L’impact des technologies sur la comptabilité révèle une transformation radicale des missions des experts-comptables, remettant en question des pratiques établies. Comment ces innovations redéfinissent-elles le paysage professionnel et ouvrent-elles la voie à de nouvelles opportunités ?
PARTIE PREMIERE : IMPACT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES SUR LES METIERS DE L’EXPERT- COMPTABLE
La première partie de ce travail est consacrée à l’étude de l’impact des technologies de l’information et de la communication sur les métiers de l’expert-comptable. Ces derniers seront à cet effet subdivisés en trois familles :
- les missions d’expertise : tenue et assistance comptables et généralement toutes les prestations visant la mesure et le reporting des événements concernant l’entreprise
- les missions d’opinion : celles qui requièrent un avis professionnel et dans lesquelles l’expert-comptable joue un rôle de garant entre émetteurs et utilisateurs de l’information
- les missions de conseil : l’ensemble des prestations portant assistance du client dans l’un des divers domaines de la gestion
Cette étude sera abordée sous les deux angles suivants :
- La manière dont les missions traditionnelles sont remodelées par les tendances technologiques. Cette étude fera l’objet d’un premier chapitre.
- Les nouvelles missions développées pour répondre aux besoins d’un environnement économique de plus en plus dominé par des technologies performantes. Ces missions seront présentées dans un deuxième chapitre.
CHAPITRE PREMIER : REMODELAGE DE L’OFFRE CLASSIQUE
Le premier effet des technologies de l’information et de la communication est la modification de la manière dont les missions traditionnelles sont offertes et conduites. Les missions traditionnelles recouvrent celles qui font appel aux compétences les plus élémentaires des experts-comptables : tenue et assistance comptables, audit des états financiers et conseil en fiscalité et en management. Dans ce chapitre, nous essayerons de présenter les nouvelles technologies appliquées à ces missions.
Nous aborderons dans un premier temps le reengineering des missions d’expertise (Section 1), ensuite l’amélioration de l’efficience et de l’efficacité des prestations d’audit (Section 2) et enfin la migration des activités de conseil vers le Web (Section 3).
Section 1 :
Reengineering des missions d’expertise
La poursuite des nouvelles sources d’avantage concurrentiel que sont la rapidité, la réactivité et la personnalisation nécessite le passage d’une structure pyramidale rigide à une organisation souple en réseaux (multiples liaisons transversales et informelles) et donc la reconfiguration des connexions entre les activités pour court-circuiter les étapes superflues. C’est la désintermédiation qui peut être définie comme « un processus de suppression des tâches sans valeur ajoutée (par exemple les tâches à coût non justifié pour le client interne ou externe) dans les processus de l’entreprise »1.
L’imputation et la saisie comptables sont l’exemple type de ces tâches répétitives inutiles pour les process d’affaires. Alors que faut-il en faire ? Trois tendances se dégagent :
- Confier ces tâches à l’informatique. A partir des événements de gestion, les ERP génèrent automatiquement les ventilations comptables en fonction des règles prédéfinies par les utilisateurs.
- Externaliser ces tâches. Les nouveaux modes et techniques de communication permettent d’externaliser à moindre risque et à moindre coût l’imputation et/ ou la saisie comptables.
- On peut garder ces tâches au sein de l’entreprise en réduisant au strict minimum le coût et la perte de temps y relatifs. Cette solution intermédiaire ne permet pas d’écarter l’imputation et la saisie comptables aussi franchement que les deux premières. L’étude sera donc limitée au concept le plus innovant et le plus prometteur : l’ASP.
Dans les paragraphes suivants, nous explorerons ces tendances en mettant l’accent sur leur impact sur les missions de tenue et d’assistance comptables. Nous aborderons respectivement la montée en puissance des ERP (§1), les possibilités offertes par l’extranet (§2) et les promesses du modèle ASP (§3).
§1. La montée en puissance des ERP
L’abréviation ERP désigne Enterprise Resource Planning. L’équivalent en français de cette expression est « progiciel de gestion intégré ». Selon le « Petit glossaire de l’échange électronique de données » de Claude CHIARAMONTI1 : « les ERP constituent une famille de programmes qui intègrent, en un ensemble cohérent, différentes fonctions de gestion informatisée d’une entreprise : gestion des ressources humaines, gestion financière, commerciale, gestion des achats, des ventes, gestion comptable, etc.
