La croissance économique en Algérie est étroitement liée à l’impact des Investissements Directs Étrangers (IDE), dont la contribution est limitée par un climat des affaires défavorable et un cadre institutionnel inadapté. Cet article propose des recommandations pour renforcer l’attractivité du pays en s’inspirant de modèles internationaux.
Chapitre III : IDE, Croissance et développement économiques : causalité dialectique et impact
Introduction
L’importance que représente, aujourd’hui, l’IDE dans les pays en développement se mesure essentiellement par ses effets de report. En effet, l’IDE n’est pas seulement considéré comme un simple mouvement de capital, comme l’avait déjà qualifié les théories traditionnelles de commerce internationale, mais aussi un vecteur de transfert de technologies avancées, de techniques managerielles développées, de croissance d’emploi, voire comme un important vecteur d’accès au marché mondial. L’IDE serait donc un important facteur de croissance et développement économiques.
Par ailleurs, si on s’intéresse, principalement, à la croissance économique, il serait important de souligner que celle-ci est démontrée aujourd’hui comme n’étant jamais un phénomène naturel qui se manifesterait dés lors qu’existait une concentration importante de ressources naturelles et de population1. Au contraire, la croissance est un phénomène qui n’est jamais acquis. De plus, si on joint notre approche au paradigme épistémologique constructiviste, on pourrait dire que la croissance pourrait être construite et créée. A cet effet, à notre sens, la contribution des IDE n’y serait jamais dénuée d’importance et pourrait participer à cette construction de croissance dans les PED.
L’objet de ce chapitre est d’identifier les traits saillants du processus de la croissance et du développement économiques ainsi que la mise en évidence des effets potentiels des IDE aux économies nationales. A cet effet, dans la première section, un accent sera mis sur les différentes explications de la croissance et ses sources (les facteurs de production et l’investissement) dans la littérature économique. Ensuite, la deuxième section sera consacrée à l’analyse du rôle de l’investissement, en l’occurrence, les effets de l’IDE dans l’économie d’accueil.
1 Mais il faudrait bien garder à l’esprit que cette recherche ne s’intéressera pas uniquement au phénomène de la croissance économique du fait que les effets de report et l’impact potentiel des IDE sur les différents paramètres économiques, sociaux et environnementaux dans les PED, à juste titre, l’Algérie, seront également étudiés. ↑
Section 1 :
Théories de croissance et IDE : diversité d’approches mais sans vision globale !
De nombreuses théories existent, tout autant classique que contemporaine, ayant tenté de donner une explication, même s’elles ont souvent été marquées par d’approches critiques et paradoxales, en termes d’explication de sources de la croissance, de rapport de causalité croissance/IDE, de processus d’accumulation du capital et de technologies ainsi que d’amélioration de la productivité globale des facteurs(PGF)2.
Depuis Smith.A et son œuvre portant sur la richesse des nations, la croissance occupait l’esprit de nombreux économistes. La croissance est ainsi associée à autant de qualifications : de court et de longue période, limitée, illimitée, instable, décroissance et état stationnaire3. Rappelant que cette dernière qualification, aurait constitué un vif point de polémique parmi les économistes fondateurs de la philosophie des sciences économiques.
Une dichotomie était même construite parmi les économistes. Quant à la croissance de long terme(LT), il y a ceux qui en sont optimistes et/ou pessimistes4, voire la naissance d’un nouveau paradigme théorique dit, de la décroissance5. Celui-ci, signifierait la diminution de la croissance alliée le plus souvent à un refus du développement, se proposant comme étant la seule solution aux différents problèmes sociaux et environnementaux contemporains6.
Nous ne nous attardons pas à développer les spécificités et la nature de leurs visions. Mais avant de nous passer au développement des théories, il parait judicieux d’exposer quelques précisions et certaines questions devraient être posées à savoir: Qu’entend-on par la croissance économique ? Qu’est ce qu’il la différencie de la notion du développement économique ? Enfin, quel lien de causalité existe-il entre développement et croissance économique ?
