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Quels résultats clés sur l’importance du rapport d’audit en Tunisie ?

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🏫 Université de Sfax pour le Sud - École Supérieure de Commerce
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Maîtrise - 2001
🎓 Auteur·trice·s
Yosra MNIF
Yosra MNIF

Le rapport d’audit en Tunisie révèle une réalité surprenante : malgré son importance, les banquiers et analystes financiers lui accordent peu d’attention. Cette étude empirique met en lumière les implications critiques de cette négligence sur les décisions de crédit, transformant notre compréhension du rôle de l’audit.


Etude empirique

L’examen de la littérature indique qu’il y a intérêt à développer une étude sur le contenu informatif des rapports d’audit pour les banquiers et les analystes financiers dans le contexte tunisien vue que la quasi totalité des travaux étant anglo-saxons. L’ensemble des travaux portant sur l’importance des différents éléments d’informations publiés par les entreprises semble indiquer que les banquiers et les analystes financiers n’accordent qu’une faible attention à l’opinion formulée est rendue publique par les auditeurs.

Ceci nous a amenés à nous interroger sur le cas qui se pose en Tunisie et plus précisément sur l’intérêt accordé par les banquiers et les analystes financiers tunisiens au rapport d’audit exprimé par le commissaire aux comptes.

Notre étude a été réalisée auprès des banquiers de la ville de Sfax à qui un ensemble de questions ont été posées dans le but de construire une idée complète sur l’importance du rapport d’audit, surtout avec réserves, en tant que source d’information au cours du processus de prise de décision d’octroi de crédit.

Ainsi notre échantillon est constitué de 20 responsables de crédit au sein des institutions bancaires de la région de Sfax dont la liste sera indiquée en Annexe.

Avant de présenter les résultats à partir des réponses au questionnaire, et malgré l’obtention d’un taux de réponse de 100%, il faut mentionner que la réalisation de cette étude dans la ville de Sfax s’est effectuée avec difficultés pour plusieurs raisons :

  • Les responsables d’octroi de crédit occupent en général le sommet de la hiérarchie de la banque et par suite ne sont pas facilement accessible.
  • Certaines banques interdisent çà son personnel de répondre au questionnaire sans avoir l’accord préalable de la direction générale.
  • Certains banquiers ont été réticents à répondre dans le détail au questionnaire.

Mais dans l’ensemble, les 20 banquiers ont répondu aux séries de questions comprenant 3 questions générales concernant le processus de la prise de décision d’octroi de crédit et 10 questions de nature qualitative.

Les réponses au questionnaire seront présentées et interprétées dans ce qui suit

Les questions générales :
  1. Prenez-vous seul, ou dans le cadre d’un comité, la décision d’octroi de crédit?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Seul

0 (0%)

Comité

20 (100%)

  1. Votre responsabilité pour l’octroi d’un crédit est-elle limitée à un montant particulier?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Oui

16 (80%)

Non

4 (20%)

  1. Prenez-vous votre décision au vu du seul dossier du client ?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Oui

5 ( 25% )

Non

15 ( 75% )

Les résultats indiqués précédemment montrent que dans la majorité des cas, la responsabilité d’octroi de crédit est une action collective et les décisions sont prises par des responsables des différents niveaux au sein d’un comité de crédit. Ce comité est généralement composé par : un chef de zone, les chefs d’agences, les responsables de crédit de zone et les responsables juridiques de zone.

Toutefois, les commentaires de certains banquiers participant à l’étude montrent qu’en général, la décision d’octroi de crédit au delà d’un certain montant est subordonnée aux délégations détenues auprès de la direction de la banque.

Là les banquiers n’ont pas indiqué le plafond auquel leur responsabilité est limitée, et ils ont précisé que tout est en fonction de la nature du crédit sollicité.

