Les perspectives futures mariage forcé révèlent une réalité troublante : malgré des lois existantes, la répression de cette pratique reste insuffisante en droit congolais. Cette étude met en lumière la nécessité urgente d’une action judiciaire renforcée pour protéger les droits des femmes et combattre les coutumes néfastes.
Point 3. Les conditions liées à l’aspect contractuel du mariage
1° Le consentement personnel des époux
Le mariage est un contrat qui requiert pour sa validité le consentement personnel des futurs époux. En effet, la volonté de se prendre pour mari et femme est l’élément majeur de la formation du mariage et ne doit pas être prise avec beaucoup de négligences ou de légèretés. Cette volonté n’est requise en principe que par les deux futurs partenaires et c’est sans intervention d’aucune autre personne étrangère. A cet effet, l’article 351 du code de la famille dispose que chacun des époux doit personnellement consentir au mariage. C’est pourquoi, le législateur ne se contente donc pas seulement de ce que le consentement existe mais exige que ce consentement soit manifesté par les futurs époux eux-mêmes.
Ainsi résulte le principe selon lequel il n’y a pas mariage sans consentement des parties : celui-ci fait allusion à l’accord de volonté exprimé par les deux futurs partenaires avant la conclusion du mariage. Toutefois, il sied de signaler que le législateur n’établit aucune formule sacramentale pour la manifestation de la volonté de chaque futur époux à consentir au mariage.57 Ainsi, le sourd-muet peut contracter un mariage, à condition qu’il soit en mesure de manifester sa volonté par écrit ou par signe.58
54Voir LEVI STRAUSS, Les structures élémentaires de la parenté, Plan, 1982, p.76, cité par MALAURIE P., et FULCHIRON H., op. cit., pp.119-120, cité par KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit., pp.213-214.
55Lire la loi n° 16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1er aout 1987 portant code de la famille, Article 353.
56 Idem, Article 353, alinéas 2 et 3.
57 KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit., p.215.
58 Ibid.
Par ailleurs, un consentement n’est valable que s’il est donné en connaissance de cause même en cas de mariage car celui-ci étant un contrat au même pied d’égalité que tous les autres contrats qui exigent pour leur validité le consentement personnel de toutes les parties contractantes. C’est la raison pour laquelle le Droit commun institue à cet égard la théorie des vices de consentement pour l’ensemble de tous les actes juridiques.
Par conséquent, pour ce qui cadre avec le mariage, bien que le législateur du code de la famille n’ait pas de manière expresse parlé ou inséré dans l’arsenal juridique congolais la notion ayant trait aux vices de consentement, nous sommes d’avis que conformément au Droit commun des contrats, le mariage peut être attaqué en nullité parce que l’un des époux ou tous les deux n’ont pas émis un consentement exempt des vices.59
En effet, les vices de consentement repris par le droit commun sont notamment : l’erreur, la violence, le dol et la lésion. Mais, le dol comme vice de consentement n’est pas acceptable ou valable en matière de mariage car étant inopérant. En mariage, les tromperies avancées par l’un des futurs époux sont acceptables parce qu’à cet effet, déclarait LOYSOL dans un adage :
« en mariage, trompe qui peut ».60
De plus, comme le dit la maxime latine « Voluntascoacta, voluntas est », comme pour dire même contrainte, une volonté n’en est pas moins une volonté. La contrainte au mariage est sanctionnée par le code de la famille comme une incrimination, par les prescrits de son article 336 qui dispose : « est puni d’une servitude pénale principale d’un à trois mois et d’une amende de 150.000 à 600.000 francs congolais ou de l’une de ces peines seulement, tout individu, autre que le père, mère,
ou tuteur, qui aura contraint une personne à se marier contre son gré ou qui, de mauvaise foi, aura empêché la conclusion d’un mariage remplissant toutes les conditions légales. Toutefois, en cas de contrainte exercée par les parents, le tuteur ou toute personne qui exerce en droit l’autorité sur l’individu, ce dernier peut saisir le conseil de famille, lequel statue.
En cas de désaccord, le tribunal de paix en sera saisi ». Cependant, à en croire cette disposition, la contrainte que le législateur incrimine, ici, est celle exercée par tout individu autre que le père, mère, tuteur ou toute personne qui exerce en droit l’autorité sur l’individu. Par conséquent, la contrainte exercée par ces gens, à l’égard de la victime d’un mariage forcé, ne sera guère sanctionnée comme repris ci-haut, elle sera seulement parée par le conseil de famille et, le cas échéant, en cas
de désaccord, à coup-sûr, par le tribunal de paix du ressort. Ce qui semble à notre avis ne pas être acceptable car selon nous, même les parents peuvent contraindre leurs enfants à se marier, qui plus est devraient également être sanctionnés comme toute autre individu qui contraindrait une personne à s’engager dans les liens du mariage sans son consentement.