» Comme leur nom l’indique, les ERP visent la mise en œuvre d’une intégration transversale de l’information au sein de l’entreprise. En effet, « ils sont construits autour d’une base de données (ou plusieurs bases de données étroitement liées) de telle façon que toutes les données concernant l’entreprise soient accessibles et exploitables par les différents modules composant le progiciel »2.
Souvent, la mise en place d’un ERP est perçue comme le prolongement naturel d’une approche BPR.
Au nombre des modules composant un ERP figure bien évidemment un module comptable qui extrait de la base les données qui le concernent et les interprète pour générer les imputations comptables. Profitant des évolutions successives et rapides connues par les logiciels comptables (saisie semi-automatique, maquettes de saisie pré paramétrées, etc.), les ERP permettent aujourd’hui de générer automatiquement près de 100% des écritures comptables des entreprises qui les choisissent.
L’avènement des ERP repousse le rôle de l’expert-comptable vers les extrémités de la chaîne de traitement de l’information :
En amont : Profitant de ses larges connaissances en comptabilité et en gestion, l’expert-comptable « apprend » à l’ERP les règles de contrôle interne et d’imputation comptable applicables à un événement donné. C’est ce qu’on appelle le paramétrage : un préalable qui conditionne dans une grande mesure la fiabilité du système et surtout l’intégrité des traitements. Les interventions de paramétrage sont sollicitées tant par les sociétés de service informatique qui développent les progiciels que par leurs clients qui ont besoin d’adaptations pour tenir compte de leurs spécificités. Etant donné leur caractère non récurrent et les compétences non exclusivement comptables qu’elles mettent en œuvre, nous classerons ces interventions parmi les missions de conseil (Technology Consulting3).
En aval : La fiabilité et la rapidité du traitement quotidien des données répétitives n’empêche pas les entreprises de faire appel à l’expérience et au jugement professionnel de l’expert-comptable lors du processus d’arrêté des états financiers. Les missions d’assistance et de supervision comptables ne sont pas autant affectées par le contexte actuel que celles de simple tenue.
La mise en place d’un ERP par le client implique des changements importants au niveau de la mission d’assistance comptable. D’abord, l’interconnexion de la base de données comptable avec les bases de gestion facilite énormément la justification et la régularisation des comptes clients, fournisseurs et personnel. Ensuite, la tendance à la dématérialisation des documents et à l’intégration des systèmes d’information bancaires et administratifs à ceux de l’entreprise facilite la justification et la régularisation des comptes banque et placements d’un coté et des comptes Etat et organismes publics d’un autre coté.
En revanche, la mission d’assistance comptable dans un environnement ERP ne saurait se limiter aux seuls aspects comptables et devrait s’étendre aux aspects liés :
- en particulier à la fiabilité du système d’information et notamment l’efficacité des contrôles informatisés.
1 Editorialiste de VendrEDI, newsletter gratuite dont l’abonnement peut être souscrit à l’adresse www.xbrl.fr
2 D’après Trites, G. Enterprise Resource Planning ; Engine for e Business. Canadian Institute of Chartered Accountants. 2000.
3 Chapitre 2, Section 3, Sous-section 1 ci-après.
- en général au système de contrôle interne y compris les contrôles non informatisés et l’environnement de contrôle étant donné l’impact immédiat des faiblesses de contrôle interne sur la comptabilité.
Grâce à un accès facilité au système d’information (bases de données intégrées incluant les données de gestion, utilisation éventuelle de solutions de communication), l’expert-comptable devrait être en mesure d’effectuer des interventions plus fréquentes et plus ciblées.
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1 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001. ↑
2 Auchan Les 4 Temps, La Défense. ↑
3 Chapitre 2, Section 3, Sous-section 1 ci-après. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les missions d’expertise des experts-comptables?
Les missions d’expertise incluent la tenue et l’assistance comptables, ainsi que toutes les prestations visant la mesure et le reporting des événements concernant l’entreprise.
Comment les nouvelles technologies modifient-elles les missions traditionnelles des experts-comptables?
Les nouvelles technologies modifient la manière dont les missions traditionnelles sont offertes et conduites, en améliorant l’efficience et l’efficacité des prestations d’audit et en permettant la migration des activités de conseil vers le Web.
Quelles tendances se dégagent concernant la saisie comptable avec les nouvelles technologies?
Trois tendances se dégagent : confier ces tâches à l’informatique via des ERP, externaliser ces tâches, ou les garder au sein de l’entreprise en réduisant au strict minimum le coût et la perte de temps.