2 C’est le rapport entre une quantité de richesse créée ou produite et la quantité de facteurs de production à cette fin. Ou encore elle peut se traduire par le rapport entre la valeur ajoutée et les couts des facteurs. ↑
3Pour ne pas encore citer, avant lui François Quesney et son tableau économique. ↑
4 Les pessimistes (des anglais) consistent en MALTHUS (1766-1834), D. RICARDO (1772-1823), notons qu’A. SMITH (1723-1790) ne lui convient pas parce qu’il est soucieux du problème de croissance en termes modernes. Et, J.B.SAY (1767-1832) et J.S. MILL (1806-1873) qui sont des français, qualifiés de courant optimistes. Pour plus, voir A. SAMUELSON, « grands courants de la pensée économique : concepts de base et questions essentiels », 1993, 2éd, OPU, Alger, P50. ↑
5 DURAN. M et SILVANO.T, « la décroissance, la réduction de la crise écologique mais à quel prix ? », MS GDDCC, P04. ↑
6 DURAN. M et SILVANO.T, ibidem. ↑
Quelques précisions : Croissance et développement, deux mots pour désigner une même réalité ?
Perroux. F(1961), économiste français définissait la croissance économique comme : « l’augmentation soutenue durant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de dimension pour la nation : le produit global brut ou net, en termes réels « 7. Perroux assimilait ainsi la croissance économique à une amélioration purement quantitative. Quand au développement, dans son ouvrage, désigne « la combinaison des changements mentaux et sociaux d’une population qui la rendent apte à faire croitre cumulativement et durablement son produit réel global8 »
Si on part des définitions précédentes, on pourrait différencier la croissance et le développement et ce, par la nature quantitative de la première et qualitative de dernier. Pourtant, dans la définition moderne de la croissance économique de Kuznets, la quantité et la qualité y sont présentes et s’entrecroisent : « la croissance économique d’un pays peut être définie comme la hausse dans le LT de sa capacité d’offrir à sa population une gamme sans cesse élargie des biens économiques.
Cette capacité croissante est fondée sur le progrès technologique et les ajustements institutionnels et idéologiques qu’ils requièrent. Ces trois composants dans la définition, gamme croissante, progrès technique et ajustement représentent la même importance. L’augmentation constante de l’offre des biens est le résultat dans la croissance économique, mais il lui est identifiée »9.
Par ailleurs, Malinvaud. E proposait une distinction entre le développement10 et la croissance en avançant que la croissance économique n’est évidemment pas un synonyme de développement. Ce dernier est une notion, pour lui, évoquant des valeurs humaines, sociales, culturelles et psychologiques, mais la croissance économique est également perçue comme favorable au développement11.
7 MALAGA.K, « A propos des quelques dilemmes de la théorie de croissance économique dans l’économie », université des sciences économiques, Pologne, P03. (http://www.revecon.ro/articles/2009-2/2009-2-3.pdf(consulté le 03/03/2014). ↑
8 MALAGA.K, ibidem. ↑
9 La définition que donne S. Kuznets, économiste américain d’origine russe (1901-1985) lors de la cérémonie d’attribution de prix Nobel (11/12/1971) et ce, pour son interprétation à la croissance économique. Http// : www.ikonomics. ordres. com., P 01. ↑
10Aujourd’hui le sens que l’on porte (depuis la fin des années 1980) au développement ne renvoie plus à ce que l’on appelait entre 1945-1975 (les trente glorieuse selon de J. Fourastié), l’économie du développement. Celle-ci est un ensemble d’analyse et de propositions visant à permettre aux pays de sud de rattraper les pays industrialisés(PI). ↑
11MALINVAUD.E, « voies de la recherche macro-économique », 1991, Paris, Odile Jacob, P227. ↑
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Par convention, pour mesurer cette croissance à long terme(LT)12, on utilisait un agrégat économique appelé « produit intérieur brut »13 (PIB), le taux de croissance de PIB. Mais, bien que le PIB soit comme mesure agrégé et exprimé en monnaie, il serait sensible aux changements des prix, c’est la raison pour laquelle, il y a une distinction entre le PIB réel14 et le PIB nominal. Quant au développement, le programme des nations unies pour le développement, depuis en 1990, calculait l’indicateur de développement humain (IDH), qui a été proposée par le prix Nobel (1998) indien Amartya Sen. Cet indicateur prend en compte : le niveau de santé, le niveau d’éducation, le niveau de revenu moyen15.
