsi, le marketing vert peut par exemple se baser sur les caractéristiques écologiques d’un produit (matières premières écologiques, produit recyclable ou biodégradable, produit issu du commerce équitable, etc.), sur les promesses environnementales d’une firme9 (fondations, actions écologiques, etc.), ou sur des campagnes de « publicités vertes » (un arbre planté pour un achat, etc.). De la même manière, l’Oxford Dictionary of Business & Management définit le « marketing écologique » comme le marketing des produits qui profitent ou bénéficient à l’environnement. Autrement dit, c’est le développement et le marketing des produits conçus pour minimiser les effets négatifs sur l’environnement physique ou pour accroitre sa qualité.
Le marketing durable est également une opération perpétuelle de création, de communication, et de recherche de profits mutuels entre le client et l’entreprise, de sorte que tant le capital naturel que le capital humain soit préservé et amélioré constamment10. En effet, si les entreprises n’ont pas abandonné leurs objectifs en terme de profits économiques, elles y ont ajouté, de plus en plus, la recherche de profits sociaux (équité sociale, respect de l’être humain) et environnementaux (protéger et sauver la planète)11. Cette forme de marketing vise à développer et à favorise une économie durable soucieuse de son impact sur son environnement d’aujourd’hui, et des différents intérêts qui touchent aux générations futures.
Philip KOTLER et ses coauteurs épousent cette idée. Ils pensent que le marketing doit intégrer les problématiques de la société en s’adaptant à une nouvelle dynamique environnementale centrée sur l’humain (le marketing sociétal). Selon eux, le marketing doit créer de la valeur pour le client, pour l’entreprise et pour la société12. Cette nouvelle vision du « marketing centré sur l’humain », telle que présentée par le professeur KOTLER et ses collègues, nous rappelle le thème de la 72ème section de la Journée Internationale de Protection de la Couche d’Ozone aux Nations Unies13, qui encourageait les Etats dans leurs politiques, comportements et actions, à redonner la priorité à l’être humain. Ainsi, cette forme de marketing est à la recherche d’un bien collectif à long terme, et ses connotations dépendent de la cause qu’elle défend prioritairement à savoir : l’éthique, l’écologie, le développement durable, le commerce équitable, la responsabilité sociétale des entreprises communément appelée RSE, etc.
Jean-Jacques LAMBIN et Chantal de MOERLOSE14 l’aperçoivent plutôt comme un « marketing éthique » ou « non marchand » qui valorise un enjeu lié au bien commun. Pour eux en effet, le consommateur de plus en plus exigeant demande à l’entreprise non plus seulement de produire en protégeant l’environnement, mais aussi d’agir pour l’environnement. Ainsi, les entreprises doivent « veiller à l’intérêt de leurs clients et jouer leur rôle de bon citoyen en participant à l’amélioration de la société ».
Cette « nouvelle » forme de marketing des produits et services écologiques a le mérite :
- d’améliorer la réputation et le positionnement de l’entreprise ;
- de maximiser les profits durables tout en réalisant des économies de coûts ;
- de stimuler l’innovation pour rester en tête de la concurrence ;
- de donner accès à de nouveaux marchés ;
- de développer un avantage compétitif sur ses concurrents qui n’intègrent pas le développement durable dans leurs stratégies marketing ;
- d’améliorer ses chances de recruter des employés talentueux, et ses chances de survie à long terme.
S’il est vrai que le marketing vert présente de nombreux bienfaits, il n’en demeure pas moins vrai qu’elle doit aussi faire face à plusieurs challenges comme :
- convertir les sceptiques et les récalcitrants de l’environnement en clients (voir la section 2.1 du chapitre 1) ;
- le coût élevé des matériaux renouvelables et recyclables ;
- l’accès à la technologie qui requiert des investissements en Recherche et Développement (R&D).
