L’analyse de cas en audit fiscal révèle que 70 % des PME sous-estiment les risques fiscaux, compromettant ainsi leur réputation. Cette recherche propose une démarche innovante pour les experts-comptables, transformant leur approche et offrant des solutions pratiques pour une gestion efficace des risques.
§ 2. Risques d’origine externe et risques d’origine interne
La distinction entre l’origine externe et interne des risques n’exclut pas leur interaction. Généralement, les risques d’origine externe sont aggravés par les faiblesses internes35.
Risques d’origine externes
Les risques d’origine externes peuvent être regroupés en quatre catégories :
- La complexité des textes fiscaux ;
- La discordance entre comptabilité et fiscalité ;
- Le changement de la doctrine ou de pratique administrative ;
- La maladresse de certains contrôleurs des impôts ;
- L’organisation de certains secteurs.
La complexité des textes fiscaux
La complexité du système rend son application plus difficile aussi bien pour l’administration elle-même que pour le contribuable. « A partir de cette idée, un système fiscal complexe est un système mal maîtrisé et qui offre des voies d’échappement au contribuable. La complexité est la conséquence du jeu « du chat et de la souris » qui règle les rapports entre le fisc et le contribuable »36
La complexité des textes fiscaux peut être se mesurer à travers les deux critères suivants :
- le productivisme juridique ;
- les incertitudes des textes et insécurité juridique du contribuable.
Le productivisme juridique
Le productivisme juridique, se traduit par la multitude de textes qui régissent la matière fiscale. Le droit fiscal se présente ainsi comme un droit volumineux, complexe et obscur. De ce fait, le contribuable se trouve dans une situation fragilisée, ne pouvant plus connaître avec certitude son régime fiscal.
Il plongera alors directement dans une ignorance croissante, en conséquence, dans une insécurité totale.
Le volume important des règles fiscales applicables à la vie de l’entreprise lui fait subir une multitude de risques liés au non respect des règles de forme fiscales. L’audit fiscal permet de s’assurer de la conformité par l’entreprise aux réglementations fiscales.
Il use une mission de détection et de prévention ; il œuvre dans le sens d’une plus grande sécurité fiscale de l’entreprise. Ainsi, il contribue à l’amélioration du niveau de maturité de la gestion fiscale.
2.1.1.2. Les incertitudes des textes et insécurité juridique des contribuables
L’insécurité juridique trouve sa source dans plusieurs phénomènes dont notamment l’instabilité et l’obscurité des textes fiscaux.
Sans prétendre dresser l’inventaire des dispositions imprécises, nous nous limiterons à illustrer les risques fiscaux associés aux incertitudes dans l’interprétation des règles de droit fiscal à travers l’exemple suivant : l’exclusion des entreprises déficitaires de la déduction des plus-values non imposables.
En effet, s’il est vrai que le code de l’IRPP et de l’IS retient souvent des formulations du type : « Est déductible du bénéfice imposable » ou « Pour la détermination du bénéfice imposable, sont admis en déduction » ou « Sont déductibles pour la détermination du bénéfice imposable », il a toujours été considéré par ces types d’expression « est déductible pour la détermination du résultat fiscal ».
D’ailleurs, une formule similaire est utilisée pour l’exclusion des charges non déductibles du résultat imposable : « ne sont pas admis pour la détermination du bénéfice » 37.
Du fait de cette disposition imprécise, une nouvelle tendance de la doctrine administrative totalement contradictoire avec l’esprit du législateur, conditionne la déduction des plus-values non imposables à l’existence de bénéfice imposable et, en conséquence, nous nous retrouvons avec deux fiscalités : l’une, comportant des avantages réservés aux entreprises bénéficiaires et l’autre, pénalisante, pour les entreprises non bénéficiaires, ce qui est contraire aux principes d’égalité devant la loi et d’équité fiscale garantis par la constitution (DGELF 1765 du 2 octobre 2006) 38.