Force est cependant de constater qu’à l’ère de la mondialisation, le fonctionnement multinational et la difficulté liée à la localisation des lieux de production, il serait assez difficile de localiser le lieu de création de PIB. Une difficulté qui s’est accentuée notamment par la montée en puissance des paradis fiscaux16. En sus, bien que le PIB est sujet à autant de limites (ne considérant pas l’économie sous-terraine, l’activité domestique, les effets sur l’environnement), un bon nombre d’autres mesures ont été proposés à savoir : le bonheur intérieur brut(BIB) qui prend en compte la qualité de la santé et d’hygiène, le PIB vert mesurant de la croissance sur l’environnement, l’indice de bien-être durable dans lequel les dépenses de consommation équilibrées par des facteurs comme, la distribution des revenus et les couts contamination de l’environnement, qui est une mesure dans le contexte de protection de l’environnement.
Compte tenu, par ailleurs, de l’internationalisation croissante de la production, le PIB est aussi utilisé afin de comparer le niveau de développement entre les pays. Ainsi, le PIB/PPA (parité pouvoir d’achat international) est utilisé, mais dont les prix des pays en question devraient être convertis à une seule monnaie international.
12Le taux de croissance=𝑃𝐼𝐵 𝑡−𝑃𝐼𝐵 𝑡−1 × 100%. ↑
13Cet agrégat a été inventé au cours de la crise économique des années 1929, pour mesurer les richesses des nations. Il consiste en sommes des VA des secteurs institutionnels + FBCF+ exportations-importations. Le produit national brut(PNB) s’en distingue (de PIB) car il prend en considération le critère de résidence, pour faciliter les comparaisons internationales. ↑
14 Il s’agit de l’accroissement de valeur des biens et services, mais qui n’est pas la conséquence des variations des prix sous l’effet de l’inflation ou la déflation. Ce qui est contraire au PIB nominal. ↑
15DEIMER.D, « économie générale », IUFM Auvergne, P95. ↑
16 L’OCDE(2002) considère qu’un paradis fiscal est un territoire qui répond aux caractéristiques suivantes: le secret bancaire y est strictement appliqué, les taxes sur les revenus, les bénéfices ou les patrimoines sont faibles ou nulles, particulièrement, pour les non-résidents, les conditions d’installation de sociétés et d’ouverture de comptes sont peu contraignantes, la coopération judiciaire et fiscale avec les autres États est faible. ↑
La productivité globale des facteurs(PGF) serait une autre mesure de la croissance économique. A ce titre, il faudrait noter qu’une partie de la croissance de production, si l’on accroit la quantité des facteurs traditionnels cités, n’étant pas expliqué. Ce n’est qu’à partir des années 1980 qu’il est démontré que cette partie devrait refléter le progrès technique et le développement de capital humain17.
Finalement, si on se met dans le même ordre d’idées, deux types de croissance peuvent par ailleurs être distingués à savoir: une croissance intensive et une croissance extensive. S’agissant de la première, c’est celle qui reposait sur l’usage des cash-flows positifs dégagés par les entreprises, l’amélioration de l’efficacité de la production et une meilleure organisation du travail.
C’était le cas de la Corée de sud alors que dans les années 1970, elle finançait sa croissance par des maigres surplus agricoles et de l’endettement. A l’opposé, le deuxième type consisterait en augmentation quantitative des facteurs de production, en l’occurrence, la création par l’injection des ressources par l’Etat. C’est le cas de l’Algérie qui comptait essentiellement sur la rente pétrolière18.
Cette derniere est l’objet de la présente recherche.
17 [Note manquante dans l’original] ↑
18 [Note manquante dans l’original] ↑