Ce mémoire analyse les motivations résidentielles des habitants de Canaan (2010-2020) et leur cadre de vie, en lien avec l’étalement urbain de Port-au-Prince post-séisme.
Université d’État d’Haïti
École normale supérieure
Département des Sciences Sociales/Géographie
En vue de l’obtention du Diplôme d’Etudes Normales en Sciences Sociales/Géographi
Vers une compréhension de la mobilité résidentielle au regard de l’étalement de l’Aire Métropolitaine de Port-au-Prince : le cas de Canaan de 2010 à 2020.
Mémoire réalisé par
Wilguens PHARIUS
Sous la direction du
professeur Mibsam JEANNIS
Port-au-Prince, mai 2021
Promotion : 2014-2019
Résumé
Au cours des dernières décennies, les périphéries des villes sont devenues le réceptacle des populations. Dans la littérature scientifique, on parle de périurbanisation quand ce processus participe au brouillage des limites entre l’urbain et le rural, ou plus largement d’étalement urbain. Il s’agit d’une nouvelle modalité épousant l’urbanisation dans un contexte de capitalisme mondialisé.
La mobilité résidentielle constitue le mécanisme central de ces mutations urbaines. D’où étudier la problématique de la mobilité résidentielle, c’est-à-dire tenter notamment de répondre à la question générale « pourquoi les gens changent-ils de domicile ? », à ce titre, paraît capital.
Dans le cadre de ce mémoire de géographie, une analyse des motivations résidentielles des habitants de Canaan (2010-2020), nouvelle périphérie de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, ainsi que du cadre de vie de cette population urbaine est proposée. Cette étude part du postulat que « les individus et les ménages disposent au cours de leur vie d’un minimum de liberté d’action et de lucidité dans leurs pratiques résidentielles ».
Ainsi, ressort-il de notre propos que s’installer à Canaan relève de la mobilité résidentielle sous contrainte pour certains, conséquence du séisme du 12 janvier 2010. Le choix résidentiel à Canaan est aussi motivé par la déclaration d’utilité publique de la zone, au coût des parcelles de terrain, et découle par ailleurs des « préférences révélées ou de fait » liées au type d’habitat, à la question de la propriété foncière et à son contexte résidentiel marqué par une relative tranquillité.
Cette investigation scientifique permet également de comprendre que l’agglomération de Canaan s’est constituée en dehors de toute règle d’urbanisme. Il s’agit d’un lieu « sans » : sans eau, sans route, sans électricité, sans Etat, etc.
Mots-clés: mobilité résidentielle, habitat/logement, étalement urbain, Canaan, aire métropolitaine de Port-au-Prince, choix résidentiel, motivation résidentielle, cadre de vie, Haïti, périphérie.
Abstract
In recent decades, the outskirts cities have become the receptacle for populations. In the scientific literature, we speak of suburbanization when this process contributes to blurring the boundaries between urban and rural, or more broadly of urban sprawl. . This is a new modality embracing urbanization in a context of globalization of urbanization in a context of globalization.
Residential mobility, that is to say, in particular to try to answer the general question ‘‘why do people change homes?’’, as such, seems essentials.
As part of this geography thesis, an analysis of the residential motivations of the inhabitants of Canaan (2010-2020), new periphery of the metropolitan area of Port-au-Prince, as well as the living environment of this urban population is proposed. This thesis is based on the premise that ‘‘individuals and households have a minimum of freedom of action and lucidity in their residential practices over the course of their lives’’.
Thus, it emerges from our remarks that settling in Canaan involves residential mobility under constraint for some, consequence of the earthquake of January 12, 2010. The choice of residential in Canaan is also motivated by the declaration of public utility of he area, and also stems from the preferences revelead like to the cost of the plots of land, to the question of occupancy status and to the residential context of Canaan marked by relative tranquility.
The scientific investigation also makes it possible to understand that the agglomeration of Canaan was constituted without any planning rules. It is a place ‘‘without’’: without water, without road, without electricity, without electricity, without state, etc.
Keywords : residential mobility, urban sprawl, housing, Canaan, metropolitan area of Port-au- Prince, residential choice, residential motivation, living environment, periphery, Haiti.
Rezime
Pandan dènye deseni sa yo, se periferi vil yo ki sitou ap resevwa moun. Nan literati syantifik la, lè pwosesis sa patisipe nan bwouye limit ant vil ak riral, yo rele sa periibanizasyon oubyen yo itilize yon konsèp pi jeneral ki se etalman iben. Se yon nouvo fòm ibanizasyon an pran nan yon moman kote mondyalizasyon an ap domine.
Se pou sa etidye pwoblematik mobilite rezidansyèl la, sa vle di konprann poukisa moun yo ap demenaje a, parèt enpòtan.
Nan kad memwa jewografi sa, n ap analize motivasyon rezidansyèl moun ki rete Kanaran yo (2010-2020), epi tou n ap chèche konprann kad de vi popilasyon sa tou. Etid sa chita sou postila ki fè konnen endividi yo ak menaj yo pandan lavi yo gen yon minimòm lisidite ak libète pou yo aji nan pratik rezidansyèl yo.