D’un autre côté, la majorité des participants stipulent que la décision n’est pas prise au vu du seul dossier du client (75%), mais plutôt par référence à d’autres éléments telle que : la solvabilité du client, la moralité du dirigeant, le secteur d’activité de l’entreprise…

Les questions qualitatives :
  1. Notez sur une échelle de 1 à 5, l’utilité de chacune des sources d’information suivantes pour votre prise de décision d’octroi de crédit. «1»: très utile; «2» utile ; «3» : d’utilité moyenne ; «4» plutôt inutile et «5» inutile

Choix

1

2

3

4

5

Total

Analyse basée sur l’évolution des cours boursiers

0 (0%)

1 (5%)

0 (0%)

10 (50%)

9 (45%)

20

Les états financiers

18 (90%)

2 (10 %)

0 (0%)

0 (0%)

0 (0%)

20

Les comptes prévisionnels

8 (40%)

7 (35%)

3 (15%)

2 (10%)

0 (0%)

20

Le rapport du commissaire aux comptes

6 (30%)

11 (55%)

2 (10%)

0 (0%)

1 (5%)

20

Autres sources personnelles à préciser

10 (50%)

8 (40%)

2 (10%)

0 (0%)

0 (0%)

20

L’analyse effectuée auprès des 20 banquiers montre l’importance relative des rapports des commissaires aux comptes comme une source fiable parmi les informations disponibles.

Cependant, il semble qu’il existe d’autres sources d’information plus importantes que ce rapport.

En effet, 90% des participants considèrent que les états financiers sont plus utiles que le rapport du commissaire aux comptes. Aussi, 40% des banquiers choisissent de placer les comptes prévisionnels en premier lieu.

D’un autre côté, la moitié des participants placent d’autres sources d’information personnelles en première position, qui sont :

  • Les informations économiques et sectorielles.
  • Les relations du client avec la banque.
  • Les informations auprès de la Banque Centrale de Tunisie
  • Les critères du marché concurrence, compétitivité, clientèle…
  • La position financière de la société et sa solvabilité.
  • L’évolution des comptes.
  • Les états de garantie
  • La personnalité, la compétence, la réputation et l’expérience du bénéficiaire du crédit.

Les réponses à cette question montrent que les banquiers utilisent a priori d’autres sources d’informations telles que les états financiers, les comptes prévisionnels, et d’autres sources personnelles citées précédemment, dans leurs processus de décision.

Une des raisons de cette opinion est que la plupart des banquiers considèrent le rapport d’audit comme une partie intégrale des états financiers de la société.

  1. Parmi les informations dont vous disposez sur les sociétés, le rapport du commissaire aux comptes joue-t-il un rôle ?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Très important

5 (25%)

Important

11 (55%)

Peu important

4 (20%)

Pas important

0 (0%)

Les réponses à cette question montrent que les banquiers attachent une certaine importance au rapport des commissaires aux comptes comme une source d’information fiable. En effet, 55% des responsables de crédit considèrent que le rapport du commissaire aux comptes joue un rôle important parmi les informations disponibles sur les sociétés.

  1. La forme et la précision des rapports des commissaires aux comptes vous satisfont-elles?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Toujours

2 ( 10%)

Souvent

10 ( 50%)

Rarement

8 ( 40%)

Selon les résultats obtenus, 50% des participants sont souvent satisfaits de la rédaction des rapports des commissaires aux comptes. Mais en même temps, 40% des participants annoncent leurs mécontentement vis à vis de la forme actuelle du rapport. Les explications de cette prise de position seront avancées par les réponses à la question prochaine.

  1. A défaut de satisfaction, trouvez-vous que le rapport du commissaire aux comptes manque de:

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Précision

7 (35%)

Détails

13 (65%)

Ponctualité

3 (15%)

Informations prévisionnelles

17 (85%)

D’autres éléments à préciser

1 (5%)

En fait, une partie des critiques formulées dans le cadre du contenu informatif du rapport des commissaires aux comptes, peut être liée à l’absence d’une part, d’informations prévisionnelles (85%), et d’autre part, respectivement d’informations détaillées (65%) et d’informations précises (35%).

En effet, étant donné que la décision d’octroi de crédit est une décision qui se projette sur le futur de la société, les informations prévisionnelles intéressent plus les banquiers que les informations actuelles.

  1. Dans le processus de recommandation d’un prêt, contactez-vous les commissaires aux comptes concernés pour clarifier le contenu de leurs rapports d’audit?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Toujours

0 (0 %)

Souvent

1 (5%)

Quelquefois

4 (20%)

Rarement

7 (35%)

Pas du tout

8 (40%)

Dans le contexte de la relation entre les banquiers et les commissaires aux comptes, les résultats de cette question laissent croire que dans la majorité des cas il n’ y a pas une relation étroite entre ces derniers.

En effet, 75% des participants contactent rarement ou jamais les commissaires aux comptes pour clarifier le contenu du rapport d’audit.