2° Le paiement de la dot
Traditionnellement, la dot était constituée des biens inaliénables durant le mariage, vu qu’elle était la preuve de ce dernier. C’est par l’introduction de la monnaie que cette
59 KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit., p.216.
60Institutes coutumières, Livre III, titre II, n°3, cité par KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit.
conception dot va être peu à peu entamée.61 Dans cette ancienne conception, la dot constituait en quelque sorte, le procédé par lequel se caractérisait le mariage légal et le différenciait ainsi de l’union libre ou du concubinage. La dot confirme la pérennité du mariage, elle assure l’affection de la femme car, elle est un indice d’attachement à sa famille.62
En effet, la dot en Droit romain ou occidental est constituée par des biens apportés au mari par la femme (sui juris) ou par d’autres (son père si la femme est alienijuris ou des étrangers), en vue de subvenir aux charges du ménage et notamment à l’entretien et à l’éducation des enfants.63 A l’encontre du droit congolais, il se dégage de l’article 361 du code de la famille que la dot congolaise se réalise au sens inverse.
Elle constitue un ensemble des biens et d’argent que le futur époux et sa famille remettent aux parents de la future épouse qui en acceptent. Les biens sont apportés par le futur mari ou les siens non pas au profit, de sa future femme ou de ses enfants à venir mais plutôt en faveur de la famille de sa femme.
Il s’ensuit que l’objectif essentiel du paiement de la dot est la consolidation des liens entre familles.64
Dans la même lancée, le mariage ne peut être célébré que si la dot a été effectivement versée au moins en partie. Le futur époux et sa famille doivent convenir avec les parents de l’épouse d’une remise des biens ou d’argent qui constitue la dot au bénéfice des parents de la fiancée.65 C’est pourquoi, conformément à la conception congolaise, la dot doit être versée et reçue selon les us et coutumes des futurs époux.66
Par ailleurs, la loi précise que la dot est unanimement la condition du mariage et de son existence, sans laquelle condition, le mariage ne peut voir le jour. D’autre part, l’alinéa dernier de l’article 361 du code de la famille dispose : « nonobstant toute coutume contraire, la dot peut-être symbolique ».
De même, la consistance et le montant de la dot sont déterminés par les us et coutumes des conjoints mais doivent être conformes à l’ordre public et à la loi. De ceci, d’aucuns pensent que le Parlement ou le Président de la République doivent respectivement prendre une loi ou une ordonnance fixant le seuil minimum et le seuil maximum du montant de la dot auxquels les deux familles sont impérativement tenues à se conformer dans la conclusion de leur contrat de mariage et dont la
violation de ceci serait érigée en infraction comme dans d’autres cieux. Malheureusement, depuis l’adoption du code de la famille le 1ier aout 1987 jusqu’à ce jour, aucun Président de République ou aucun Parlement n’a déjà pris une quelconque ordonnance ou une quelconque loi fixant le montant minimum et le montant maximum de la dot pour se conformer aux prescrits du code de la famille.
61 KAMPETENGA LUSENGU, Cours de droit coutumier congolais, Deuxième année de Graduat, Université de Lubumbashi, Faculté de Droit, 2006, p.42, cité par KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit.,p.220.
62 MUSANGAMWENYA WALYANGA KUBABEZAGA G., Notes de cours de droit coutumier congolais, Deuxième année de Graduat, Université de Kalemie, Faculté de Droit, 2016-2017, p.87, inédit.
63 GIFFARD A.-E., Précis de droit romain, Tome 1, 2ième éd., Dalloz, Paris, cité par KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit.
64 KIFWABALA TEKILAZAYA J.-P., op. cit.,p.221.
65 Loi n° 16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1ier aout 1987 portant code de la famille, Article 361.
66 Idem, Article 363.
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les conditions de validité du consentement dans le mariage en droit congolais?
Le mariage est un contrat qui requiert pour sa validité le consentement personnel des futurs époux, qui doit être manifesté par eux-mêmes.
Quels sont les vices de consentement reconnus en droit commun pour le mariage?
Les vices de consentement sont notamment : l’erreur, la violence, le dol et la lésion, bien que le dol ne soit pas acceptable en matière de mariage.
Quelle est la sanction pour contrainte au mariage selon le code de la famille congolais?
La contrainte au mariage est sanctionnée par une servitude pénale de un à trois mois et une amende de 150.000 à 600.000 francs congolais.