Cette étude révèle l’impact des extraits végétaux sur les insectes, en analysant comment Azadirachta indica, Eucalyptus camaldulensis et Tithonia diversifolia influencent l’entomofaune de Helianthus annuus à Ngaoundéré. Quels effets ces extraits ont-ils sur les rendements en graines du tournesol ?
CHAPITRE I : REVUE DE LA LITTERATURE
I.1. Helianthus annuus (Asterales : Asteraceae)
Généralités
Le tournesol, Helianthus (du grec Helios pour le soleil et Anthos pour fleur) annuus, est une plante diploïde (2n=2x=34) appartenant aux dicotylédones, famille des Astéraceae (Muller et al., 2006). C’est l’une des rares espèces dont la culture avait commencé en Amérique du Nord (Schilling & Heiser, 1981) et dont la domestication a été réalisée dans la région de Mexico par les Aztèques vers 2600 av.
J.C. (Lentz et al., 2008). Il a été introduit en Europe au 16e siècle par les Espagnols mais sa culture comme plante oléagineuse s’est seulement étendue à la Russie et à toute l’Europe au début du 19e siècle (Soltner, 2005). Cette plante était autrefois cultivée par les Amérindiens, principalement pour son huile mais également pour sa matière colorante, ses propriétés médicinales et ses graines comestibles ; source de nourriture à la fois pour l’homme et les animaux (Raskinet, 2022).
Aujourd’hui, elle est l’une des cultures oléagineuses les plus importantes dans le monde avec le coton, le colza, le soja, l’arachide et le palmier qui possède des qualités agronomiques essentielles telles que la résistance à la sécheresse, au froid et à la chaleur (Khalida et al., 2021). La croissance du tournesol nécessite un sol fertile, des précipitations modérées, des semences viables (Pal et al., 2015).
Le cycle de développement du tournesol (Figure 1) dure de 80 à plus de 170 jours selon les génotypes, les facteurs climatiques et les conditions culturales (Taissir, 2006). En 2019, les principaux producteurs du tournesol étaient : l’Ukraine (14,71 millions de tonnes) suivie de la fédération de Russie (14,06 millions de tonnes) et de l’Union Européenne (9,21 millions de tonnes) (FAOSTAT, 2019).
Tableau 1 : Production mondiale des graines de tournesol (en tonnes)
Pays | 2013-2014 | 2014-2015 | 2015-2016 | 2016-2017 | 2017-2018 | 2018-2019 |
---|---|---|---|---|---|---|
Turquie | 1,52 | 1,48 | 1,50 | 1,80 | 1,80 | 1,80 |
Russie | 10,20 | 9,00 | 10,99 | 11,60 | 10,50 | 12,71 |
Argentine | 2,30 | 3,00 | 2,80 | 3,30 | 3,40 | 3,50 |
Ukraine | 10,9 | 10,3 | 13,47 | 13,14 | 14,60 | 15 |
Afrique du sud | 736 | 736 | 755 | 874 | 859 | 740 |
Etats unis | 917 | 1,005 | 1,326 | 1,203 | 978 | 961 |
Source : Cheng et al. (2019)
Figure 1: Principaux stades physiologiques du tournesol (CETIOM et al., 2000).
Morphologie
Le tournesol mesure entre 2 à 4 m de hauteur (Chadefaut & Emberger, 1960). La racine pivotante peut atteindre 60 à 70 cm de profondeur (Taissir, 2006). Les racines secondaires forment un chevelu racinaire dense qui occupe un volume important du sol, permettant ainsi une grande résistance à la sécheresse (Taissir, 2006).
Le fruit est un akène ovale (Figure 3D), à bords peu anguleux et courbés, tronqué aux deux extrémités. Il est couvert d’un péricarpe membraneux et parfois strié, non soudé à la graine et qui représente 18 à 40 % de son poids. Il est généralement de couleur noire ou violet-noire et parfois rayé de blanc et de gris et mesure environ 1,5 cm de longueur et 0,5 cm de largeur (INA P-G, 2003).
Les feuilles sont cordiformes, dentées et alternes selon une phyllotaxie en spirale au-delà des cinq premières paires de feuilles qui sont opposées ; leur nombre et leur taille sont variables : les plus grandes sont à une hauteur intermédiaire et jouent un rôle plus ou moins important dans la formation et l’accumulation des réserves lipidiques (Al-Snafi, 2018). La tige est cylindrique et plus ou moins pubescente selon les génotypes. Elle mesure de 1 à 4 cm de diamètre et 50 à 300 cm de hauteur (Taissir, 2006).