  1. Modifiez-vous vos décisions d’octroi de prêt lorsque les rapports des commissaires aux comptes contiennent des réserves?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Toujours

3 (15%)

Souvent

7 (35 %)

Quelquefois

9 (45 %)

Rarement

1 (5 %)

Les résultats montrent que 50% des participants attachent une certaine importance aux réserves mentionnées dans les rapports des commissaires aux comptes (toujours, souvent) contre 50% qui n’accordent pas pratiquement une importance à ces opinions avec réserves (quelquefois, rarement).

  1. Dans le cas où l’opinion du commissaire aux comptes contient des réserves, est-il important selon vous de connaître les postes de comptes sur lesquels ces réserves sont exprimées?

CHOLX

NOMBRE DE REPONSES

Très important

11 (55 %)

Important

8 (40%)

Peu important

0 (0%)

Pas important

1 (5%)

Selon la grande majorité des banquiers (95%), il est indispensable de connaître les postes de comptes sur lesquels ces réserves sont exprimées. En effet, la consultation des postes sur lesquels les réserves ont été exprimées est primordiale afin de vérifier si ces réserves influencent ou non la décision d’octroi de crédit.

  1. Dans l’hypothèse de publication des réserves, selon vous quelle est la plus significative de ces cinq formes de réserves suivantes qui peuvent être exprimées par le commissaire aux comptes ? Classez- les par ordre décroissant d’importance.

CHOIX

1

2

3

4

5

TOTAL

Réserves concernant la non

conformité avec certaines règles et pratiques comptables

2

(10%)

8

(40%)

2

(10%)

5

(25%)

3

(15%)

20

Réserves concernant des incertitudes sur certains postes

comptables

3

(15%)

4

(20%)

5

(25%)

6

(30%)

2

(10%)

20

Réserves concernant l’évaluation

des actifs

1

(5%)

5

(25%)

9

(45%)

3

(15%)

2

(10%)

20

Réserves concernant un changement de méthode comptable

1

(5%)

2

(10%)

2

(10%)

5

(25%)

10

(50%)

20

Réserves concernant la continuité

d’exploitation

14

(70%)

0

(0%)

2

(10%)

1

(5%)

3

(15%)

20

L’enquête menée montre que les participants considèrent que les réserves concernant la continuité d’exploitation sont plus significatives (en termes de gravité) que les autres réserves (70%). Ces aboutissements sont attendus étant donné que ce type de réserve est bien très grave vu que la société n’est plus capable de poursuivre son activité.

  1. Accordez vous un crédit lorsque le rapport du commissaire aux comptes contient une réserve sur la continuité d’exploitation ?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Toujours

0 ( % )

Souvent

2 (10%)

Rarement

4 (20%)

Jamais

14 (70%)

Ces résultats montrent que la réserve de continuité d’exploitation semble affecter la décision d’octroi de crédit des banquiers. En effet, 90 % des banquiers interrogés accordent rarement ou n’accordent pas de crédits si cette réserve est émise par le commissaire aux comptes dans le rapport d’audit.

  1. Selon vous, l’impact de la divulgation d’une opinion avec réserves sur la décision d’octroi de crédit varie t- il selon le type de réserve?

CHOIX

NOMBRE DE REPONSES

Oui

19 (95 %)

Non

1 (5%)

Là, les réponses des responsables de crédit sont presque les mêmes étant donné que 95% des responsables de crédit annoncent que l’impact des opinions avec réserves sur la décision d’octroi des prêts varie selon le type de celles – ci.

En effet, certaines réserves peuvent toucher considérablement les intérêts de la banque, et d’autres peuvent être insignifiantes.

Conclusion

Le commissaire aux comptes assure de nos jours un rôle central dans des relations sociales complexes, multipersonnelles et multidimensionnelles : il doit à la fois répondre aux besoins de son client, respecter les normes et la réglementation en vigueur, protéger le public et bien sûr assurer sa propre rentabilité dans un marché compétitif.

De ce fait, l’offre d’informations comptables et financières est en particulier celle des informations concernant les états financiers des entreprises traduites par le biais du rapport de l’auditeur, et d’influencer par deux facteurs majeurs : l’existence des instances réglementaires et la contrainte externe imposée par les partenaires de l’entreprise.

Ainsi, l’auditeur financier légal a des obligations comptables et réglementaires envers les utilisateurs des rapports d’audit étant donné qu’il représente l’agent économique indépendant qui renforce la crédibilité de l’information financière qui leur est fournie et par conséquent, la personne qui défend leurs intérêts.

