Le secteur des hautes technologies en Algérie souffre d’une faible contribution des Investissements Directs Étrangers (IDE), entravée par un climat des affaires défavorable et un cadre institutionnel insuffisant. L’article propose des solutions inspirées de modèles internationaux pour renforcer l’attractivité du pays.
Le secteur de hautes technologies et de l’information: fort levier de croissance
A l’instar des pays maghrébins, l’ouverture aux métiers de l’information en Algérie, s’est déroulée dans le cadre de la libéralisation du secteur des télécommunications et ce, à travers notamment la privatisation des operateurs historiques et la déréglementation globale de marché. Mais force est aujourd’hui de constater, contrairement à l’Algérie, plus prés , au Maroc et la Tunisie ainsi que beaucoup de pays émergents (comme l’Inde) ont su tirer profit, chacun à sa manière et selon ses possibilités humaines, de la vague intense de délocalisation dans différents métiers de l’information.
Le Maroc et la Tunisie ont investi dans la mise en place de technopoles spécialisés dans les TIC afin de soutenir les activités de recherche et d’innovation et de favoriser l’attractivité des IDE dans le secteur. En effet, en plus des cybers centres (navigation, création de site) pourvoyeurs d’emploi pour les populations, il est tout de même à constater la dynamisation dans les activités d’infogérance (centre d’appel, saisie de données service bancaires et assurances). C’est une opportunité qui rend possible la délocalisation des services des pays où salaires et charges sont moins élevés, mais et à forte créatrices d’emplois pour les jeunes diplômés, notamment.
L’Inde, pour ne citer que celle-ci, a construit des moteurs de croissance auteur de cette industrie, en développant la démarche de l’off-shoring1. Le Maroc et la Tunisie en optant sur ces secteurs, ont déjà mené des actions afin de capter des parts de marché(PDM) des NTIC, en ciblant notamment l’off-shoring des pays européens.
La Tunisie disposant d’une aptitude particulière sur ce plan compte tenu de l’ouverture traditionnelle de son système socio-économique, qui lui a déjà permet de bénéficier aisément des IDE et des NTIC. Ainsi la Tunisie tendrait à maitriser non pas dans un but essentiellement de communication interne, mais en vue aussi d’en faire un secteur devant alimenter ses échanges extérieurs.
D’où ses efforts en vue de l’exportation en direction des pays avoisinants, au Maghreb et en Afrique et du développement d’un partenariat méditerranéen. Ce qui correspondrait bien à la structure et à la logique de son économie avec des PME/PMI tournées vers l’exportation, dans le cadre notamment de la sous-traitance. En Tunisie2, depuis peu, la délocalisation s’accélère et des centaines de PME, notamment françaises, s’installent en off-shore pour l’exportation des services informatiques.
L’Algérie, quant à elle, pourrait jouer un rôle clé dans ce secteur où elle est largement sous-représentée, et son développement semble tout à fait possible au regard des capacités humaines dont elle dispose. Là aussi, de coûts salariaux plus faibles comparés aux salaires des ingénieurs occidentaux3. Il y a de bons informaticiens en Algérie, et ils ont prouvé leurs compétences chaque fois que l’occasion leurs en est offerte.
Dans ce sens, il serait regrettable que le développement rapide de téléphonie, notamment ces dernières années, n’ait donné aucune impulsion à des métiers proches comme ceux d’autres pays. Mais au delà de ces atouts et faiblesses, il serait intéressant de souligner que la mobilisation des IDE, le développement des partenariats et la constitution des pôles de compétitivité4, seraient des outils performants permettant une forte intégration en amont et proactive dans telle spécialisation industrielle, ça d’une part, le développement de la sous-traitance, comme le montre l’expérience asiatique, dans certains créneaux et branches visés n’aurait pu être inutile et pourrait avoir lieu, ça dans d’autres part. Mais force est de constater que cela ne serait pas sans risque, comme semble le montrer l’expérience tunisienne, et que ces pôles deviennent de véritables enclaves économiques et technologique, sans liens ni impacts réels sur l’économie et la société5.
L’électronique serait un autre secteur par ailleurs où l’Algérie dispose de fortes potentialités. Les activités de l’électronique constituent un secteur où les chaines de valeur sont intégrées au-delà des frontières nationales. Ainsi, la fabrication de l’IPhone donne une bonne illustration des nouveaux paradigmes de la production industrielle6:pas moins de neufs pays (USA, Japon, Taiwan, Allemagne, France, Corée du sud, Chine) participent à la fabrication et au montage de différentes composantes du produit Apple.
Chacun de ces pays étant spécialisés dans un segment particulier de production pour lequel dispose d’un avantage comparatif(AC). Il serait vain pour un pays de vouloir se spécialiser dans l’ensemble des segments d’un processus de production. C’est une industrie, à forte VA où l’Algérie pourrait développer une position forte en s’insérant dans la chaine de valeur internationale(CVI).