Le capitule mesure à maturité entre 5 à 50 cm de diamètre et comporte 1000 à 2000 fleurons (Taissir, 2006) (Figure 3B). Le fleuron (Figure 3A) a une corolle courte ; 2 sépales rudimentaires, 5 étamines à filets libres et à anthères soudés (Taissir, 2006). D’après Van der Vossen & Fagbayide (2007), la formule florale du tournesol est la suivante : (3 + 3) T + (3 + 3) E + (3 C) (Figure 3C).
L’ovaire contient un seul ovule. Les fleurons du rang extérieur sont stériles, la corolle est constituée d’un grand et unique pétale (Philippe, 1991). La floraison d’un capitule peut durer sur 5 à 10 jours, période durant laquelle les fleurons fertiles s’épanouissent d’une manière centripète à raison de cinq à six rangs concentriques par jour (McGregor, 1976).
Dès son ouverture, chaque fleuron fertile se trouve au stade mâle qui dure un jour au cours duquel les sacs polliniques s’ouvrent et libèrent le pollen (Taissir, 2006). Dans la matinée du second jour, les stigmates deviennent réceptifs au pollen (Philippe, 1991). Ces stigmates sont entourés d’un involucre à bractées ovales avec un sommet pointu (Philippe, 1991). Les fleurons centraux en tube sont jaunes-pâles et insérés dans des bractées plus sombres qui donnent au disque central une couleur noire (Philippe, 1991).
Après la fécondation, la graine se développe et accumule ses réserves protéiques (15 à 21 %), puis lipidiques (50 à 54 %), le reste correspondant à la coque (Taissir, 2006). Le poids de 1000 grains peut varier de 40 à 200 g (Taissir, 2006).
Capitule
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Bouton floral
Tige
Feuille
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Figure 2: Pied de Helianthus annuus (Ngaoundaye, Juillet 2023)
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Fleuron
A : Fleuron (Roubik, 1995) B : Capitule
Fleur ligulée
Bouton floral Fleuron
Pétale
Sépale Anthère Ovaire Ovule
C : Diagramme floral D : Akène (Alicia, 2008) (Van der Vossen et Fagbayide, 2007)
Figure 3: Fleuron (A), capitule (B), diagramme floral (C) et Akène (D) de Helianthus annuus
Classification botanique justifiée
(Source : 1 = Woese et al., 1990 ; 2 = Taissir, 2006)
- eucaryote. Domaine : Eucarya (1)
- multicellulaire ; autotrophe ; paroi cellulaire cellulosique………………………………………..
… Règne : Plantae (1)
- plante à fleurs Embranchement : Spermaphytes (2)
- graines enveloppées ; ovule clos dans le carpelle ; un ou deux cotylédons ; étamines ; sacs polliniques ; grains de pollen… Sous-embranchement : Angiospermes (2)
- fleurs de type cinq ; deux cotylédons… Classe : Dicotylédones (2)
- pétales libres ; ovaire infère Sous-classe : Dialypétales (1)
- tendance à porter des inflorescences compactes (capitules) ; fleurs ayant des anthères soudés entre elles et en un tube qui entoure le style ; ovule à un seul tégument avec nucelle très peu volumineux Ordre : Synanthérales (2)
- les inflorescences sont typiquement des carpelles pouvant être eux-mêmes réunis en grappe, en cyme ou en corymbes Famille : Asteraceae (2)
- corolle de tous les fleurons tubuleux (ou seulement ceux des fleurons centraux tubuleux) ; pas de lactifères (organes sécréteurs d’essences). Sous-famille : Tubiflores (1)
- mouvement héliotropique de la fleur dû à la courbure de la tige ………………………………
… Genre : Helianthus (2)
- espèce annuelle Espèce : annuus (2)
Nom scientifique : Helianthus annuus Linnaeus, 1753 (1)
Usages
Le tournesol est avant tout cultivé pour ses graines contenant 35 à 50% d’huile, utilisée dans la gamme des huiles de table (Roche, 2005) et 17 à 25% de protéines (Muttagi, 2017). Cette huile est appréciée pour son équilibre en acide gras ; elle contient 12% seulement d’acides gras saturés et une forte proportion d’acides gras insaturés constitués d’acides oléique et linoléique (soit 75 à 87%) qui sont des acides essentiels (Laporte, 2013).