En effet, dans le cadre de la théorie d’agence, il a été démontré (notamment en ce qui concerne la relation actionnaires créanciers) en s’inspirant des travaux de Jensen et Meckling (1976) que l’entreprise est un ensemble de contrats formels et informels entre les divers agents économiques qui tous cherchent à maximiser leurs propres intérêts et que l’audit est souvent considéré comme un élément essentiel de l’équilibre contractuel de la firme puisqu’il permet non seulement la résolution des conflits d’agence mais aussi de faire coïncider les intérêts des différents intervenants et de limiter les manipulations comptables.

Cependant, si les travaux de Jensen et Meckling dans le cadre de la théorie d’agence nous permettent de mettre en évidence l’importance de l’audit comme mécanisme de contrôle et de démontrer son utilité contractuelle pour les différents intervenants, ils ne peuvent pas statuer sur le contenu informationnel du rapport d’audit et son utilité dans le processus décisionnel des utilisateurs des documents comptables.

Dans ce contexte, il a été démontré que l’utilité décisionnelle du rapport d’audit a fait l‘objet de types de recherches : les études de réaction et les études d’interprétation « expérimentales » dites également comptabilité comportementale.

Les études de réaction étudient dans le cadre de l’hypothèse du marché efficient, les relations entre le rapport d’audit et la valeur en marché des actions pour expliquer les changements dans la valeur des titres et pour prédire le comportement des investisseurs comme groupe. Ces études considèrent alors le marché financier comme une représentation de l’ensemble des décideurs c’est à dire comme le décideur moyen.

Néanmoins ce type d’études ne peut pas identifier la réaction des cours boursiers à la seule publication du rapport d’audit (la réaction du marché peut être expliquée par d’autres sources informatives) ni étudier le contenu informationnel du rapport d’audit vis à vis d’un utilisateur individuel (groupe homogène d’utilisateurs).

Pour pallier à ces insuffisances, les études d’interprétation ont été développées en empruntant des théories à la psychologie et aux sciences de comportement en vue de mesurer l’utilité du rapport d’audit en observant le comportement des utilisateurs non pas comme groupe mais plutôt en tant qu’individus.

Après cette revue de littérature, nous avons tenté de mener une étude empirique dans le contexte tunisien (précisément dans la ville de Sfax) sur l’utilité du rapport d’audit pour la décision d’octroi du crédit.

Il ressort de notre étude, et d’après l’analyse des réponses des banquiers dans l’ensemble, que l’opinion exprimée par le commissaire aux comptes a une faible importance pour la décision d’octroi de crédit. En effet, dans leurs processus de décision, les banquiers tiennent compte en priorité d’autres sources d’informations dont notamment : les états financiers, les comptes prévisionnels, les informations provenant de la banque centrale et les garanties offertes.

De ce fait, le rapport d’audit ne prend pas une place primordiale dans le processus de décision des banquiers. Une des raisons de cette place est qu’il est plus considéré comme une seconde opinion sur les états financiers qu’une partie intégrants de ces derniers.

Cependant, les résultats différent lorsque le rapport d’audit contient des réserves. En effet, il ressort de l’étude que les banquiers attachent une importance non négligeable à la nature de la réserve et aux postes comptables concernés.

S’agissant du cas particulier de la réserve sur la continuité d’exploitation, les résultats montrent que ce type de réserve a un impact déterminant sur le comportement et la décision des banquiers en matière d’octroi de crédit (refus d’accord de crédit).

Finalement, il faudrait signaler que les résultats obtenus sont à prendre avec prudence. Ils ne peuvent pas être généralisés pour les raisons suivantes : taille réduite de l’échantillon et spécificité de l’étude (région de Sfax).

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Questions Fréquemment Posées

Quelle est l’importance du rapport d’audit pour les banquiers en Tunisie?

L’étude montre que les banquiers en Tunisie accordent une attention limitée à l’opinion formulée par les auditeurs dans le rapport d’audit.

Comment les décisions d’octroi de crédit sont-elles prises par les banquiers à Sfax?

Les décisions d’octroi de crédit sont généralement prises en comité, impliquant plusieurs responsables au sein de la banque.

Quels facteurs influencent la décision d’octroi de crédit selon les banquiers tunisiens?

Les banquiers stipulent que la décision n’est pas prise uniquement sur la base du dossier du client, mais également en tenant compte de la solvabilité du client, de la moralité du dirigeant et du secteur d’activité de l’entreprise.

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