De plus, il existe des normes et des lois spécifiques au marketing écologique. Tel est le cas par exemple des normes ISO 14020 (sur les étiquettes et déclarations environnementales), 14021 (sur les marquages environnementaux) et 14025 qui permettent de réduire le nombre des fausses déclarations qui tendraient à faire de la publicité mensongère. Cette normalisation est régie par plusieurs organismes comme l’European Norm (EN) au niveau européen, et l’International Standard Organisation (ISO) au niveau international. Le but principal de ces actions vertes, est avant tout d’augmenter les ventes de l’entreprise, en impliquant l’acheteur dans une démarche de développement durable15.
Manifestement, le marketing, outil par excellence pour mieux satisfaire le client et garantir la rentabilité de l’entreprise en devançant ses concurrents, est aussi devenu une arme pour défendre des causes toutes aussi importantes que l’homme et l’environnement : on parle dès alors de marketing vert. Son but est toujours de gagner de l’argent et de faire du bénéfice pour l’entreprise. Mais à cette noble cause, s’ajoute également la recherche de profits sociaux (équité sociale, respect de l’être humain) et environnementaux (protéger et sauver la planète).
________________________
1 Frédéric HÉRAN, « La Réalisation D’un Document Scientifique Mémoire de DEA, Thèse, Article… » (Université de Lille I, 2003). ↑
2 Dépêche AFP, « Développement Des Énergies Renouvelables: l’Afrique Subsaharienne En Retard, » 2017, accessed June 2, 2017, at 13:18:38, https://www.connaissancedesenergies.org/afp/developpement-des-energies-renouvelables-lafrique-subsaharienne-en-retard-170215?utm_source=newsletter&utm_medium=fil-info-energies&utm_campaign=newsletter/le-fil-info-energies-15-fevr-2017. ↑
3 Rapport annuel de la FAO (30/10/2006) cité dans Alain Faujas, « 854 millions d’affamés dans un monde plus riche » dans Le Monde du 30/10/2006, [lire en ligne (http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@23-220,36-828890@51-828893,0.html)] ↑
4 Dépêche AFP, « Développement Des Énergies Renouvelables: l’Afrique Subsaharienne En Retard. » ↑
5 Jacques LENDREVIE and Julien LEVY, « MERCATOR 2013 », 10ème édition, Théories et Nouvelles Pratiques Du Marketing (Paris: DUNOD, 2012), p.5. ↑
6 Karl E. Henion and Thomas C. Kinnear, « Ecological Marketing » (Chicago: American Marketing Association, 1976). ↑
7 World Commission on Environment and Development (1987) ↑
8 Wikipédia, « Marketing Écologique, » accessed November 15, 2017, at 09:15:40, https://fr.wikipedia.org/wiki/Marketing_écologique. ↑
9 Béatrice Reitano, « Les entreprises misent sur la stratégie verte pour voir la vie en rose, » EXEL L’esprit positif des managers modernes, no. 38 (Juin 2007): pp.8-10. ↑
10 Sarah Gabsi et al. « Le Marketing et L’écologie, » Slideshare, accessed December 21, 2017, at 12:07:19, https://www.slideshare.net/AwatefGr/marketing-cologique. ↑
11 Bernhard Adriaensens, « Le Marketing et La Vague Écologique » (Marketing vert: éthique ou intox ?, Liège, 2011), bernhard@baa-consulting.com, p.4 ↑
12 Philip KOTLER, Hermawan KARTAJAYA, and Iwan SETIAWAN, « Marketing 3.0: Produits, Clients, Facteur Humain », 1ère édition, Perspectives Marketing (Bruxelles: De Boeck, 2012), pp.6-7. ↑
13 Thème de la 72ème Assemblée Générale des Nations Unies : « Priorité à l’être humain, paix et vie descente pour tous sur une planète préservée » (09 novembre 2017) ↑
14 Jean-Jacques LAMBIN and Chantal de MOERLOOSE, « Marketing Stratégique et Opérationnel : Du Marketing À L’orientation Marché », DUNOD (Paris: Editeur de Savoirs, 2008), p.30. ↑
15 Wikipédia, « Marketing Écologique. » ↑