Il est également utilisé dans une moindre mesure ; pour l’alimentation animale par la production de tourteaux riche en matières azotées totales (45 à 55%), en méthionine, et vitamines B (Laporte, 2013). La teneur importante de l’huile de tournesol en Omega 6, combinée aux Omega 9 et à la vitamine E lui confère les propriétés protectrices des systèmes cardio-vasculaires et stimulants du système immunitaire (Laporte, 2013).
L’huile de tournesol sert également à la fabrication des détergents, des produits cosmétiques, des plastiques, des caoutchoucs, des lubrifiants, des enduits, de la résine, du papier et des intermédiaires de synthèse des carburants (CETIOM, 2002). L’inflorescence (capitule) du tournesol est la vedette de nombreux dépliants touristiques (CETIOM, 2002).
A
Source : CETIOM et al., 2000
B
Figure 4: Composition d’une graine (A) et d’huile (B) du tournesol
I.2. Insectes ravageurs de Helianthus annuus
Pucerons
Les pucerons ou les aphides sont plus que jamais des ravageurs préoccupant sur de nombreuses cultures. Ce sont des insectes piqueurs-suceurs constituant aujourd’hui le groupe entomologique le plus important dans le monde d’opinion agronomique (Zitouni & Douar, 2017).
Le petit puceron vert du prunier Brachycaudus helichrysi, le puceron noir de la fève Aphis fabae et le puceron vert du pêcher Myzus persicae sont responsables de plusieurs dommages sur le tournesol (Terres Univia, 2020). Ils provoquent un arrêt de croissance avec déformation et recroquevillement des feuilles, la production de miellat permettant le développement du champignon de la fumagine (Sekkat, 2007).
Chenilles
Ce sont des groupes de papillons appartenant à la famille de Noctuidae et de l’ordre de lépidoptères (Westdal, 1975). Elles se nourrissent sur tous les organes des plants (feuilles, fruits, tiges (Zitouni & Douar, 2017). Les jeunes plants du tournesol au stade vegetatif sont les plus sensibles par ces ravageurs. Les feuilles sont broyées et mâchées et les plantes coupées en dessous ou au-dessus de la surface du sol par ces insectes (Westdal 1975 ; Knodel & Charlet 2007). C’est le cas de la chenille grise sombre : Euxoa messoria, la chenille grise terne : Feltia jaculifera (Westdal, 1975). La chenille Helicoverpa armigera est la plus dangereuse du tournesol ; elle pénètre dans les fruits (Zitouni & Douar, 2017).
Punaise terne
L’espèce la plus courante de punaise Lygus présente dans les champs de tournesols est la punaise terne (Lygus lineolaris). Il attaque au moins 385 espèces végétales différentes et sévit dans 39 États américains et cinq provinces canadiennes (Knodel et al., 2010). L. lineolaris perce la paroi des fleurs, des jeunes fruits et des tiges pour en sucer la sève souvent à l’extrémité des tiges terminales et latérales. Ce comportement peut causer d’importantes diminutions du rendement (Zitouni & Douar, 2017). Leur activité trophique se manifeste par l’apparition de taches claires ou de petites tachetures qui rendent les fruits invendables (Zitouni & Douar, 2017).
Thrips
Les Thrips sont des insectes piqueurs-suceurs susceptible de provoquer de dégâts importants en culture maraichère (Picault et al., 2018). Thrips tabaci cause de petites zones argentées le long des nervures et entrainent une décoloration et la mort des feuilles. Il est aussi responsable de la cicatrisation et la déformation des fruits, ainsi que la transmission du virus TSWV (Tomato Spotted Wilt Virus) (Zitouni & Douar, 2017).
a) Brachycaudus helichrysi b) Aphis fabae c) Myzus persicae
d) larve de Euxoa messoria e) larve de Feltia jaculifera f) larve de Helicoverpa armigera
g) Lygus lineolaris h) Thrips tabaci
Figure 5: Quelques ravageurs de Helianthus annuus (Knodel & Charlet 2007 ; Zitouni & Douar, 2017)