Partant des observations faites, nous remarquons qu’il existe de fortes ressemblances et similitudes entre les économies étudiées et l’Algérie, en termes de potentialités, de bases industrielles et d’un marché intérieur important. L’électronique renferme autant d’industries à facteurs clés de succès différents : l’électronique grand public (téléviseurs, ordinateurs etc.) et l’électronique de spécialité avec des produits hautement technologiques (électronique- automobile, médicale etc.). Sont des produits à forte intensité capitalistique et nécessitant une forte maitrise des coûts de production, entre autres, l’innovation et la maitrise des technologies, dont l’appel à l’expérience étrangère s’avère incontournable.
Pourtant, cela ne se pourrait devenir possible qu’à travers la construction de son attractivité,en rendant l’Algérie attractif pour de grands champions régionaux et internationaux. L’industrie informatique nationale a besoin d’une stratégie de développement qui affiche clairement ses objectifs à MLT et du soutien de l’Etat à travers un secteur public vecteur de développement scientifique et technologique qui pourra s’appuyer sur le potentiel de qualification aux compétences reconnues, formé dans les instituts et les universités nationales, qui elles-mêmes pourraient bénéficier des connaissances et savoir des différents partenaires étrangers. Il faudrait rappeler que l’Algérie était pionnière de l’informatique en Afrique et dans le monde arabe dans les années 1970-80, avec le premier institut supérieur de formation d’informaticiens ouvert sur le continent, le centre d’études et de recherche en informatique(CERI), aujourd’hui école nationale supérieure d’informatique(ESI), qui ont produit des centaines d’ingénieurs de valeurs dans telles branches d’avenir.
Quoique, 90% des diplômés de cet institut sont partis à l’étranger. Ainsi, pour la seule période 1992-1996, 3000 experts informaticiens ont quittés le pays7. L’Algérie, aujourd’hui n’est qu’un marché où les grandes marques mondiales écoulent leurs productions, et le potentiel national de qualifications se bornent dans la vente de matériels informatiques, au lieu de s’investir dans les activités de fabrication de logiciels, à moins dans celles d’assemblage et de montage.
La Métallurgie (sidérurgie, construction métallique), l’électromécanique, la pétrochimie, la pharmacie, les agro-industriels, la logistique et les industries créatives, la nanotechnologie et industries vertes sont autant d’autres activités industrielles émergentes et peu développées dans lesquelles l’Algérie présente des avantages comparatifs (et compétitifs) et un fort potentiel ce dont elle pourrait indéniablement faire la différence et être compétitive. Le développement de ces filières pourrait permettre à l’Algérie de passer du stade de simple fournisseur d’hydrocarbures bruts (et mines) à celui de producteur et d’exportateur de biens transformés et de services d’informations. Dés lors, ce sont les leviers sur lesquels les pouvoirs publics devraient travailler en vue de permettre l’émergence de nouvel modèle de développement, basé sur la connaissance et le savoir.
Mais il doit être bien compris que ne serait-ce possible sans le capital étranger (l’IDE). L’Algérie n’a localement aucun levier pour un développement et généralisation du phénomène de l’industrialisation alors qu’aujourd’hui, c’est la ré-industrialisation de l’Algérie qui doit être obligatoirement le moteur d’une croissance forte et durable qui permettra de créer de la richesse, notamment de l’emploi et la diversification de notre économie.
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1 L’off-shoring consiste à délocaliser de manière optimale des activités ou processus de l’entreprise, en s’appuyant sur les nouveaux moyens de télécommunication dans des zones géographiques qui disposent de différentiels importants en matière de disponibilité, de qualité et de cout de main d’œuvre , sont activités des zones franches). L’Inde a sans doute fait une avancée dans ce domaine, grâce à une politique volontariste et stable menée depuis nombreuses années : 75% de marché mondial de l’off-shoring et 7% de PIB sont produite par l’off-shoring qui a réalisé 30% des exportations de pays en employant plus de quatre million de personnes. Voir BENACHENHOU. A, 2008, op.cit, P151. ↑
2 BENACHENHOU.A., 2006, op.cit, p222. ↑
3 Bouzidi.A, 2010, op.cit, p 253. ↑
4 Faut-il penser au Cyber-parc de Sidi Abdallah, BOUINEN (sports et biotechnologies) et Boughezoul (TIC, formation et technologies avancées)) comme d’abord premiers pôles de compétitivité en Algérie, qui assument pleinement leur rôle d’accompagnateur de porteurs de projets et de pépinière de startups. Là où se dessine en partie et en silence l’avenir des TIC en Algérie. En plus par ailleurs, d’autres prédéfinis dans la pétrochimie, énergies nouvelles, métallurgie et mécanique. Sur ce point on pourra lire, MOUHOUB.S, « les vulnérabilités : cas de l’Algérie », ENAG, Alger, 2009, P194 et, SENAT 2025, http://fr.scribd.com. ↑
5 MEZOUAGHI.M, et PERRAT(2007), cité par DAHMANI. A et J.M. LEDJOU, « le développement des télécommunications dans les Suds », Tic &société(en ligne) Vol.5, no 2-3, 2011. Consulté le 24/03/2015. ↑
6 SGHIR.S cité dans le journal liberté du 07/10/2015. ↑
7 Le quotidien de Liberté de 16/09/2015. ↑