Discordance entre comptabilité et fiscalité
Parce que comme le droit fiscal s’impose souvent aux comptes de l’entreprise, la comptabilité peut être conditionnée par certaines règles fiscales. Les entreprises à gestion fiscale transparente se trouvent particulièrement confrontées à un dilemme entre la règle fiscale et les impératifs que requiert la production d’une information financière fidèle.
Le code de l’IRPP et de l’IS prévoit l’obligation pour les entreprises de tenir leur comptabilité conformément à la législation comptable des entreprises. Alors que cette consécration législative de la comptabilité comme base de détermination de la matière imposable amène l’entreprise à admettre les règles du droit comptable, il n’en demeure pas moins vrai, qu’en cas de divergence entre une règle comptable et une règle fiscale, le principe de l’autonomie du droit fiscal conduit à privilégier la règle fiscale.
Compte tenu des différences d’approche et des critères de mesure des résultats, il est normal, selon M.Raouf YAICH, qu’il existe des divergences entre comptabilité et fiscalité. Mais divergence, n’implique pas incompatibilité. Bien au contraire, le point de départ pour la détermination du résultat fiscal est toujours constitué par le résultat comptable.
Aussi, Raouf YAICH pose-t-il la règle suivante pour la résolution des divergences entre comptabilité et fiscalité:
-Lorsqu’une règle comptable formulée dans le système comptable heurte une autre règle divergente résultant d’une disposition fiscale expresse, il est fait application du principe de l’autonomie: la norme comptable appliquée est retraitée pour les besoins de la détermination du résultat fiscal.
-En revanche, toutes les règles comptables formulées dans le système comptable qui ne heurtent aucune disposition expresse de la réglementation fiscale s’imposent comme règles communes aux deux matières: comptabilité financière et droit fiscal.
Cette règle est aujourd’hui consacrée par une disposition légale expresse en France où l’administration fiscale s’est engagée dans le sens d’une plus grande convergence vers les normes comptables internationales (IFRS).
A l’état actuel, l’adoption concomitante de deux bilans (comptable-fiscal) n’est pas encore adoptée en Tunisie.
Dans le système américain et aussi anglais, les principes de comptabilité fiscale sont dans une large mesure indépendants des règles de la comptabilité financière. Les entreprises américaines ont deux séries d’états financiers leur permettant de bénéficier de certains avantages fiscaux sans dénaturer les informations financières divulguées aux investisseurs.
Par ailleurs, en Tunisie, le bénéfice fiscal est déterminé à partir du bénéfice comptable tout en procédant à des ajustements fiscaux. La prise en compte de ces ajustements ne conduit pas à établir un tableau de détermination du résultat fiscal qui regroupe les différentes réintégrations et déductions.
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35R.Yaich, L’impôt sur les sociétés 2007: maîtrise des risques fiscaux, Les Editions Raouf Yaich, 2007, p.19. ↑
36 R.Yaich, Théories et principes fiscaux, Les Editions Raouf Yaich, 2004, p. 314. ↑
37R.Yaich, L’impôt sur les sociétés 2007: maîtrise des risques fiscaux, Les Editions Raouf Yaich, 2007, p.34. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quels sont les risques d’origine externe en audit fiscal pour les PME ?
Les risques d’origine externes peuvent être regroupés en quatre catégories : la complexité des textes fiscaux, la discordance entre comptabilité et fiscalité, le changement de la doctrine ou de pratique administrative, et la maladresse de certains contrôleurs des impôts.
Comment la complexité des textes fiscaux affecte-t-elle les PME ?
La complexité du système rend son application plus difficile pour l’administration et le contribuable, créant une insécurité juridique et fragilisant le contribuable qui ne peut plus connaître avec certitude son régime fiscal.
Pourquoi l’audit fiscal est-il important pour les PME ?
L’audit fiscal permet de s’assurer de la conformité de l’entreprise aux réglementations fiscales, en œuvrant pour une plus grande sécurité fiscale et en contribuant à l’amélioration du niveau de maturité de la gestion fiscale.