Nan kad travay la nou reyalize chwa lokalizasyon rezidansyèl nan Kanaran an se rezilta yon sitiyasyon kontrent ki lye ak tranbleman de tè 12 janvye 2010 a. Li se konsekans arete ki deklare itilite piblik zòn nan, epitou se preferans moun yo pou pri moso tè yo, tip abita a, kesyon estati okipasyon an ak kontèks rezidansyèl trakilite nan Kanaran.
Envestigasyon syantifik sa tou pèmet nou konprann Kanaran konstui an deyò tout règ ibanis. Se yon kote « san » : san dlo, san wout, san Leta, elt.
Mo kle yo : mobilite rezidansyèl, abita/lojman, etalman iben, Kanaran, zòn metwopolitèn Pòtoprens, chwa rezidansyèl, motivasyon rezidansyèl, kad de vi, Ayiti, periferi.
Introduction
Pourquoi les gens déménagent-ils ? Comment choisissent-ils leur logement et le lieu de résidence ? Ces questions sont capitales pour comprendre la dynamique des villes contemporaines. Les mouvements résidentiels sont en effet un moteur majeur qui façonne les tissus urbains. Ils sont au cœur des processus tels la gentrification et l’étalement urbain.
Des chercheurs comme Florin et Semmoud (2010 :2) explicitent et précisent que la mobilité résidentielle est à l’origine des dynamiques quasi synchrones, à savoir la métropolisation, le desserrement voire l’étalement urbain.
La mobilité résidentielle, objet d’étude entre autres de la géographie des mobilités constitue l’une des quatre formes principales de mobilité spatiale au côté de la mobilité quotidienne, de la migration et du voyage. La géographie des mobilités visent à répondre à la question « pourquoi les gens se déplacent-ils ? ».
Depuis trois décennies, le desserrement des grandes agglomérations urbaines et leur expansion spatiale sur les espaces environnant se sont imposés comme un processus planétaire : c’est l’étalement urbain. On parle de périurbanisation1 plus précisément quand cette croissance spatiale se fait aux dépens des espaces ruraux environnants (Guibert et Jean, 2011).
L’explosion des mobilités, l’intensification des circulations matérielles et immatérielles et le processus d’urbanisation planétaire accélérée depuis un demi-siècle dans un contexte de capitalisme mondialisé, constituent les principales causes de ce phénomène. Si l’on veut paraphraser, on pourrait dire que l’accroissement des surfaces urbanisées résulte de la mobilité résidentielle, c’est-à-dire du déplacement des individus ou des ménages impliquant l’installation sous un toit, dans un domicile.
Au Nord, la périurbanisation tout en étant moins forte dans les années 1970 en île de France en France, continue d’alimenter la densification et l’expansion des aires métropolitaines. A Mexico au Sud, où la périurbanisation est ancienne (1960), le taux d’accroissement annuel des zones périurbaines est de 2,5% à la fin des années 1990 contre 1,28% pour l’agglomération.
Dans d’autres pays du Sud, à la même période, la croissance des espaces périurbains est bien plus rapide : de l’ordre de 10% autour de Chennay et de New Delhi en Inde ; de 8% à Chia, au nord de Bogota en Colombie (Guibert et Jean, 2011).
Les villes haïtiennes n’échappent pas au phénomène de l’étalement urbain ou de la périurbanisation. La littérature scientifique évoque en ce sens la zone ouest vers Gressier et Léogâne, la zone sud-est dans les communes de Kenscoff, la zone nord dans la commune de Croix des bouquets de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince avec Canaan, notre terrain d’étude.
Depuis 2010, Canaan s’étend et participe à l’agrandissement de la tâche urbaine de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince. C’est un cas particulier contrairement aux autres périphéries de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, en raison de la rapidité de son urbanisation et le contexte dans lequel il s’est émergé, un contexte post-catastrophe. Ce territoire reçoit près de 250 000 habitants en cinq ans selon l’UCLBP. Presque tous les nouveaux arrivants viennent de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince.
Ainsi, pour réaliser cette étude, en plus de la partie introductive constituée par la présente, ce travail comporte cinq chapitres répartis comme suit :
- Le premier chapitre définit le problème, présente nos questions de recherche, les objectifs de l’étude et les justifications du travail, Celui-ci présente également les travaux antérieurs réalisés en rapport avec la thématique de recherche.
- Le deuxième traite du cadre théorico-conceptuel dans lequel nous situons notre recherche, et fera la lumière autour des concepts clés du travail.
- Le troisième chapitre est consacré à la présentation du cadre méthodologique, lequel vise à définir la méthode de recherche, les techniques utilisées pour la collecte des données.
- Le quatrième chapitre procède à une brève présentation du terrain d’étude : Canaan.
- Le cinquième chapitre est consacré au cadre empirique c’est-à-dire la présentation, l’analyse et l’interprétation des données recueillies.
- Enfin, la conclusion.